DBAF-Lamantin

Faîtes-nous partager votre fibre littéraire en écrivant votre propre histoire mettant en scène les personnages de Dragon Ball et, pourquoi pas, de nouveaux ! Seules les fanfictions textes figurent ici.

Re: DBAF-Lamantin

Messagepar Paulemile le Ven Juil 29, 2016 16:32

Yo,

Grace aux awards d'Omurah, je me suis lancé dans la lecture de cette fic.
J'ai lu les 3 OS avant et là j'ai englouti les 7 premiers chapitres.

J'ai vraiment bien.
Il y a parfois des fautes facilement évitables mais ça ne gêne pas trop.

Le seul défaut que je pourrais trouver, c'est que c'est parfois un peu bordélique, qu'on ne capte pas bien ce qui se passe à tel moment, par rapport au paragraphe précédent, car il y a quelque fois des ellipses et on ne s'en rend pas bien compte.

Bref, à part ça. J'adore le fait que la magie prenne une grande place dans le monde de DB. Je trouve ça totalement logique et c'est classe.

Toute la partie sur le Makai est géniale, les persos attachants et l'intrigue assez cool.

J'ai beaucoup aimé la taverne dans laquelle est emportée Psychée, ça fait vraiment penser au Tambour Crevé dans les bouquins de Pratchett :D

Enfin, la description des personnages, l'originalité de chacun tant au niveau de l'apparence que du caractère, c'est assez dingue.

Ah oui, et tout le passage sur l'initiation de Derek, une tuerie.

Voilà, je suis à fond dedans. Je m'y remets dès que je peux :)
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Re: DBAF-Lamantin

Messagepar omurah le Ven Sep 09, 2016 17:33

Lamantin_Furtif a écrit:(je veux bien les titres de mes concurrents du coup)

J'ai pas oublié (c'était sur ma "to-answer-list") du coup je répond à la question avec 500 plombes de retard : les auteurs actifs que je vois dans le même créneau sont : GLaDOS, Xela, Satan Sama et Niic (quand la mafia est entrée peu ou prou en jeu) ^^

Voilà, voilà, c'était la séquence osef du jour mais comme j'aime pas mettre de vents xD :mrgreen:
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Re: DBAF-Lamantin

Messagepar Lamantin_Furtif le Dim Oct 16, 2016 23:42

YOOOOOOOOO

Whou, désolé du délais et de la non-réponse, mais j'étais persuadé de finir cce chap' vite fait bien fait et en fait... Moui, l'histoire est familière.

Paulemile a écrit:Yo,

Grace aux awards d'Omurah, je me suis lancé dans la lecture de cette fic.
J'ai lu les 3 OS avant et là j'ai englouti les 7 premiers chapitres.


Merci ! Content que ça plaise à un auteur aussi chevronné ! (oui, je vais essayer de faire mieux pour les fautes)

Paulemile a écrit:Le seul défaut que je pourrais trouver, c'est que c'est parfois un peu bordélique, qu'on ne capte pas bien ce qui se passe à tel moment, par rapport au paragraphe précédent, car il y a quelque fois des ellipses et on ne s'en rend pas bien compte.


Hum... ça c'est un souci que j'ai du mal à régler. Le principe de ce début de fic est de mettre en place le plus de choses le plus vite possible tout en ne lasssant pas le lecteur, forcément ça secoue. ça se pose un peu par la suite

Paulemile a écrit:Bref, à part ça. J'adore le fait que la magie prenne une grande place dans le monde de DB. Je trouve ça totalement logique et c'est classe.

Yep ! On reste dans la continuité de la saga Boo, en montant d'un niveau


Et un merci global pour ton appréciation des personnages. C'est vraiment là-dedans que j'essaie de mettre le plus de travail possible, pour avoir des personnages intéressants, utiles, et avec un "chara-design" très distinct l'un de l'autre. En effet, Pratchett est celui qui influence le plus toute l'ambiance "relai du destin + l'immortel + Psychée"

omurah a écrit:
Lamantin_Furtif a écrit:(je veux bien les titres de mes concurrents du coup)

J'ai pas oublié (c'était sur ma "to-answer-list") du coup je répond à la question avec 500 plombes de retard : les auteurs actifs que je vois dans le même créneau sont : GLaDOS, Xela, Satan Sama et Niic (quand la mafia est entrée peu ou prou en jeu) ^^

Voilà, voilà, c'était la séquence osef du jour mais comme j'aime pas mettre de vents xD :mrgreen:


Okok, je garde ceux-ci dans le viseur et on se prépare.


Chapitre 13 - Exil



    - Tu vois, Sepet, je ne suis pas fâché que tu m'aies trahi. Par contre, je suis très déçu.

Le sol du chalet était plein de sang et de bouts de chair difficiles à identifier. Les dégâts infligés à Sepet étaient trop profonds pour la médecine « traditionnelle », et le nécromancien avait dû dépiauter la plupart des organes vitaux pendant l'opération, tout en gardant le reste du corps en état. Évidemment, c'était impossible à réaliser sans tuer ou rendre fou de douleur le sujet, d'autant plus que le cerveau du vampire avait lui aussi été affecté par les brûlures internes. Son statut de nécromancien faisait paradoxalement d'Abel le médecin le plus exceptionnel qu'on puisse imaginer. Il se contentait la plupart du temps d'abattre ses patients d'une étincelle noire bien placée, pour ensuite s'attaquer directement aux tissus endommagés, sans se soucier des conséquences. Il fallait aussi de quoi créer du sang, mais là encore, le nécromancien avait un sort pour ça..
Pour cette opération-ci, il avait fallu abattre Sepet à l'ancienne, ce qui n'était pas pour simplifier la tâche. Les vampires résistaient aux flammes noires : c'était le détail le plus important de leur conception. Ni vivants, ni tout à fait morts, ils n'avaient rien à voir avec les zombies, dont Abel se contentait se raviver la chair en créant un simulacre de vie assujetti à sa volonté. Rien à voir non plus avec ceux qui, comme Nadil, avaient été véritablement ressuscités, et pour qui tout nouveau contact avec le flammes noires serait à nouveau fatal.

