CHAPITRE 106
L'échec des négociations
Dans la savane carbonisée se tenaient toujours les cinq corps encore vivants, dans une ambiance mêlant la peur à l'horreur...
Observant de loin cette scène incroyable, Zetsu était aussi immobile que les arbres devenus cendres. Dans son viseur se distinguaient aisément les silhouettes qui se faisaient face.
Au cœur du théâtre de cette invraisemblable rencontre se tenaient les deux Saiya-jin. Leurs puissants corps se distinguaient clairement dans cette atmosphère effroyable, particulièrement celui de Nappa, lequel semblait surpris par la réaction anormalement sérieuse de son partenaire.
Sous l’œil terrifié et lointain de Konohamaru, qui se fondait étonnamment dans ce décor vidé de toute vie, Raditz observait le dernier individu.
Du bas de leur cratère, les deux Saiya-jin devaient plisser les yeux pour distinguer la silhouette calme de Danzō derrière lequel brillait le Soleil déchirant les nuages obscurs. Pourtant, en dépit de ces contrastes de lumières, un éclat s'imposait.
– Oh, Raditz... l'interpela Nappa.
C'est quoi cet œil brillant ?
– Imbécile ! s'exclama son partenaire en tournant son visage vers le colosse.
Ne le regarde pas dans les yeux !Raditz ferma les poings.
– C'est... Le Sharingan...
– Je constate que mes leçons ne sont pas passées dans l'oreille d'un sourd, déclara alors calmement Danzō.
Nappa grimaça de mépris face à pareille outrecuidance. Il ne s'attendait certainement pas à voir un individu multipliant seulement les centaines d'unités s'autoriser une intervention, encore moins avec une telle aisance dans la parole.
Mais Danzō était un parfait orateur. Et, même pour un guerrier aussi expérimenté que Nappa, cela sortait du cadre de ses habitudes.
Quant à Raditz, il tremblait de plus en plus, fixant le torse du vieil homme qui s'était bien plus introduit en lui que n'importe qui d'autre. En cela, Danzō était une menace jusqu'alors inégalée.
Cet homme représentait à la perfection ce que le monde Shinobi avait de plus vil, un trait que les Saiya-jin, en dépit de leurs conquêtes et des horreurs qu'elles apportaient, ne pouvaient toutefois espérer appréhender.
– Cela faisait longtemps, reprit le vieil homme de son timbre calculateur,
Raditz.Le Saiya-jin fronça les sourcils, sous le regard de plus en plus intrigué de Nappa qui s'abstenait de toute intervention – pour le moment.
– Comment... murmura Raditz.
Comment as-tu survécu à la destruction de Konoha ?
– Excellente question.Danzō s'interrompit au moment où Nappa tournait son regard vers Konohamaru. Celui-ci avait pourtant tenté de discrètement se faufiler en direction du vieil homme.
– Tu peux le tuer, si tu veux, intervint Danzō à son adresse.
Mais tu devras également abattre ton partenaire dans la foulée.Nappa grimaça une nouvelle fois, visiblement outré de voir ce qu'il considérait comme un insecte s'adresser à lui avec une telle confiance.
– Es-tu prêt à vivre seul sur une planète déserte jusqu'à l'arrivée de ton chef pour avoir tué un apprenti-ninja ? poursuivit alors le Shinobi d'expérience.
Le colosse réfléchit un court instant. Cet homme semblait être lié au comportement étrange de Raditz. Et il n'avait peut-être pas totalement tort, après tout...
Konohamaru, qui s'était brièvement immobilisé de terreur, venait de retrouver le plein usage de ses jambes et il courait en direction de Danzō.
Le bruit de ses pas s'évanouit timidement sous le silence qui s'installait naturellement au cœur de cette scène de désastre, avant d'être interrompu par un rictus.
Et Nappa éclata alors brutalement de rire.
– Eh bien, Raditz, je vois que tu t'es fait de sacrés amis ! Il s'interrompit, son regard devenant presque immédiatement sérieux.
– Je te félicite d'avoir survécu jusque là. Ce monde... semble plutôt dangereux pour un basse-classe.Un frisson de surprise parcourut soudain le corps de Raditz face aux paroles de son partenaire. Cette ultime preuve de reconnaissance le touchait jusque dans son âme, faisant étrangement réagir le flot de ses émotions.
– Bien, reprit Nappa, fixant alternativement Raditz et Danzō.
Que fait-on, maintenant, messieurs ?Son ton était si plein d'arrogance qu'on ne notait chez lui qu'un désir de tuer le temps avec un plaisir immonde.
– Je vous propose d'en rester là, dit alors simplement le Shinobi.
