
Plop.
Alors, oui je suis vivant. Non je ne suis pas dans les temps. Non j'ai pas de vraie excuse (j'avais une vie IRL assez chargée avec ma fin d'année et mon stage mais voilà quoi).
Par contre la bonne nouvelle c'est que le chapitre est + long (Omurah a l'air de vouloir des longs chapitres). Deux fois plus long qu'un chap normal en fait.
Comme d'habitude, je ne me sens pas vraiment légitme de répondre aux questions sans poster un chapitre en meme temps, désolé. C'est pour ça que je met du temps à répondre aux commentaires, mais ils me font vraiment plaisir, merci !
omurah a écrit:Et du coup je me pose la question, puisqu'il était prévu de faire intervenir la Z-team, pourquoi ne pas avoir occasionnellement pointé le curseur sur eux, en amont, ne serait-ce que pour appâter du lecteur dans les premiers virages xD
Je dis ça, mais moi, ça me va très bien, comme t'as fait. Je préfère comme ça. Je pose juste la question par curiosité

Hum, c'st principalement parce que
1- Je ne cherche pas vraiment à appâter le lecteur. Tout le monde aime sa propre fic, ça ne voudrait rien dire si je spammais d'auto-pub. Et je suis mauvais juge sur mon propre travail. Quand je vois Antarka qui glisse un "Lisez DBAF Lamantin" dans une conversation, ça a beaucoup plus de poids pour moi (et, je l'espère, pour les lecteurs potentiels).
2 - Parce qu'ils ne sont pas du tout des personnages centraux dans cette fic. Je préfère ne pas mentir.
3- Parce que j'ai un peu de mal à les écrire, et très peur de mal les écrire. (et honnêtement, ils sont, je trouve, mal retranscris dans cette fic)
Content que tu aimes Axod
omurah a écrit:Franchement j'aurais été toi, j'aurais quand même pris le risque d'effectivement désamorcer tout le bordel en un coup de pied, ce troll serait resté dans les annales m'est avis xD (pour de bonnes ou de mauvaises raisons, c'est une autre question, trololol)
Ah mais le troll et les retournements de situation impossible, c'est ton domaine, je voudrais pas empiéter.
Antarka a écrit:En fait j'ai un peu le même avis qu'avant en mieux : tjrs aussi épique, géant, transcendant, et mieux car on est quand même moins largué dans tout ton Bordel (enfin moi en tout cas, mais c'parce que j'ai tout relu, et plusieurs fois même).
Bah merci beaucoup. Euh,, je suis content que ça te plaise autant. C'est pour ça que je poste lentement en fait, pour vous laisser le temps de relire. Faites comme lui.
Antarka a écrit:Enfin moins largué... Suis toujours dubitatif en voulant imaginer ce que tu vas faire (au point où j'en suis, je me demande pourquoi Khaine a pas balayé la Terre lui-même, et ce que tout ses Saiyens légendaires pourront faire de tt façons contre YALDABAOTH, vu qu'il a dû bannir tout l'ancien monde pour s'en débarrasser après son combat contre l'aberration.
Le truc avec YALDABAOTH, c'est qu'il a peur de Khaine. Il ignore que ce dernier est affaibli et, pour ce qu'il en sait, il est la seule personne dans l'univers qui puisse le tuer (avec Abel). à mois de n'avoir absolument pas le choix, il choisira toujours d'envoyer quelqu'un mourir à sa place. Les SSJL pourront botter les fesses de tout ce que ce dernier parviendra à leur envoyer. Enfin, c'est le plan. Reste à voir comment ils tiennent contre les élus, Ach'Aël et Bellica.
Antarka a écrit:Question : comment tu te représentés géographiquement l'ancien monde ? Je veux dire, notre univers (l'arène) c'est du vide, avec ici et là des systèmes stellaires qui possèdent des planetes, qui elles mêmes possèdent la vie.
Le Makai ça semble être une étendu en gros plate (pas une planète), plus grand que la surface de n'importe quel monde.
Mais l'ancien monde ?
Tu as tout bon pour l'ancien monde et l'arène.
Pour l'ancien monde, il s'agit d'un chaos primordial sans consistance, une masse tourbillonnante d'énergie et de matière à peine condensée dans lequel seuls les archéens et les titans peuvent survivre (sous une forme très différente pour les titans). Les titans, s'il leur vient l'envie, créent des "Bulles". Ce sont des volumes de réalité condensée, plus vivables, où la matière s'agglomère beauoup plus facilement. Neuf fois sur dix, ce sont des genre de mini-Makaï, mais leur topographie varie du tout au tout (le palais de Bellica, par exemple, pourrait s'apparenter à une grotte aux dimensions absurdes. Le gros de son architecture a été généré par un titan prisonnier et non taillé par des outils ou par magie)
Antarka a écrit:Et pourquoi que seule les âmes de l'arène passent devant Enma ?
Cela fait partie du pacte passé entre les habitants de l'ancien monde et YALDABAOTH : toutes les âmes de ceux qui sont restés dans l'ancien monde lui reviennent. à leur morts, elles sont récoltés par
LUI et subissent
SON jugement. Inutile de préciser qu'il vaut mieux avoir été un bon croyant toute sa vie si on veut une réincarnation favorable (ou une réincarnation tout court), et que les hérétiques ne subissent pas un sort très enviable (Sheol ou annihilation pure et simple, selon l'humeur du moment). Après, l'ancien monde est vaste et il y a toujours des moyens de contourner les règles.
Je vais essayer de faire une frise chronologique ce WE, promis.
Et merci encore pour vos comms, ça fait vraiment plaisir !
Chapitre 21 - Annihilation
Encore.
Le sol de Namek tremblait, les vents déchaînés rapportaient les nouvelles du combat titanesque qui se déroulait pour l'avenir du peuple de Dende.
Encore.
Et la roche se fendit sous ses pieds, il saisit un enfant par le col, lui épargnant une chute fatale, et le reposa sur le sol en compagnie de la population du village. Ils étaient une centaine de nameks, agglutinés les uns autours des autres, les yeux grands ouverts, terrifiés par ce qui s'abattait sur leur peuple.
Encore.
Ils étaient tous nés après l'attaque de Freezer, après ces événements horribles qui avaient signé la fin de l'innocence de Dende, de l'idée que s'ils se comportaient bien, s'ils ne causaient de tort à personne, alors personne n'aurait de raison de leur faire du tort à eux.
Absurde. Dende le savait, maintenant, mais il n'y avait eu personne pour le faire comprendre à la nouvelle génération. On ne comprenait pas en écoutant les histoires. Il fallait la vivre.
Et Dende la revivait, encore. Il voyait un démon du froid, un membre de cette race haïe qu'il avait cru disparue, revenir pour assassiner son peuple. Et encore une fois, ils devaient se reposer sur autrui pour survivre. La force, il n'y avait guère que ça qui comptait. Il en venait à souhaiter qu'il n'y ait jamais eu de dragon balls et que ces monstres aient laissé leur peuple en paix pour l'éternité, au lieu de les attaquer injustement. Il avait vécu près de ces monstres, lui aussi, pendant si longtemps. Il les aimait, et Piccolo comme Gohan étaient devenus des amis précieux, mais l'enfant qu'il était à l'époque où il avait choisi de vivre sur terre avait en lui des motivations bien moins noble que l'amitié et l'amour de ce monde étranger. C'était la peur qui l'avait poussé à vivre sur terre. Il s'était figuré que vivre chez les êtres qui avaient tué Freezer le protégerait des monstres pour toujours.
Quelle erreur ! Il avait mis une éternité à le comprendre : rien ne pouvait l'éloigner des monstres, pour la simple et bonne raison qu'il en était un lui-même. Quelle terreur devaient inspirer les Dragon Balls aux ennemis de la terre ! Il fallait toute l'innocence des Nameks pour concevoir un outil si formidable sans songer un instant aux terribles emplois qu'un esprit mal intentionné pourrait lui trouver. L'immortalité désirée par Freezer n'était somme toute qu'une idée très mondaine comparée à ce qu'il avait entendu suggérer par les humains. Une peste magique qui ravagerait le Makaï, et tout le reste de l'univers à l'exception de la terre et de Namek, tant qu'on y était ; la destruction de stocks de nourriture ou d'autres ressources vitales... Tout cela aurait coupé court à l'invasion, et il avait du hausser la voix pour dissuader les terriens d'agir de la sorte.
Oui, à l'égard du pouvoir surnaturel qui sommeillait entre ses mains, et entre celles de tous les membres de la tribu du dragon, il était lui aussi un de ces monstres qui faisaient de l'univers un endroit sombre et effrayant. Maudites soient les Dragon Balls, et maudit soit le pouvoir antique qui avait mis une telle chose entre leurs mains à eux, les Nameks, qui n'avaient jamais demandé qu'une vie paisible et pacifique.
Une autre série d'impacts repoussa les nuages ans l'atmosphère
Kibitoshin allait gagner. Après toutes ces années sur terre, à contempler les sayens, Dendé était parfaitement à même de comprendre comment les combats se déroulaient, même à cette échelle de puissance. Banquiz ne le savait peut-être pas encore, mais le combat ne se prolongeait que parce que Kibitoshin économisait ses forces pour un autre affrontement. Le démon du froid se battait mieux, faisait décliner les réserves de son ennemi bien plus vites que les siennes à lui, mais le kaïoshin pouvait à tout moment dégager une force vitale à même de porter le coup fatal, quelle que soit l’habileté dont son ennemi fasse preuve.
Dende voulut sourire, mais n'y arriva pas. Le sol tremblait toujours sous ses pieds.
Ça y était, Kaïoshin passait à l'attaque, concentré. Il avait mis à contribution l'énergie accumulée et l'aura de Banquiz diminuait de seconde en seconde.
Aveuglé par le brasier de ki qui se déchaînait devant lui, il ne perçut pas l'étincelle au-dessus de sa tête.
******
Trop nombreux. Non, ce n'était pas juste ça : Non seulement ils étaient trop nombreux, mais ils étaient aussi plus efficaces, plus organisés, plus cohérents. Ils s'étaient préparés pour une guerre, pas pour un championnat d'arts martiaux. Mais Piccolo s'adaptait vite.
Dos à dos avec un combattant fusionné dont il ne connaissait même pas le nom, il parvenait enfin à tenir en respect les troupes disciplinées de l'adversaire, et stabilisait ses réserves d'énergie, capable d'analyser quand les escadrons de démons fondraient sur lui en simple distraction et quand ils le faisaient dans le but d'asséner un coup fatal.
À leur décharge, ils avaient réussi à lui infliger trois coups fatals. Mais les capacités de régénération de Piccolo l'avaient préservé, et son formidable sens du combat le prémunissait du risque de subir deux fois de suite la même attaque.
Tenir. Il n'y avait plus que ça à faire. Tenir sans laisser la moindre ouverture, et prier pour de Gohan ou Goujin vienne à sa rescousse une fois de plus et nettoie la vague de démons, lui donnant une chance de passer à l'offensive.
La ville dans laquelle Piccolo avait choisi de commencer le combat était complètement nivelée à force de kikohas et de chocs sismiques. Des gravats et du béton éclaté à perte de vue. À sa droite, un arbre fendu apportait une touche de nature dans ce décor d'apocalypse. Les cieux rouges s'illuminaient régulièrement, et on n'entendait parfois le choc des combats que de longues minutes plus tard. Partout, la terre chauffée à blanc côtoyait un sol fendu par le gel. La magie du Makaï avait imprégné jusqu'à l'air ambiant et s'éparpillait comme une goutte d'essence dans une flaque d'eau, chaque bombardement magique rendant un peu plus difficile la perception du monde alentours.
Quelque part en lui, celui qui avait été le protecteur de la terre ne reconnaissait plus le monde autours de lui. Son aspect muté par les combats et son essence teintée par la magie démoniaque lui semblaient étrangers, dangereux, hostiles.
Et au-dessus, comme un vol de vautours paralysés, trente deux démons les observaient en cercle, guettant un moment, une occasion qui leur serait propice. Piccolo arrivait maintenant à lire dans leurs formations et à prévoir les timings où ils se jetteraient sur lui en formation.
Ils savaient se battre, mais ce n'étaient pas des génies pour autant.
Le principal danger du groupe auquel il était confronté résidait dans son utilisation de tissus enchantés dont les fibres les protégeaient des attaques de ki et les rendaient considérablement plus difficiles à détecter. Il fallait déchirer leurs armures de bandelettes avant de les frapper, ce qui impliquait d'engager des corps à corps toujours très laborieux.
Le namek se sentait capable de tenter l'attaque, mais son compagnon d'armes n'y survivrait certainement pas.
Bah, ils avaient les dragon balls après tout. Il fallait prendre l'initiative ou il se feraient submerger à coup sûr.
Une série de signes, quelques paroles échangées, et Piccolo fut rassuré : l'envoyé du Kaïoshinkaï n'avait absolument pas peur de mourir. Ils attaquèrent simultanément : Piccolo en avant, et son allié derrière, lui couvrant les arrières. À peine leur mouvement enclenché, et les démons avaient réagi, adoptant des formations inconnues jusque-là.
Pas le temps de changer de trajectoire.
Au lieu de frapper le démon vers lequel il se dirigeait à l'origine, Piccolo dévia sa charge pour passer sous celui-ci, esquivant une combinaison de Kikohas qui l'aurait sinon assommé à coup sûr. Derrière, le crâne de son coéquipier éclatait entre les genoux de deux démons.
Combien de formations ont-ils mémorisé ? Il fallait tuer le sorcier, c'était lui qui leur permettait une telle cohésion, mais il était hermétiquement protégé par les plus puissants de ses congénères... Zut !
Piccolo était coincé en l'air, avec l'intégralité de la force de frappe ennemie entre lui et son point d’atterrissage potentiel. Derrière ses gardes du corps, les yeux phosphorescents du sorcier le narguaient. À gauche, à droite et par derrière, toujours la force de démons se refermait sur lui.
Mais ils n'étaient pas les seuls à avoir gardé un as dans leur manche.
Même si, depuis que les sayens avaient surpassé leur première transformation, l'idée de devenir un jour le plus puissant combattant de la terre s'était faite utopiste, Piccolo n'avait pas abandonné sa quête de perfectionnement. C'était même l'inverse : il n'avait jamais été aussi rapide et efficace dans ses entraînement que depuis qu'il avait compris qu'il ne surpasserait jamais Goku.
En abandonnant tout espoir de tenir un jour le futur de la terre entre ses seules mains, il s'était fugacement imaginé qu'il abandonnerait ses entraînements pour de bon. Cela avait été l'inverse. Il ne s'entraînait plus pour vaincre Goku mais, à la manière de celui-ci, pour se surpasser lui-même. Cela avait toujours été le cas, au fond. La haine de Piccolo Daimao, qui lui avait donné vie, ne s'était pas tant focalisée sur le garçon qui lui avait transpercé le cœur d'un coup de poing que sur le soi-disant roi démon qui s'était laissé vaincre par l'enfant en question. Il l'avait simplement transposé sur la mauvaise cible.