Sans cette condition de demi-morts, il aurait été impossible pour Abel de transférer sa conscience dans l'un d'entre eux, alors qu'il s'agissait tout de même là de son objectif principal. Un corps normal périrait dans la seconde, une fois fusionné à son aura fatale. En contrepartie, ils étaient forcés de raviver la malédiction qui leur accordait leurs pouvoirs par une consommation régulière de catalyseur, d'où les besoins en sang. (Ou en poussière de lune, ou en os de sorciers, ou en paillettes d'orichalque irradiées... Il y avait des tas de catalyseurs, mais allez savoir pourquoi, les gens avaient tendance à préférer le sang frais.)

Et c'était bien cette condition qui avait forcé Abel à l'achever d'une manière plus conventionnelle, et nécessairement spectaculaire, au vu de l'endurance anormale d'un vampire de première génération. Une fois le corps majoritairement reconstruit, Abel s'était attaqué au cerveau. Lucie s'y était prise comme une brute épaisse : on pouvait suivre les marques de brûlures qui s'étendaient sur tout le cortex, mais, heureusement, à faible profondeur. Il avait fallu chercher les empreintes antérieures laissées sur les plans de réminiscence. Un sacré exercice, mais, malgré sa traîtrise, Abel se souvenait toujours de celui qui avait été son plus fidèle serviteur.

Toujours allongé sur un drap trempé devenu complètement rouge, dans cette pièce qui empestait la viande fraîche, Sepet, plus livide que jamais, se contentait de regarder le ciel. Abel avait gracieusement effacé la plupart des souvenirs liés au châtiment de Lucie, mais en avait laissé bien assez pour tuer dans l’œuf toute volonté de récidive.
Le vampire avait mal partout. Les nerfs devaient se reconstruire, et le fourmillement de petites démangeaisons servait de bruit de fond pour des pics sensoriels plus importants. Tout affreusement désagréable, mais comparé à ce qu'il avait subi une dizaine d'heures auparavant, cela faisait figure d'extase. Et puis, il y avait cette odeur de vomi. Matsu n'avait pas supporté la médecine du nécromancien.

Abel venait de se lever. Il faisait toujours les cent pas quand quelque chose le gênait.

    - C'est... C'est la combientième fois que je te sauve la vie, déjà ?

    - ...

    - Je ne m'en souviens même pas. Tu serais mort dans ta putain de prison si je n'étais pas venu te chercher, la première fois. Et tu l'aurais mérité ! Je t'ai donné la vie éternelle !

Tout ceci était vrai, mais incomplet. Pouvait-on considérer un enrôlement de force comme cobaye pour les expériences mortelles du nécromancien comme une chance ? Il n'y avait eu que quatre survivants, parmi le millier de sujets initiaux, et plus que trois après qu'Abel se soit emparé de l'un des corps.
Restait que ces trois-là avaient eu une chance inouïe, et qu'il en avait fait partie. L'un dans l'autre...

Abel s'était calmé. Il avait finit de marcher, et s'était assis devant lui, les mains jointes.

    - Alors ? Qui est ce sorcier ? C'est aussi lui qui maintient le sort d'oubli, je présume. Il doit vraiment tenir à sa discrétion.

Sepet était piégé. En l'espace d'une journée, il serait devenu un double traître.

    - On l'appelle juste « le chef ».

    - Mais ce n'est pas son vrai nom, n'est-ce pas ?

    - ...



*******



Les montagnes, les lacs, les plaines, les océans.... Tout ceci se fondait dans un flou. Lucie se déplaçait dans toutes les directions à la fois, à une vitesse défiant toute concurrence. Il y avait déjà eu plusieurs explorations de ce genre, presque toutes infructueuses, jusqu'à la dernière en date. Le sort d'oubli les faisait invariablement tourner en rond. Mais cette fois-ci, Lucie savait ce qu'elle cherchait. Elle l'avait extirpé du cerveau de ce maudit vampire avec une certaine délectation, et, toute à sa fureur, s'était immédiatement mise en route. L'apprenti se chargerait d'avertir Abel.

Le monde défilait toujours plus vite, alors qu'elle engloutissait des millions de kilomètres, sans jamais ralentir, à la recherche d'une faille dans le sort, concentrant ses pouvoirs pour parvenir à passer outre. Son esprit sondait les plans sans relâche, et elle finit par trouver un pliage anormal, une courbe un peu trop stable, et ce fut tout ce dont elle eut besoin. Sa forme se condensa, et, elle fendit le ciel du Makaï comme un soleil miniature. Il ne lui fallut pas longtemps. L'entrelacs de magie trompeuse se défaisait sous son emprise, et chaque kilomètre parcouru affaiblissait le sort. Puis, il n'y eut plus de résistance, et elle vit enfin la silhouette estropiée, trônant sur un piton rocheux. Il l'attendait.

Évidemment. Il n'avait aucune raison de fuir devant elle.

Lucie se manifesta, ailes battantes, à quelques mètres de lui, sans qu'il ne détourne le regard. Elle prit le temps de s'attarder sur ce bras figé qui avait autrefois brisé mille tyrans, sur cette jambe raide et infirme qui avait supporté l'équilibre du monde pendant une éternité, sur cette face aux traits tombants dans laquelle on devinait les ruines d'un autre âge. Il était à la fois familier et méconnaissable, indestructible et pourtant brisé, force et décrépitude. Il souriait de toute sa moitié de visage.

    - Cela faisait longtemps, Lucie.

    - Cela faisait longtemps, en effet, ...



********


Il y a bien longtemps (mais pas tant que ça)


Baphasi parvint à se jeter sur le côté avant que l'énorme poing de pierre ne percute sa position. Elle roula par terre, fit trois sauts en arrière, et tenta de reprendre son souffle, sans succès. L'impact titanesque avait fendu la roche friable sur des kilomètres, entraînant un glissement de terrain, qui emportait maintenant des milliers de tonnes de roche dans sa course. Impossible d'y voir quoi que ce soit dans un pareil nuage de poussière, et Baphasi ne distingua qu'au dernier moment le rougeoiement caractéristique du corps enflammé de son adversaire, ce qui lui permit de se replier dans une direction sûre, où son champ de vision s'étendrait à plus de trois mètres.

