L'odyssée de la vie...
L'odyssée de la vie commence par une rencontre : celle d'un ovule et d'un spermatozoïde. Ou plutôt, d'un ovule et de millions de spermatozoïdes... Lors de l'ovulation, l'ovule descend dans une trompe et il survivra un à deux jours hors de l'ovaire s'il n'est pas fécondé. Lors du rapport sexuel, l'humain éjacule lors quelques centaines de millions de spermatozoïdes. Mais sur cette incroyable armée, un seul soldat atteindra le Graal : 99 % ne passent pas même le col de l'utérus, seules quelques centaines réussiront à atteindre les trompes après un périple de quinze à dix-huit centimètres pour des aventuriers de 0,05 millimètres.
Dès l'instant où un spermatozoïde entre dans l’ovule, ce dernier dresse - dans la plupart des cas -, une barrière tout autour de lui pour empêcher l’entrée d’autres spermatozoïdes. Effectivement, un ovule fécondé avec plusieurs spermatozoïdes donne un embryon non viable. Le noyau de l’ovule et celui du spermatozoïde fusionnent ; la première cellule est née !
Un bruit de sachet en plastique froissé masqua légèrement la suite des explications de la voix off. Genïe fit disparaître son paquet de bonbons, puis saisit un grand saladier qu'elle posa sur ses genoux. La Gardienne plongea sa main droite à l'intérieur du récipient, puis attrapa quelques pop corn sucrés avant de les engloutir d'une bouchée. Elle se redressa sur le canapé, tapota les coussins derrière elle et reporta son attention sur le reportage qu'affichait la petite tablette numérique suspendue en lévitation face à elle.
Un minuscule être humain se développe à partir de la cellule-œuf qui s'est formée environ vingt heures après la fécondation, lorsque les noyaux du spermatozoïde et de l'ovule se rejoignent. Mélangeant les patrimoines génétiques des deux parents, cette cellule œuf est absolument unique. Elle contient déjà toutes les informations génétiques du futur adulte. Au bout de dix heures commence la première des multiples divisions cellulaires. Des trompes, l'embryon descend vers l'utérus et s'implante sur ses parois autour du septième me jour. À ce stade l'embryon mesure 0,1 mm...
Un sourire irradia le visage de Genïe alors suivait - avec un intérêt non dissimulé -, les séquences vidéos de chaque étapes du développement d'un embryon humain dans le ventre de sa mère. L'odyssée de la vie humaine ! Un sujet qui fascinait Genïe au plus haut point. Ce n'était pas la première fois qu'elle regardait un documentaire qui traitaient de ce thème. Mais elle était émerveillée à chaque fois qu'elle en regardait un.
— Ces reportages sont si touchants ! Je ne m'en lasserai jamais... s'exalta la Gardienne, les yeux - pétillants -, braqués sur la tablette numérique. Quelle chance vous avez vous les humaines...
— Chance ? Je ne sais pas si on peut réellement appeler ça comme ça... lança Maelyss, installée à la grande table du salon les yeux rivés sur son livre de sortilèges.
— Pourquoi dis-tu ça ? s'enquit la Djinn curieuse.
— Parce que là ils ne parlent que des aspects positifs. Or, il y a malheureusement pas que ça. À commencer par la déformation du corps, les seins gonflés et sensibles, les vergetures, les nausées, la constipation, les sautes d'humeurs. Les hémorroïdes, les insomnies, les crampes, contractions, les malaises. Douleurs de dos, de mollets et j'en passe. Sans évidemment parler de l'accouchement en lui-même et de certains actes chirurgicaux déplaisants facilitant l'arrivée du bébé...
— C'est sûr que vu sous cet angle c'est moins réjouissant, nota la Gardienne. Mais tu portes la vie ! Ça doit être tellement génial de sentir un petit être grandir et bouger en soi !
— Oui je suppose... conclut la fille de Gokû, peu convaincue.
Elle retira ses lunettes de lecture, puis referma son bouquin. Un bruit se fit subitement entendre de son estomac. Signe qu'il était temps de faire une petite pause et de reprendre des forces avant d'attaquer la dernière partie de ses révisions. Tiens, pour une fois elle était en avance sur son horaire habituel. Elle allait peut-être pouvoir terminer avant 16h et ainsi, s'octroyer une petite virée en ville pour se détendre et se changer les idées. Elle en avait grand besoin en ce moment... La jeune femme s'étira en baillant, puis quitta sa chaise. Elle s'orienta dans la cuisine et se prépara un énorme sandwich avant de s'installer sur le canapé du salon aux côtés de son amie.