Depuis le début de l'invasion, Piccolo observait, mémorisait, tentait de comprendre des mécanismes qui régissaient leurs ennemis. Même s'ils abattaient les démons par poignées entières, ils étaient des milliers sur la lune, prêts à rejoindre la mêlée. Peu importait la force individuelle de leurs super-sayens, ils se feraient submerger si l'on laissait le poids du nombre s'exercer librement sur la résolution du conflit. Cela, il l'avait compris bien avant le premier assaut.
Il avait eu tout le temps de préparer un contre.
Loin en contrebas, dans les ruines de la ville, la magie et le ki qui imprégnaient l'air se dissipaient lentement.
Plus loin encore, enterrés sous le béton et l'asphalte, plus de deux cent œufs, incapables d'absorber plus d'énergie ambiante se fissurèrent quasi-simultanément sous l'impulsion de leur créateur.
Les nouveaux-nés jaillirent du sol à l'unisson, une armée de taupes monstrueuses écartaient la fonte et le ciment comme s'il s'était agi de terre et de sable. Couverts d'écailles squameuses, c'était la meute grinçante et caquetante qui avait servi Piccolo Daimao en des temps anciens. Des parodies dégénérées de nameks, voués dès leur naissance à verser le sang de au nom de leur maître. Dans leurs petits yeux froncés, rien d'autre que la fureur maligne et la servilité voulue par l'ancien roi des démons. Nombreux, remplaçables, combatifs et cruels. Une armée appropriée pour celui qui avait voulu faire de la terre un enfer miniature. Voilà qu'elle était suscitée pour empêcher cette même chose.
Ils étaient trop idiots pour saisir l'ironie de la situation, et chargèrent avec toute la sauvagerie qui les caractérisait vers ceux qui s'en prenait à leur créateur, en haut. Démons contre démons. Les nouveaux-venus n’arrivaient pas à la cheville des guerriers du Makaï, et même leurs cervelles limitées comprenaient qu'à deux cent contre trente, ils courraient vers une mort certaine.
Mais cela n'avait pas la moindre importance : ils protégeaient le maître.
*******
Les pas du démon retentissaient dans la grotte, rendus tonitruants par le silence souterrain. Ce réseau de cavernes s'étendait sur des kilomètres, et une foule de spéléologues l'avaient laborieusement cartographié au cours des siècles. Parmi eux, un certain cyborg répondant au nom de C17. Il n'aurait jamais pensé que cette passion lui rendrait de tels services, mais, lorsqu'il avait reçu l'appel au secours de sa sœur par leur canal de communication privé, il avait immédiatement envisagé de se replier ici si leurs forces combinées ne suffisaient pas à défaire la menace.
En l'occurrence, la menace les avait proprement massacrés.
L'idée de C18 de transformer la bataille en une longue suite de duels mettait à contribution la tradition martiale de leurs adversaire pour les pousser dans une configuration où elle aurait immanquablement l'avantage. Les deux cyborgs, et C17 l'avait lui aussi remarqué de son côté, se trouvaient dans une tranche de puissance idéale, en cela qu'ils n'étaient pas substantiellement plus puissants qu'un démon de haut niveau, mais que leur endurance surhumaine leur assurait immanquablement la victoire contre un ennemi niveau similaire. Cela avait fonctionné pendant un quart d'heure, où ils avaient chacun de leur côté abattu une force combinée qui serait venue à bout de presque n'importe quel super-sayen, si elle avait eu le temps de s'unir. Cela avait cessé de fonctionner lorsqu'ils avaient rencontré un démon largement plus puissant qu'eux.
Il était somme toute logique qu'une culture aussi martiale que celle des démons ait placé une lignée de combattants exceptionnels à son sommet, et le prince Nadil avait fait honneur à sa famille. Devant l'assistance médusée, il avait calmement entrepris de démolir C18. N'ayant rien à prouver ni à revendiquer, il avait pris son temps, n'était pas tombé dans le moindre piège, là où C18 avait enchaîné les mauvaises surprises à toute vitesse. Plus rapide, plus fort, il avait révélé ses capacités de sorcier en plein milieu du combat en générant une cage de flammes autours de la cyborg, qui, figée par la surprise, perdit son bras droit dans la minute. Heureusement, son frère était arrivé en renfort à temps, mais elle avait accumulé assez de données pour comprendre que leur seul espoir de survie résidait dans la fuite.
Au moins, cette option ne leur était pas fermée.
Leur nature de cyborgs les avait sauvés encore une fois. Les flashs lumineux installés dans leurs systèmes de combat combinés à leur absence de ki les avait rendus complètement invisibles le temps de s'enfuir dans un lieu où ils auraient, sinon l'avantage, au moins une chance de s'enfuir.
Mais pour s'enfuir, encore fallait-il bouger. Et l'ouïe du monstre était à la hauteur de sa force. Béni soit leur canal radio personnel et la médiocrité des démons lorsqu'il s'agissait de s'adapter à la technologie locale. Ils avaient eu une dizaine de minutes pour discuter de la situation : ils étaient faits comme des rats, mais le complexe de roches était si immense que la seule chance de les retrouver était de le faire sauter dans son intégralité. Et Les cyborgs pourraient tous deux profiter d'une telle explosion pour s'enfuir au loin. Ils étaient bien dans un cul-de-sac, mais leur ennemi aussi. À moins qu'il ne révèle une nouvelle capacité inconnue, bien sûr.
Leur discussion radio s'était arrêtée à ce constat depuis quelques minutes quand le frère reprit la parole.
- On a encore perdu des sayens.
- Oui.
- Faut qu'on y aille.
- Oui.
- …
- …
Les pas du démon s'étaient arrêtés, puis reprirent d'un coup, alors que sa voix, trop puissante pour n'avoir reçu aucune aide magique, retentissait à nouveau dans toute la grotte.
« Je finirai par vous trouver, vous savez ? C'est ça le courage des terriens ? Vos amis se font tuer, dehors ! »
Il les provoquait depuis le début de cette partie de cache-cache mortelle. Les pas reprisent, s'éloignant, et C-17 reprit.
- Il a raison. Je vais faire diversion, essaie de partir les aider.
Sa sœur le dévisagea dans l'obscurité, furieuse.
- Tu plaisantes ? N'essaie pas de me protéger, j'ai un bras arraché si ça t'a échappé. Tu sera plus utile que moi là-haut.
- Mais je...
- On a les dragon balls. Ne t'inquiète pas pour moi.
Bien sûr qu'il s'inquiétait pour elle. Mais aussi pour les autres, pour Krilin, pour ses petits-enfants à elle, alors que lui... Ils seraient une dizaine tout au plus à pleurer sur son cadavre si le pire devait arriver.
Mais il pensait comme un vaincu, alors que sa sœur n'avait pas exprimé de doute sur leur victoire depuis le début de l'invasion, même quand la puissance de Baphasi avait augmenté au point de dépasser celle des super-sayens, elle avait gardé confiance en eux.
Il priait pour que ce ne soit pas injustifié.
Puis, il capta une présence à l'entrée de la grotte, et sut qu'il devait agir tout de suite.
*******
« La morsure du soleil ! »
Huit démons, tous vêtus du blanc de la garde royale, s'effondrèrent sur le sol, terrassés par les kienzans. Le neuvième tint bon une seconde, malgré sa gorge qui vomissait des flots de sang, et eut le temps de cracher un kikoha avant de s'effondrer, inconscient.
Seul les cris de douleur de Nosette venaient rompre le silence.
Krilin s'approcha de son élève, et lui tendit son dernier senzu. Les jambes repousseraient en quelques heures, mais Nosette était hors de combat. Benoix, Rachid, Cawett et Amandine reprenaient leur souffle, guettant avec inquiétude la force colossale qui se tapissait au fond de la grotte. Les kienzans ne fonctionneraient pas sur celui-ci. En tout cas, pas la version primitive qui avait permis à ses élèves de vaincre des centaines de démons infiniment plus forts qu'eux depuis le début de l'invasion.
Krilin ressentait une sorte de plaisir coupable à comparer les performances de ses élèves et celle des moines de la grue, pourtant tellement plus puissants et versatiles, mais le constat était là : Marron et Nosette, blessée mais vivantes, étaient les deux seules pertes de l'école de la tortue, là où moins d'un moine le la grue sur dix respirait encore.
À quoi bon chercher la puissance quand l'ennemi les dépasserait quoi qu'il arrive ? L'entraînement de Krilin s'était focalisé sur la discrétion, et la poignée de techniques qui leur permettrait de vaincre ces ennemis ridiculement plus forts qu'eux : la morsure du soleil, le kienzan, et le mafuba avaient terrassé plus de démons que n'importe quel super-sayen, à l'exception seule de Son Goujin.
Mais si leurs victime dépassaient le millier, ils n'avaient jusque là abattu que du menu fretin. Les vraies menaces, comme celle qui traquait C18 dans cette grotte, restaient bien au-delà de leur portée. Mettre les pieds la-dedans, c'était se condamner à mort.
Et pourtant, il fallait qu'il y aille. Parce que sinon, C17 et C18 allaient tous les deux mourir, et que la terre avait plus besoin d'eux qu'elle n'avait besoin de lui. Parce que ses élèves étaient bien assez bons pour continuer son œuvre sans lui, même s'il devait les abandonner ici. Et par-dessus tout, parce que depuis ce jour où il avait été assez idiot pour risquer le sort de la terre sur un coup de tête, il savait qu'il ne pourrait jamais abandonner C18 à une mort certaine.
- Je vais y aller, mettez Nosette en sécurité. Dites à Marron que je pense à elle.
Aucun des élèves ne contesta sa décision. Graves, silencieux, ils acquiescèrent et disparurent dans la nature, reprenant à quatre la guérilla qu'ils avaient commencé à sept.
La grotte ouvrait grand sa gueule, prête à laisser entrer le maître des tortues. Il prit une grande inspiration par la bouche, et fit un pas dans les ténèbres.
- Laissez moi faire, maître Krilin. C'est trop dangereux pour vous.
Le petit homme se retourna tendu et prêt à combattre l'inconnu. Il ne l'avait absolument pas senti approcher.
Un clairvoyant. Le troisième œil au milieu du front ne laissait pas de doute sur son identité. Il était grand, basané et tatoué sur tout le corps. Erik. Le facteur inconnu. Le plus mystérieux, et probablement le plus actif des clairvoyants. Il était sans le moindre doute beaucoup plus fort que Krilin.
Un moucheron, comparé à ce qui les attendait, tapis dans les ténèbres souterraines.
- Si c'est Tien qui t'envoie, dis lui que je n'ai pas besoin qu'on meure à ma place.
Les yeux sombres du clairvoyant étaient toujours aussi inexpressifs.
- Je n'ai pas l'intention de mourir, maître Krilin. J'ai l'intention de tuer ce qui se trouve dans cette grotte, et de secourir nos deux alliés. Maintenant, si vous voulez bien vous tenir à distance, cela me facilitera la tâche.
Et l'homme s'avança seul, d'un pas calme et décidé, vers l'entrée du souterrain. Il s'arrêta sur le seuil, juste avant que les ténèbres ne l'engloutissent. Quand il reprit la parole, sa voix laissa transparaître un tremblement infime, tout-de-suite réprimé, mais qui n'échappa pas à l'oreille acérée de Krilin.
- À la réflexion, il est possible que je meure. Si cela se produit, je... Enfin...
De longues secondes s'écoulèrent sans qu'il ne parvienne à finir sa phrase. Krilin vit la poitrine d'Erik se soulever alors qu'il prenait une grande inspiration, puis, le corps du clairvoyant se fondit dans les ténèbres.
Cela n'aurait rien dû avoir de surprenant, l'intérieur était très sombre et dénué d'éclairage. Le côté exceptionnel de la chose provenait du fait qu'Erik ne s'était pas avancé dans la grotte avant de quitter la vue de Krilin. À la place, droit sur ses deux jambes, il avait simplement fondu dans les ombres.
Et le gouffre s'assombrissait de secondes en secondes. Bientôt, on ne put plus distinguer quoi que ce soit de l'intérieur, comme si l'entrée toute entière était un mur lisse couvert d'une peinture noire sans reflets.
Le maître des tortues resta figé, incapable de procéder les informations que lui transmettaient ses sens. C'était comme si toute la grotte était devenue vivante. Une bête immense et souterraine qui entendait, sentait, respirait...
Mordait.
Et les cris de Nadil, repris par l'écho, retentirent pendant de longues minutes avant de se taire à jamais.
******
Le vide spatial n'était pas froid. C'était ce qui y entrait qui refroidissait à toute vitesse, la matière intruse dans ce monde vierge se neutralisait, prenait un état solide et éternel, ou se dispersait en un instant en gaz. Mais Krios n'était pas un intrus, ici.
Sa peau immaculée ne brillait pas comme elle l'aurait dû à la lumière du soleil, absorbant la plupart des radiations qui aurait foudroyé d'autres êtres.
Nu, l'enfant dérivait dans un environnement infiniment hostile à la vie. Expérimenter le vide, c'était faire un pas en avant, devenir un « autre ». Ou transformer le reste du monde en autre. Les plus puissants sayens, dieux et démons pouvaient survivre dans le vide, mais aucun ne s'y sentait chez lui. Ils souffraient, leurs muscles et leur aura tendus contre un milieu mortel. Ils étaient des intrus dans l'espace. Des intrus dans ce qui constituait essentiellement la totalité de l'univers.
Krios entrait pour la première fois de sa vie dans sa maison. Une maison infiniment plus grande que ce que tous, hormis les rejetons de Rte'is, appelaient l'univers. Une maison dont il était, avec son père, le seul vrai occupant, et dans laquelle personne ne pouvait s'aventurer sans recourir à de fragiles coques de métal. Tout près, il voyait l'une de ces coques dériver à l'aveugle, à sa merci. Elle contenait ceux qu'il avait cru chérir le plus au monde. Polt, Cadenza...
Il les aimait toujours de tout son cœur, mais Krios venait de découvrir en lui une chose plus importante. Il embrassait des yeux son vrai trésor. Sans une atmosphère pour l'aveugler, sa vue transperçait l'univers. Il voyait les océans de plasma se déchaîner à la surface du soleil, il distinguait les mouvements des étoiles lointaines et devinait leurs locations. Ses pouvoirs télékinétiques se déployaient lentement, libérés des chaînes de la gravité.
Dans sa tête, se dessinait une carte spatiale qu'aucun esprit n'appartenant pas à sa race n'aurait pu déchiffrer, mais elle était pour lui limpide. Il sentait la terre et le déchaînement d'énergies obscures à sa surface. Il pouvait l'atteindre, il pouvait y aller. Il pouvait étendre les fils de ses pouvoirs en une ligne droite qui trancherait les dimensions et l'amènerait vers sa destination en quelques mois. Non, en quelques semaines. Les distances étaient broyées sous sa poigne, l'univers se pliait en origamis conciliantes, comme une bête bien dressée.
