kyoju kenpu a écrit:En même temps si tu t'identifies à un personnage sans tenir compte des règles internes de son univers qui diffèrent du tiens
Il vivait dans un univers dont les règles étaient globalement les mêmes que les miennes, jusqu'à
Endgame. Tu m'écris une histoire tournant dès le départ autour d'un scientifique cherchant à remonter le temps pour revoir sa bien-aimée, OK, pourquoi pas. Tu me montres pendant une demi-douzaine de films un type qui a perdu sa bien-aimée et doit apprendre à faire avec son deuil pour tout à coup sortir un voyage temporel d'un chapeau et dire "nan en fait le deuil ça sert à rien", je trouve ça naze et même malsain, oui. Je trouve que nos histoires ne devraient pas "mentir" sur les choses importantes - le merveilleux, les super-pouvoirs, ce sont des détails.
tout en persistant à considérer la dernière leçon de morale comme la seule qu'il faut retenir même si les circonstances diffèrent de la précédente leçon, forcément t'auras du mal à tirer la moindre leçon profitable avec cette lecture!
Déjà, c'est quoi, la seconde leçon ? Cap n'a rien fait de spécial. Une opportunité en or s'est offerte à lui, et... c'est tout. Et cette seconde "leçon" annule totalement la première. Parce que, comme certains d'entre vous l'ont dit,
Endgame a rétropédalé sur le développement de Steve : finalement, il n'a
pas surmonté sa perte. Donc il n'a pas appris cette première leçon. Et quand bien même il l'aurait apprise, il l'aurait apprise pour rien. À quoi bon renoncer à ses rêves du passé si au final, quand on s'y accroche malgré tout, ils finissent par se réaliser ? C'est ça, le cœur du message d'
Endgame. Oui, ça se réalise grâce à du fantastique, mais fondamentalement, c'est exactement ce qui se passe.
Lenidem a écrit:Encore une fois, je ne reproche rien au personnage, mes reproches vont au scénario qui lui donne cette opportunité.
Je ne t'ai pas accusé de reprocher quoi que ce soit au personnage, et je t'ai déjà dit que j'étais d'accord concernant le scénario et de son impacte sur le développement du personnage.
Ben c'est toi qui m'a donné l'exemple d'un personnage :
2 tu trouverais malsain qu'un mec paralysé à vie et qui s'est résigné à ne plus marcher se mette à espérer à nouveau, car après avoir progressé la médecine a trouvé le moyen de le faire marcher? Roger est dans la même situation.
Je ne reprocherais rien à ce personnage. Je trouverais l'histoire mal foutue si le propos de tout le bouquin était d'apprendre à vivre sans pouvoir marcher, à trouver des plaisirs et des satisfactions autres que la danse ou la promenade, à admettre que maintenant il est ainsi, pour que dans les toutes dernières pages ça se termine par "ah ben non en fait il peut de nouveau courir danser et faire du sport, youpie !"
En plus,
Endgame nous dit qu'apparemment, Steve n'a jamais cessé de se laisser tourmenter par son passé même quand il n'avait aucune raison d'espérer.
Moi je te parle du propos que tu trouvais malsain dans ton précédent message ici:
J'ai l'impression que soit tu t'emmêles les pinceaux, soit tu t'exprimes mal, où alors c'est moi qui comprends rien.
C'est la troisième option.
Blague à part, je ne sais vraiment pas comment m'exprimer autrement.
Du coups je pose la question de sorte à ce qu'on ne s'embourbe pas trop à force de débattre: t'es sur que le terme malsain correspond à ton ressenti?
Oui.
desa a écrit:Le propos de Lenidem pour moi de ses sacrifices que tu vois un personnage faire seulement pour se retrouver à survivre de toute façon. Ce que certains disent n'est pas un problème car ce qui compte est l'intention non le résultat mais que j'ai tendance à détester. Pour que quelqu'un s'intéresse à l'intégralité de ce message cela m'emmerderait qu'au final le perso utilisé pour le faire passer à l'audience n'est en fait pas y faire face.
