Un soldat parmi tant d'autres.
Il était debout, au milieu de son rang, avec son armure qui couvrait l'intégralité de son corps, rien ne le distinguait du millier d'âmes qui patientait sur ce qui allait devenir un champ de bataille. Il avait peur, il savait qu'il allait probablement mourir aujourd'hui. C'était sa première bataille et probablement sa dernière.
Quelle ironie ! Quand il était enfant il jouait souvent à la guerre, il se revoyait courir vers le camp adverse en agitant son bâton. Parfois il gagnait et parfois il perdait, il devait alors s'allonger à terre et attendre que les autres aient fini. S'il perd aujourd'hui, il ne se relèvera pas, plus jamais. Dire qu'avant il voulait échapper à la vie monotone de son village et vivre d'aventures, à présent il regrettait cette vie confortable.
Son officier faisait face au régiment, il parlait de la nécessité de gagner du temps pour que le rituel du conseil des anciens marche, que leur sacrifice ne sera pas vain et que s'ils devaient mourir, ce serait dans la dignité.
Mourir dans la dignité ? Quelle bonne blague ! Que soit en lâche ou en héros, le résultat sera le même. Leurs ennemis venaient du ciel, dans des sphères de métal, il avaient certes des visages différents mais il avaient un but commun : conquérir leur planète et s'approprier le secret de leur métal. Ce métal qui composait leur armure, un alliage fabriqué par leurs meilleurs forgerons, était le nerf de la guerre. Le soldat savait qu'il lui ne restait plus que deux solutions : combattre ou fuir, courir loin de cette folie et se cacher en espérant qu'on ne le trouverait jamais. Le soldat pensa soudainement à son père, qu'un accident de chasse avait rendu inapte au combat, à sa mère et ses deux sœurs. Sa vie n'était pas seulement en jeu mais aussi celles de ses proches, de ceux qu'il aimait. L'enjeu de cette bataille était de détourner l'attention de l'ennemi et de gagner du temps pour les incantations des sages mettent tout le monde à l'abri.
Un bruit de tambour tira le soldat de ses pensées. Le régiment frappait leurs plastrons avec leur poing, le chant des guerriers allait commencer. Le soldat martela son torse lui aussi, créant un bruit semblable à celui d'un tambour. Des chants guerriers émergèrent des rangs, allant crescendo jusqu'à devenir assourdissant. Dans ce vacarme, le soldat prit la décision de se battre, ceux qui ne pouvaient se défendre avaient besoin de lui. Il se battrait et s'il devait mourir ce serait en défendant chèrement sa peau.
Le silence, tout d'un coup, tout le monde savait qu'ils arrivaient avant même qu'ils ne soient visibles. Détecter les puissances était vraiment utile, toute l'armée avait appris ce don avant d'entamer les hostilités. Les capitaines ordonnèrent de lever les bras vers le ciel. Tout le monde sut vers où pointer. Les officiers intimèrent la mise à feu, de multiples détonations retentirent, des milliers de kikohas, semblables à des étoiles filantes, fusèrent vers le ciel. De multiples détonations retentirent, suivies par des tirs de riposte. Un feu nourri fut échangé entre les deux camps. A trois reprises, des tirs ricochèrent sur l'armure du soldat. Il était en transe, les lumières dans le ciel, les corps des soldats adverses et les détonations, tout cela était surréaliste.
La charge fut lancée, le soldat s'élança dans un saut qui se transforma en vol, il repéra sa cible qui tira pour le repousser. En vain, les kikohas rebondissaient sur l'armure. Le soldat prit de la vitesse puis donna un coup de poing à l'ennemi. Des os craquèrent, l'énergie de l'inconnu s'éteignit comme une bougie en plein vent. Le soldat regarda l'homme chuter, il venait d'ôter la vie pour la première fois. Le soldat ne bougeait plus, il sentait que son déjeuner voulait sortir de son estomac. Un choc sur le coté lui fit rappeler qu'il était dans un champ de bataille. Un soldat au crane ovale le poussait vers le sol. L'impact au sol fut rude, le soldat crut se trouver entre un marteau et une enclume. Sonné, il se demanda pourquoi le forgeron continuait de le marteler. Il était un myuhi, pas un bout de métal.
- Putain de chat ! Je n'arrive pas à percer son armure.