...

Soit le sol était anormalement fragile à cet endroit, soit cet enfoiré était beaucoup plus fort que prévu. Le paysage des désolations était un désert de canyons et de falaises, et celle sur laquelle ils se battaient venait de reculer de plusieurs kilomètres. Le coup avait transformé une pente relativement douce en une paroi à pic de plus de deux cent mètres de haut en broyant les roches les plus faibles. Pas de corps-à-corps. Cela était plus que jamais une question de survie. Elle ne pourrait jamais survivre à l'un ces coups, se dit-elle en plongeant vers le sol pour y réengager le combat. Il fallait trouver un moyen de gagner sans perdre toute son énergie, et vite !

Quelle folie avait-elle donc commise en abandonnant le son royaume sans escorte pour suivre un rêve et une vision ? Abel et Ladra s'entendaient comme chien et chat, et Panka aurait besoin de... Bah, trop tard ! Panka devrait bien se débrouiller avec la dépouille de Gilgamesh comme ace dans la manche. Baphasi était déjà trop loin pour faire demi-tour et, si ses visions s'avéraient exactes, elle aurait grand-besoin des guerriers des désolations dans les années à venir. En supposant que celui-ci ne la tue pas avant, naturellement.

Ces trois mois de traversée du Makaï l'avaient épuisée. Comme il était vite devenu impossible de se déplacer en volant sans attirer les dragons, elle s'était résignée à un voyage à pieds, par bonds géants, nettement plus discret. Elle avait vite appris à minimiser les bruits qu'elle déclenchait, néanmoins. Il y avait d'autres choses qui rôdaient dans les désolations, et elles avaient généralement l'oreille affûtée.
Cela avait été la partie facile du voyage, et elle s'était arrêtée il y avait deux semaines. À partir de là, elle avait pénétré dans le territoire des hommes d'argile.

La première chose qui l'avait marquée, c'était la disparition progressive des dragons à mesure qu'elle s'y enfonçait. Les ombres qui obscurcissaient ciel et l'obligeaient auparavant à se cacher toutes les deux heures s'étaient faites de plus en plus rares. À vrai dire, seules les plantes prospéraient ici. Les quelques animaux que l'on pouvait encore apercevoir n'étaient que de petits rongeurs, ou des genres de passereaux aux becs tranchants. Libérée de ses rencontres journalières avec un grand prédateur, Baphasi avait avancé bien plus vite et tranquillement. Jusqu'à ce qu'elle rencontre son premier homme d'argile.

Les désolations grouillaient de ces saletés. De tailles et d'apparences diverses, il s'agissait presque toujours d'humanoïdes, et ils avaient en commun cet étrange corps pâteux et brûlant qui tournait aux cendres dès lors qu'on le sortait de sa carapace de terre cuite. L'exo-squelette changeait d'apparence selon les individus et était devenu un bon indicateur de leur niveau de dangerosité. Les plus faibles étaient vêtus de blocs grossiers, mais certains semblaient arborer une sorte d'armure, recouverte d'une d'écriture cunéiforme et de fresques représentant des éléments impossibles à identifier. Ceux-là, Baphasi avait appris à les éviter : son Don n'avait pas le moindre effet sur eux et, malgré ses rapides progrès, elle était toujours loin de les écraser en terme de puissance brute.
Celui-ci était un gros spécimen. Les jointures de sa carapace laissaient échapper une bouffée de flammes rouges à chaque effort trop rapide, et les vagues de chaleur qui s'échappaient de son corps lui desséchaient les yeux en permanence. Il avait requis un gros sacrifice, sans le moindre doute.

Le territoire des hommes d'argile était parsemé de cercles de pierre dans lesquels on trouvait parfois le corps carbonisé de l'un des rares êtres vivants à s'être égaré dans le secteur. Il n'avait pas fallu longtemps à Baphasi pour faire le lien entre les différentes tailles et formes de ses agresseurs et les restes des créatures immolées à proximité. Les plus petits hommes d'argile, tous de la même morphologie grossière, étaient trop nombreux pour avoir été générés de cette manière, mais les autres... La vision fugace d'un alter-ego au corps de flammes vêtu de terre la plongea dans une rage noire envers cette engeance.

Elle sauta pour esquiver la jambe qui menaçait de la faucher, et profita de la position pour lancer une puissante attaque de ki vers le crâne lisse et orné de la créature. Elle se réceptionna dans un son satisfaisant de pot cassé. Une coulée de magma rougeoyant coulait du crâne de l'homme d'argile, mais il tenait encore debout. Et merde. Un avant-bras presque aussi grand qu'elle fusa dans sa direction, et Baphasi dut encore une fois se jeter sur le côté pour y échapper.
Elle avait depuis longtemps abandonné l'idée de les affronter au corps-à-corps. Son bras gauche recouvert de cloques lui rappelait en permanence à quel point les corps minéraux étaient chauds. Elle se maudissait d'avoir été trop paresseuse pour apprendre la cryomancie, plus jeune. Ça aurait sûrement été très efficace, et lancer une attaque de feu sur une de ces choses était juste trop stupide pour qu'elle se résolve à l'essayer. Il ne restait que les kikohas... Mais ça avait le défaut de coûter très cher en énergie, et Baphasi était épuisée depuis plusieurs jours.

Il fallait terminer celui-ci avec sa prochaine attaque, ou son voyage dans les désolations se terminerait plus vite que prévu.

La créature s'était ressaisie et s'apprêtait à repartir à l'assaut. Elle fit jouer ses articulation, et la chaleur se fit de plus en plus étouffante. C'était maintenant ou jamais. Baphasi commença à concentrer son ki, prête à réagir au quart de tour quand l'assaillant passerait à l'action.