Voilà. On place le personnage dans une situation qui arrive pratiquement à tout le monde, on le confronte à un problème qui travaille l'humanité depuis toujours : le temps passe, et on ne peut pas revivre sa jeunesse. C'est la vie. On le montre se démerder comme il peut face à ça, exactement comme nous. Le passé aurait pu être merveilleux, il ne l'a pas été ; mais le présent n'est pas si mal, et il peut même avoir du bon. À nouveau, tout le monde peut s'identifier à ça. C'est qui rend ces super-héros humains : ils vont dans l'espace, ils affrontent des super-vilains, mais leurs sentiments, leurs problèmes fondamentaux sont les mêmes que les nôtres. Et là, bim, solution magique à un problème réaliste. Son statut de personnage de film de super-héros lui permet d'outrepasser un problème qui se pose à chacun de nous. I'm out.
Je suis d'accord avec ça, je l'ai déjà dit! Mais encore une fois c'est un problème scénaristique, ou plutôt un problème de traitement qui amoindrit l'impacte de la précédente morale, pas une incohérence de propos.
Je trouve que c'est loin d'être un simple amoindrissement de la précédente morale, car elle s'est avérée parfaitement superflue. S'il avait passé toutes ses soirées à chialer en pensant à sa meuf de jadis, malgré ses nouveaux amis, malgré ses nouvelles opportunités, son happy ending aurait été exactement le même. Quand pendant six chapitres on te serine qu'il n'y a pas de retour en arrière possible, si le septième et dernier te dit "en fait si", le message, c'est bel et bien que oui. Se braquer sur le début de l'histoire en ignorant volontairement la fin est artificiel.
desa a écrit:J'imagine que le côté malsain est de donner un problème humain à Cap (la nécessité de faire la paix avec son passé/les occasions manquées) et récompensé une dangereuse façon de faire face à ce problème (continuer à se focaliser sur le passé au lieu d'avancer). J'imagine que Lenidem aurait moins de problème si Cap prenait toujours sa retraite mais se trouvait un partenaire dans le présent.
Exactement. Desa m'a compris !
kyoju kenpu a écrit:C'est pour ça qu'il faut faire la part des choses entre les analogies, les apologies, le ton, les simples essors scénaristiques de sorte à ne pas se méprendre sur le ou les messages de fond! Tout n'est pas à prendre littéralement, et tout ne fait pas l'apologie d'une leçon de morale, les intentions ne visent parfois qu'une simple tournure pour faire avancer l'histoire ou pour la finir.
Nombres d'oeuvres incomprises ont subit des critiques cinglantes parce que le public avait du mal à faire la part des choses justement!
Si je prenais l'histoire littéralement, je me dirais que je n'ai qu'à construire une machine à voyager dans le temps pour rattraper toutes mes occasions manquées. Justement, je vois ça comme une analogie, et cette analogie me semble foireuse. Un équivalent dans le monde réel, ce serait, par exemple, un premier amour qui ressurgit du passé contre toute attente et tout espoir raisonnable, et on recommence à s'aimer comme au premier jour : toutes les difficultés qu'on a traversées depuis, tout le travail qu'on a fait sur soi-même pour s'en remettre, pour se reconstruire une vie, tout ça est relégué au rang de parenthèse désagréable qu'on peut oublier illico. Certes, il n'est pas totalement impossible que ça arrive. Mais on devrait apprendre à ne pas compter sur ce genre de miracle, car en réalité ces chimères nous empoisonnent la vie nonante-neuf fois sur cent.
Après, ça s'inscrit dans ma vision globale de la fiction, y compris du divertissement, qui, selon moi, pour être "bonne", pour être "saine", doit être fondamentalement "vraie" (ce qui ne veut pas dire "réaliste"). À ce sujet, je recommande la lecture de
On fairy tales (
Du conte de fées) de Tolkien.