CHAPITRE 95
La marque reptilienne
Chichi serra les poings à la vue de l'homme recroquevillé devant elle. Cela l'enrageait de l'admettre, mais d'une certaine manière, elle était responsable de son état. Et en dépit de son épuisement, elle ne pouvait supporter de voir un innocent mourir sous ses yeux.
Alors, animée d'un sursaut nouveau de rage, elle se lança de nouveau sur les monstres. Sa volonté reprenait le dessus, au point de réussir à chasser cette petite voix qui s'exprimait en elle...
Et tandis qu'elle frappait, repoussant les monstres avant qu'ils n'atteignissent l'homme devant elle, tandis qu'elle sentait les crânes se briser sous les poings et que l'odeur pestilentielle de la mort s'emparait de ses narines, elle réalisait toutefois que la voix de son propre corps à l'agonie s'imposait davantage...
Cette voix, c'était la raison qu'elle ne pouvait se permettre d'écouter. Car ce serait admettre une chose qu'elle n'avait plus le droit d'accepter.
Cette fois-ci, elle allait agir comme le légendaire Son Gokū. Elle serait à la hauteur de son défunt époux.
Et tout comme lui, elle mourrait. Car l'inéluctable fin les rattraperait tôt ou tard.
Serrant les dents, elle réalisait que la voix parvenait toujours à l'atteindre. Et elle sentit alors le nombre d'adversaire la submerger...
Les innombrables démons parsemant le champ de bataille dissimulaient à présent totalement Mister Satan aux yeux de son équipe de tournage. Le silence des observateurs se mêlait aux tonnerres des vibrations qui se déchaînaient à quelques mètres sous leurs pieds.
– Ils sont quand même diablement nombreux... murmura alors le cameraman, incapable de retrouver son héros dans cette agitation sauvage.
Vous croyez vraiment qu'il a fait exprès de se détacher du câble... ?Il était vrai que tout cela paraissait un peu extrême, même pour une telle légende montante des arts martiaux. Après tout, bien qu'invaincu jusqu'alors, Satan s'était contenté de victoires locales, avec pour ambition les plus grands tournois d'arts martiaux.
Certes, il prétendait pouvoir vaincre n'importe qui, et rien n'allait contre cette idée. Mais là, il faisait face à une armée entière de démons surhumains et invulnérables.
Peut-être était-ce trop pour Mister Satan...
– Ne... Ne dis pas de bêtises, répliqua alors celui qui tenait une longue perche terminée par un micro.
De toute façon, que peut-on faire ? Un seul de ces monstres nous briserait sans forcer...Le cameraman avala péniblement sa salive. Puis il reprit sa respiration et souffla, comme pour se forcer à garder son calme.
– Nous... Nous devons nous rapprocher...
– QUOI ?! Arrête, c'est de la folie ! T'as vu les bonds que font ces monstres ? Et je ne parle pas de ceux qui volent...Le cameraman jeta un œil aux créatures qui lévitaient à quelques mètres du sol. Ils ne pouvaient vraisemblablement pas se déplacer très rapidement ni très haut dans les airs, ce qui assurait à l'hélicoptère une distance de sécurité qu'il ne serait pas sage de vouloir diminuer.
– I-Il... bégaya le cameraman, avant de se reprendre.
IL LE FAUT ! C'est notre devoir de montrer au monde ce que...
– Au monde ?! Mais arrête ! Y'a plus rien ! Depuis que ces... choses... sont arrivées...
– SATAN CROYAIT AU MONDE DE DEMAIN ! tonna l'homme, lâchant d'une main sa caméra pour secouer vigoureusement son partenaire.
IL S'EST BATTU ET A DONNÉ SA VIE POUR CET IDÉAL !L'autre resta sans voix. Puis il fixa le sol sous leurs pieds, avant de jeter un coup d’œil au pilote. Après quelques secondes d'échange muet, il lui fit signe de diminuer son altitude.
