Enfin, il rentrait chez lui. Combien de temps cela faisait qu’il n’était pas venu ? Il ne le savait probablement pas réellement lui-même. Un jour. Une semaine. Un mois. Non, trois semaines. Oui, c’était bien ça.
Il était parti un jeudi, prétextant partir chercher de la nourriture en plus. Les personnes se trouvant à l’intérieur de son habitation étaient sans doute parties. Il l’espérait, en tout cas. Si seulement ça pouvait être vrai. Si seulement elles avaient pu retourner chez elles.
Enfin, il n’avait pas réellement le droit de se plaindre. Après tout, c’était de sa faute si elles étaient toutes devenues comme ça.
À la base, elles n’étaient que de simples jeunes filles timides et tristes d’avoir été enlevées. Mais, par la suite, elles s’étaient montrées bien plus arrogantes, autoritaires et extraverties. Il en avait fait de véritables jeunes femmes pourries gâtées. Lui qui ne rêvait que de trouver l’amour, mener une vie simple, et mourir en la compagnie de la femme qu’il aime.
Mais désormais il était face à la porte d’entrée, hésitant. D’un coup, il se motiva de nouveau.
« Allez, mon cochon ! Elles ne peuvent pas être restées ! » dit-il à voix haute, pour se rassurer, avant de lentement tourner la poignée, faisant bien attention à ne pas faire le moindre bruit.
Malgré toutes ses précautions, une fois que la lumière pénétra à l’intérieur de l’entrée de la bâtisse, une demi-dizaine de jeunes filles lui sautèrent dessus en même temps, synchronisées. Comme si elles s’y étaient entraîné durant ces trois semaines.
Rapidement, beaucoup plus vite qu’il n’avait jamais fait, il trouva une ouverture et s’y engouffra, parvenant à entrer dans sa maison. Sans perdre plus de temps, il referma l’accès à clef. Il était désormais seul à l’intérieur, et pouvait enfin se relaxer sans une de ces sept filles collées à lui.
Hein ? Sept ? Mais.. mais.. le bellâtre prit alors le temps de regarder par la fenêtre. Seul cinq d’entre elles se trouvaient collées à la porte, frappant comme si c’était leur seul moyen de fuir un démon.
Il lui restait deux possibilités. Soit elles étaient encore à l’intérieur, l’attendant cachées dans un coin de la maison, soit elles étaient rentrées chez elles.
Alors, l’homme-porc se décida. Armé d’un chandelier allumé, il se mit à fouiller chaque pièce précautionneusement. Même si ses jambes pouvaient à tout moment le lâcher, tant elles tremblaient, il pénétra dans la première pièce sur son chemin. Le salon. Enfin le premier. Il y en avait trois, au total. Ben quoi ? Il lui fallait bien de la place, pour accueillir ses ‘‘conquêtes’’ et puis, il avait l’argent pour le faire, de toute façon. C’était de l’argent tout à fait légal, et propre. Il n’était tombé qu’une seule fois du camion. Enfin, il avait sauté dans un sac placé par le transformiste, voila tout. Rien de plus normal.
Le premier salon n’avait rien à signaler. Tout était à sa place, et personne ne s’y cachait. À moins de réussir à se cacher dans l’écran plat, ou la table en cristal, du moins. Quelque chose d’impossible, en soit. Après un rapide soupir de soulagement, le cochon retourna dans le long couloirs, et ouvrit la porte de la pièce opposée au premier salon.
C’était des toilettes. Sans chercher à l’intérieur, il referma la porte, de plus en plus soulagé. Plus qu’une vingtaine de pièces et il pourrait enfin rallumer la lumière, et profiter de son immense séjour.
Enfin, il devait s’avouer qu’il n’avait pas vraiment l’envie de fouiller partout, à la recherche de personnes nuisibles. Oui, il allait s’installer dans son salon, devant la télé, et, pourquoi pas, un peu de nourriture, et passerait toute son après-midi comme ça. Et, au pire, si quelqu’un venait lui causer des soucis, il se transformerait en un petit animal, comme un cafard, une araignée, ou bien même une souris, et prendrait la fuite. Comme il l’avait toujours fait, d’ailleurs.