Cela ne pouvait pas être dû au hasard. En fermant les yeux, il voyait cette figure sombre, puissante qui avait offert l'univers à sa race en l'échange de quelque service grandiose et lointain. Il était l'héritier de ce pacte, de ce monde.
Ah, quelle extase ! Ce qui n'avait été que des mots lui apparaissant maintenant comme une certitude. L'univers lui appartenait, à lui, d'un droit plus divin que la parole de n'importe quel dieu. Tous les autres étaient des intrus, cachés derrière leurs coques de ki, de métal...
Ou de pierre.
Sous lui, nouvelle-Namek lui semblait aberrante. Un dégoûtant monument à la gloire d'usurpateurs qui avaient cru leur voler la galaxie.
Il savait ce qu'il avait à faire.
Depuis l'orbite, le jeune démon du froid concentra son ki, les yeux fixés sur l'arrogante sphère qui prenait maintenant tout son champ de vision. Puis, il tendit un index accusateur vers son ennemie.
Une créature moindre aurait hurlé de rage en déchargeant la vague de ki planèticide. Une créature moindre aurait qualifié l'acte de « démoniaque », et l'expression de Krios de « froide ».
Krios n'était pas de ces créatures-là. Il était un seigneur du vide.
******
Vingt et un. Il ne savait pas s'il espérait qu'il en resterait plus ou moins.
Piccolo peinait à dissimuler son dégoût lorsqu'il baissait les yeux vers sa création. Un ramassis d'immondices vouées à la destruction de l'humanité, et qu'il avait détourné de leur but original. Le fait qu'ils l'aient loyalement servi, bravant la mort à de multiples occasions pour lui donner l'opportunité de frapper une fois de plus, s'interposant face aux kikohas et aux sortilèges qui auraient sinon scellé son sort, ne l'aidait pas à trancher le sentiment troubles qu'il avait pour ces créatures. Ses enfants.
Ceux qui avaient survécu étaient les plus forts et les plus rusés de la meute. Ils commençaient à faire preuve d'une cohésion instinctive qui leur avait permis, à la manière de leurs ennemis, de vaincre des combattants individuellement bien plus puissants.
Ils s'étaient débarrassé de ce groupe, et il fallait bouger vite, avant qu'un autre détachement ne leur tombe dessus. Les effectifs des sayens, morts comme vivants, chutaient à toute vitesse.
Vingt.
Un de ses enfants venait de mourir. Là, à moins de deux cent mètres.
Piccolo étendit sa perception, tentant de détecter le combattant ennemi qui se cachait dans l'ombre. Ses guerriers se regroupaient, dos à dos, au niveau du sol, prêts à assaillir l'agresseur dès qu'il se manifesterait.
Si l'ennemi cachait prodigieusement bien son ki, il y avait d'autre manières de détecter un être vivant. Sans même les regarder, le namek était capable de percevoir le mouvement des cailloux, des herbes que son ennemi devrait fatalement effleurer dans ses déplacements. Rien. Il étendit ses sens plus précisément, analysant les poussières, l'air, les mouvements des minuscules insectes environnants.
Dix neuf. Un autre monstre s'effondra sur le sol, sans vie. Ses frères, paniqués, scrutaient l'environnement en quête de cet ennemi invisible. Piccolo redoubla d'efforts, mais il ne percevait rien d'autre que le vent, le sable, les insectes...
Les insectes.
Deux kiaïs pulvérisèrent à la fois l'essaim qui tournait autours de ses guerriers et celui qui se dirigeait vers lui.
Saletés.
Piccolo avait la signature énergétique, il fallait seulement la remonter. Il devait y avoir un essaim, une ruche ou une reine. Il allait le trouver et le détruire. Cet ennemi, tout mortellement dangereux qu'il soit, devenait inoffensif dès lors qu'on le connaissait.
Il n’eut pas à chercher bien loin. Les applaudissements le guidèrent. La ruche avait un visage, deux bras, et une bonne douzaine de jambes. Son buste aurait pu passer pour celui d'un adolescent, mais la masse de chair boursouflée où il s'enracinait avait perdu tout aspect humanoïde si elle en avait un jour eu un. Dessous, une collection de membres sanguinolents supportaient la masse de viande. Animée, la peau se tendait parfois sous la pression d'un abominable rejeton. Une cloque éclata, libérant un autre nuage d'insectes dans l'air, et Piccolo dû réprimer un haut le cœur. Le parallèle avec sa propre création n'était que trop évident, et, à en juger par le sourire qui illuminait les yeux noirs de la créature, elle en avait parfaitement conscience.
Ses démons s'étaient reformés, formant un barrage vivant entre lui et l'ennemi. Impossible de savoir ce que cette créature leur réservait, et ils resteraient sur la défensive jusqu'à ce que leur géniteur leur donne l'ordre d'attaque.
Et déjà, le monstre changeait de forme. Le ventre flasque et ballottant se durcissait en des constructions successives de muscles noueux et d'os acérés. En quelques endroits, la peau éclatait face à la reconstruction en cours, laissant couler un ichor jaunâtre ou un sang carmin.
Le spectacle eut été révulsant s'il n'avait été aussi rapide, mais les pouvoirs de métamorphose de cette chose fascinaient par leur rapidité. Quelques secondes, tout au plus, et il était passé d'une pondeuse pataude à un puissant golem armuré d'os et de cartilage. Les petits yeux noirs s'ouvraient partout où sa forme asymétrique laissait l'espace pour poindre l'un d'entre eux et loin, loin sous les épines d'os qui suintaient d'une toxine qu'on devinait fatale, le cerveau immonde et boursouflé de la bête préparait une autre forme d'attaque.
Un changelin.
Kaïoshin les avait averti de l'existence de cet ennemi-là. Dernier héritier d'une race disparue qui avait en son temps causé des dégâts comparables à ceux de Boo. Boo était d'ailleurs celui qui avait pris la responsabilité de l'abattre, mais il avait du échouer d'une manière ou d'une autre, le changelin avait dû s'évader sous la forme d'un ver ou d'un cafard alors que son corps guerrier se faisait détruire.
Ou alors il avait carrément affaire à un deuxième changelin.
Ces horreurs pouvaient générer un autre individu capable en moins d'une heure, mais celui qui accompagnait Baphasi était manifestement beaucoup plus fort que les autres membres de sa race. Vingt minutes ? Cinq ? Moins ? Combien d'autres monstres du genre y avait-il encore sur terre ?
Ils devaient impérativement tous les tuer, sous peine de les voir prendre contrôle de tout l'écosystème de la planète. À terme, l'humanité n'y survivrait pas.
Là où la force de cette créature était son adaptabilité infinie et son taux de reproduction phénoménal, sa faiblesse était son incapacité à employer efficacement le ki au combat. Il était très bon pour se cacher, certes, mais son aura restait dérisoire et la danse de l'air lui était probablement inaccessible. Le pulvériser à coups de kikohas restait l'option la plus sûre, mais c'était la stratégie que Boo avait sûrement adopté à l'arrivée du changelin, et voilà où cela les avait mené.
Il fallait oblitérer toute la zone. Noyer la ville entière dans un océan de plasma surchauffé où aucun germe, aucune larve, aucun œuf et aucune spore ne pourrait survivre. Tout cela sans trop endommager la planète. Difficile, mais faisable.
Les yeux toujours rivés sur l'ennemi en contrebas, qui tournait autours de leur position comme un vautour inversé, le namek commença à charger son ki. Le changelin préparait quelque chose.
Les macro-capsules.
Il y en avait une dans la ville.
Et juste à côté, quelque chose.
Un autre changelin.
Paniqué, Piccolo interrompit la charge de son attaque, et fusa vers la scène du meurtre de masse à venir. Il se jeta sur le côté tout juste assez vite pour éviter le coup de bélier que le premier changelin lui destinait, depuis le sol. La détente monstrueuse de la créature avait propulsé sa masse formidable à trente mètres de haut. Arrêté dans sa course ascendante par un tentacule, il projeta quatre autres des puissants appendices garnis d'épines toxiques qu'il avait jusque là dissimulé vers Piccolo.
Il fallait esquiver. Il perdit quelques précieux instants à contourner les appendices, et quelques-uns de plus à projeter l'ennemi vers le sol. Encre une seconde gaspillée pour détruire un nuage d'insectes venimeux et il sut qu'il n'arriverait pas à temps pour empêcher le désastre.
Tant pis, on a toujours les Dragon Balls. Tout en esquivant, il chargeait une nouvelle attaque, plus puissante, plus destructrice. Quelque chose qui ruinerait définitivement à la fois ce changelin et celui qui se tenait maintenant juste en face de la macro-capsule.
À dix mètres de la macro-capsule. Une autre puissance venait de se matérialiser et de l'écarter de sa cible.
Tien Shin Han apparut à sa droite, un instant plus tard, la macro-capsule dans la main droite. Ils eurent un sourire entendu, et le namek projeta la décharge d'énergie qui viendrait à bout des monstres en contrebas.
C'était une attaque d'une puissance rare, autrement plus complexe qu'une simple boule d'énergie. Le kikoha, soutenu, propulsa la température au sol à un niveau insoutenable, qui carbonisa sur place toute forme de vie ayant eu le malheur de se trouver sur place. Tout le sol et les roches en-dessous ne furent pas épargnés et rejoignirent la masse de plasma incandescente qui avait remplacé la métropole. La décharge d'énergie phénoménale aurait largement dû condamner la planète, mais la maîtrise du ki de Piccolo n'avait plus d'égale depuis la mort de Goku et de Vegeta. Il enchaînait le ki sous le joug de son esprit, condensait les vagues et les retournait dans ce creuset infernal alors qu'elles tentaient de lui échapper. Il tint une longue minute à ce régime avant de s'arrêter, épuisé.
Il n'y avait plus rien de vivant à des kilomètres à la ronde. Il avant complètement rasé la ville et le sol frémissait encore de la puissance dégagée. Les gaz toxiques échappés pendant la combustion remontaient jusqu'à eux, mais ils pouvaient tous deux communiquer par télépathie et retenir leur souffle pendant une heure entière si nécessaire.
Même sans cela, l'épuisement du namek était manifeste.
- Je n'ai plus de senzus.
- Moi non plus.
L'explosion avait attiré les démons en masse. Ils étaient facilement trois cent à converger vers eux. Piccolo était épuisé et Tien était bien loin du niveau requis pour affronter un de leur détachements. Cette armée allait les écraser.
- Vas-y, pars. On on me ressuscitera avec les Dragon Balls.
- Il n'y a plus de Dragon Balls, Piccolo.
Le visage du namek se teinta progressivement d'horreur lorsqu'il rechercha, en vain, la trace énergétique de la planète d'exil de son peuple. Glacé par la situation, il dévisagea, incompréhensif, son camarade qui lui tendait la macro-capsule.
- Prend-la. Le ne pourrai pas me battre en tenant ça.
Malgré la profonde tristesse qui se lisait dans les trois yeux du maître, on le sentait apaisé. Il souriait, résolu face à l'adversité. Alors que l'armée démoniaque fondait sur eux, il acceptait une mort irréversible.
- Qu'est-ce que ? Tien, c'est du suicide ! Prend la capsule et fuis avant qu'ils ne te tuent !
- Pour aller où ? Nous perdons.
C'était vrai. Trop de démons, pas assez de sayens. Les mathématiques étaient d'une terrifiante simplicité.
- Je crois que les sayens ont fait bien assez de travail. C'est peut-être à nous de prendre la relève.
Il y avait autre chose. L'aura de Tien Shin Han fluctuait, et son ki ne ressemblait plus du tout à du ki. Il vibrait sur une autre fréquence, son aura remplacée par l'avatar de quelque chose d'autre.
- Tu diras à Chaozu que je lui fais confiance. Et embrasse tout le monde de ma part.
Le cercle de démons se refermait sur eux, et Piccolo ne parvenait toujours pas à concilier ce qu'il percevait et ce qu'il voyait. Il tenta d'imprimer dans sa mémoire ce visage qu'il ne verrait plus jamais, il en avait l'intuition. Un visage sec, qui n'avait jamais abandonné sa quête de perfectionnement, qui n'avait jamais levé le pied sur ses entraînements draconiens, qui avait non pas suivi le chemin de Goku, mais s'était entraîné aussi dur que possible de son côté, sans que l'immense écart de force entre lui et les sayens ne soit jamais entré en ligne de compte. Tien Shin Han était véritablement le plus ancien combattant de la terre, en cela qu'il n'avait jamais cessé d'être un artiste martial, en corps et en âme.
Il arpentait sa voie depuis plus longtemps que n'importe qui d'autre. Plus longtemps que Goku lui-même arpentait la sienne.
Et il y avait trouvé quelque chose.
Piccolo planta son regard dans celui de Piccolo, puis fixa ce troisième œil ouvert, si dérangeant et familier à la fois.
Les deux yeux humains se fermèrent, et le troisième œil s'ouvrit une seconde fois. Piccolo sut alors ce que Tien avait trouvé.
******
Idiot. Il s'était senti si idiot quand il avait enfin réalisé la vérité. Il s'était aussi senti idiot quand la phase d'entraînement la plus éreintante de sa vie n'avait abouti qu'à l'acquisition d'une simple augmentation de son acuité visuelle. Il s'était raccroché à l'idée que l'exploit d'avoir surmonté la douleur et d'avoir survécu à la fois à la transformation et à la consommation des substances qui l'y avaient préparé consistait déjà en un endurcissement mental et spirituel qui, plus que le troisième œil, l'avait fait progresser.
Idiot, double idiot et triple idiot.
Comme un homme des cavernes qui se serait servi d'un fusil comme d'une massue.
Il avait tenu une arme formidable entre ses mains mais, stupide, faible et indiscipliné comme il l’avait été, il n'avait jamais saisi son potentiel.
Le troisième œil n'était pas là pour mieux observer le monde. Il était là pour voir au-delà du monde. Pour se voir soi-même.
La vue de Tien Shin Han épluchait toutes les couches de réalité comme de simples entraves. Les plans défilaient devant lui comme il les écartait dans un intervalle de temps replié qui passait pour inexistant à tout le reste de l'univers. Le temps, l'espace et la réalité de son être se délitaient les uns après les autres, jusqu'à ce qu'il ne reste que celui qui tournait les pages. Le dernier plan parallèle, l'ultime couche de réalité révélatrice de son soi profond.
Il ne restait plus que le Tien Shin Han zéro. Plus de chair, plus d'esprit, plus de monde extérieur. Rien que le spectre auquel tout le reste était connecté. Rien que Lui.
Il était simple, pur. Et par sa pureté, avait une vue directe sur le torrent infini d'énergie qui coulait sous multiples les strates de réalité qui composaient l'univers.
Il percevait sa structure mouvante, troublée, il devinait la meute sans visage qui dévorait l'extrémité du monde et voyait la fontaine de volonté qui, terriblement proche, jaillissait du front de la reine des démons pour abreuver le cosmos tout entier. L'énergie était là, infinie, à porté de main.
Il n'avait qu'à la tendre, et la force primordiale envahirait son soi purifié.