BLAM


La reine du Makaï, fauchée par le souffle de l'explosion, valdingua sur une trois cent mètres, laissant échapper un cri à chaque obstacle qu'elle détruisait dans sa course. Elle finit son dérapage sur la poussière ocre, sous une pluie d'éclats d'argile brûlants. Il ne restait plus qu'un cratère là où son adversaire s'était tenu quelques secondes auparavant.
Paniquée, elle essaya de localiser l'identité du nouvel arrivant, prête à fuir. Même au sommet de ses capacités, elle n'aurait jamais pu produire une attaque aussi puissante. Il ne lui fallut pas longtemps pour le trouver, néanmoins. Il, ou plutôt elle, fanfaronnait depuis sa position en hauteur. Elle ne ressemblait à aucun démon dont Baphasi eut connaissance : qu'il s'agisse de ce grand corps gris écailleux ou de cette énorme crinière blonde et drue qui pointait derrière elle, agitée par un vent invisible, tout indiquait une native du monde d'au-dessus.

Était-ce là un cas isolé, ou était-elle vouée à affronter de telles créatures à la surface ? Autant abandonner tout de suite si c'était le cas. L'inconnue avait fini de s'esclaffer. Elle se planta devant Baphasi avec un grand sourire.

    - Hey, salut chef ! Tu visites le coin ?

Il fallut quelques secondes à Baphasi pour comprendre qu'on l'ignorait, et que le « chef » en question se trouvait derrière elle. Vint alors naturellement la question « depuis combien de temps ? ».
Lentement, pleine d’appréhension, elle se retourna pour voir celui qui parvenait à asseoir son autorité sur une pareille guerrière.

Sans s'attendre à rien, elle ne put étouffer un hoquet de surprise. Ce qu'elle avait pris dans ses visions pour une allégorie prenait vie sous ses yeux. Elle était en présence d'un héros. Non. Du héros. Chaque trait, chaque geste était celui d'une légende venue à la vie, car il était celui qui avait donné vie aux légendes. Un archétype sorti des méandres du subconscient collectif s'avérait d'un coup lié à une réalité concrète. Elle avait devant elle le héros zéro, celui dont découlaient tous les autres, et qui, par essence, les éclipsait tous. Il était exactement comme on aurait pu se le figurer, car il avait gravé son image au cœur du monde de ses propres mains, et c'était elle qui ressortait à la mention d'un sauveur, d'un roi, d'une barrière de justice et de droiture contre les ténèbres d'un univers impitoyable. La légende ne comprenait que la moitié droite de l'homme.
À gauche, une paupière amorphe s'écrasait sur son œil, et des lèvres tombantes tordaient sa bouche et le forçaient à articuler exagérément chaque mot. Baphasi n'avait presque jamais été exposée à la misère, mais en une seule occasion, lors d'une visite à Ionia, elle avait entrevu un homme handicapé au point de ne plus pouvoir se mouvoir sans un siège harnaché de métal antigrav qu'un de ses proches poussait devant lui. Même en sachant qu'elle-même, avec à sa disposition les meilleurs sorciers-docteurs du Makaï, en était à l'abri, la peur viscérale de la mutilation avait hanté ses cauchemars pendant des mois.
Et elle avait devant elle, en ce pas sûr et claudiquant, en cette silhouette invincible et brisée, l'incarnation même de cette peur.

La panique faillit la prendre à la gorge lorsqu'elle fit le lien entre le rougeoiement qu'on devinait sous la veste de cuir à l'emplacement approximatif du cœur de cet individu, et celui émis par les hommes d'argiles. Était-il une forme très évoluée de ces créatures ? Ou un hybride ?

    - Non, je m'assurais de la sécurité de notre invitée. Parce que, vois-tu, quelqu'un a insisté pour se charger de cette zone, mais n'est quand même pas fichue d'empêcher les prométhéens de proliférer.

Petit blanc gênant. On entendait encore les derniers morceaux de terre cuite tomber au sol. Cet homme la suivait à la trace depuis le début du combat... Malgré la peur et la fatigue, elle sentit la colère remonter. Une colère surtout dirigée contre elle-même. Sans aide, elle ne s'en serait probablement pas sortie.
Et pendant ce temps, le chef continuait de sermonner sa salvatrice, de sa voix empreinte d'autorité millénaire. La menace des hommes d'argile, ou « prométhéens » , comme il les appelait, était manifestement à prendre très au sérieux. Et la guerrière, nommée Lothurie, avait plusieurs frères et sœurs aussi puissants qu'elle. Ils discutaient duquel d'entre eux pourrait la seconder dans la surveillance du territoire dont elle avait la charge. Baphasi envisageait presque de s'éclipser, quand les deux interlocuteurs parvinrent à un accord, pour enfin se retourner vers elle. Le chef prit la parole, cordial.

    - Excusez-nous, madame. Bienvenue dans la bande des oubliés. Vous avez beaucoup voyagé et l'endroit n'est pas très sûr, vous voudrez peut-être rejoindre un de nos repaires pour vous y reposer ?

L'homme s'éleva dans les airs, l'invitant d'un geste à le suivre. Rien dans son ton ne laissait supposer qu'elle pût refuser l'invitation. Elle n'en avait de toute façon pas l'intention : sa prochaine rencontre avec un homme d'argile lui serait fatale.
...
Les hommes d'argile...

Sous le choc, Baphasi s'arrêta en plein vol. Son guide se retourna vers elle, interrogateur. Elle demanda enfin :

    - Les prométhéens. Ce sont eux les titans. C'est ça ? Ce sont eux qui ont faillit exterminer les démons.

Le chef eut un bref éclat de rire, avant de secouer la tête, négatif.

    - Ha ha, heureusement que non ! Sinon nous serions dans un sacré pétrin ! Ce sont plutôt des sortes de drones, voyez-vous.