Le soldat se rendit compte que c'était en réalité son ennemi qui tentait de briser son armure avec ses poings. Un tir repoussa l'alien en arrière, un coup de pied au crane mit fin à sa vie.
Un chat ? De quoi parlait cet étranger ? Le soldat était un myuhi, un félin qui marchait debout, il ne savait pas s'il venait d'être insulté ou non. Un de ses congénères s'écrasa près de lui. Le soldat eut un hoquet de surprise, l'armure avait été fracassée. Quel genre de monstre pouvait réussir un tel exploit ? Le soldat vit très vite le responsable : un humanoïde rose et obèse, ne possédant aucun poil. Ses lèvres bleues montrèrent un sourire sadique quand il transperça un autre myuhi avec son poing.
- Vite, j'ai besoin du plus grand nombre de soldats possible pour la tactique KG ! Cria un officier.
La tactique KG ou ki groupé consistait à regrouper un nombre X de soldats pour lancer un laser commun avec l'énergie combinée du groupe. Le soldat comprit qui était la cible, le gros soldat rose. Il alla vers l'officier et il se blottit contre les autres volontaires. Les mains des soldats pointèrent vers la même direction. Le groupe entier concentra son énergie, le soldat se sentit réchauffé par cette combinaison des auras. Le gros alien rose repéra le groupement de myuhis, il tira un laser avec sa bouche.
- Feu ! Cria l'officier.
Les deux lasers s'entrechoquèrent, le soldat sentit soudainement une forte pression dans ses bras, la puissance du kikoha ennemi était titanesque. Des cris plaintifs lui indiquèrent que ses coéquipiers ressentaient la même chose. La douce chaleur des auras se transforma en fournaise. Les muscles des bras devinrent douloureux, le soldat pria pour que cette torture ne dure pas longtemps. Malheureusement pour lui, les lasers ne bougeaient pas, le rapport de force entre les antagonistes était équilibré... ou presque. L'alien rose ne montrait aucun signe de fatigue alors que les myuhis gémissaient. Le soldat avait l'impression qu'on l'avait enfermé dans un four pour le cuire, ses bras endoloris semblaient lui supplier de s'arrêter mais son cerveau lui ordonnait de continuer. Il savait que s'il s'arrêtait ce serait la mort. La pression diminua soudainement, le soldat vit que d'autres myuhis harcelaient l'alien rose avec des tirs. Ce dernier agita les bras pour chasser les importuns. Un tir le toucha à l'œil, l'alien bougea la tête à cause de la douleur, son laser bougea vers le sol puis explosa. Les soldats myuhis rugirent, leur laser gagna en puissance et fonça vers l'ennemi. L'alien rose fut englouti par le laser. Le soldat cessa soudainement de diffuser son énergie. Il tomba à genoux, son armure semblait avoir gagné plusieurs tonnes. Il avait soif, il était épuisé mais l'ennemi était à terre.
Ses congénères poussèrent des cris de joies qui ne durèrent pas longtemps, un humanoïde d'une puissance équivalente venait de se poser près de l'alien rose.
- Alors ? Demanda le nouveau venu à un de ses subordonné.
- Il est encore vivant monsieur Zabon.
- Qu'est ce que vous attendez alors ? Emmenez Dodoria se faire soigner au vaisseau mère !
- Tout de suite monsieur !
Le dénommé Zabon s'intéressa au groupe de myuhis. Le soldat sentit la panique envahir son être, il n'avait plus la puissance nécessaire pour se défendre, il n'avait même plus la force de fuir. Si cet homme aux cheveux verts attaquait, c'était la fin pour lui et ses camarades.
Un silence de mort s'installa soudainement dans le champ de bataille. Intrigué, Zabon regarda autours de lui. Les myuhis s'étaient immobilisés, les envahisseurs se regardaient avec perplexité, ils ne comprenaient pas pourquoi leurs adversaires avaient cessé la lutte. Le soldat se figea, le pire était en train d'arriver. Une puissance titanesque descendait des cieux, ce pouvoir qui avait incité le conseil des anciens à organiser cette bataille.
- Seigneur Freezer ! Dit Zabon.