Seulement son soi purifié. Tout le reste serait balayé avec le flot de puissance brute.
Ne faire qu'un avec la force, c'était vers cela qu'il avait tendu depuis le début, n'est-ce pas ?
Le sacrifice n'en était alors pas réellement un.
De plus, la situation l'exigeait.
* * *
« TIEN ! »
Mais Tien Shin Han n'était déjà plus là. La macro-capsule serrée dans la main, Piccolo, encore aveuglé par le flash lumineux qui avait emporté son ami, fixait d'un regard blanc l'armée qui se dirigeait vers lui, prête à le démembrer. Dans l'air brûlant chargé d'électricité statique, il repéra enfin l'origine de la force monstrueuse qu'il percevait partout à fois.
Le ciel était zébré d'arcs électriques, et les nuages brillaient comme autant de soleils sous les vagues d'énergie ambiante.
L'armée démoniaque s'était immobilisée, tous les yeux braqués vers la voûte céleste et le nuage invisible, trahi par quelques arcs électriques qu'on devinait loin, là-haut. Un sorcier se mit à hurler de terreur, seul dans le silence. Un autre groupe de démons, une centaine, pris dans son élan tenta d'atteindre le sol à travers la masse d'énergie silencieuse qui avait autrefois été un humain du nom de Tien Shin Han. Ce fut assez pour qu'il passe à attaque.
La foudre ne frappe jamais deux fois au même endroit. Les rares démons à survivre à la tempête d'éclairs qui s'abattit sur le champ de bataille périrent lors de la chute dans le magma bouillant qui les attendait en contrebas.
Et le nuage monta, s'étendit, englobant bientôt toute la planète alors que toujours plus d'éclairs pleuvaient du ciel sur l'armée des envahisseurs, et que la personnalité du maître des grues s'éloignait, toujours un peu plus loin dans l'oubli.
*******
- Nos pertes augmentent rapidement. À ce rythme...
- La ferme.
Ladra voyait parfaitement ce qui se produisait : les écrans de surveillance installés par les sorciers royaux étaient bien suffisants. Leurs soldats tombaient comme des mouches aux quatre coins de la planète, et on voyait à présent l'atmosphère illuminée d'éclairs sur tout le globe.
Les sayens survivants se comptaient sur les doigts d'une main, et pourtant, ils perdaient cette bataille.
Ou du moins l'ennemi devait le penser... Le stock de renforts à leur disposition n'avait pas été à moitié entamé. Des soixante mille combattants qui avaient quitté la terre de leurs ancêtres pour allers porter la guerre aux terriens, près de cinquante mille fixaient toujours le combat à distance, prêts à entrer en jeu à son signal.
Ils étaient les disgraciés, les prudents, les insuffisamment dévoués et les plus mesurés des démons présents. Ce qui n'avaient pas été assez désespérément assoiffés de gloire et de victoires pour postuler aux premiers groupes d'assaut. Ceux-là manquaient en témérité, mais ils n'étaient pas lâches pour autant, et elle pouvait les voir piaffer d'impatience à ses pieds. Toutes les couches de civilisation, tous les mensonges de la société ne parvenaient plus à masquer la soif de sang qui, plus que toute chose, unissait les habitants du Makaï. Ils
sentaient la bataille, Ils savait que le massacre était à portée de main, et la peur du danger s'effaçait devant leur désir de violence. L'écume aux lèvres, les babines retroussés, l'ost démoniaque se préparait à l'assaut.
Et Ladra la sentait elle aussi, cette soif de sang. Ce désir viscéral de tout massacrer sur son passage. Au diable la stratégie ! Quelle que soit cette nouvelle arme déchaînée par les sayens, elle plierait elle aussi face au poids de la horde que Ladra tenait en son pouvoir. Un mot, un seul, et la terre brûlerait !
La régente jeta son manteau de côté et fit monter son ki. C'était agréable, elle sentait le feu intérieur pulser en elle au rythme des battements de son cœur. Sa force montait doucement, à son service, prête à se relâcher à la moindre commande d'un corps dont chaque fibre avait été méticuleusement dressée au cours d'interminables entraînements.
Ladra était la guerrière ultime, maîtresse parfaite de son corps et de son esprit. La rage meurtrière ne l'habitait que parce qu'elle l'avait laissée entrer. Elle voulait tuer et exulter ce faisant. Elle voulait goûter à la chair des sayens.
Et, alors qu'elle ouvrait la bouche pour donner l'ordre d'attaque, elle vacilla sous l'emprise d'un vertige soudain.
Impensable. Elle mit quelques secondes à saisir ce qui se produisait, et déploya son aura dans un accès de rage. Que son corps ose la trahir dans une telle situation !
Et son ki s'arrêta de grandir, bloqué à la moitié de ce qu'elle pouvait normalement fournir. Elle voulut s’exclamer d'indignation, lorsqu'un horrible goût métallique emplit sa bouche. Elle bascula et reprit son équilibre en une seconde. Trop tard. Ladra balaya le reste de la loge des yeux, et y vit ce qu'elle craignait le plus : Les yeux ébahis des plus grandes figures du Makaï, qui n'en revenaient pas de l'avoir vue trembler, elle.
Puis, ses yeux rencontrèrent ceux de Nordis, et la vérité qu'ils y lurent firent éclater la rage de Ladra.
*******
Lorsque les démons avaient commencé leur invasion, ils s'étaient révélés pratiquement inarrêtables sur le plan militaire, mais l'empire s'était préparé à une défaite écrasante. Non, le véritable souci avait été leur sorciers, et plus précisément leur capacité à lire les pensées d'individus contre leur volonté. Le réseau d'espionnage royal avait été violemment démantelé par cette arme inattendue, ce qui n'avait laissé en place qu'une poignée de cellules à peine capables de survivre, sans parler de faire remonter les informations dont ils manquaient cruellement. L'essentiel des services secrets s'étaient fait capturer ou tuer dans les premières semaines de l'invasion, mais pas en vain. Nordis avait pu récupérer quelques précieux éléments de savoir sur la culture et la nature des ressortissants du Makaï. On ne pouvait pas parler là de point faible, mais c'était au moins des informations, et Nordis avait pu élaborer une stratégie. C'était risqué, mais dans une telle situation il était impossible de ne pas remettre une partie de leurs chances de victoire au hasard.
Le plan de Nordis reposait sur trois éléments.
Premièrement : Les démons du Makaï respectaient la force par-dessus tout, en conséquence de quoi leurs chefs ne pouvaient pas plus se permettre de refuser un duel que leurs soldats ne pouvaient se permettre d'en interrompre un. En théorie, si un combattant parvenait à atteindre le chef des démons et à engager le combat contre lui, même au beau milieu de leur armée, la tradition martiale de l'ennemi devrait annuler l'avantage du nombre.
Bien sûr, cette même règle imposait que le chef des armées démoniaques soit toujours immensément fort, bien au-delà de Nordis lui-même.
Deuxièmement, Baphasi désirait ardemment s'épargner une guerre de conquête en obtenant l'abdication en bonne et due forme de Nordis. Elle ne se sentait pas menacée par le roi, et ne voyait apparemment pas d'inconvénient à le garder en vie. Pendant plusieurs mois, on l'avait gardé sous escorte et exposé à toutes les démonstrations de puissance que le Makaï ait pu élaborer. Il avait vu des conclaves de sorcier lever un chaîne de montagnes, des planètes entières ravagées par des combats rituel dont il parvenait à peine à suivre les protagonistes, à des défilés de bêtes sauvages toutes plus monstrueuses les unes que les autres, mais on ne tentait pas de l'impressionner ainsi pour le tuer ensuite.
La conquête de la terre était le bouquet final de cette longue parade d'intimidation, et sa vie ne serait pas menacée avant son terme. Il y avait à parier qu'il se trouverait alors sur la meilleure tribune, et en présence du plus puissant démon disponible lors de l'affrontement.
Troisièmement, et cela avait été une surprise au vu de la dureté de la terre natale des démons, qui les avait rendu si forts et presque insensibles tant à la douleur qu'aux aux variations de température, les roches du Makaï ne présentaient au mieux qu'une radioactivité tout à fait négligeable. En conséquence, les démons du Makaï n'avaient strictement aucune notion de physique particulaire, et ne soupçonnaient pas le moins du monde l'effet catastrophique que les rayonnements de forte intensité avaient sur le métabolisme de toutes les espèces vivantes de l'univers.
Toutes les espèces, sauf celle qui se nourrissait justement des radiations en question, et à laquelle Nordis avait la chance d'appartenir.
Une chance incroyable, en effet. Sans sa constitution surhumaine, il n'aurait pas pu supporter l'incroyable concentration d'éléments radioactifs qui rayonnaient sous la mince couche de peinture de son armure de cérémonie.
Il débordait d'énergie, ses forces décuplées par les mêmes rayonnements qui tuaient à petit feu toute l'assemblée qui pensait le garder à l’œil. L'envie le brûlait d'attaquer maintenant, de faire voler en éclats cet accoutrement ridicule, d'achever les carcasses des gardes silencieux qui n'étaient guère plus mus que par leurs parties robotiques encore fonctionnelles. Mais la résistance réelle des démons aux radiations dont il les bombardait depuis plusieurs heures maintenant lui restait un facteur inconnu. Tant que le gros de l'armée démoniaque ne faisait pas mine de rejoindre le champ de bataille, le temps jouait toujours en sa faveur, mais si l'ost décidait de quitter le satellite avant que le croiseur doré ne le démolisse, alors il devrait accélérer ses plans.
Il y avait une faille dans cette sstratégie, qu'il n'avait pas réussi à combler, cependant. Une fois engagé dans un duel avec Ladra, il ne parviendrait probablement pas à quitter la lune avant impact, et alors...
Taris avait eu le bon goût de ne pas relever ce point de détail.
Le souverain fut sorti de ses pensées par le silence ébahi le la loge et le regard assassin d'une Ladra vacillante dont les narines laissaient couler un flot de sang encore plus rouge que sa peau. Il se prépara à attaquer, mais n'eut que le temps de faire monter son ki à un niveau acceptable avant que celle-ci ne se jette sur lui en hurlant.
Elle ne le tua pas instantanément, et il s'en félicita, mais à travers le fracas de son armure brisée et de la loge qui s'effondrait en ruine sous les cris paniqués des généraux du Makaï, son sens télépathique lui hurlait l'arrivée de la masse inarrêtable du croiseur doré. Et, alors qu'il s'appliquait à dévier les estocades puissantes et cruelles de Ladra, il en vint à se demander qui de son ennemie ou de son ami le tuerait en premier.
*******
Pas un autre ? Il y aurait dû avoir un autre coup pourtant....
C'était tout ce que le cerveau malmené de Callagan parvenait à articuler. Les pensées cohérentes étaient parties depuis longtemps sous les gants gainés d'acier de la souveraine de Noxus. L'armure noire, qui n'avait pas cédé sous les poings du sayen, arrachait à chaque choc un peu plus de conscience à son esprit malmené. Le crâne bourdonnant, abruti par les impacts successifs, il se contentait de se demander pourquoi le coup suivant ne venait pas.
Le sayen ouvrit son œil valide. Alvandra, la démone qui l'avait massacré avec l'aide de sa suite de guerriers, engoncée dans son armure de métal noire, soulevait quelqu'un par la gorge.
Non. C'était elle qui était soulevée, la gorge prise par la poigne d'un autre être encore plus colossal. Il les avait confondu parce que cet autre individu était lui aussi couvert de métal.
Non. Il était fait de métal.
Il y eut un bruit horrible qui passa par miracle les tympans de Callagan, et l'armure d'Alvandra se contracta brutalement, comme un ballon dégonflé qui laissa vite couler un flot de sang visqueux de chacune de ses anfractuosités. Une volée de kikohas, jaillie de quelque part en haut, alla percuter l'homme de métal, qui l'encaissa sans vaciller, tendit la main et riposta avec ce qui lui semblait des obus de plomb incandescent à ses yeux et des kikohas à des sens supérieurs. Quoi qu'il en soit, les attaques eurent raison de ses adversaires. D'un pas mécanique, qui peinait à contraindre chaque articulation, comme si le corps d'acier résistait de toutes ses forces à la volonté de son occupant, la chose qu'était devenu Soman entreprit de massacrer ce qui restait de la vague démoniaque, encaissant sans vaciller des déflagrations qui auraient terrassé Callagan, même au sommet de sa forme.
La vue du sayen s'éclaircissait, à présent, et son sang de guerrier le ramenait à la vie, le pressait de retourner au combat pour soutenir son allié.
Mais il n'avait pas besoin de retourner au combat. L'homme d'acier brûlant écrasait de ses poings rigides vague après vague d'assaillants sans subir la moindre égratignure.
Invincible.
Et de son pas si laborieux, luttant contre l'implacable rigidité de ses articulations rougies plus par la chaleur que le sang, le moine de la grue terrassait ennemi après ennemi. Pour la première fois depuis une éternité, la terre défendait les sayens, et non l'inverse.
*******
La cocotte-minute. Il la connaissait par-cœur, maintenant. Il connaissait chaque anfractuosité sur la surface de métal galvanisé, la tâtait en permanence de ce nouveau corps qui n'en était plus un. L'expérience était terrifiante, au début. Ou plutôt, elle aurait dû l'être, mais son nouvel état (gazeux, il supposait), atténuait grandement la moindre de ses émotions. Il pensait très lentement, il ne paniquait pas et, grâce salvatrice, ne s'ennuyait que très peu. L'était d'hyperactivité frénétique qui caractérisait le cerveau humain à toute heure du jour et de la nuit s'était complètement effacé. Il ne pensait à rien, et pouvait le faire pendant aussi longtemps qu'il le souhaitait. Pas qu'il lui restât le moindre moyen de mesurer le temps, ici. Les pensées ralenties à l’extrême, sans battements de cœur ou respiration pour rythmer l'univers, il était définitivement isolé.
En fait, il en venait à aimer cet auto-cuiseur.
Il y eut une brusque chute de pression, un bruit aigu, et Derek se retrouva catapulté sur le sol terrestre, retourné à son corps de chair. Assourdissant, il sentait son cœur battre à tout rompre dans sa poitrine. Ses sens, tus pendant si longtemps, lui hurlaient un capharnaüm d'informations qu'il réapprenait sur le tas à déchiffrer. Son cerveau tout juste reconstitué triait tout cela avec acharnement, se remettant à toute vitesse du comas passé. Une rage nouvelle le poussait à se reprendre, à se retrouver à travers tout le temps passé.
Bordel, il haïssait cet auto-cuiseur.
Les dents serrées, l'esprit encore hagard, Derek leva les yeux pour rencontrer le regard de sa salvatrice. Jade, de toutes les personnes possibles.
C'était une scène d'apocalypse.
Les cieux étaient zébrés d'éclairs, et le sol tremblait d'explosions puissantes et lointaines. Les colonnes du sanctuaire gisaient, brisées par un combat qui avait, si ce qu'il percevait dans sa vision périphérique était bien des traces de sang, fait plusieurs dizaines de victimes. Un regard aux alentours lui révéla un corps brisé, que sa tenue identifiait comme un moine de la grue.