Les paroles de Danzō résonnèrent dans ce monde chaotique avec étrangeté. Raditz ouvrit grand les yeux de surprise, incapable de répondre dans l'immédiat, tandis que Nappa haussait les sourcils.
– Tu... Tu es sérieux ? Tu abandonnes ?
– Un Shinobi doit savoir quand combattre devient superflu.Il se tut un instant, froid et immobile comme le monde dévasté qui l'entourait.
– Il n'existe aucun homme sur cette planète qui soit en mesure de rivaliser avec votre puissance.
– Oh ?Danzō s'adressait à présent directement à Nappa.
– Qu'auriez-vous à gagner à anéantir un monde incapable de vous proposer une défense acceptable ?Le colosse lâcha un rictus amusé.
– Quel aveu de faiblesse...
– Comme votre partenaire en a fait la fâcheuse expérience, réagit aussitôt Danzō,
nous disposons également de forces... d'une autre nature... potentiellement dérangeantes.L'étrange esquisse d'un sourire sembla furtivement s'installer sur le visage ridé du politicien rescapé de Konoha.
– À tel point que leur utilisation par un Saiya-jin de caste inférieure... a réussi l'exploit de vous surprendre un instant, n'est-ce pas ?Le regard de Nappa se fronça. Ce n'était pas la première fois qu'un peuple sur le déclin tentait une négociation avec lui – en tant qu'ultime recours. Mais cet homme faisait preuve d'un certain culot, mêlant les mots aux actions, les paroles aux preuves. Il ne se contentait pas de le supplier de l'épargner, lui et son monde. Il semblait bien trop intelligent pour cela, à tel point que Nappa se montrait de plus en plus curieux de voir où il voulait en venir...
– Vous avez donc le choix, reprit Danzō, sous le regard indirect de tous les survivants de son monde.
Vous pouvez nous éradiquer tous. Les Shinobi sont des experts dans l'art de la discrétion, mais avec votre puissance et votre détecteur, je ne donne pas à ce monde plus d'une poignée d'heures de survie, sans aucune résistance possible.
– C'est plutôt optimiste... murmura dangereusement Nappa avec un léger sourire.
– Vous resteriez ainsi dans les bonnes grâces de votre empereur, ajouta alors le vieil homme.
Le regard de Nappa s'agrandit de surprise face au dernier mot prononcé par son interlocuteur. Faisait-il allusion à leur chef, le jeune prince des Saiya-jin ? De toute évidence, cet homme avait un certain passif en lien avec Raditz. Il n'était donc pas exclu qu'il ait appris des choses, par l'utilisation d'une de ces étranges capacités évoquées précédemment.
Mais le contexte dans lequel il présentait le dernier objet de ses paroles donnait l'étonnante impression que cet homme faisait référence à de plus hautes instances encore. Peut-être était-ce lié à sa parfaite maîtrise du verbe doublée de talents d'orateur exceptionnels, mais Danzō semblait en fait même percevoir des éléments qui échappaient sans doute à la compréhension de Raditz.
– Si tel est votre souhait, personne ne vous arrêtera. Qui le pourrait ? Cependant...Il prit une profonde inspiration, conscient d'avoir parfaitement capté l'attention de l'immense Saiya-jin.
– ... avec ce monde disparaîtront ces atouts qui nous ont permis de tenir tête à un être au-delà de nos pouvoirs pendant près d'une année... des forces qui, si elles étaient en possession des derniers Saiya-jin, leur permettraient sans doute de...Il marqua une nouvelle pause, parfaitement dosée en adéquation avec l'attention dévoilée par Nappa.
– ... se libérer de leurs entraves et de s'imposer comme la plus grande puissance de l'Univers...***
Tsunade tremblait face à l'écran. Chacune de ses cellules semblait ressentir le profond malaise qui s'installait depuis son âme jusque dans ses muscles tétanisés.
Bien sûr, elle reconnaissait Danzō. Elle ne l'avait jamais porté dans son cœur, mais cette aversion s'avérait à présent tellement refoulée qu'elle ne la ressentait même plus.
Ce qui la rendait dans un état si terrible était l'homme qui l'avait brisée. Raditz, par ses expressions faciales aussi variées que contrôlées, dévoilait quelque chose de terrifiant, même à travers l'horreur qui animait son visage.
Ses yeux avaient changé. La lueur qui y brillait n'était plus du tout celle d'un guerrier abusivement fort, dominant aisément chaque créature du monde qu'il visait. Cette expression là était plutôt celle de son partenaire.
Mais Raditz, volontairement ou non, venait de faire une démonstration de force sans précédent au monde Shinobi. Même s'il ne s'agissait que de l'espace d'une action, il était parvenu à mettre à terre son partenaire au pouvoir encore bien plus démesuré.
Le message était clair pour Tsunade : Raditz était devenu anormalement dangereux.