Hochant la tête d'un geste reconnaissant, le cameraman pointa son appareil droit sur l'armée animée d'une rage animale, désireux de montrer le courage de l'homme qui les avait guidés en ces temps troublés.
– Mister Satan restera dans les mémoires, commenta-t-il sombrement,
comme l'homme qui, même dans le plus grand des noirs, a su apporter l'espoir...À peine eut-il prononcé ce mot qu'un démon fusa dans sa direction, évitant de peu l'hélicoptère que le pilote paniqué fit aussitôt remonter.
– BORDEL ! s'exclama l'homme à la perche, manquant de perdre l'équilibre.
C’ÉTAIT QUOI ÇA ?Le cameraman, professionnel jusqu'au bout, se reprit assez tôt pour filmer la scène qui se déroulait sous leurs yeux. Le monstre propulsé dans leur direction ne l'avait pas été de son fait : seul un coup d'une puissance extrême pouvait l'avoir balayé ainsi...
Et soudain, il le vit, au milieu du chaos : Mister Satan était toujours en vie. En proie à une passion jamais vue jusqu'alors, il combattait les monstres !
Dos à dos avec Chichi, laquelle était à l'origine du monstre propulsé, il se déplaçait avec une habileté impressionnante. Loin d'égaler la puissance de l'épouse de Gokū, force était de constater qu'il venait de lui sauver la vie.
Étonnamment ignoré par la majorité des monstres, lesquels semblaient en vouloir à Chichi, il s'était toutefois illustré en se défendant d'une attaque isolée. Galvanisé par sa victoire, il s'était mis à affronter les autres monstres qui ne s'occupaient pas de lui.
Et il gérait admirablement bien, le bougre ! Là où les coups de Chichi faisaient des ravages considérables, elle réalisait qu'en dépit de leur relativement faible puissance, les kicks de Satan parvenaient à sonner les monstres – même si cela devait lui demander parfois de s'y reprendre...
Mais ce n'était pas le plus remarquable. Car la jeune femme avait beau frapper de toutes ses forces, elle parvenait au mieux à éloigner certains adversaires et se donner l'illusion de gérer le champ de bataille. Car ses cibles se régénéraient à chaque fois.
Alors comment Satan faisait-il pour que ses adversaires ne se relevassent pas ?
– MESDAMES ET MESSIEURS, LE VOYEZ-VOUS ?! s’époumonait la journaliste, restée silencieuse jusque là.
LE GRAND HERCULE AFFRONTE À LUI SEUL UNE ARMÉE ENTIÈRE !Il fallait toutefois remettre l'exploit dans son contexte. Satan n'était la cible de presque aucun des démons, qu'il abattait péniblement l'un après l'autre. De plus, il fatiguait, au même titre que Chichi, à laquelle il avait permis de reprendre son souffle suffisamment pour s'autoriser quelques nouveaux élans de rage.
Retournant à leur position dos à dos, les deux combattants avaient tous deux réalisé la sombre réalité. Ils ne viendraient jamais à bout de toute cette armée. Mais le fait de partager le combat avait totalement transformé leur état d'esprit, qui assurément resterait inébranlé jusqu'à la fin.
Alors ils se jetèrent de nouveaux sur les démons.
Depuis l'hélicoptère, les observateurs perdaient peu à peu une nouvelle fois leur idole de vue.
Le cameraman tentait toutefois de le garder dans le champ de vision de l'objectif.
L'équipe de Satan était à présent confiante vis à vis de leur héros. Si bien que quand une partie importante de l'armée tourna brusquement les talons pour courir à pleine vitesse en direction opposée de leurs cibles, ils n'en furent pas le moins du monde étonnés.
– Ahahah ! s'exclama la journaliste.
Ils détalent devant Mister Satan !Pourtant, Chichi et Satan étaient les premiers surpris par cette situation inattendue – sans qu'ils n'eussent à s'en plaindre. Des démons insensibles même à la mort, et qui semblaient uniquement portés par des instincts primaires, n'avaient aucune raison de fuir.