Le soldat vit l'être surpuissant se poser, il était surpris par son apparence. Il s'était imaginé un titan, un être gigantesque, une masse de muscle mais cet être n'avait rien d'impressionnant. Malgré la distance, le soldat estimait qu'il faisait au moins deux têtes de plus que ce Freezer. Sa carrure était comparable à celle d'un pré adolescent myuhi mais la puissance que dégageait cet être était mille fois supérieure à celle du soldat. Il y avait aussi ce regard cruel, arrogant et dénué de compassion qui faisait comprendre que cet être était bien plus redoutable qu'il en avait l'air.
- Hé bien ! On dirait que mon arrivée vous fait de l'effet. Puisque tout le monde a mon attention, laissez moi me présenter : je suis Freezer, l'empereur de cette armée. Si j'ai pris la peine de vous voir, c'est parce que la bataille semble tourner en votre faveur. Votre organisation et vos armures semblent causer des difficultés à mes hommes. Je suis venu ici pour vous éviter de faux espoirs car un seul destin vous attend si vous persistez dans votre lutte futile : la mort. Cependant, il serait dommage de gâcher un tel potentiel guerrier. Si vous acceptez de travailler pour moi, je vous épargnerais. Qu'en pensez vous ?
Un myuhi en armure d'apparat s'avança.
- Je suis le général Chartreux, je suis celui qui commande ces courageux soldats. J'étais présent quand votre émissaire nous a posé votre ultimatum. Vous voulez le secret de nos armures, vous voulez le savoir de nos forgerons et pire vous voulez que notre peuple travaille dans vos mines. Et maintenant, en plus de l'esclavage, vous voulez qu'on tue des innocents pour votre compte.
- Vous avez tout compris.
- Je refuse, mon honneur m'interdit de m'abaisser à de tels actes.
- L'honneur, un concept inventé par les idiots pour justifier leur propre stupidité... Très bien, il y a d'autres imbéciles prêts à mourir pour l'honneur ?
Les myuhis restèrent silencieux.
- Je prend ça pour un oui. Laissez les moi, je m'en occupe seul, nous verrons si votre roi sera aussi peu coopératif quand il saura que sa grande armée a été anéantie par un seul homme.
Des myuhis chargèrent et furent envoyés dans les airs d'un seul coup de poing. Le soldat vit avec horreur que les armures étaient brisées comme de vulgaires coquilles d'œufs.
- C'est inutile ! Que tout les myuhis en mesure de se battre, se regroupent par douzaine pour une tactique KG ! Cria le général Chartreux.
Le soldat voulut s'envoler mais il se rappela combien il était dangereux d'utiliser la tactique KG en état de fatigue. Pendant son instruction, on lui avait parlé de myuhis brulés vifs par le ki des autres. Il fallait juste espérer que ce monstre meure sous les kikohas combinés de ses camarades. Freezer ne semblait pas inquiété par ce groupement de myuhis dans le ciel, il semblait même amusé. Un doute traversa le soldat. Il se demanda si cet être surpuissant n'allait pas esquiver ou bloquer. L'intégralité des myuhis seront épuisés après la tactique KG, ils deviendront des cibles faciles. Il fallait que Freezer ne puisse pas riposter, il fallait une distraction. Le soldat eut soudain une idée, une idée à la fois géniale et stupide.
Le soldat s'envola vers Freezer en faisant du rase-motte, sa main gauche laboura le sol, il tira un kikoha avec sa main droite. La boule d'énergie détruisit le monocle de l'ennemi, le soldat fonça vers Freezer et... Il fut arrêté par la poigne d'acier du démon du froid.
- Tu as un sacré culot toi. Es tu fou ou es tu venu me servir de bouclier humain ?
Le soldat lança la terre qu'il avait avait collecté dans les yeux de Freezer, ce dernier poussa un cri en lâchant le soldat.
- Putain de chat, je vais me servir de ta fourrure comme descente de lit !
Le soldat prit la fuite, pas à cause de la colère du démon du froid mais en raison de la détonation qu'il venait d'entendre, les myuhis venaient de faire feu.
Le soldat entendit un bruit semblable à un coup de tonnerre et il sentit un souffle chaud le pousser en avant. Il vit une lumière le couvrir, il eut l'impression de faire un bain de lave tant la chaleur était infernale. Il entendit plusieurs craquements et la lumière disparut soudainement. Le soldat rebondit sur le sol puis il s'écrasa brutalement. Il laissa échapper une plainte de douleur, son corps tremblait, il vit que son armure était fissurée en plusieurs endroits. Elle était également tachée de sang, son propre sang. Ses oreilles sifflaient, probablement à cause de l'explosion, il essaya de se lever et, malgré la douleur, il parvint à se mettre debout. Il regarda vers le lieu de l'explosion, un immense cratère s'était creusé.