Il la saisit par le bras et s'envola à pic, à une vitesse fulgurante. Un quelconque sortilège empêchait Baphasi d'être blessée par cette subite accélération. Les couleurs se firent floues, et elle perdit immédiatement tout repère dans l'espace. Il y eut une dizaine de secondes d'ascension à ce rythme avant qu'il ne les arrête brusquement. Pas de choc, pas de nausées malgré ces mouvements brusques, et pour quelque raison, elle ne suffoquait pas à cette altitude. Ils étaient beaucoup plus haut que les nuages. Beaucoup plus haut qu'elle n'était jamais allée. Après s'être assuré qu'elle parvenait à tenir en l'air d'elle-même, le chef tendit son bras valide, et les nuages s'écartèrent instantanément, lui permettant de distinguer le sol. La reine du Makaï mit plusieurs minutes à comprendre ce qu'elle avait sous les yeux, à remettre dans ce nouveau contexte la géographie qu'elle arpentait depuis des semaines.
Le héros pointa le sol du doigt et s'écria :

    - Ça c'est un titan !

Et l'évidence lui sauta à la gorge. Elle paniqua, battit des bras, étouffée par l'absurdité de ce qu'elle contemplait. Haletante sous la panique, tiraillée entre le besoin impérieux de fuir, et la certitude que nulle part ne serait assez loin. Des kilomètres en contrebas elle apercevait, minuscule, les traces du mouvement de terrain que l'homme d'argile avait déclenché. Seconde après seconde, ses yeux arrachaient un peu plus à son bon sens les formes qu'on distinguait en contrebas, les réduisant inéluctablement à un seul fait inacceptable, que deux millions d'années de sédimentation échouaient à dissimuler.
L'à-pic de deux cent mètres n'était pas une falaise.


C'était la tranche d'un ongle.




De très loin, elle entendit la voix de son hôte lui parvenir.

    - Toutes mes excuses, j'ai oublié de vous demander votre nom. Pour ma part, vous pouvez m'appeler...

Elle n'écoutait pas. Ce nom, ses visions le lui martelaient depuis des mois.


*******


    « Khaine. »
Dernière édition par Lamantin_Furtif le Dim Nov 05, 2017 23:34, édité 1 fois.
"Dorenavant votre rage me parviendra comme un sketch de Gad Elmaleh"
Many, 12 juin 2016


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Re: DBAF-Lamantin

Messagepar omurah le Mar Oct 18, 2016 11:08

Toute la partie sur les vampires et le style de "healer" d'Abel était très cool à lire ! =D ; l'introduction des mages est toujours aussi propre et bien huilée, on se prend au jeu de voir le tableau se compléter au fil des chapitres tandis que la hype monte avec. L'ambiance et le rendu des désolations étaient excellent aussi. Baphasi qui se déplace par bonds de géants, les hommes-argile, la contre-plongée avec le titan, l'intro du Almighty Khaine, tout y était pour faire une seconde moitié de chapitre qui se dévore sans qu'on n'ait envie d'en laisser une miette. Bref du très bon boulot comme d'hab, aucune dépréciation qualitative à l'horizon ! Vivement la suite donc :mrgreen:
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Re: DBAF-Lamantin

Messagepar Lamantin_Furtif le Jeu Déc 01, 2016 0:50

Merci du commentaire, Omurah ! Content que la fic continue à te plaire

Je commence à avoir un peu de mal à publier, mais je suis toujours là, pas d'inquiétude ^^

autant publier maintenant, sinon je ne le ferai jamais à ce rythme (et Niic a l'air un peu trop occupé ces temps-cis pour répondre)


Chapitre 14 - Rencontre avec le passé



La soirée était déjà bien avancée, mais le soleil brûlait encore. Lorsque les portes du convoyeur s'ouvrirent avec un chuintement, Unio dut plisser les yeux pour se protéger de la lumière. Ignorant les efforts de l'air conditionné, une bouffée d'air chaud chargé de poussière s'engouffra à l'intérieur, déclenchant un concert de toussotements et de clignements d'yeux larmoyants chez la dizaine de passager que le cargo avait trans^porté jusque là. Il devait faire quarante degrés au bas mot, et son métabolisme de namek réclamait déjà de quoi s'hydrater. Lorsqu'il recouvrit enfin la vue, il put constater que sa mère adoptive trottait déjà sur la terre battue calcinée du spatioport, et pressa le pas pour la rejoindre.

L'immortel arrivait apparemment à détecter toute forme de téléportation vers sa personne. Qu'à cela ne tienne ! Psychée avait utilisé un moyen plus simple pour atteindre la créature. Le voyage vers Argi, parqué dans la soute entre les énormes conteneurs et les autres passagers, avait été très inconfortable. La planète payait son indépendance vis-à-vis de l'empire par un certain retard technologique et une isolation vis-à-vis du reste du monde. Presque toutes les ressources locales étaient investies par le gouvernement pour acheter les armures de combat Rhiniennes nécessaires pour tenir en respect la féroce mafia locale. On en venait presque à regretter l'époque où la poigne de fer du gouverneur Ganduro étranglait le secteur tout entier. Cette zone de la galaxie ouest était devenu synonyme de corruption et de violence, réputation qui tenait sûrement à l'écart tout investisseur potentiel. L'écart était d'autant plus cruellement visible que le gouvernement de Nordis avait fait des miracles presque partout ailleurs, pour ce qui était de la sécurité ou du niveau de vie des citoyens. Il avait suffit d'un coup d’œil jeté à leurs compagnons de voyages pour qu'Unio comprenne que seuls les pires rebuts de la société chercheraient refuge dans un pareil taudis.
Et l'immortel aussi, bien sûr . Unio sentit le sol brûlant à travers ses fines semelles et accéléra le pas. L'immortel se cachait ici, prêt à leur filer entre les doigts pour la énième fois. Il avait presque rattrapé psychée, lorsqu'un gros nuage de poussière ocre lui fit fermer les yeux. C'était horriblement chaud, mais il n'eut pas le temps de bougonner dans sa barbe. Un ki considérable venait juste de se révéler à quelques kilomètres de là. Unio ouvrit brusquement les yeux, mais ce ne fut que pour voir une taupe de trois cent kilos lui sauter au visage, pour l'emporter sans ménagement avec elle dans sa plongée souterraine.