- Qu'est-ce qui s'est passé ?
Jade ne répondit pas à sa question.
- Pars. Cache-toi jusqu'à la fin du combat, et ne reviens jamais.
- Répond moi ! Qu'est-ce qui se passe ?
Et, comme pour compléter sa phrase, trente des résidents du Makaï les rejoignirent sur le toit du monde. Inutile de questionner leur alignement : leur hostilité était évidente. Blessés, brûlés, saignants de plusieurs dizaines d'entailles chacun, ils ne ressemblaient sûrement que très peu à des humains à l'origine, et la bataille avait achevé d'en faire de véritables monstres.
Il émanait de chacun d'entre eux une force qui les projetait au niveau des super -sayens, et, de facto, bien au-delà de ce que Derek et Jade pourraient leur opposer.
J'aurais dû l'écouter et fuir immédiatement. Maintenant, on va mourir tous les deux. Elle avait tenté de le sauver, et voilà où ils en étaient. Peu importait ce qu'étaient ces créatures, Derek savait reconnaître quand un groupe s'apprêtait à passer à l'attaque. Il ressentait que, partout sur terre, ces même monstres combattaient ce qui restait de la population terrienne (une poignée de combattants, de ce qu'il percevait).
Ne trouvant rien de spirituel à commenter, il se résolut à mourir et se mit en garde, conscient de la futilité de son geste.
Soudain, les démons se figèrent, stupéfaits et terrifiés. Derek ne voyait pas ce qu'il venait de se passer, mais n'en avait aucunement besoin. Jade n'était plus Jade. Ce qui se tenait derrière lui, quelle que soit sa forme, dégageait une aura terrifiante qui le figeait de terreur, au même titre que les démons.
« PARS ! »
L'ordre lui était adressé, et il prit immédiatement ses jambes à son cou sans regarder derrière lui, passant à deux pas de la troupe de démons. Pétrifiés, ils tremblaient comme des feuilles et ne firent pas le moindre geste pour l'intercepter. On ne leur en avait pas donné l'ordre.
Il courut de toutes ses forces, quittant la montagne par grands bonds ou par la danse de l'air quand cela lui raccourcissait le trajet. Ce ne fut que lorsqu'il atteignit la vallée qu'il pensa à Jade et au sort terrible auquel il l'avait laissée. L'ordre avait jusque-là oblitéré toute pensée parasite, remplaçant toute sa volonté par un simple mot.
Tout là-haut, il ne restait plus trace des démons. Plus trace de quoi que ce soit, d'ailleurs, à part cette chose indestructible et impérieuse qui avait remplacé son amie.
*******
Les poings de Ladra étaient un essaim de frelons sur Nordis. Même affaiblie, saignant à mort, ses muqueuses massacrées par la dizaine de grays qu'elle avait absorbé à son insu, la volonté monstrueuse de Ladra contraignait ses organes à se soumettre. Les muscles obéissants se tendaient sans latence, ses sens brouillés écartaient la douleur et lui laissaient percevoir son ennemi malgré leur dysfonctionnement progressif. Ladra mourrait, et pousser son organisme toujours plus loin ne faisait que rapprocher l'échéance.
Mais elle avait déjà renoncé à la vie, reconnaissait Nordis. Elle l'avait fait bien avant que leur duel à tous les deux ne soit engagé. La guerrière n'avait jamais eu l'intention de quitter la terre en vie, et de mourir en tuant Nordis ne serait qu'un moyen inattendu de rejoindre une fin connue d'avance.
Ainsi, elle combattait de toutes ses forces et de toute sa technique contre un roi qui peinait à tenir la distance, même revigoré par l'armure de cérémonie (qui n'était maintenant plus qu'un souvenir : les premiers impact l'avaient faite voler en éclats).
Il perdait.
Pire : il ne parvenait pas à déporter le combat plus haut dans le ciel, Ladra le zonait de ses attaques puissantes et rapides, pressée de le ramener le plus près possible du sol, là où son armée prendrait le relais dût-elle tomber au combat et où Nordis ne pourrait pas s'enfuir dans l'espace.
Elle saignait de partout, mais lui aussi, maintenant. Les ongles et les bagues d'acier avaient déchiré sa peau, les poings démoniaques avaient brisé son exosquelette et il était exposé, sanglant et haletant, face à une démone qui n'en finissait pas de mourir. Et loin, très loin, invisible dans les cieux noirs, le croiseur doré s'approchait inexorablement pour marquer leur fin à tous.
Nordis esquiva une série de kikohas, pour se rendre compte que cela n'avait été qu'une manœuvre destinée à le ramener à distance de charge pour Ladra. Il recroisa les yeux meurtriers de son ennemi, et ne perdit pas de temps à peser le pour et le contre : il usa de ses pouvoirs télékinétiques pour la projeter hors de portée.
Tenir.
Il devait tenir le temps que Taris les atteigne. Tant pis s'il mourrait après, Krios vivrait.
En bas les démons se rassemblaient, les yeux fixés sur leur affrontement. Ils étaient des dizaines de milliers, combien parmi la horde pouvaient le surpasser ? Cent ? Mille ? Dix mille ?
Et Krios vivrait-il, seulement ? Il était encore si jeune... Un namek l'avait-il exécuté ? Ou un démon ? Ou bien un traître ?
Un doigt bagué de fer perça sa joue dans un déchirement brûlant et vint racler contre ses dents. Nordis enroula sa queue autours du bassin de Ladra et martela son visage de coups du poing et du coude jusqu'à ce qu'elle se résolve à lâcher prise. Le temps qu'il y parvienne, la déchirure avait rejoint sa bouche et son œil gauche n'était plus qu'un globe de chair percé et sanglant.
La douleur lui montait à la tête, il n'avait pas en lui la même rage meurtrière que son ennemie.
C'était foutu. Il allait mourir.
Une autre frappe du plat de la main s'infiltra entre deux de ses côtes déjà brisées, il saisit le bras meurtrier avant qu'il ne touche son cœur, et sa queue s'enroula pour immobiliser la seconde main. Elle forçait, gagnait du terrain. Au bout de ses forces et sur le point de s'évanouir, Nordis imprima une dernière fois le visage ensanglanté de Ladra dans son esprit et se prépara à sombrer.
Sa queue lâcha prise devant le bras démoniaque qui parvint à s'extraire, vif comme un serpent. La griffe se dressa, recourbée comme un crochet de boucher souillé du sang royal. Les muqueuses ravagées de Ladra teintaient ses dents de rouge lorsqu'elle asséna le coup fatal, extatique.
Et son bras se figea en l'air. Incapable d'énoncer une pensée cohérente, la guerrière tourna son visage toujours victorieux vers la main qui venait de l'interrompre, et souriait toujours, les babines retroussées, quand Kaïoshin la décapita du tranchant de la main.
La face figée chuta lentement vers le sol lunaire, les démons arrêtés dans leur charge, aucun n'osant prendre l'initiative d'attaquer celui qui venait d'abattre si nonchalamment leur meilleure guerrière. Sévère, le dieu saisit Nordis par le visage avant qu'il ne rejoigne Ladra et, après d'interminables secondes d'hésitation, libéra son pouvoir guérisseur.
Nordis resta conscient juste assez longtemps pour contempler l'expression affligée de tristesse et de regret du kaïoshin. Namek.
« Je suis désolé. », voulut-il articuler. Autant qu'un dieu, un roi avait des impératifs auxquels il ne pouvait se soustraire. Il aurait voulu expliquer, que le dieu comprenne la terreur que les dragon balls avaient insufflé dans son peuple, de l'horrible et croissant sentiment que leur roi ne pouvait pas les protéger, mais la fatigue le rattrapa en premier. Il ferma les yeux, et ne vit jamais l'endroit où Kaïoshin l'emmena, à l’abri de la horde démoniaque qui, remise du choc, fondait déjà sur eux.
Les cinquante mille héros de Makaï, sous leurs bannières de guerre, ne purent que crier de rage à la face de cet affront . Débordants de fureur, survoltés et pressés d'en découdre, les seigneurs guerriers surpassèrent à la foi leur prudence, et leurs griefs en quelques minutes de discussion hurlée. Ils chargeraient tous ensemble, et peu importe alors l'assassinat de leur général. La terre plierait sous le poids de leur armée, qu'il y ait ou non un membre de la lignée royale à leur tête.
Les cris retentissaient à l'unisson, et chaque seigneur de guerre prit la tête de sa légion.
Ils étaient sur le point de quitter le sol lunaire lorsque le croiseur doré acheva sa course droit sur leur position, et leur constitution surhumaine ne leur épargna absolument pas le sort qu'un impact de cent millions de terrajoules aurait réservé à n'importe quel autre mortel pris dans le rayon d'explosion.
Taris, confortablement installé dans son trône de commande, ne ressentit pas la moindre secousse lorsqu'il pulvérisa l'armée du Makaï.
*******
Impossible d'esquiver. Elle voyait l'attaque arriver, évidente, grossière, mais elle ne pourrait pas y échapper. Elle se faisait malmener depuis le début. D'abord par cette sayenne qui avait tenté de détruire son armée au début du combat, puis par un deuxième qui l'avait rejointe.
Deux sayens, et pas des moindres. Ils avaient accès à la dernière transformation de leur espèce, même s'ils étaient loin de la maîtriser à la perfection. La plus puissante race de guerriers de l'univers. C'était un combat perdu d'avance, mais elle avait la graine, elle avait l'entraînement du meilleur maître en arts martiaux qui soit, elle était...
Qui, déjà ?
Baphasi. C'était son nom. La reine du Makaï, et bientôt de l'univers entier !
« Ils vont te tuer. Tu n'as aucune chance sans nous. » La graine. D'abord silencieuse, elle parlait de plus en plus fort dans sa tête, au fur et à mesure qu'elle y puisait toujours plus d'énergie. Cela avait été son plan depuis le départ, et sa seule chance de se propulser au niveau des sayens. Que cette source d'énergie apparemment infinie ait un coût, elle s'y était attendue. Qu'elle ait une forme de conscience, là aussi, était plus ou moins prévisible. Mais c'était plus qu'une seule conscience qui s'était révélée lorsqu'elle avait puisé dans les réserves de la graine. C'en était un millier.
Un essaim impossible de voix haineuses et malveillantes qui empestaient le vice et l'ambition. C'était les consciences les plus retorses et les plus abominables qui aient jamais vu le jour dans l'univers. C'étaient là des esprits si exempts de la moindre étincelle d'amour qu'ils s'étaient vus, à leur mort, refusés même par l'enfer. Leur noirceur infinie était retournée à la graine, à l'essence maléfique de l'univers.
C'étaient les âmes des makaïoshins, rejetées par le paradis et par l'enfer, elles s'étaient condensées dans la graine qui leur avait donné naissance.
« Prend notre force ou tu vas mourir ! » Elle avait survécu contre deux sayens, avait puisé dans la graine autant qu'elle s'en était sentie capable. En l'état, elle savait pouvoir faire le chemin arrière, elle savait que les voix finiraient par partir, qu'elle redeviendrait un jour la femme qui avait, quelques jours auparavant, serti sa couronne de l'objet maudit.
Mais le troisième sayen avait tout changé. Il y en avait eu deux, puis ils avaient effectué une danse ridicule pour donner un troisième combattant monstrueusement fort. Une fusion. Khaine lui avait pourtant assuré que cet art était perdu...
De manière prévisible, il s'était avéré immensément plus fort que les deux autres, et la combinaison de leurs pouvoir avait allègrement surpassé tout ce qu'elle parvenait à extraire de la graine. De trois directions différentes, les kamehamehas fusaient vers Baphasi, immobile et ensanglantée. L'esprit rendu hagard tant par l'influence néfaste de la graine que par le lynchage en règle qu'elle subissait depuis une demie heure, elle luttait intérieurement contre les voix qui, de plus en plus pressantes, l'incitaient à reprendre le combat, à descendre toujours plus profond dans ces sables mouvants.
Le visage de Panka s'imposait dans son esprit, comme une ultime barrière entre ces monstres et sa santé mentale. Mais quel bien cela lui ferait-il une fois que les kikohas l'auraient rejointe pour pulvériser son corps ? Si Baphasi perdait, sa fille était aussi condamnée.
Le temps ralentissait à l'approche de la mort. Ou bien peut-être était-ce les makaïoshins qui l'influençaient ? Leurs voix se faisaient plus pressantes, plus excitées, plus impérieuses.
« Vas-y, accepte ou bien tu ne la sauveras jamais ! » Et c'était vrai. La manne était juste là. Si proche...
Elle tendit la main.
*******
Elle tenait. C'était absurde. Elle tenait contre trois super-sayens de niveau trois !
Zakriel força autant qu'il le pouvait, tout comme Gotenks et Kyra, mais c'était inutile. Elle survivait, aussi absurde que cela puisse paraître.
Baphasi devenait de plus en plus puissante. Au début, Kyra la dominait allègrement. Puis, il avait fallu qu'il la rejoigne. Ils l'avaient enchaîné sans efforts jusqu'à ce que sa force augmente encore brutalement, et que l'aide de Trunks et Goten devienne indispensable.
Pire : aucune de leurs attaques ne semblait avoir le moindre effet à long terme. Les os brisés se ressoudaient, les organes broyés redevenaient opérationnels en une poignée de secondes, et il était certain de lui avoir arraché au moins un doigt, qui était soudainement réapparu au milieu du combat.
À côté de ça, Boo c'était de la rigolade. Lui au moins il se fatiguait au lieu de se renforcer.
Gotenks pouvait encore tenir trois minutes avant de disparaître. Et après ? Tout en appuyant son attaque énergétique qu'il savait inutile, l'héritier des Briefs appréciait la situation stratégique. L'armée démoniaque avait presque disparu. Plus la moindre trace d'énergie sur la lune, et les signatures des démons chutaient à toute vitesse aux quatre coins du globe. Cela avait sûrement un lien avec cette tempête d'éclairs surnaturelle qui se déchaînait depuis plusieurs minutes, mais il investiguerait plus tard sur ce sujet.
Pour l'instant, une seule chose comptait : Boo, Oob, Gohan et Goujin allaient devenir disponibles pour gérer la menace principale. Tout en maudissant intérieurement leur décision de sacrifier le séjour terrestre de Pan pour l'anniversaire de Goujin, il sourit intérieurement. Avec ces quatre génies du combat, ils trouveraient forcément un moyen de venir à bout de la reine des démons.
C'était gagné. Plus que quelques minutes à tenir, et ils allaient mettre un terme à cette histoire une bonne fois pour toutes.
Coincée dans sa gangue de ki en explosion, elle survivait peut-être, mais elle n'avait aucune échappatoire. Et s'il y avait bien une chose qu'ils puissent se permettre, c'était de dépenser du ki sans compter.
Et puis tout à coup, ils ne furent plus que deux à maintenir leur attaque. Les deux vagues d'énergie, toutes incommensurables qu'elles soient, s'écrasaient sur la reine du Makaï comme des vagues sur une falaise.