La démone rose éteignit la tablette graphique d'un bref geste de la main et se tourna vers son amie.
— Alors, tu voudrais pas avoir un bébé ?
— Hmpff ! keuf, keuf ! hein ? fit la métisse en avalant de travers son morceau de pain.
— Oui ! Comme ça je pourrai pouponner ! répondit la Majin le sourire jusqu'aux oreilles.
— Je te signale que pour ça il faut être deux. Et je n'ai encore personne... D'ailleurs, ce n'est pas une priorité en ce moment. Et puis pourquoi t'en fais pas un toi ? Ce sera beaucoup plus rapide que pour moi.
— Mais ça peut prendre des siècles avant que je trouve quelqu'un et qu'on décide d'en avoir un ! Chez nous le processus se déroule tellement vite qu'on ne peut pas réellement en profiter. Comparé à vous, le miracle de la vie perd un peu de son charme je trouve. Et comment ça tu n'as personne ? Et Jaï dans tout ça ?
— Quoi Jaï ? lâcha Maelyss avant de mordre à pleine dents dans son en-cas, incrédule.
— Ben vous êtes très proches tous les deux. Et ça pourrait très bien fonctionner si tu te décidais enfin à franchir le pas...
— Genïe je t'en prie... soupira la fille de Gokû.
— Quoi ? C'est vrai ! Il n'attend que ça je te ferai remarquer.
— On est amis, juste amis et rien de plus. D'ailleurs je ne suis pas d'accord avec toi. Je ne trouve pas que votre manière de procréer manque de charme, au contraire, je la trouve plutôt magique ! Sans compter qu'elle a beaucoup d'avantages. Des avantages que nous humaines, nous n'avons pas.
— Moui, je ne vois pas trop lesquels, mais bon...
— Genïe, non seulement vous ne subissez pas tous les effets secondaires sur votre corps et vos hormones, mais en plus vous n'avez pas à attendre neuf mois pour qu'il vienne au monde, car si je me rappelle bien, il peut naître quasi instantanément ou quelques semaines après la conception. Et le must du must quand même : les hommes peuvent aussi porter les bébés. Que demander de plus ?
— Oui c'est vrai qu'il y a beaucoup d'avantages, Mais il n'empêche que je trouve ça horriblement mécanique...
— Mais peu importe la manière dont le bébé se développe, comment il est conçu et par qui il est porté. Ce qui compte c'est le désir d'enfant non ?
— Je sais ! Mais j'ai lu tellement de livres et vu tellement de reportages de femmes humaines qui énonçaient la joie de porter la vie et de la sentir grandir en elles, que je me dis que ça doit être génial de vivre cette expérience ! Chez nous c'est un phénomène plutôt rare. En réalité, c'est le futur bébé qui choisit où et comment il se développera. Il n'y a que 5 % des Majins portent leurs enfants. Hommes et femmes confondus.
— Je trouve ça fascinant personnellement ! Mais... la fille de Gokû se mordit la lèvre tout en posant son sandwich sur l'assiette qu'elle tenait de sa main droite.
Elle déposa cette dernière sur la table basse du salon face à elle. Un petit silence s'installa peut à peu dans la pièce tandis qu'elle prenait un instant de réflexion. Au loin, le carillon de l'imposante horloge en bois ancien du salon sonna quatorze heures. Maelyss reprit :
— Comment ça se passe lorsque vous souhaitez avoir un enfant ? Est-ce dépendant d'un rapport sexuel ?