Du haut de l'hélicoptère survolant la cible, l'individu tenant la perche remarquait que droit devant ceux qui semblaient fuir se tenait en fait un homme – et quel homme !
– Re... Regardez ! lâcha-t-il enfin en le pointant du doigt.
Face au groupe qui lui fonçait dessus, le colosse restait impassible, attendant les monstres, armé de sa hache.
– C'est quoi ce type ? s'étonna le cameraman qui le filma aussitôt.
– Impossible ! réagit alors la journaliste, tremblante.
– Qu'y a-t-il ?
– Je le reconnais... murmura-t-elle d'une voix concernée.
J'avais tenté un reportage sur lui, au début de ma carrière...Elle avala sa salive.
– J'ai failli y laisser ma vie...
– Qui est-ce ? insista aussitôt l'homme à la perche.
– Gyumaō... !Alors que les créatures s'apprêtaient à l'atteindre, l'homme frappa puissamment de sa hache contre le sol. Soudain, une énorme fissure s'ouvrit sous les pieds des démons, laissant tomber des dizaines d'entre eux dans la crevasse nouvellement formée.
– PERSONNE NE TOUCHE À MA FILLE ! jura-t-il soudain d'une voix si tonitruante qu'elle recouvrit tout le champ de bataille.
À l'entente de ces mots, Chichi ouvrit grand les yeux.
– P... Papa !Elle fronça les sourcils et renouvela d'efforts, motivée comme jamais, seulement séparée de son géniteur que par un mur de démons assoiffés de violence.
Cette scène fascinait totalement ceux de l'hélicoptère, à l'exception toutefois du pilote, lequel n'observait plus ce champ de bataille complètement fou. Son regard était pointé droit devant lui, où approchait à grande vitesse un petit avion.
Une jeune femme aux commandes se mit aussitôt à parler, sa voix parfaitement audible à travers les mégaphones positionnés sur l'avion.
– Veuillez quitter cette zone, c'est dangereux !Le pilote fronça les sourcils et plissa les yeux pour y repérer le logo. Cet engin appartenait à la société « Capsule Corp. ».
Non désireux de s'attirer les foudres de l'une des plus grandes multinationnales du monde, et insensible aux plaintes de l'équipe de tournage, il ne s'attarda pas. Le cameraman, rangeant rageusement son objectif, crut soudain voir passer juste devant lui un individu volant. Surpris, il le chercha du regard, mais le pilote eut la bonne idée de pivoter l'engin du mauvais côté...
Gyumaō d'un côté, Chichi et Satan de l'autre, chacun combattait une part de l'armée des démons. La bataille s'intensifiait. Et ce n'était pas fini...
KIKOHŌ
Soudain, c'est tout un pan de la terre qui sembla partir en fumée sous l'intense déflagration venue des cieux. Hercule ouvrit grand les yeux de stupeur en découvrant que plusieurs individus volants s'étaient joints à la fête, rasant des parcelles de terre par des assauts d'une puissance dévastatrice, piégeant les démons.
Soudain, dans tout ce remue-ménage, deux hommes se posèrent juste devant Chichi et Satan.
– Krilin ? reconnut-elle.
Yamcha ?Incapable de prononcer davantage de sons, elle se laissa porter par le plus petit des deux tandis que l'autre prenait son partenaire de combat sur son épaule. Et les guerriers s'élevèrent dans les airs, dans une danse aérienne qui acheva de faire perdre connaissance à la jeune femme...
***
Lorsque Chichi rouvrit les yeux, elle était étendue sur un lit. À son chevet se tenait son père, dont le visage légèrement égratigné par la bataille laissait voir son extrême inquiétude.
– Papa... ?
– Chichi... murmura-t-il, les larmes aux yeux.
Oh, ma chérie ! J'ai eu si peur !Il s'abaissa et serra sa fille avec une force telle qu'un homme normal aurait immédiatement trépassé.