Elle était immobile, mais plus immobilisée.
Et encore plus puissante. Toujours plus puissante.
Terrifié, Zakriel sondait en vain la surface du globe, à la recherche de Gotenks. Mais le sayen fusionné n'était nulle part, tout comme Oob, Gohan et tous les maîtres décédés.
*******
Guz Hécatoris de Noxus, troisième fils de Vorz Hécatoris et de Sarminia Jucatoris, grand commandant de la troisième division armée de la surface. Un héros, comme Noxus en avait eu grand besoin dans ses années de honte. Il avait trente et un ans lorsqu'il avait participé à sa première chasse au dragon, soixante deux lorsqu'il avait combattu les tribus unifiées par Ellac Czapas et subi la première défaite militaire de sa jeune vie. Son honneur sauvé par ses impressionnantes performances lors de la bataille de Megido, où il avait fait prisonnier l'un des soldats du Kaïoshinkaï, il avait tout naturellement été sélectionné pour diriger l'une des divisions de l'armée noxienne, sur terre.
Cela avait été un grand honneur, et ses frères et sœur n'avaient pas pu cacher leur jalousie lorsqu'il avait défilé en tête du millier de combattants dont il avait la charge. Fier, dans l'armure ouvragée de ses ancêtres, il avait attiré un regard admiratif de la reine en personne. Il fallait dire qu'il présentait bien, surtout selon les standards du Makaï. Sa carrure, quoi qu'imposante, n'accusait pas le grotesque comme cela arrivait trop souvent, même aux lignées nobles. En fait, culminant à un mètre quatre vingt-quinze, il était le plus petit de sa fratrie, mais se retrouvait dans cette tranche de corpulence où les proportions étaient les plus harmonieuses. Son visage, lui aussi, était exempt de tout détail monstrueux. Pas de canines protubérantes, pas d'yeux globuleux ou excédentaires, mais quatre cornes larges et puissantes, pas exagérément longues, qui venaient prolonger la ligne virile de sa mâchoire. Il était, sans que l'orgueil s'en mêle, un beau jeune homme promis à un brillant avenir. Et quand l'orgueil s'en mêlait, l'avenir devenait radieux.
Les Trokatoris, les Novroj, les Terratosien... Toutes les familles dominantes de Noxus avaient éclaté sous la pression des événements récents. Leurs champions étaient tombés face à la magie noire des makaïoshins ou un quelconque champion de la surface. La plupart avait vu un de leurs membres capturé lors de l'attaque de Czapas, mais pas les Hécatoris. La lignée avait perdu deux héros au combat contre les tribus, mais pas subi l'humiliation des fers, et seuls les Karène leur faisaient encore de l'ombre.
Qu'Alvandra subisse le moindre revers au cours de cet affrontement critique, que Guz parvienne à se distinguer, et les tables seraient tournées. Noxus était à la tête de la première vague, les plus loyaux des serviteurs de la citadelle ! Personne ne pouvait leur refuser ce titre-là, et il serait tout à fait normal de les récompenser pour leur bravoure. Par exemple, avec la régence du monde d'au-dessus, ou alors... La princesse Panka, quoi qu'encore un peu jeune, était largement en âge de prendre un premier concubin (qui serait sans le moindre doute décisif, voire unique, car elle ne paraissait pas partager les appétits de sa mère en la matière). Et Alvandra Karène, malgré sa position restait une femme. Une femme repoussante, qui plus est.
Retourner dans la famille royale... C'était peut-être la seule ombre sur la réputation des Hécatoris qu'aucune goutte de sang royal ne se soit mêlé au leur depuis cinq générations.
Oui, il n'avait qu''à remporter cette bataille, et il deviendrait un choix logique -non, évident!- pour la belle Panka. Il se figurait déjà, patriarche puissant, siégeant sur une Noxus plus grande que jamais, métropole opulente où convergeraient les richesses du monde d'au-dessus, tandis que sa femme assumerait la lourde tâche de diriger l'empire unifié. À ses côtés, une ribambelle de rejetons, tous doués par le sang royal, qui écraseraient sans efforts toute rébellion et toute armée qui en voudrait à son sang. Ils seraient les nouveaux sayens ! La lignée royale des Hécatoris ! Et ils célébreraient le nom de Guz le fondateur jusqu'à la fin des temps !
Il avait mené son corps d'armée le sourire aux lèvres, féroce et enjoué, et avait vaincu sans efforts, mais en grand spectacle, le guerrier fusionné du Kaïoshinkaï qui avait été leur première cible. Facile. Glorieux. Il s'était senti pousser des ailes.
Un éclair dans le ciel. Doré. Le temps de se mettre en garde, la lumière était au-dessus de lui et de son armée. Le temps de se repositionner, et le kamehameha était déjà parti, trop large et rapide pour qu'il l'esquive. Et Son Goujin était parti exterminer une autre vague, sans même contempler son œuvre.
La mère de Guz lui avait confié une amulette avant son départ. Une caresse sur la joue, un sourire mélancolique, et elle lui avait passé la pierre grave au cou, sans un mot.
Il ne l'avait pas retirée un instant, sentant faiblement que l'objet contenait plus qu'une valeur affective et un enchantement basique, insignifiant au niveau de puissance auquel il combattrait. Sarminia Jucatoris ne se procurerait pas la même camelote que les autres pères et mères de soldats : elle avait acheté cet objet au nécromancien en personne, afin que son cadet bien-aimé revienne de la terre sain et sauf.
Mais même la magie du septième mage avait ses limites. Le super-sayen avait écrasé le bouclier invisible. La colonne vertébrale brisée juste en-dessous de la clavicule, Guz ne trouvait pas la force de soulever sa poitrine pour prendre une dernière inspiration. Il n'aurait de toute façon trouvé que du sang visqueux et des côtes broyées en lieu d'air. Le choc, amorti par le cadeau maternel, lui avait offert dix-sept minutes d'agonie muette dont chaque instant lui semblait une année. Un autre aurait cédé face à la douleur, mais pas Guz. Jusqu'au bout, il tint bon. Concentré, alors même qu'il sentait ses pensées s'assombrir et ses neurones mourir un à un, il ne cessa d'espérer l'arrivée d'un soigneur. D'abord pour prendre sa revanche, puis juste pour vivre une minute de plus. Pour être une déception pour ses deux parents, pour n'avoir rien d'autre à ramener chez lui que sa propre vie. Mais au moins serait-il vivant !
La lutte prit fin quelques minutes avant l'arrivée de ses sauveurs potentiels. Quand l'amulette dévoila sa véritable fonction : celle d'une balise qui facilita l'arrivée du septième mage sur le sol terrien, Guz avait rendu l'âme, et pas plus d'un démon sur mille respirait encore.
Ignorant le regard horrifié que sa fille jetait aux cadavres répandus sur le sol, parmi lesquels celui de Guz était le seul reconnaissable, Abel sondait le champ de bataille avec la bonne humeur et l'enthousiasme qui le caractérisaient en situation de crise. Immortel, il ne se souciait pas le moins du monde du destin de ceux qui l'entouraient. Panka, encore sous le choc des corps éparpillés et de l'expression de souffrance extrême sur le visage de Guz, fut prise d’une violente montée de haine envers son père. Inutile. Pas ici, pas maintenant.
Elle avait déjà échoué trop de fois à imprimer un peu d'empathie chez cet homme à l'affection horriblement sélective. Il avait à chaque fois traité cela comme un caprice d'enfant. Brisé par les millénaires. La perspective de devenir un jour elle aussi une cynique l'étouffait d'angoisse toutes les nuits. Panka était immortelle, elle aussi. Que deviendrait son souci pour autrui après avoir témoigné d'un millier de scènes comme celle qui se déroulait sous ses yeux ?
Une attaque. Son flot de pensée fut coupé net, et elle matérialisa l'un des sceaux d'interdiction autours d'elle et de son père. Une autre barrière translucide, levée par Abel un instant plus tôt brilla dans son champ de vision avant que le sceau ne les englobe.
- Bons réflexes ! Mais on ne va pas aller bien loin en restant cachés comme ça.
- C'était quoi ce truc !!?
- J'ai ma petite idée, mais il va falloir que je vérifie. Tu nous ouvres ?
Tellement tranquille... Tellement joueur... Leur armée avait été massacrée, Panka le sentait. Mais Abel Alazrhad, septième mage, s'en foutait royalement. Il comptait vaincre les terriens tout seul, c'était le plan depuis le début. L'armée levée par sa fille n'avait jamais compté à ses yeux.
Enfoiré...
Elle révoqua le sceau d'interdiction, et un torrent d'éclairs vint frapper le dôme placé par son père. Au-dessus d'eux, on devinait le nuage électrique loin dans le ciel, qui leur destinait cette attaque impossible et continue. Quelle puissance !
Et soudain, elle sentit ce qui se déchaînait à l'autre bout du monde. La masse de ténèbres physiques, palpables, qui engloutissait toute une hémisphère. Un ki qui émanait d'un mal absolu. Et au centre...
Abel gardait les yeux fixés vers le ciel et leur impossible adversaire.
- On s'occupera d'elle après ! Des clairvoyants, des foutus clairvoyants ! Et pas qu'un seul en plus ! Trois, quatre... Non, cinq ! Cinq clairvoyants !
- Il y en a cinq des trucs comme ça ?
- Oui. Tu peux maintenir la barrière pendant que je le disperse ?
Le nuage de foudre s'était fait plus insistant, et, devant le vacarme, ils avaient tous les deux opté pour la télépathie. Malgré le tonnerre, Panka distingua clairement les syllabes anciennes hurlées par Abel alors qu'elle luttait pour maintenir une protection valide quelques secondes de plus. Il y eut un claquement, une puissante colonne de vent ascendante, et un frisson qui la traversa, puis, plus rien. Les nuages, là-haut, accusaient une large trouée.
L'aura du clairvoyant était encore distinguable, mais beaucoup plus haut dans le ciel. Très diffuse.
- Il a son compte pour l'instant. Il faudra penser à l'achever quand on aura le temps.
- Et les quatre autres ?
- Mois forts, moins dangereux. Et ils sont une forme condensée, sauf un. Un coup de flammes noires et c'est réglé. Oh, atten.... !!!
Cette fois-ci, la barrière d'Abel s'effondra à l'impact du kikoha et le sceau dispersa une vague d'énergie qui les aurait sûrement envoyés valser aux quatre vents.
Un super-sayen. Aucune hésitation n'était plus possible devant ce colosse d'énergie brute et parfaitement canalisée. Fort n'était pas un mot adapté pour le désigner. Il était incommensurablement fort, bien au-delà de ce qu'aucune créature du Makaï, même Baphasi elle-même n'avait pu atteindre un millième de ceci. Et quelle pureté, aussi, quelle innocence ! Malgré son corps taillé pour le combat, malgré son kimono (à peine déchiré ça et là), il n'était pas un guerrier, c'était évident. C'était un protecteur, qui défendait son foyer contre une agression injustifiée.
Sous son aura blanche, Son Gohan toisait les deux nécromanciens, prêt à frapper à nouveau. Mais une chose le retint. Dans les yeux de Panka, dans ce qu'il percevait de son ki, si létal et chaotique, il ne voyait pas le vice et la haine qui avait caractérisé tous les démons du Makaï. À vrai dire, il y reconnaissait un peu de cette innocence déterminée qu'il avait si souvent pu contempler dans les yeux de sa fille et qu'elle avait hérité, il le savait, de lui-même et de son père avant lui.
Pour cette raison, il commit une erreur. En laissant une chance de reddition à Panka, il laissa en vie une menace qu'il aurait dû taire immédiatement.
- Votre armée a perdu. Rentrez chez vous et sauvez vos vies, vous n'avez rien à faire ici.
Panka ne savait pas quoi dire, elle voulut ouvrir la bouche, mais, comme trop souvent son père l'interrompit. Il avait, et le sayen n'avait pas pu s'en rendre compte, prononcé depuis l'attaque énergétique, une incantation à des fréquences inaudibles pour la plupart des mortels.
- Non, c'est vous qui n'avez rien à faire ici.
Et juste comme ça, Gohan disparut de son champ de vision, tout comme une foule d'autres puissances similaires sur toute la terre.
- Sorciers de pacotille qui croient qu'on peut invoquer les morts comme ça...
Il fallait décamper, et en vitesse. Pas question de se faire surprendre une fois de plus. Le stock de combattants de la Citadelle était presque épuisé et, même s'il ne restait pas non plus beaucoup de guerriers terriens, le surnombre jouait dans le camp des défenseurs. Un feu de forêt, à quelques centaines de mètres en aval, fournissait le couvert idéal aux deux sorciers.
Sous les frondaisons ardentes, pris dans une chaleur étouffante, une fumée lourde et les effondrements intempestifs des troncs calcinés, ils accédaient enfin à une forme de tranquillité.
C'était déroutant, de voir la nature s'effondrer là où eux deux, cherchaient refuge. Les flammes s'écartaient autours d'eux, et les températures trop extrêmes même pour leurs corps surhumains étaient atténuées d'un sortilège mineur.
L'armada mystérieusement disparue, il ne restait guère plus que Baphasi pour s'opposer aux invincibles terriens, mais quelle puissance elle dégageait ! Ils étaient tous là, tous les combattants encore valides de la terre avaient abandonné la traque des démons survivants et s'étaient concentrés sur l'affrontement avec la reine. Quatre. Et à quatre, ils étaient débordés, cela se sentait, se voyait même à la forme chaotique que prenait le ki de la graine, qui avait complètement absorbé celui de sa porteuse, à présent.
Les clairvoyants aussi convergeaient vers l'affrontement, à leur vitesse. Il semblait qu'ils avaient disparu des préoccupations terriennes. Comment leur en vouloir ? Allergique à l'inactivité, Abel était en train de se greffer sur le système de communications terrien, et partageait gracieusement avec elle le flux d'information qu'il parvint, inévitablement, à déchiffrer. Un dieu mineur assurait un puissant réseau de communications télépathiques entre tous les défenseurs, ce qui expliquait entre autres l'excellente coordination observée depuis leur arrivée sur le terrain. Mais il y avait forcément autre chose, qui expliquerait l'arrivée si soudaine du super-sayen de tout à l'heure.
Un Kaïoshin. Il observait le champ de bataille depuis quelque part, en sécurité. Elle n'eut pas le temps de saisir ce que cela impliquait, le ki colossal et hélas trop familier de Gohan (vivant, cette fois) éclatait au-dessus d'elle, immédiatement suivi d'une voix, âgée, qui éclata dans le réseau télépathique.
« Ils sont juste en-dessous de toi, vas-y. »
Panka était une combattante puissante, mais la marge qui la séparait de Son Gohan était tout simplement trop grande. Il ne leur laissa pas la moindre chance, cette fois-ci. Elle n'eut pas le temps de manifester les sceaux. Son monde vira au blanc aveuglant, puis au noir complet.