Mais c’est au moment où il alluma la télévision qu’un bruit retentit. Il venait de la porte. C’étaient sans doute les filles, qui tentaient de la défoncer. Manque de chance, elle était faite en un bois si résistant que même lui, qui avait eu des cours d’arts martiaux à l’école ne pouvait la briser.
Pourtant, il ne leur fallut que quelques coups de la même force pour parvenir à leur but. Elles pouvaient désormais entrer, et agripper à l’homme qu’elles aimaient. Lui faire des câlins, et, surtout, ne plus jamais le laisser les quitter. Pas même pour aller aux toilettes.
Oui, elles étaient clairement flippantes. Au moment où elles entrèrent dans le salon, elle virent la télé allumée, mais aucune trace du propriétaire des lieux, et de leur cœur.
Effectivement, il s’était transformé, comme prévu, en araignée, et se trouvait suspendu au plafond, chronométrant au millième près le temps qu’il lui restait avant de reprendre sa forme originelle.
Heureusement pour lui, elles partirent à sa recherche bien rapidement. Le seul inconvénient, c’est que deux d’entre elles étaient restées devant l’entrée, lui bloquant toute chance de fuite par ici. Il allait devoir se cacher dans la maison, en attendant les secours ? Des secours ? Pour lui ? Pff, personne ne le connaissait, à part ces jeunes filles pleines de rage. Bien entendu, il y avait sans doute leur familles, mais le cochon se doutait bien que vu l’intensité de la peur qu’ils éprouvaient à chacune de ses apparitions, ils ne pouvaient venir chercher leur filles. Peut-être qu’avec un miracle, ils le feraient. Mais il fallait se montrer réaliste. Un miracle est appelé comme ça parce que ça n’arrive tout bonnement jamais.
C’est bon, il était bien caché. Jamais personne n’imaginerait qu’il se trouvait au grenier. Et même si elles arrivaient, par n’importe quel moyen, à le découvrir, il pourrait toujours se changer en mouche, et fuir de nouveau. Mais était-ce vraiment possible, avec elles ? Elles n’étaient rien d’autre que des loups, qui pourchassaient leur proie dans une tanière.
« Oolon, montre-toi. Allez, mon amour, je ne te veux que du bien ! » commença une voix féminine qui paraissait sincère.
Pourtant, moins d’une dizaine de secondes plus tard, son ton de voix changea, de même que son expression faciale. On aurait dit un véritable démon.
« BON, J’EN AI MARRE DE JOUER AVEC TOI ! TU VAS TE MONTRER?! » hurla-t-elle presque, révélant ses réelles intentions.
Cela fit sursauter l’interpellé de peur, mais il ne se montra néanmoins pas. Il savait qu’en restant caché encore quelques secondes, il pourrait rester caché jusque tard dans la nuit, au moment où elles dormiraient. Ce plan aurait sans doute marché, oui. Mais il fut annulé par un petit imprévu. Oolon, en voulant se gratter le ventre, fit tomber un objet – il n’eut pas vraiment le temps de s’y intéresser sur le coup – et, avec une rapidité dépassant la vitesse de n’importe quel coureur, la jeune fille se trouvait déjà sur lui. Il était coincé. À moins que…
Sans prendre le temps d’hésiter, il se transforma en haut-parleur, et, avec la plus merveilleuse de ses intonations, il se mit à parler.
« Venez, je suis dans le grenier, j’en ai marre de jouer à cache-cache ! » déclara-t-il, certain qu’elles seraient appâtés. Ça ne rata pas, puisqu’elles débarquèrent en moins de trois secondes. Désormais, elles encerclaient l’objet de leurs désirs.
Au moment où elles s’accordèrent pour lui sauter dessus, le petit cochon de lait se transforma de nouveau, cette fois-ci en une mouche. D’un battement d’ailes, il se trouvait dans l’escalier. D’un autre, il était descendu. Encore quelques uns et il était désormais devant la porte d’entrée. C’est à ce moment qu’il retrouva son apparence normale. Mais ça ne l’empêcha pas de continuer sa fuite. Il couru très vite, même lorsque ses petits poumons n’en pouvaient plus. Finalement, il arriva face à une étendue d’eau, devant laquelle se tenaient deux personnes, un petit garçon, et une jeune fille de seize ans.
« Tout compte fait, je vais venir avec vous. Ces ‘‘dragon ball’’ m’intéressent. »