Pourtant, cette réalité semblait ne pas atteindre l'autre Sannin, dont le visage semblait s'être légèrement adouci. De surcroît, l'expression de Jiraiya ne trahissait aucune surprise, en dépit de cette improbable succession d'événements.
– Je me demandais quand il arriverait... murmura-t-il alors.
Tsunade lui jeta un coup d’œil en biais.
– Tu savais ? Comment ?Jiraiya croisa les bras, sans quitter l'écran des yeux.
– Tu sais bien que j'ai mes sources.Comprenant qu'il était inutile d'insister, Tsunade tourna à son tour son regard en direction de l'écran.
– Que ressens-tu à présent, Tsunade ? interrogea alors Jiraiya.
– Ce que je ressens ? répéta celle-ci, le regard rivé sur Raditz.
Elle fronça les sourcils, son cœur manquant un battement à la vue de la soudaine réaction du Saiya-jin à la crinière. Il n'y eut pas besoin de réponse.
***
– NE L'ECOUTE PAS ! s'exclama soudain Raditz.
– Raditz... ?
– Ces ninjas... Ils sont dangereux... !Il fronça les sourcils.
– Ils doivent tous disparaître de l'Univers.Danzō haussa les sourcils.
– Est-ce vraiment ta volonté, Raditz ?Mais étrangement, un sourire s'était dessiné sur le visage du guerrier. Cela n'échappa pas à Danzō, dont le regard si impassible se para d'un voile de méfiance.
– Que sais-tu de la volonté d'un Saiya-jin... Danzō ?Retrouvant mystérieusement son calme, Raditz s'était immobilisé. Il semblait concentré.
– Il ne s'agit pas des Saiya-jin, répliqua Danzō.
Il s'agit uniquement de toi.
– C'est là ton erreur... ricana soudain Raditz sans plus sourire.
Les veines qui parsemaient son visage se dévoilaient jusqu'au fond de ses yeux, donnant étrangement l'illusion que ses iris s'éclaircissaient.
Nappa fronça les sourcils. Jamais Raditz n'avait démontré une telle présence. Il ne se comportait désormais absolument plus comme le basse-classe qu'il était.
– Tais-toi, répliqua Danzō.
Laisse parler les grandes personnes entre elles. Avoir détruit Konoha ne signifie plus rien, désormais. Tu n'es plus qu'un pion.Suite à ce mot, le regard de Raditz se leva brutalement pour se pointer sur le vieil homme avec une telle violence que ce dernier ressentit un étrange sentiment de malaise. Fixant directement le légendaire Sharingan du défunt Shisui Uchiha avec défi, le Saiya-jin ne dévoilait plus rien de sa crainte.
– Tu peux contrôler mon esprit et mon corps... murmura alors Raditz.
Une série d'éclairs ravagèrent derrière lui ce qu'il restait de ce pauvre sol calciné tandis que la terre se surélevait autour de la silhouette immobile du guerrier.
– ... mais s'il y a une chose qu'un Saiya-jin garde toujours...Danzō fronça les sourcils, réalisant que quelque chose échappait totalement à son contrôle.
– ... C'EST LA FIERTÉ !!! tonna Raditz dans un hurlement déchirant.
Et soudain, un nouvel éclair parsema cette scène irréelle. Mais cette lueur fut si véloce que même le Sharingan de Danzō ne parvint pas à la percevoir, pas plus qu'aucun spectateur. En fait, le seul qui devina son effet fut Nappa.
Cet éclat fugace avait eu pour source Raditz. Mais il s'était dissipé aussi rapidement qu'il était apparu.
Et le guerrier à la crinière s'écroula, inconscient.
Nappa fronça les sourcils. Une étrange fissure était apparue sur son Scouter, telle la signature d'une anomalie.
Restant un instant pensif, il en oublia même la présence de Danzō.
Ce dernier semblait également concerné par le comportement imprévisible de Raditz.
Particulièrement observateur, il réalisa sans mal que l'attention de l'immense Saiya-jin n'était plus focalisée sur lui. Sans plus attendre, il se mordit le pouce jusqu'au sang.
– Tu devrais t'accrocher à moi, Konohamaru, si tu ne veux pas retrouver ton grand-père de façon trop précoce...Il laissa à peine le temps à l'enfant d'effleurer sa cape du bout des doigts que déjà il s'abaissait avec une vigueur insoupçonnée pour son vieil âge.
KUCHIYOSE NO JUTSU
Un souffle d'une violence inouïe accompagna son geste, à la manière d'une tempête aux allures apocalypatiques. Konohamaru manqua de perdre l'équilibre en se sentant soudain surélevé de plusieurs dizaines de mètres. Il n'eut même pas le confort de réaliser son vertige à la vue des deux Saiya-jin qui paraissaient à présent bien petits en comparaison de cet étrange sol sur lequel il se tenait.