Plaqué contre le ventre poilu de l'animal par deux petits membres prévus à cet effet, il esquiva le gros des frictions avec la terre. Malgré cela, la vitesse de terrassement laissa une bonne partie de son épiderme arraché ou incrusté de sable et de graviers. En ajoutant à cela une sensation d'étouffement à même de rendre claustrophobe le mineur le plus aguerri, ainsi qu'une touffe de poils drus qui s'efforça de s'introduire dans sa narine gauche tout le long du voyage, on obtenait l'un des épisodes les plus désagréables dont le namek pouvait se rappeler. Il avait faillit se dégager d'un kiaï,, mais ses sens l'avaient rapidement rassuré sur la nature de l'étrange mammifère à six pattes. Psychée était capable de métamorphoses instantanées, et elle ne lui avait visiblement pas dévoilé toutes les formes à sa disposition. Il fit donc en sorte de retenir sa respiration le temps du parcours, et tenta plutôt de se concentrer pour capter les énergies qu'il avait senties un bref instant avant sa plongée improvisée.

C'était puissant. Unio se savait incroyablement fort selon les standards de l'Arène, mais il y avait au moins quatre personnes qui le surpassaient sur cette planète, et deux d'entre elles était clairement en train d'exterminer les autres. C'était un combat d'une rare brutalité. Au mois deux cent utilisateurs de ki étaient engagés, et, comme Unio n'avait rien remarqué à son atterrissage, il était bien forcé de supposer que tous savaient cacher leurs présences. Qu'est-ce qui se passait au juste ? Ils étaient bien trop faibles pour qu'il s'agisse d'une attaque démoniaque.

Ils finirent finalement par émerger dans un geyser de sable et de terre, au milieu d'une lande desséchée et escarpée, couverte d'amas rocheux. De cette position surélevée, on pouvait voir les explosions cataclysmiques causées par la bataille qui se déroulait dans la capitale. Unio fixait le loin, sans voix. Dans sa tête, il entendait les vies des innocents terrorisés s'éteindre les unes après les autres. Il brûlait d'aller les secourir, mais Psychée ne le laisserait jamais faire. Des gouttes d'eau dans l'océan, comparés à ce qui était en jeu. Des gouttes d'eau...
Et toujours plus de gouttes d'eau étaient sacrifiée sous ses yeux, pour un bien commun qu'il peinait encore à saisir. L'immortel n'allait pas rester ici avec toute cette agitation... Ils s'étaient encore déplacés pour rien, si ce n'était pour voir des milliers de vies partir en fumée.

Le plus puissant des combattants devait être Taris, le capitaine renégat. D'après les médias, il avait refusé la reddition du gouvernement, et s'était lancé dans une guérilla avec les quelques mutants qui avaient bien voulu le suivre. Plus important : il avait au passage enlevé le prince héritier Krios. Malgré toutes les déclarations officielles, il était évident que la situation allait dans le sens du roi, et Psychée soupçonnait que les Kaïoshins l'aident à se cacher.
Si ces suppositions étaient exactes, que les services secrets de Nordis étaient bien de mèche avec les Kaïoshinkaï, et que les ennemis qu'ils affrontaient n'étaient pas des démons...

Une nouvelle explosion retentit, causant quelques centaines de victimes supplémentaires. Le namek déglutit en entendant leurs hurlements dans sa tête.

    - Des vampires. Taris a trouvé leur base principale.

    - C'est bien... Gnnn... Tu fais des progrès...

Intrigué, il se retourna vers sa tutrice présentement occupé à pousser sur un des énormes rochers qui parsemaient le terrain. La scène vira soudainement du ridicule au sidérant lorsque la vieille femme, dans un basculement des hanche tout en souplesse, envoya rouler les quatre tonnes de granite hors de leur emplacement, à la manière d'une prise de judo.

    - Mais laissons les morts-vivants à leurs ennuis, si tu veux bien. Nous avons un immortel à rencontrer.

Unio la rejoignit immédiatement, et pu observer la caverne que sa tutrice venait de mettre à jour. L'intérieur était sobrement aménagé, avec quelques lampes, des livres, et une paillasse rudimentaire. Les murs et le plancher étaient recouverts d'inscriptions tracées avec une sorte de substance blanche, parmi lesquelles Unio reconnut quelques runes de camouflage utilisées par Psychée. Un immense individu vêtu d'un long manteau beige poussiéreux et d'un sombrero leur tournait le dos, immobile. À en juger par sa position, il était en train de tracer les runes de brouillage au sol lorsqu'on l'avait dérangé.
À peine essoufflée par l'effort titanesque qu'elle venait de produire, le second mage s'engagea dans l'escalier grossier avec enthousiasme.

    - Nous allions aussi partir. Tu nous fais une petite place ?


*******



« Foutue planète de barjots . »

Lestat grommelait encore quand son vaisseau ralentit sa descente pour rejoindre le sol en douceur. Il n'en revenait toujours pas de sa mésaventure. Ces démons avaient intérêt à être sacrément puissants s'ils espéraient rivaliser avec de tels pouvoirs. En tout cas, cela se ferait sans lui. Les portes chuintèrent avec la dépressurisation, et alors seulement il put entendre les sons à l'extérieur.

Et regretta d'avoir atterri.

Ces bangs supersoniques à répétition, ces bruits d'explosion, ces éclatements aigus d'auras... Pas de doute : on se battait ici, et les combattants ne plaisantaient pas.

Le souci, c'était que « ici » voulait dire « le QG des vampires de la galaxie nord ». Et qu'on s'y batte voulait dire « Taris nous a retrouvé ». La purge était entrée dans les livres d'histoire, mais Lestat avait plus de cinq cent ans. Il se souvenait très bien du sentiment de terreur et d'impuissance généralisé qu'ils avaient ressenti lorsque l'implacable mutant avait lancé sa vendetta, et que leurs plus puissants chefs de lignée étaient tombés les uns après les autres sous ses coups.
Des mille sept cent trente deux vampires supérieurs vivants à l'époque, il n'y avait eu que deux survivants, qui avaient, depuis, rebâti l'organisation, avec pour credo « secret, et dispersion ». Voilà pour le secret. Pour ce qui était de la dispersion, Lestat comptait bien l'appliquer le plus vite possible.