— Non pas du tout. Il nous est pas nécessaire d'avoir un rapport sexuel lorsque nous voulons un bébé. Certains Djinns y ont recourt pour donner un aspect plus romantique. Mais la majorité d'entre eux passent cette étape. C'est pour cela que je disais que c'était très mécanique... Lorsque des Majins veulent avoir un enfant, ils fusionnent et entrent dans ce que nous appelons : "l'état de reproduction". Il s'agit d'une sorte de transe qui se caractérise par des pupilles fluorescentes et dilatées. Il arrive parfois que certains Djinns transpirent un peu plus ou que leur peau deviennent très chaude. Cette phase leur permet de lâcher une cellule unique qui fusionnera avec celle de leur partenaire pour donner un nouvel être. Si l'embryon choisit comme la plupart du temps de se former indépendamment de ses parents, il dressera un cocon autour de lui afin de continuer son développement. Le processus de gestation varie de quelques secondes à quelques heures. Il peut arriver qu'un bébé naisse après quelques jours, voir quelques semaines après la conception. Mais c'est plutôt rare. Mais lorsque ça arrive, ça ne dépasse pas un mois.
— Je vois. Mais comment savez-vous qu'il est totalement formé et prêt à sortir ?
— Le cocon émet une aura autour de lui et il devient plus mou pour permettre au bébé de sortir. Et si nous voyons qu'il n'y parvient pas tout seul, on l'aide.
— D'accord, je maintiens donc que le miracle de la vie comme tu le dis, ne perd rien de son charme ! acheva la jeune femme.
— Peut-être... Mais je trouve que voir le ventre de la femme s'arrondir de jours en jours et sentir ce petit être bouger à l'intérieur de son corps c'est bien plus magique !
— Décidément, on n'est jamais satisfait de ce que l'on a ! ria Maelyss. Du coup, comment ça se passe au niveau... sexuel ?
— Comment ça ?
— Eh bien, je sais que vous n'êtes pas autant porté sur la chose que les humains, que vous n'avez pas tout à fait la même sensibilité corporelle que nous et que vous n'aviez pas autant de zones érogènes que nous, du coup je me demandais si le plaisir que vous ressentiez était le même que nous et comment ça se passait concrètement ?
— ...pourquoi tu me poses ces questions ? D'ailleurs, pourquoi tu ne me les a pas posées avant ?
— Euh... ben parce qu'on a jamais vraiment eu l'occasion d'aborder ce sujet-là à cause de mes soucis avec Darkon. Parce que c'est un peu délicat et gênant aussi. Sans compter que les cours que j'ai eu à ce sujet faisaient très étude de laboratoire et ça me mettais un peu mal à l’aise pour vous... argumenta la jeune femme.
— Pourtant, à ma sortie de formation je savais l'essentiel sur le fonctionnement de votre système de reproduction. Et je n'ai pas eu la sensation de vous étudier comme des animaux de laboratoire... Cela dit, il est vrai que je me suis véritablement intéressé à la question que lorsque j'ai commencé à travailler pour toi, alors... je ne peux pas trop t'en vouloir.
La fille de Gokû détourna le regard en se mordant la lèvre inférieure, définitivement honteuse. Ses explications étaient encore plus dérisoires que sa pathétique tentative d'argumentation. Elle était embarrassée. Pas seulement pour elle - et ses aprioris totalement futils-, mais vis à vis de Genïe. La sexualité n'était pas censé être un sujet tabou. Encore moins entre meilleures amies. Cette conclusion lui fit subitement prendre conscience à quel point elle avait été idiote de ne pas avoir osé en parler davantage avec elle. Il fallait qu'elle y remédie !
— Bon, comme tu le sais déjà, contrairement à vous, notre sexe sert uniquement à nous procurer du plaisir et rien d'autre. C'est d'ailleurs ici que ce concentre l'essentiel du plaisir, expliqua la Majin. Et le sexe d'un homme Majin n'est pas visible en temps normal. Il ne se dévoile que lors de l'excitation sexuelle.
"J'avais remarqué, oui..." nota la guerrière pour elle-même tout en se faisant violence pour effacer le sourire imbécile qui menaçait de fendre son visage en deux.
— Quant aux autres zones érogènes, chez nous elles se limitent aux cuisses ou au ventre pour la femme et le torse ou les fesses pour l'homme. Il arrive parfois que certains Majins soient aussi légèrement sensibles des orteils et des seins... Mais ça reste un plaisir moindre comparé à vos zones à vous. Enfin, de ce que j'ai entendu dire. Je n'ai jamais eu... de rapports alors... Notre corps étant moins sensible que le vôtre, nous sommes moins réceptifs au toucher.