*******
Il était terrifiant. Zakriel, Boo et Kyra étaient poussés dans leurs dernières limites face à la reine des démons, et se limitaient à survivre, en attendant l'arrivée providentielle d'un Son Gohan qui saurait, il le fallait, trouver la faille dans la défense de leur ennemie. Mais Son Goujin, lui...
Ils reprenaient leur souffle, se partageaient des quarts de Senzus qui remontaient à peine leurs réserves, et lui... Plusieurs minutes qu'il bataillait, seul, contre ce monstre. Pas qu'ils ne l'aient abandonné, pas qu'ils soient significativement moins puissant que le jeune sayen, c'est juste que, comparés à lui, ils étaient...
Inutiles.
Pire, gênants.
Comment leur en vouloir ? Comment comprendre l'obstination inhumaine dont faisait preuve Son Goujin contre cet adversaire indestructible ?
Elle avait muté, depuis le début du combat. Méconnaissable, la femme que Kyra avait manqué de décapiter il y a une heure s'était renforcée à mesure que la graine (et c'était bien une graine, plus d'erreur possible là-dessus) lui insufflait son énergie. Premièrement, elle avait grandi. Elle était déjà grande, au début, mais elle dépassait maintenant les deux mètres trente, sans compter la chevelure.
C'était la partie la plus évidente et terrifiante de sa métamorphose. Partout sur son corps, la peau s'était faite dure, épaisse et rêche comme de l'écorce. Elle avait noirci, aussi. Prenant la teinte sombre et satinée de la graine, elle avait perdu son rouge profond que ne se voyait désormais plus que dans de trop rares crevasses, causée par des chocs passés. Il était maintenant impossible de l'atteindre, Zakriel en était convaincu. Même s'ils parvenaient à rassembler une autre attaque comme le triple kamehameha de tout à l'heure, il était certain que cela ricocherait, inutile, sur la nouvelle carapace de la reine.
De la graine, on voyait pousser plusieurs germes qui allaient, sans exception, se ficher profondément dans le crâne de leur porteuse. La couronne qui la maintenait était tombée depuis longtemps, maintenant, mais les racines enserraient la tête de Baphasi. Son regard hagard détonnait avec les prouesses martiales dont elle faisait preuve. Plus aucune flamme dans ses yeux morts, mais le corps végétal débordait de force et de vivacité.
Mais c'étaient bien les cheveux qui attiraient le regard, qui rendaient terriblement évidents que ce qu'ils affrontaient n'avait plus rien à voir avec la reine du Makaï, et qu'ils ne l'appelaient encore Baphasi que parce que les mots leur manquaient pour désigner cette créature. La femme s'était faite plante, ses cheveux avaient fusionné pour donner une myriade de branches, qui, s'évasant progressivement, avaient bourgeonné pour la couronner d'une canopée de feuilles rouges. Le bosquet s'ébranlait à chaque coup, laissant tomber des touffes de feuilles pointues et rigides comme du verre, mais il en poussait toujours plus, par poignées, et les brindilles reprenaient de plus belle. L'arborescence reprenait également entre ses épaules, et la tunique accusait déjà trois déchirures qui laissaient poindre toujours plus de végétation. À en juger par la masse de bois tordue qui s'accumulait, faisait pression à travers ses vêtements, tout son dos subirait bientôt le même sort.
Elle encaissait la plupart des attaques de Son Goujin, ne ripostant qu'à coup sur trois. Mais ces frappes, alors... Tellement rapides, tellement puissantes... Il s'agissait de longs arcs de la jambe, suivis d'une racine qui claquait derrière, comme un énorme fouet de deux mètres, fusionné à son mollet, ou bien d'une frappe de la main, où des dizaines de branches qui la hérissaient faisaient l'effet d'autant de griffes cruelles et terriblement dures.
Mais Goujin voyait tout venir. Il esquivait, ménageait ses réserves, et frappait encore et encore, sans laisser la moindre pause à cette créature.
S'il n'avait pas une meilleure compréhension de la situation, Zakriel aurait pu jurer qu'il allait gagner... À sa droite, Boo restait pensif, concentré sur autre chose. Il leva la tête, grave, et sa voix résonna claire dans leur tête, même dans le vacarme du combat.
« Son Gohan a besoin d'aide. Tout de suite. J'y vais avec Goujin. Vous la retenez, mais pas de bêtises. »
Le djinn croisa le regard du jeune sayen et, après une courte hésitation, ils quittèrent à toute vitesse, laissant les deux plus vulnérables membres de leur équipe contre l'ennemi.
*******
- Mon dieu, qu'est-ce que c'est que ça ?
Il y avait quelque chose, là-bas. Quelque chose d'horrible. Unio ne s'était jamais rendu compte à quel point l'univers était passif, paisible, bon et accueillant. Certes, il avait parfois un soubresaut de dureté, de violence aveugle qui allait frapper dans le vide, prenant une poignée de vie dans un feu de forêts, un hiver cruel ou un tremblement de terre, certes les habitants de ce monde étaient parfois cruels, parfois vicieux, mais...
Mais on pouvait vivre, bon sang. On pouvait se tenir debout devant autrui sans craindre pour sa vie, sans lutter contre l'envie de l'égorger. La concorde primait toujours sur le chaos.
Ce qui se déployait sur terre, c'était... C'était l'inverse de tout ça.
C'était le mal incarné.
Psychée et l'immortel se regardaient, concernés.
- Il va vraiment falloir qu'on y aille.
- Hum. Unio, prépare toi. On va aider Abel.
Le namek resta immobile, attendant vainement que les deux anciens désamorcent la plaisanterie. Mais il n'y avait pas de plaisanterie. Ils allaient vraiment venir sur terre et se confronter à
ça.
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Un vrai combat. Lui, Abel Alazrhad, au maximum de sa forme, contre un ennemi à sa hauteur. Cela faisait tellement longtemps, depuis... Depuis la chute, en fait. Depuis son emprisonnement. Un petit pic de rage le remit dans le rythme du combat.
Le mouvement. Pas la vitesse, c'était le mouvement qui comptait. La capacité à briser sa vitesse pour agir et réagir, pour casser le rythme du combat. C'était l'une des premières leçons d'arts martiaux qu'il ait reçu, et il l'avait appliquée religieusement. La plupart de ses ennemis étaient plus rapides que lui, c'était vrai. Mais, mais, avec les bonnes techniques de transe martiale, il pouvait aiguiser sa réactivité à des niveaux inimaginables, et surpasser le mouvement de manipulateurs de ki bien plus forts.
Son Gohan était incomparablement plus fort que lui, certes. Il allait aussi beaucoup plus vite, mais au niveau du mouvement...
La pluie de météores intangibles zébra le ciel sur leur position, formant un labyrinthe mortel, apparemment insoluble, mais le sayen naviguait entre les traits sans qu'un seul d'entre eux le touche. Dissimulé plusieurs mètres sous la roche terrestre, le nécromancien usa de ses quelques cercles d'incantation restants pour enchaîner sur un second barrage de lances enflammées. Toujours forcer le mouvement de l'ennemi, l'occuper. Peu importe l'écart de puissance si Son Gohan ne parvenait pas à frapper !
Les lances n'auraient probablement pas causé de dommages à un individu de ce calibre, les météores l'auraient secoué, pas plus ; mais le sayen n'avait jamais eu affaire à un sorcier de combat. Méfiant, il esquivait absolument tout, quitte à se faire mener en bateau. Son entraînement ne lui permettait pas de distinguer un leurre d'une frappe mortelle, il parvenait seulement à détecter les attaques magiques à la distorsion qu'elles provoquaient. Pour ce qui était des attaques de zone, il les dispersait d'un puissant kiaï.
Ça faisait le jeu du nécromancien : l'ennemi dépensait beaucoup plus d'énergie que lui, et tant qu'il parvenait à ne rien encaisser, il devrait bien gagner à un moment. Plus problématiques étaient les rares moments où Gohan parvenait à le débusquer du repli dimensionnel, de la cachette ou de la métamorphose qui le dissimulait l'essentiel du combat. Encaisser du ki, en magie, était une impasse théorique : on ne pouvait pas installer de protection vraiment efficaces en un temps raisonnable. La plupart des murailles à la disposition du nécromancien avaient été pulvérisées dans les premières minutes du combat, et son stock d'invocations se réduisait dangereusement. Les sceaux d'interdiction démoniaques lui auraient bien servi, mais ces artefacts avaient sans le moindre doute été façonnés par Khaine et le septième mage était loin d'avoir le talent requis pour imiter ce tour de force. Le recours qu'il avait trouvé était l'amour de son adversaire pour la planète sur laquelle ils combattaient. Pour exhumer la cellule de pierre dans laquelle Abel se cachait actuellement, il faudrait broyer une quantité phénoménale de roche et, incapable de le localiser précisément, Gohan ne pouvait pas tenter d'attaque de zone sans endommager irrémédiablement la planète.
Tant qu'il ne perdait pas le mouvement, c'était dans la poche.
« Juste là, Gohan ! »
Maudits Kaïoshins.
Et le kikoha, parfaitement placé, défonça la gangue de roche jusqu'à la cache où Abel s'était trouvé une seconde auparavant. Propulsé en surface en urgence, il invoqua instinctivement la troisième et dernière porte du mange-lumière. À l'instar de ses deux sœurs, elle se manifestait sous la forme d'une muraille de métal blanc, haute de cinq mètres, large de sept et épaisse de trois. Au centre, une figure démoniaque et grimaçante ouvrait grand sa gueule. Le kikoha de Gohan ne se fit pas attendre mais, au lieu de se faire avaler et recracher comme cela avait été le cas des deux premières fois, il continua à s'engouffrer dans la cavité béante, soutenu par son envoyeur.
La porte pouvait encaisser des quantités de ki phénoménales, mais Abel sut instantanément qu'elle avait trouvé sa limite. Il parvint à sortir du rayon de l'impact juste avant qu'elle n'explose.
Une de ses meilleurs invocations qui partait en fumée, il faudrait des heures avant qu'elle ne se régénère. Et il était en surface, précisément ce qu'il tentait d'éviter depuis le début.
Un portail s'ouvrit, à quelques dizaines de mètres, et il reconnut immédiatement les deux personnes qui en sortirent.
Le combat avait assez duré, c'était l'heure de passer à l'attaque.
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Le mouvement.
Le mage était incroyablement réactif, pour sa puissance, et Gohan n'avait rencontré que des mauvaises surprises depuis le début de l'affrontement. Confronté à l'immense panel technique de son ennemi, à l’infinité de méthode qu'il employait pour dévier toutes les attaques, à ses frappes insidieuses, dont il n'osait pas tester la véritable puissance, Gohan n'avait conservé qu'un seul avantage, qu'une seule botte secrète qu'il puisse déployer pour porter le coup fatal.
Son mouvement.
Depuis le début de l'affrontement, il réagissait un peu moins vite que possible, esquivait de justesse des projectiles dont il avait pourtant deviné a trajectoire avant même qu'ils ne soient conjurés. Il avait gardé sa vitesse dans son fourreau, prête à être dégainée pour le coup fatal.
Et le coup fatal était venu. Deux alliés –Non, trois. Mais le dernier était faible, il se cachait.- surgis de nulle part à la rescousse venaient de se jeter sur lui, de trois angles différents. Des sorciers. Il fallait tout esquiver, et tous les vaincre en même temps.
Frapper, de toutes ses forces, trois ennemis lents mais dotés d'une réactivité inhumaine. Il fallait le faire simultanément ou ils y survivraient à coup sûr.
Ce n'était pas un combat, c'était une danse dont la chorégraphie ne tolérerait pas le moindre écart, sous peine de mort. Et il ne connaissait qu'un seul de ses trois cavaliers...
Pour la première fois depuis une éternité, Son Gohan se souvint parfaitement de ce qu'il avait ressenti contre Cell. Pour la première fois depuis qu'il avait sauvé le monde, il se sentait vraiment proche de son père.
Il dégaina son mouvement, et les forces combinées de Psychée, d'Abel et de l'immortel de Pandora purent contempler, spectatrices, la danse du plus puissant des sayens.
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Elle ne bougeait plus. Enfin, elle ne bougeait plus vers eux. Ses jambes avaient fusionné, la masse de racines s'était faite immense, plus de trente mètres en contrebas, le plus long des germes venait gratter la terre. Ils étaient animés d'une pulsation lente et bestiale, comme un ours endormi. Zakriel n'avait aucune envie de le réveiller.
Au-dessus, les branches avaient grandi de la même manière, et le corps de la reine paraissait minuscule, un détail dans le nouvel être végétal. Détail qui ne tarderait pas à disparaître, avec la transformation.
- Il ne faut pas que les racines touchent le sol.
Une clairvoyante. Sahane, s'il se souvenait correctement. Elle étaient arrivée, et il ne l'avait même pas sentie. Était-ce sa discrétion extrême ou l'aura toxique de la graine qui avait atténué ses sens ? Il en percevait presque plus rien, tant ce nuage noir toxique obscurcissait tous les kis. Réduit à se servir de ses yeux, il observait la monstruosité qui le toisait, immobile et grandissante.
À la réflexion, la laisser s'enraciner semblait bien une mauvaise idée.
- Comment on l'en empêche, selon vous ? Kyra et moi, on va se faire massacrer si on l'approche.
- Je peux la combattre, je crois. Les autres clairvoyants vont arriver. À vous tous, vous trouverez une faille.
Zakriel dévisagea la petite femme courbée et bien trop âgée pour supporter un combat. Il ne doutait pas qu'elle cachait une force surprenante dans ce corps frêle, mais de là à la voir affronter Baphasi... Puis, il vit les autres clairvoyants, ce golem de métal surchauffé, cette ombre rampante, qu'on devinait par élimination, là où les sens s'arrêtaient, ce halo de lumière qui entourait la tête de leur cadette, et qu'il ne parvint à quitter des yeux qu'après un hochement de la tête de cette dernière. Et alors, sentant distinctement leurs auras pourtant si étranges, il saisit pourquoi il n'appréhendait pas celle de Sahane.
Il ne la sentait pas pour la même raison qu'il ne se voyait pas lui-même.
L'aura de Sahane était la sienne.
Kyra, plus loin, était prise dans une conversation endiablée avec une interlocutrice imperceptible. Sahane était partout et nulle part à la fois.
- Vous comprenez ? Je n'ai que la présence que vous m'accordez.
C'était horriblement dangereux, mais que faire d'autre ? Personne ne pouvait affronter cette chose seul.
- Je ne vais pas l'affronter seule. Je vais l'aider à se combattre elle-même. Là-dedans, Baphasi est en train de lutter contre la graine, et je vais lui donner la chance de gagner.
- …
- Excusez-moi, je ne peux pas vraiment m'empêcher de...
- De lire dans les pensées, oui. Essayez de prévenir, la prochaine fois.
Le visage de Sahane s'assombrit brusquement.
Il n'y aura sûrement pas de prochaine fois. Inutile de le formuler, elle l'avait entendu. Zakriel commença à communiquer par signes sa stratégie à Kyra, quand un son impossible éclata à sa droite.