Il n'y avait plus nulle part où aller, de toute façon. Le complexe souterrain dissimulé sous le HLM qui leur servait de couverture avait été mis à jour, et l'océan de gravats, de blocs de béton et de verre brisé laissait de ci et de là voir les cadavres de ses frères et sœurs. C'était un cauchemar.

En l'air, il parvint à capter la masse de cheveux roux qui trahissait sa chef de lignée et sœur biologique. Elle se battait contre une chose si puissante que même elle n'en menait pas large, et si rapide que Lestat ne parvenait même pas à capter sa forme. C'était perdu l'avance. Il n'aurait pas le temps de prendre le vaisseau... Il ne lui restait plus qu'à tenter sa chance par la ville, et prier pour qu'il ne s'agisse pas de Taris en personne, mais de l'un de ses subordonnés qui n'oserait pas pulvériser toute la ville pour s'assurer la de la mort du dernier vampire.
Dès qu'il parvint à cette conclusion, il s'élança vers les blocs l'habitation encore intacts, avec la technique du « pas flotté », qui leur permettait d'atteindre les vitesses énormes sans alerter les détecteurs. Malgré sa vision périphérique floutée, il distingua une trace rousse à sa droite, suivie de gouttelettes plus rouge, et su que c'était fini. Une jeune fille aux cheveux châtain coupés en brosse vêtue de l'armure des forces spéciales de Cold atterrit devant lui, lui broyant instantanément les organes internes d'un seul crochet du droit. Projeté en arrière, Lestat parvint à garder les yeux assez ouverts pour voir ce qui restait du corps de sa sœur s'écraser au sol dans une explosion rouge. Il y avait une limite à ce dont un vampire pouvait revenir, et elle avait été allègrement dépassée.

Le souffle coupé, il sentit quelque chose de dur et tranchant lui entrer dans l'épaule quand il percuta le sol. Pas le temps de se relever, Sally était déjà sur lui, un sourire cruel sur le visage.

    - C'est ça les vampires supérieurs ? Vous êtes à peine moins minables que les autres.

Le cerveau de Lestat tournait à toute vitesse pour se trouver un moyen de s'en tirer. Il allait faire le mort. Ça avait déjà marché une fois, restait à espérer que...

La mutante était sur le point de l'exécuter, quand une ombre encore plus rapide la saisit à la gorge, à la manière dont elle avait, tenu Lestat un instant plus tôt. Libéré, ce dernier chuta sur ses genoux et pu relever la tête pour contempler son sauveur.
C'était un homme, mais d'une stature inhabituelle. Large d'épaule, taillé en V, il culminait à deux mètres de haut, et ses longs cheveux noirs et raides, en contraste total avec sa peau d'une pâleur mortelle, faisaient de sa silhouette celle d'un colosse.

Il dévoila ses longues canines, retroussa les manches de son manteau de cuir écailleux, et s'entailla nonchalamment le bras, tout en maintenant en l'air sa victime, dont il retourna enfin la tête afin de la forcer à absorber le liquide vermeil.

Elle cracha, s'étouffa, mais finit par en déglutir quelques gorgée alors qu'elle sombrait dans l'inconscience. Il la rejeta négligemment au sol. La transformation était déjà en cours, et la blessure sur son bras avait cicatrisé.

Sepet se retourna lentement vers Lestat, le dévisageant ses yeux rouges.

    - Tu sais qui je suis ?

Évidemment qu'il ne savait. L'ordre n'avait pas dégénéré à ce point depuis sa dernière visite.

    - Vous êtes le prophète Dracula, qui parle la parole du Nécromancien, et qui nous apportera sa protection pour la fin des temps.

Devant cette leçon bien apprise, Sepet esquissa une ombre de sourire. Puis, il se retourna vers la future vampire qui commençait à trembler, et la hissa sur son épaule.

    - Bien. Nous n'avons plus rien à faire ici. Je vais avoir besoin de ton vaisseau, et d'un informaticien discret. Tu sauras trouver ça ?

Lestat hocha doucement de la tête, encore sous le choc de la rencontre avec la légende vivante.

    - Oui. Oui bien sûr.

Les mots eurent à peine franchit sa bouche, que Sepet le quittait à grandes enjambées, plantant le vampire sur place. Il était presque entré dans la navette lorsque Lestat sortit enfin de son état de choc, et l'interpella.

    - Est-ce que c'est vrai ? Que...

Que le seigneur des ténèbres avait ressuscité. Qu'il marchait de nouveau parmi ses enfants. Que la longue attente avait pris fin, et que cette guerre était celle qui sonnerait le glas des dieux. Que le nouvel age d'or était presque là, qu'ils n'avaient plus qu'un pas à franchir. Que...

Bien sûr, Dracula comprenait sans qu'il soit besoin de prononcer un mot. Mais Lestat ne voulait pas une réponse. Il voulait y croire. Aussi, le seigneur vampire laissa son regard fiché dans celui de Lestat, jusqu'à que celui-ci soit totalement sous son emprise, avant de confirmer, à moitié couvert par le hurlement des sirènes d'alarmes.

    - Oui.