– Ne vous inquiétez pas, intervint alors une voix féminine proche.
Elle est seulement fatiguée. Ses jours ne sont pas en danger, à moins que vous ne la serriez trop fortement...Suite à ces paroles aux nuances accusatoires, le grand Gyumaō relâcha sa fille avec autant de douceur que s'il s'était agit d'une poupée de porcelaine.
– Bon sang, murmura alors une voix timide à l'entrée.
J'avais oublié que tu étais si forte, Chichi...Le regard de Chichi se tourna et reconnut aussitôt Krilin. Sa vue lui rappela qu'il était celui qui lui avait annoncé la mort de Gokū et son cœur se serra. Le jeune guerrier sembla le lire dans ses yeux et ressentit un profond sentiment de malaise. Il commençait à s'éclipser, quand Chichi leva le bras dans sa direction.
– Attends, ordonna-t-elle.
Viens.Krilin se raidit et pointa son doigt vers son propre torse avec étonnement.
– M-Moi ? demanda-t-il.
Face à l'acquiescement de la femme alitée, le jeune chauve s'approcha prudemment sous les regards concernés de Gyumaō et de Bulma.
Et tandis que Krilin se demandait à quelle sauce il allait être mangé, regrettant amèrement d'être intervenu à son réveil, les pensées de Chichi avaient pris une toute autre direction.
Lui faisant signe d'avancer davantage, elle se redressa légèrement et approcha son visage du crâne luisant du digne meilleur ami de Son Gokū.
– Merci, lui glissa-t-elle dans l'oreille d'une voix d'une douceur qu'on lui connaissait rarement.
Krilin resta un instant abasourdi face à cette réaction totalement imprévue. Puis, passée la surprise, le jeune homme se gratta derrière le crâne avec gêne, un petit sourire dessiné sur ses lèvres.
– De rien, répliqua-t-il d'un air pantois,
mais j'étais pas seul !Croisant le regard insistant de Chichi, il comprit que cela ne concernait pas que ce sauvetage. Elle voyait devant elle celui qui, depuis le début, avait accompagné son époux, restant dans son ombre sans chercher à le rabaisser. Elle admirait ce jeune homme qui lui avait annoncé la terrible nouvelle de sa mort, mettant ses propres émotions de côté pour éviter de lui compliquer la tâche. Elle reconnaissait celui qui lui avait sauvé la vie.
– Ouais, tu peux remercier l'autre crétin, grommela Bulma.
– Satan ? répéta Chichi.
Il est ici ? Il va bien ?Elle se releva péniblement.
– Et on est où d'ailleurs ?
– Nous sommes à Capsule Corporation, répondit Bulma.
Nous nous trouvons dans l'infirmerie. Hercule se trouve dans la pièce à côté. Vous avez tous les deux perdu connaissance suite au combat, toi par fatigue physique, lui parce que, passé l'état d'adrénaline, la frousse l'a rattrapé...
– T'es injuste, Bulma, intervint Krilin.
C'est grâce à lui qu'on a pu identifier tout ça aussi vite.
– Ah oui, répliqua-t-elle avec mépris.
Ce pitre a au moins le mérite d'être un bon communiquant. On se sert de sa notoriété pour le suivre et sauver les gens. Bien entendu, il en retire tout la gloire...Elle semblait animée d'une rancœur particulière à l'égard du jeune homme.
– Enfin, se reprit-elle face aux regards chargés de trouble de son auditoire,
j'avoue qu'il m'a surprise, sur ce coup...
– Je te trouve un peu dure, réprouva Chichi.
Sans lui, je ne serais plus de ce monde...Un silence ponctua ses paroles.
– Et puis, reprit-elle alors dans sa lancée,
ses coups étaient plus efficaces sur ces monstres que les miens...
– C'est parce qu'ils étaient faibles, s'excusa presque Krilin d'un air gêné.
– Que veux-tu dire ?