Le Scouter de Nappa s'activa de nouveau tandis qu'une nouvelle puissance s'imposait dans cet enfer, les chiffres qui montaient en flèchent étant visiblement suffisants pour attirer l'attention du colosse.
– C'est l'invocation de Danzō ? s'étonna Zetsu blanc.
Purée, il nous sort le grand jeu ! Ce... Ce truc... a l'air... anormalement puissant !– Parce que ce n'est pas une simple invocation... répondit Zetsu noir tandis que déchiraient ce voile nuage trois gigantesques queues.
C'est un Bijū.Il s'interrompit alors que le puissant grondement de la titanesque tortue s'imposait à travers les cieux, générant à lui seul un chaos indescriptible qui se mêla terriblement bien avec le décor apocalyptique environnant.
– Un Bijū ? répéta Zetsu blanc.
Alors c'est là qu'il se cachait...
– ... Sanbi... murmura Zetsu noir, dévoilant de son œil l'iris aux reflets du Sharingan de la Bête.
Nappa se retourna pour faire face à l'immense tortue, tapotant son Scouter qui s'était finalement arrêté sur leur valeur.
– Que fait une créature de 781 unités sur ce monde ? s'étonna-t-il.
Il tourna son regard vers le corps étendu de son partenaire. Celui-ci semblait retrouver peu à peu connaissance, visiblement revigoré par la puissante apparition du démon légendaire.
– Je comprends de mieux en mieux tes galères, Raditz...Il se retourna vers la créature. Pourtant, chaque témoin de cette scène avait déjà comprit l'ignoble réalité : si Sanbi, par sa puissance démesurée, aurait pu prétendre surprendre un court instant l'indétrônable Raditz, il n'était qu'un élément du décor supplémentaire aux yeux de Nappa.
Ce gouffre de pouvoir était tel que, passée la surprise, Nappa se désintéressa totalement du monstre pour reporter son regard vers Danzō, lequel transpirait d'épuisement suite à cette invocation combinée au contrôle de la créature.
– Ton offre est intéressante, reconnut alors Nappa, poursuivant simplement la conversation qu'ils avaient débutée avant que ne se déchainassent les enfers du Bijū.
Mais... Raditz m'a convaincu.Il se gratta un instant son crâne lisse.
– Et toi, du coup, bah...Il lâcha un sourire désolé, qui se transforma aussitôt en un franc rire menaçant.
– Tu vas mourir avec le reste de ton monde.
– Je vois... murmura Danzō.
Du haut de sa tortue à trois queues, le vieil homme dévoila soudain un regard plus résolu, plus concerné que jamais.
Et étonnamment, l'once de la tristesse se dévoila, en même temps qu'une étrange détermination.
– Raditz avait raison de se méfier de nous, Shinobi, reconnut alors Danzō en replaçant son livre ouvert devant ses yeux.
Je lui en ai suffisamment appris sur nos mœurs pour qu'il puisse réaliser le danger représenté par notre monde.Encore à moitié inconscient, Raditz fixait Danzō d'un regard dur.
– Le Ninjutsu, le Taïjutsu, le Genjutsu... énumura le vieil homme.
J'ai même appris qu'il avait fait l'expérience du Senjutsu et de Dōjutsu légendaires...Sanbi abattit lentement ses deux pattes avant sur le sol, générant un violent souffle de poussière qui, à lui seul, aurait suffi à terroriser une armée.
– Combinés à l'intelligence d'un combattant expérimenté, ces armes peuvent se transformer en atouts remarquables.Raditz se releva péniblement. Il était encore bien faible.
– N-Nappa... murmura-t-il.
– Raditz ?Danzō jeta un œil au plus faible des Saiya-jin qui récupérait lentement et comprit qu'il n'avait que peu de temps.
– Mais j'ai toujours pris soin d'éviter de lui enseigner un dernier atout... dans le cas où même le légendaire Kotoamatsukami serait défait. Cet atout était si puissant qu'il fut responsable de la perte de l'un des plus grands clans de l'histoire... un clan dont les vestiges... sont restés un trésor d'érudition.Nappa tourna la tête vers Danzō.
– Tue-le... reprit faiblement Raditz.
Tue-le maintenant !Alors, Sanbi se leva sur ses pattes arrières, surplombant même le Soleil par son immense taille à la vue des deux Saiya-jin. Restant sur sa tête, Danzō plaça son doigt sur son livre au moment où Nappa décidait d'en finir.
– Il s'agit, reprit-il,
de l'art des sceaux.Et tandis que le colosse bondissait de sa vitesse irréelle, cassant brutalement la distance qui les séparait, Danzō tournait sa page.