- Non !
Ce mot lui avait échappé, Freezer était en train de léviter au centre. Le démon du froid était indemne.
- Hé bien, beaucoup d'énergie dépensée pour pas grand chose, je suppose que vous avez perdu tout espoir de victoire maintenant. Je vais tous vous anéantir en un coup.
Le démon du froid rassembla toute son énergie dans son poing, le soldat sut que tous les soldats allaient être tués par l'énergie contenue dans cette main.
- Freezer !
Le démon du froid tourna la tête vers le soldat, ce dernier n'en revenait pas qu'il venait de crier. Son instinct de survie lui avait intimé de se faire oublier mais il l'avait ignoré. Il se demanda s'il n'était pas devenu fou.
- Tu te rappelles de moi ? Je suis celui qui t'as balancé de la terre à la figure.
Freezer apparut devant le soldat qui eut un mouvement de recul.
- C'est vraiment très serviable de te signaler, avec vos armures c'est impossible de vous distinguer les uns des autres.
Le casque du soldat se brisa en mille morceaux.
- Maintenant je ne risque plus de te confondre avec les autres et surtout je pourrais lire l'agonie sur ton visage quand je te porterai le coup fatal.
Le soldat frappa son adversaire au visage, ce dernier ne broncha pas. Le soldat multiplia ses frappes, Freezer se contenta de bailler.
- Ennuyant tout cela, je vais faire vite, j'ai une armée à exterminer.
Freezer pointa son index vers le soldat, ce dernier concentra son énergie dans son poing droit pour donner un dernier coup. Le démon du froid disparut soudainement, le soldat resta bouche bée un moment avant de regarder autours de lui. Il s'attendait à ce que Freezer réapparaisse et lui inflige mille tortures mais rien n'arrivait. En regardant attentivement il vit que tous les aliens, qu'ils soient morts ou vivants, avaient disparu.
- Que le grand félin soit loué, le rituel des anciens a fonctionné.
Le soldat sursauta, le général Chartreux s'était posé devant lui. Le soldat fit un salut maladroit.
- Repos soldat. En détournant l'attention de ce monstre, vous avez sans doute sauvé la vie de centaines de soldats, une action à la fois folle et courageuse. On dirait que le grand félin aime les fous et vous a sauvé d'une mort certaine.
- Merci mon général mais que s'est il passé exactement ? Je savais que le conseil des anciens faisait un rituel pour nous mettre à l'abri mais je ne connais pas les détails.
- Hé bien pour faire simple, notre planète a été téléportée loin des griffes de ce monstre et vu qu'il n'y a pas de brusques changements de température, nous devons être à une distance idéale d'une étoile.
- C'est vrai ? Comment une telle chose est possible ?
- Nos plus grands mages ont du se relayer pendant un mois pour permettre un tel miracle, le rôle de notre armée était de repousser les envahisseurs en attendant que la téléportation soit possible. Mais trêve de bavardage, je veux connaître votre nom. Il serait dommage que vous restiez un soldat parmi tant d'autre.
- Je suis le première classe Coon, Maine Coon.
- Très bien soldat Coon, je ferais en sorte que votre courage soit récompensé.
Pendant ce temps, de nombreux soldats de Freezer mourraient dans le vide de l'espace. Certains volaient au hasard dans l'espoir de retrouver leur pods. Zabon retrouva le vaisseau mère et activa un des sas auxiliaires. Les poumons en feu, il attendit que la porte de sécurité s'ouvre enfin. Il pénétra dans le vaisseau en prenant de longues inspirations.
- Monsieur Zabon, vous avez réussi à revenir. C'est la panique dehors, beaucoup de nos hommes sont en train de mourir. Dit un opérateur.
- Que diable s'est il passé ? Cria Freezer.
- Je l'ignore seigneur, la planète a tout simplement disparu.
- Je veux des explications, maintenant !
Zabon s'éloigna discrètement, il était rare que quelque chose échappe à Freezer. Et quand ça arrivait, il passait ses nerfs sur ses hommes. Il y aura des morts et Zabon ne voulait pas en faire partie.
Fin