On ne va pas se mentir, le succès de Rogue One auprès des fans s'explique en grande partie par 2 facteurs. En premier lieu la quasi catastrophe de la gestion de la licence Star Wars par Disney, qui le rend encore meilleur qu'il ne l'est en comparaison. Et en second, les apparitions d'un Vador plus charismatique que jamais.
Cela dit, si on enlève la Force et les vaisseaux spatiaux, Rogue One est reste un bon film de guerre, simple mais très sympa.
Ca parait tout con, mais c'est assez réaliste et plutôt rafraichissant pour l'univers Star Wars de nous présenter l'Alliance Rebelle et l'Empire non pas comme des blocs homogènes mais comme des mouvances plus complexes, rassemblant des individus aux ambitions et visions différentes.
Ainsi, bien que théoriquement rassemblés sous la même bannière, les impériaux se déchirent pour des luttes de pouvoir (Tarkin/Krennic) ou des conflits moraux (Erso/Krennic). A ce titre, la tentative de Krennic pour se rapprocher de Vador dans l'idée de faire contrepoids à l'influence de Tarkin est cohérente et pertinente. De la même manière, les opposants à l'Empire divergent sur les moyens à utiliser afin de lutter contre lui, Saw Gerrera étant présenté comme plus dur (favorable à la torture) que Mon Mothma et Bail Organa, ce qui nous renvoit à des débats très actuels sur la légitimité de l'utilisation de la violence comme moyen de lutte contre un pouvoir perçu comme oppressif...
A "la base" des combattants, le réalisme froid d'un Cassian Andor (prêt à abattre un camarade blessé qui risque de se faire capturer) contraste avec l'idéalisme mystique de Chirrut Îmwe, adepte des voies de la Force, tandis que les doutes et la désillusion de Baze Malbus constituent un entre deux. L'âge d'or des Jedis est révolu tandis que l'innocence, les valeurs chevaleresques et la magie ont fait place à une mentalité plus grise et pragmatique, y compris chez ceux qui tentent de restaurer la République.
C'est d'ailleurs l'un des atouts de ce film que de se concentrer sur les combattants de l'ombre, les petites mains, les anonymes dont il révèle l'importance, plutôt que sur des élus et maitres de la force, des princesses ou de grandes figures politiques, ces dernières étant finalement secondaires dans le déroulement de l'intrigue. Côté Empire, Krennic a beau se démener comme il peut, ce sont les noms de Tarkin et Vador que l'histoire retiendra, le premier comme concepteur de l'Etoile de la Mort et le second pour sa traque des plans volés. Chez les Rebelles, le sacrifice des membres de Rogue One sera rapidement évoqué dans le IV où il servira surtout de tremplin à l'exploit de Luke Skywalker.
Un aspect du film qu'il est inévitable d'évoquer est le fan service...
Si l'apparition de Vador sur Mustafar est tout à fait justifiée par les luttes d'influences auxquelles se livrent les impériaux, son assaut à la fin du film l'est beaucoup moins, bien que brutalement badass. Les plans pouvaient très bien être directement transmis au vaisseau de Leia tandis que l'on aurait observer le vaisseau du Sith se rapprocher inexorablement. Le dernier mot prononcé par Leia, "l'espoir" est en effet tout autant raccord avec le titre du IV qu'avec le prochain retour d'Anakin/Vador vers le côté lumineux.
Néanmoins, dans la mesure où il ne gâche rien de l'intrigue et ne prend pas trop de place, je considère la scène de l'attaque de Vador comme un bonus pas forcément nécessaire mais inoffensif et très appréciable.
Les points réellement négatifs du film sont selon moi :
- son utilité relative. Encore une fois, le film est un très bon film de guerre dans l'univers de Star Wars mais est facilement dispensable et résumable par ce que la Trilogie Originale nous en apprenait : "un groupe de rebelles ont donné leurs vies pour transmettre à l'Alliance les plans de l'Etoile de la Mort".
- la complexité des différents camps auraient pu être développée d'avantage. La mort de Gerrera ("fatigué de fuir"...) est trop rapide et j'aurais beaucoup aimé le voir confronté sa vision sans concession à celle du tandem plus policé Mothma/Organa. Les liens (confiance, respect mutuelle etc...) entre Tarkin et Vador, expliquant le manque de soutien de ce dernier à Krennic, aurait mérité un peu d'exposition.
Au final, par son rejet du manichéisme, ses personnages divers et bien écrits, son intrigue simple mais bien menée, ses scènes spectaculaires ainsi que son fan service bien dosé, Rogue One est un film très appréciable et demeure, de loin, le meilleur film Star Wars de l'ère Disney.
J'ai d'ailleurs hâte de visionner Andor qui me semble plus prometteur que "Kenobi" qui n'avait rien à proposer hormis son fan service (le concept intéressant du personnage de Reva, qui aurait mérité sa propre série, est gâché par sa plot armor et sa rédemption niaise) et "Ahsoka", sympa (surtout au niveau des relations entre les personnages, surtout en ce qui concerne les Jedi noirs) mais mou, creux et remplit de facilité... je sais bien que Thrawn est censé être un génie dans le Legend (je viens d'ailleurs de m'acheter les 2 premiers romans de la "Croisade noire du Jedi fou"
) comme dans le canon, mais l'espèce d'aura mystique dont il bénéficie dans la série et qui est sensé justifier l'inquiétude des personnages (et plus généralement toute l'intrigue) sort un peu du cul des scénaristes.