– Pour une raison que j'ignore, répondit Bulma,
les infestés ne peuvent pas mourir. Chaque fois qu'ils le devraient, leur corps se régénère. Mais ils peuvent être blessés...Face au regard d'incompréhension de Chichi, elle chercha le soutien du reste de son auditoire.
– Mieux vaut les mettre K.O. que les tuer, conclut Krilin.
Chichi resta silencieuse, comprenant mieux l'exploit de son partenaire. Les coups de Satan étaient ceux d'un humain exceptionnel, et étaient donc susceptibles de blesser fortement ces monstres, sans pour autant être trop puissants au point de les tuer sur le coup.
– Mais je ne comprends pas, murmura Chichi,
vous voulez dire que vous combattez ces monstres ?
– Oui, répondit Krilin,
et au moment où l'on parle, Tenshinhan et Yamcha sont encore en train de s'en charger. Mais c'est sans fin, on n'a même plus le temps de s'entraîner... Alors on protège les vivants du mieux qu'on peut...
– Capsule Corporation a mis à disposition de la population plusieurs refuges, ajouta Bulma.
Avec mon père, on a mis au point un système de boucliers masquant le Ki des individus. Il recouvre toute la Capitale de l'Ouest, dont nous avons éloigné tous les infestés.
– Des boucliers ? répéta Chichi, hébétée.
– Les infestés attaquent leurs cibles en fonction de leurs énergies. Leur code génétique a été totalement chamboulé d'une manière particulièrement sophistiquée. Je n'avais jamais vu ça auparavant...Elle fronça les sourcils.
– Ils communiquent entre eux via leur ADN. Une conscience de groupe se crée, et impacte la perception des données sensorielles de leur cerveau reptilien. C'est comme un code liant tous les infestés et qui tiendrait en compte de la puissance des énergies, de leurs distances, et de tout un tas de paramètres pour établir les décisions de chaque individu de la façon la plus efficace qui soit.
– Hein ?
– Ils sont taillés pour prospérer, expliqua alors Krilin.
Plus t'es balaise, plus ils seront nombreux à t'attaquer.
– Comment savez-vous tout ça ? s'étonna Chichi.
Soudain, un rugissement se fit entendre à proximité de la pièce, faisant sursauter la jeune femme alitée.
– Bon sang, c'était quoi ça ?!
– Ne t'en occupe pas, répliqua Gyumaō d'une voix apaisante.
– Mais c'est tout proche ! s'exclama Chichi.
Y'en a un dans le bâtiment ! Il faut...Ses sourcils se froncèrent tandis que son regard se posait sur la scientifique.
– Bulma... Me dis pas que t'en as enfermé ici ?!
– Nous devons absolument examiner les infestés ! se défendit aussitôt l'accusée.
C'est le seul moyen de pouvoir s'en défendre... et de trouver le remède.Chichi ouvrit grand les yeux d'ébahissement. Et soudain, elle craqua.
Fondant en larmes, elle fut aussitôt enlacée par son père. Sa fatigue mêlée aux puissantes émotions qui la tiraillaient avaient finalement eu raison des barrières qu'elle s'était créées..
– J'EN PEUX PLUS ! hurla soudain Chichi dans un sanglot.
Son entourage resta figé, chacun cherchant vainement des mots qui pourraient soulager les souffrances de cette femme qui en avait bien trop vécues.
– J'AI PERDU GOHAN ! J'AI PERDU GOKŪ ! J'AI PERDU MON MONDE !
– Chichi... tenta de l'apaiser Gyumaō.
– Gohan... ! reprit la jeune femme en braquant Bulma de son regard animé de folie.
Est-ce qu'on a des nouvelles ?!L'interrogée avala sa salive, incapable de répondre. Mais ce fut finalement Krilin qui vint à sa rescousse.
– Rassure-toi, exprima-t-il.
Il est en sécurité.
– Comment le sais-tu ? interrogea-t-elle aussitôt.