« Cela veut dire... qu'il n'a rien ressenti et que j'ai été la seule à avoir réellement eu du plaisir durant notre rapport ?" se questionna Maelyss, perplexe.
La Saiyanne se mordit la lèvre inférieure tandis que la culpabilité gagnait peu à peu son esprit. Bon sang ! Qu'est-ce qui lui avait pris de faire une chose pareille ? Et avec le plus grand ennemi de sa famille qui plus est ! C'était de la folie. De la folie pure et dure ! Enfin, le plus grave à ses yeux c'était... qu'elle avait apprécié ce moment partagé avec Buu. Maelyss secoua la tête de façon infinitésimal mais perfectible. Qu'est-ce qui lui prenait ? Comment pouvait-elle dire une chose pareille ? Il fallait à tout prix qu'elle se sorte cette histoire de la tête et vite !
— Ça ne va pas ?
La voix de Genïe retira brutalement Maelyss de ses pensées.
— Hein ? fit Maelyss. Si, si ça va... c'est juste que ça doit faire un peu bizarre de se dire que votre partenaire ne ressent presque rien quand vous l'embrassez ou le caressez...
— Tu sais, même si on est moins réceptifs, cela reste tout de même une marque d'affection et d'amour. Et je connais pleins de Majins qui adorent se faire des câlins ! Même si pour la plupart d'entre eux, le sexe n'est pas une nécessité pour qu'ils se sentent bien et heureux dans leur couple.
— Oui je comprends. Du coup je me demandais... Si Jaï et moi étions ensemble, est-ce que je devrais me protéger lors de rapports sexuels ?
— Hum... c'est difficile à répondre. Étant donné que l'état de reproduction est un état dans lequel on choisit volontairement d'être et que Jaï est quelqu'un de foncièrement honnête et respectueux, il n'y aurait à priori pas besoin que tu prennes une contraception, relation ou non. Quant à la notion de compatibilité... je crois savoir que nous avons un ADN relativement similaire, alors oui, si vous étiez ensemble, tu pourrais très tomber enceinte.
— Je vois... "Et si le Majin est malhonnête et irrespectueux que se passerait-il ?" se demanda Maelyss tandis qu'un noeud remontait le long de sa gorge.
— Disons que par mesure de précautions, il vaut mieux se protéger, on ne sait jamais ! lâcha Genïe.
— Et pour ce qui est des maladies ?
— Nous ne sommes pas touché par ça. Et nous ne produisons aucun virus sexuellement transmissible alors il n'y a aucune crainte à avoir de ce côté-là ? Mais dis-moi, tu me demande tout ça parce que tu comptes changer d'avis à propos de Jaï ?
— Quoi ? Ah, non, non ! C'était juste pour savoir, par curiosité ! sourit Maelyss. Bon, je vais aller faire un tour en ville. Tu viens avec moi ? s'enquit la Saiyanne.
— Non, je vais rester un peu ici pour bouquiner, je crois.
— D'accord, alors à plus tard !
La fille de Gokû termina rapidement son sandwich, puis fit se leva du canapé. D'un bref mouvement de la main gauche, elle troqua son bas de training et son haut, contre un jeans bleu foncé, un tee-shirt asymétrique rose fuchsia à courtes manches évasées et des sandales à talons. La jeune femme fit un rapide passage face l'immense miroir du vestibule pour vérifier si ses cheveux n'étaient pas trop en bataille, puis quitta le manoir. Elle emprunta le petit chemin de briques roses qui menaient à la grille de sécurité de la propriété, puis s'arrêta un instant.
Le soleil était peut-être absent en cette après-midi de juillet et même cela n'allait pas l'empêcher pour autant de faire sa petite promenade. Enfin, si les nuages daignaient ne pas assombrir encore plus le ciel déjà très gris. La jeune femme fixa l'immense prairie à travers la grille de la grande demeure, Peut-être qu'un tour dans la nature lui ferait davantage de bien qu'une balade en ville tout compte fait ! Un soupir s'échappa des lèvres de la fille de Gokû alors qu'au loin oiseau rouge quittait son nid pour rejoindre le ciel. Elle savait qu'elle ne pourrait pas garder son secret pour elle éternellement. Et peut-être que cette virée en pleine nature l'aiderait à trouver le moyen pour en parler à se meilleure amie...