La tête encore bourdonnante, sa visibilité pratiquement annulée par les immenses nuages de poussière qui s'étaient soudainement mobilisés, arrachés au par les échanges d'énergie en altitude, distinguait à travers le nuage la forme de l'arbre, ébranlé par une pluie de frappes invisibles. L'ombre monstrueuse rétrécissait, et les feuilles tombaient à toute vitesse, ôtant l'impression de volume dégagée par la chose.
Une ouverture. Un mouvement à sa droite le fit tressaillir. Les deux cyborgs étaient là, et seule C18 présentait des blessures sérieuses. Elle semblait toujours vaillante, malgré son bras manquant, mais la prudence était de mise. Il lui fit signe de se tenir à l'écart, passa le cap de sa troisième transformation, et parti à l'assaut avec Kyra.
À leurs côtés chargeaient les cinq derniers survivants des forces du Kaïoshinkaï et Piccolo. Si le cyborg et le namek avaient à la fois la capacité de survie et le panel technique pour cet affrontement, ce n'était absolument pas le cas de leurs jeunes alliés.
Zakriel envisagea de leur dire de s'arrêter. Mais il était déjà au corps à corps cherchant désespérément une faille dans cette masse de bois qui tremblait et craquait au rythme des coups de hache d'un bûcheron invisible.
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Fini. Son Gohan les avait massacrés.
L'instant d'euphorie passé, tuer lui procurait toujours le même sentiment de malaise. Ses défenses toujours levées, il savait que ce combat était fini. Il avait soufflé l'énergie vitale de ses trois ennemi, facilement. Il y avait eu un grand guerrier pâle et cette vieillarde. Le cadavre de la petite femme, désarticulé davantage par sa chute au sol que par les kikohas qui l'avait transpercée, le remplissait de malaise. Qui étaient ces sorciers ? Ils n'avaient rien à voir avec les démons, le sayen pouvait le sentir. La tentation de quitter immédiatement l'endroit se faisait forte, mais il se força à regarder le corps si dérangeant.
Il avait tué une vieille femme sans préavis, sans coup de semonce. Pire : il y avait pris du plaisir. Qu'est-ce qu'ils étaient venus faire ici ?
Goujin et Boo s'approchaient. Il résolut de les attendre ici, et peut-être d'interroger le dernier sorcier. Celui qui était petit, faible, et qui croyait pouvoir cacher son énergie face à un être du calibre de Son Gohan.
- Je sais où tu te caches ! Viens, je ne te ferai pas de mal !
Tellement de questions à poser... Il fallait s'assurer que la situation ne dégénère pas encore plus. Avec le niveau alarmant de puissance que dégageait Baphasi, ils ne pouvaient pas se permettre de tirer un trait sur la moindre source d'information.
Le monde était en ruine, et Gohan voulait savoir pourquoi.
Namek était détruite, bon sang... Pour la première fois, il n'y avait pas de fin heureuse à l'histoire qui se déroulait et il était bien décidé à comprendre les tenants et les aboutissants de cette horreur.
La silhouette du sorcier se détacha dans la forêt, les deux bras levés en signe de paix. Gohan s'était préparé à n'importe quoi, mais pas à cela.
Un Namek.
Le flot de soulagement le prit à la gorge. Ils avaient encore des dragon balls. On pouvait tout arranger. Son discernement, son rechignement à tuer sans raison avait sauvé la terre ! Sans qu'il s'en rende compte, un grand sourire clair était né sur son visage.
Sans qu'il s'en rende compte... Il avait baissé sa garde.
Il avait perdu son mouvement.
Il se retourna en une demie-seconde, mais c'était trop tard. Le rythme l'avait abandonné, il ne pouvait pas le reprendre. Le cadavre de Psychée s'était relevé sur ses membres broyés, était déjà sur lui, projeté à une vitesse surnaturelle par son nouvel occupant dont les yeux, ambres, brillaient au fond de ses orbites noircies.
Les doigts désarticulés, repliés comme des tentacules, enserraient maladroitement une faux noire. Le sayen interposa son bras, vaguement conscient de l'inutilité de son geste.
Et puis, il n'y eut plus du tout de Son Gohan.
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Elle frappait, mais ça ne faisait pas mal. En fait, ça la soulageait. Comme gratter une piqûre d'insecte, comme retirer une croûte...
Un morceau d'écorce se décrocha de sa peau, arrachant un peu de chair et de sang avec lui. ça faisait du bien. Baphasi ne s'était pas rendue compte d'à quel point l'écorce la révulsait avant que Sahane ne commence à l'en débarrasser. Un frisson de satisfaction parcourut sa poitrine. On la frappait d'ailleurs, elle le savait parce qu'elle le voyait quand elle arrivait à ouvrir les yeux, pas parce qu'elle sentait d'autres coups que ceux de Sahane. La démangeaison était obnubilante, et sa suppression extatique. Béate, elle laissa couler un caillot de sang à travers son sourire quand un coup de talon éclata la couche de bois qui recouvrait sa cage thoracique. Chaque pic de douleur était une libération. Elle pouvait sentir les branches et les racines qui se rétractaient au fur et à mesure que l'énergie vitale de la graine s'éteignait en elle. Sahane retournait cette force infinie contre elle-même, saisissait la haine que la graine lui vouait et s'en servait pour racler la corruption hors du corps de la reine. Elle aurait voulu l'embrasser, mais il y avait comme une connexion fondamentale entre elle et cette inconnue. La terrienne n'avait pas prononcé un mot, Baphasi ne lui avait rien dit (elle n'aurait pas pu, avec ses mâchoires lignifiées) mais elle avait compris. Elle
savait.
Elle savait pourquoi Baphasi était venue. Elle savait que cette tâche était nécessaire, qu'elle n'avait jamais eu le choix, qu'elle mourrait heureuse si les sayens agissait justement. Et ils le feraient, Baphasi l'avait compris en communiquant d'une manière si pure avec la clairvoyante. Elle plaiderait en sa faveur, ils laisseraient le peuple du Makaï s'installer en surface, quitter leur terre condamnée pour survivre. Ils n'étaient pas maléfiques, pas irrémédiablement affectés par la graine. Loin des makaïoshins, ils prospéreraient, ils abandonneraient leurs coutumes barbares et embrasseraient la civilisation. Sous le règne de Panka, cette fille qui était un cadeau inestimable pour elle et son royaume, qui avait été si droite, si parfaite en toutes circonstances, il ne pourrait naître qu'une nouvelle ère de paix. On pouvait avoir confiance en elle, reposer le monde sur ses épaules, même si elle ne méritait pas un tel fardeau, elle était la seule à pouvoir l’assumer.
Et elle l'assumerait jusqu'au bout, maintenant qu'il n'y avait plus personne pour se mettre en travers de son chemin. Maintenant que toute la noblesse dégénérée du Makaï, que tout ces tyrans cruels et décadents avaient été écrasés, avec leur fierté et leur démence, sur l'autel sacrificiel qu'avait été la terre.
Elle avait vu de ses propres yeux la puissance des sayens, et savait que seule la graine lui conférerait la moindre chance de victoire contre les guerriers les plus formidables et les plus violents du monde. Mais les sayens de la terre étaient pacifiés, on pouvait leur faire confiance, lui avait susurré Sahane. Ils épargneraient Panka, car elle saurait les convaincre de ses nobles intentions.
Oh, elle s'en voulait tellement ! Elle regrettait la destruction irraisonnée qu'elle avait semé sur le monde, mais toute son amertume était noyée dans la soulagement que lui apportait Sahane.
Son torse était à vif, un entrelacs sanguinolent de chair, d'os et de pousses végétales. La corruption ne s'était pas limitées à la peau, et s'était infiltrée en profondeur, dans chaque fibre de son être. La douleur hurlait une douce berceuse à ses oreilles. Elle chantait la mort de cet horrible corps qui n'était plus le sien. Sous sa boite crânienne, elle sentait l'agitation des premières racines, qui sentaient venir leur heure.
Elle allait mourir. Baphasi croisa le regard de Sahane, et il y avait la même sérénité dans leurs yeux à toutes les deux.
Elle avait prévu que ce serait Abel mais peu importait, au final. Il comprendrait. Il était dangereux, mais il les aimait profondément, elle et Panka, même s'il ne le savait pas encore. Elle saurait le contenir. Oh, elle saurait faire tant de choses. Rien n'aurait été possible sans elle.
Le coup fatal approchait et la reine s'autorisa à pleurer, de joie. Loin, la graine et sa horde si horrible hurlait sa haine et sa rage, dans des oreilles qui ne l'écoutaient plus.
« Ah, ça y est, j'ai trouvé. »
Cette voix appartenait à la horde.
Devant ses yeux encore troublés, elle vit un makaïoshin, implacable et monstrueux, qui enserrait fermement la main de Sahane. Qui l'empêchait de libérer la frappe finale, celle qui mettrait un terme à son calvaire. Furieux, avec dans es yeux une perversion qui détonnait horriblement avec tout ce que représentait Sahane, il abattit son poing griffu sur le crâne de la clairvoyante.
Ce combat se déroulait en Baphasi, et la force de l'impact n'avait aucune espèce d'importance. La graine avait trouvé la faille, elle n'allait plus se laisser rendormir par qui que ce soit. D'autres makaïoshins se matérialisèrent autour de Sahane. Dix, puis cent, et l'issue du combat que menait cette lueur de clarté dans l'esprit de Baphasi ne fit plus le moindre doute. Les larmes sur les joues de la reine prirent une saveur amère alors que la douleur au niveau de son torse se résorbait, que les racines reprenaient de plus belle et comblaient ses plaies malgré les attaques désespérées des sayens.
Elle ferma les yeux, mais le spectacle ne disparut pas. Fermement agrippée de toutes parts par une foule de monstruosités silencieuses, Sahane s'éteignit avec ses derniers espoirs d'une fin heureuse.
Plus de douleur, plus de soulagement. Le monde se résumait à la horde qui lui susurrait ses mensonges à l'oreille et de la sensation toujours plus répugnante du corps végétal qui prenait petit à petit le dessus sur elle. Les jambes immobilisées, elle sentait à nouveau les racines qui pendaient vers le sol, insensibles à la violence désespérée que les terriens déchaînaient sur elles. Elle se sentait mal pour eux. On ne pouvait pas vaincre la graine. Les voix la pressaient de part en part, lui intimaient de répliquer, de se joindre à elles...
Il fallait attendre Abel. Si Baphasi tenait jusqu'à son arrivée, alors il saurait quoi faire. Ce serait dur pour lui, mais il saurait agir comme il s'imposait et la délivrer de cette horreur. En position fœtale, elle se barricada dans les dernières fortifications de son esprit, et tint bon. Attendre, il ne lui restait plus que ça à faire, et Panka saurait construire un monde meilleur, sans elle.
Loin, beaucoup plus loin que le vacarme bourdonnant du millier de voix divines qui l'assaillait, résonnaient de lointaines déflagrations. Elles étaient éloignées, mais assez fortes pour qu'à un univers d'écart, elle les perçoive toujours. C'était... Ah oui, c'était les sayens. Elle les avait presque oubliés.
Ils étaient là parce que... Parce qu'ils défendaient leur terre natale, oui. Ah, les pauvres, pauvres sayens. Perdus dans un monde si dur, si hostile. Elle au moins, elle savait ce que le monde leur réservait à tous. Elle avait vu le lion qui régnait sur l'univers, et elle avait vu le roi qui, les mains fermement enserrées sur ses mâchoires, l'empêchait de clamer leur petit oasis de paix et d'ignorance. Maudite soit-elle, elle avait vu ces mains trembler, elle savait que le lion viendrait. Il fallait qu'elle le fasse, qu'elle sauve son peuple, qu'elle sauve Panka...
Il fallait...
Il fallait...
Ah oui.
Il fallait qu'elle tue les sayens.
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- Encore la réincarnation instantanée ? Il va falloir changer de botte secrète, un jour.
- On ne peut pas tous avoir un... Hurrrgh !
Le torse d'Abel ne correspondait plus à la taille de son pharynx. Il fallut quelques secondes de plus pour que la chair de Psychée achève de se distordre pour prendre l'apparence du nécromancien. Il matérialisa son habituelle panoplie noire et dorée au lieu des loques ensanglantées qui le couvraient d'un claquement de doigts, fit craquer ses articulations alors que sa peau s'assombrissait pour reprendre son bronzage habituel et reprit la conversation avec l'immortel.
- Je disais : on ne peut pas tous avoir une régénération de fou furieux comme toi.
Unio était horrifié mais, comme d'habitude, il on ne faisait plus attention à lui. Il venait de voir sa tutrice broyée suite à un combat dont il n'avait pas pu suivre une seule passe, puis le nécromancien posséder et transformer ce cadavre en sa forme originelle. Et il plaisantait. Lui et l'immortel s'envoyaient des piques comme deux adolescents alors que deux autres guerriers monstrueusement puissants s'approchaient à toute vitesse.
Il n'y avait pas de gravité, pas de défaite dans leur monde, réalisa Unio. Pour ces deux immortels, aucun obstacle, aucun ennemi n'était plus qu'un contretemps. Et si les sayens gagnaient, alors ? Ils reviendraient tous les deux, tôt ou tard, et leurs ennemis pourriraient dans leur tombe, incapables de les arrêter. Et si la singularité venait, finalement ? Ils la traverseraient tous les deux, riraient un bon coup, et reprendraient leur routine. Le monde brûlerait à nouveau comme il avait déjà brûlé. C'était une certitude pour le nécromancien et une expérience pour l'immortel. Ils se fichaient complètement de le faire brûler, localement, quelques fois de plus.
Ils auraient pu empêcher ça. Empêcher ce carnage, et ils ne l'avaient pas fait. Ils n'avaient même pas envisagé de le faire.
Unio prenait progressivement conscience qu'il était dans le mauvais camp. Que la résignation qui n'avait jamais quitté Psychée venait de ce fait. Les démons, Freezer... Ils étaient un mal temporel, vincible et localisé. Mais ce que ces deux immortels, ce que Primus incarnaient... C'était un mal éternel, indestructible, généralisé et infatigable justement parce qu'il se figurait nécessaire.
Et Unio ne pouvait rien y faire du tout. Il courut se cacher loin de ces monstres et de ceux qui s'approchaient. Paralysé, il murmura ses sortilèges de camouflage, en priant pour la victoire de l'ennemi.
Le nécromancien, d'un ton horriblement banal, reprit.
- Tu prends lequel ? Le gros ou le petit ?
- Le petit, il a l'air énervé.
Le mouvement d'air arriva en premier. En second, la déflagration due à l'arrivée du sayen assourdit les fragiles tympans du namek. Même à cette distance, avec l'aura crépitante du sayen qui couvrait ses cris, il comprenait tout. Il percevait que, sous les hurlements furieux, la voix était sur le point de se briser.
- Où est Son Gohan ? Qu'est-ce que vous lui avez fait ? Je vais vous tuer !
Un mauvaise plaisanterie. Toute cette histoire était une mauvaise blague qui ne faisait rire qu'Abel.
- Haha, je voudrais bien te voir essayer!