– Piccolo ne le tuera pas, d'après Kami, répondit Krilin.
– Qu'en sait-il ? répliqua-t-elle vivement.
Qui sait si... s'il ne l'a pas transformé en l'une de ces... choses ?
– Parce que ce ne sont pas ses démons, intervint alors une voix à l'entrée.
Gyumaō tourna la tête.
– Maître... murmura-t-il.
– J'ai connu l'avènement de Piccolo Daimaō, expliqua Muten Rōshi.
J'ai combattu ses démons. Et ils n'avaient presque rien de commun avec ceux-là.Il fronça les sourcils.
– Kami nous l'a confirmé, renchérit Krilin pour rassurer la jeune femme.
Celui qui est à l'origine de tout ça... ne vient pas de ce monde.
– Alors... murmura la jeune femme.
D'où vient-il... ?Personne ne répondit.
– Qui est-il... ? ajouta-t-elle.
Les bruits de canne du vieux Rōshi rythmèrent le profond silence naissant.
– Il serait bien hasardeux de répondre à cette question, répondit-il.
Mais une chose est sûre : ton fils est probablement le plus en sécurité d'entre nous tous.Les yeux de Chichi se tournèrent lentement vers le vieux maître des tortues, ne sachant pas si ses propos étaient le fruit d'une provocation bien mal indiquée ou d'une sénilité avancée.
– Après tout, reprit sombrement Kame Sennin,
il est avec Piccolo.***
Le jeune Gohan assistait à un spectacle peu commun.
La demeure du roi du monde accueillait en effet, par cette nuit glaciale, un invité des plus vénérables : son dieu. La grande salle principale du château était le lieu d'un face à face particulièrement tendu entre Piccolo et Kami.
– Et donc, murmurait le roi, poursuivant un froid échange qui semblait s'être installé,
tu es venu me raisonner ?
– Non, répliqua le dieu.
Je suis venu te parler.
– Me parler ? répéta d'un air amusé le souverain sur son trône.
– Pourquoi fais-tu tout cela ? interrogea Kami.
Le sourire mauvais de Piccolo s'agrandit.
– Je te connais mieux que quiconque, reprit alors son aîné dans un murmure concerné.
Mais quelque chose m'échappe...
– Ah, vraiment ?
– Pourquoi avoir organisé un tel tournoi ? Que s'est-il passé, Piccolo ?Le visage inquiétant du roi s'abaissa lentement.
– Et tu prétends me connaître... ? murmura-t-il.
– Dans ce cas, permets-moi de te poser une autre question...[/i]
Après un court instant d'échanges, le vieux dieu fixa intensément les yeux de son interlocuteur.
– Pourquoi n'avoir pas tué Son Gohan ?Le démon Piccolo jeta un œil au jeune garçon qui se tenait silencieusement à l'entrée.
– N'as-tu donc rien à répondre ? insista alors Kami en fixant Piccolo, dont le regard s'était brutalement figé.
Mais l'expression de ce dernier ne se trouvait aucunement liée avec les mots de son aîné, lequel, en dépit de sa clairvoyance, n'avait visiblement qu'à peine réalisé le changement brutal dans lequel l'atmosphère du palais s'était imprégné. Et soudain, il le sentit, à la manière d'un fin courant d'air glacial. Cette terrible pulsation de Ki fit aussitôt se retourner le gardien de ce monde.
– Je n’interromps rien, j'espère ? demanda la voix mielleuse à l'origine de cet obscure sursaut d'énergie.
Le dieu et le roi avaient naturellement tourné leur attention vers le jeune Son Gohan, positionné à l'entrée de la grande salle, dont le visage éclairé par le croissant de Lune sembla se décomposer subitement.
Car la lumière de l'astre n'éclairait pas que le regard tétanisé du garçon, mais également la main froide aux longs doigts blanchâtres posée sur son épaule, derrière laquelle se tenait, dans l'obscurité menaçante, l'auteur de cette nouvelle voix.