*******


Unio frissonna à son entrée dans la grotte de glace, et s'empressa d'invoquer ses vêtements d'hiver. Toujours avoir du matériel prévu dans son espace de poche. Psychée avait rapidement fait de même, et acquiesça silencieusement en voyant le réflexe de son disciple. Les cordes commençaient à rentrer. Il ne serait jamais un mage, mais on pouvait encore en faire un sorcier correct.
L'immortel, lui, semblait se moquer royalement du froid, et il se débarrassa rapidement de son chapeau et de sa parka sur le porte manteau accroché au mur glacé. Combien de planques de ce type avait-il à travers les quatre galaxies ? Cela faisait la quinzième qu'ils visitaient, et Unio le soupçonnait d'avoir encore beaucoup de réserve. Un lit, quelques livres, des armoires remplies de vêtements passe-partout, et du matériel d'incantation, c'était toujours la même installation. Il y avait même une chaise, que Psychée monopolisa rapidement, condamnant les deux autres à rester debout. L'immortel s'adossa calmement au mur, attendant qu'on engage la conversation à sa place. Il était impossible de distinguer quelque forme d'émotion que ce soit sur ce visage, mais Unio restait attentif au moindre signe d'hostilité.

    - Bon, qu'est-ce que tu me veux ?

Il ignorait complètement Unio. Psychée battit des paupières presque innocemment avant de répondre.

    - C'est au sujet de la Singularité.

    - Merci, je m'en doutais. Qu'est-ce que tu prévois ?

    - D'après mes sources, la singularité aurait déjà commencé. Ce qui implique qu'il est arrivé quelque chose à l'essence de l'univers. C'est à dire à l'un des deux arbres. Celui du Vice, de toute évidence.

    - Hum...

    - L'essence du Vice a changé de forme, donc. Et, au vu des événements de ces dernières années... Je dirai qu'elle est plus... Condensée.

Voilà qui était intéressant. L'Immortel releva un sourcil avant de relever.

    - C'est ce qui m'a semblé, en effet. Mais je n'ai pas pu le vérifier en personne.

    - Bien. Une forme plus condensée, donc. Peut-être est-elle même... Transportable ?

    - Ce n'est pas impossible.

    - Et cette source d'énergie infinie et transportable se trouve donc entre les mains de cette Baphasi, qui a justement une dure bataille devant elle.

    - Tu penses qu'elle va tenter de s'en servir pour combattre les terriens ?

Psychée écarta la question d'un geste de la main.

    - Je pense qu'elle va la faire sortir du Makaï.

L'Immortel n'avait manifestement pas envisagé cette hypothèse. Il détacha son dos du mur.

    - Mais dans ce cas, si le Makaï n'a plus d'essence...

    - ... Il va se rétracter et disparaître totalement, oui. Avec tous ses habitants, dont notre cher Azazaël, qui est plus que certainement celui qui porte sur lui le bannissement vital de tout l'ancien monde.

    - Alors il faut tuer Baphasi ! Qu'est-ce qu'on attend ?

Unio était intervenu, pressé par l'urgence de sauver ces milliards de vies inconnues. Psychée se retourna sur sa chaise et lui lança un regard noir par-dessus son cache-nez, mais ce fut l'immortel qui lui répondit.

    - C'est la Singularité, petit. On aura de la chances si les survivants ne se comptent pas sur les doigts de la main. Si tout se passe normalement, Baphasi va massacrer les kaïoshins, l'ancien monde va disparaître biens sagement, et toute l'arène ou presque y survivra sans problème.
    Mais tout ne se passe pas normalement. Sinon tu ne serais même pas ici, Pshychée.

    - Primus dit qu'il y a autre chose qui provoque la Singularité, et qu'il faut la déclencher nous-même pour limiter les dégâts. Or, tout se passe parfaitement pour Primus, comme tu l'as dit.

Les mots restèrent flotter entre les trois magiciens pendant de longues secondes. Comment combattre ce que l'on ne percevait pas ? L'immortel reprit la parole.

    - L'ancien monde. Ça vient forcément de l'ancien monde.

    - Il est banni, je te rappelle. Khaine l'a lié à Azazaël avant de mourir.

    - Peut-être que le bannissement n'est pas inviolable, alors. Est-ce que c'est vraiment trop dur à imaginer ? Un univers infini, des titans, des archéens... Les ressources à leur disposition sont pratiquement illimitées, et ils ont eu tout le temps de les exploiter.

    - Même le Dragon n'est pas sorti, bon sang 

    - Alors peut-être qu'il existe quelque chose de plus puissant que le Dragon, là-bas !

Le silence se fit entre les trois sorciers. L'immortel enfoncé une porte que touts s'efforçaient de croire fermée. Les Kaïoshins n'avaient jamais été le problème. L'ennemi attendait son heure, invisible, et banni.


*******


    - Le sept de pique, le cinq de trèfle et le chariot.

Encore.

Les deux grandes mains à huit doigts mélangèrent une énième fois le paquet avec une souplesse envoûtante. Les articulations en trop et la disposition anormale des appendices en avait déjà hypnotisé plus d'un, avant même qu'on en vienne à remarquer les courbes artificielles que prenaient les grosses veines saillantes qui parcouraient ses membres. C'était une créature singulière qui battait là les cartes. Ses trois paupières transparentes se refermaient les unes après les autres devant chaque œil, dessinant à chaque fois un symbole et une nuance de rouge différents sur l'iris pâle. À chaque battement, elle accédait à une perception différente de la même réalité, et tentait de l'affiner à l'aide de l'immense couteau suisse magique qu'était son organisme tout entier. Partout sur son corps, des muscles aux positionnements improbables déplaçaient une veines, en obstruaient une autre, ou accéléraient le flux dans une troisième, modifiant sans cesse l'entrelacs de cercles cabalistiques formé par son système sanguin. De toutes les substances canalisant la magie, aucune n'égalait le sang frais, et elle allait le chercher directement à la source.
Sa masse de cheveux filasse presque transparents flottait paresseusement derrière son dos, agités par des courants qui n'étaient pas de ce monde. Chaque mouvement perturbant le royaume des arcanes lui était retransmis en un instant, et son cerveau sur-développé n'était pas de trop pour trier cette immense masse d'information.
Elle inspira.

Ses six poumons, chacun connecté à seize plans existentiels, assimilèrent le mélange d'impressions diffuses issues du présent, du passé et de l'avenir en même temps que l'air chaud de son repère. Il était impossible d'écarter une certitude de cette tornade d'impressions contraires. Elle avait appris à trier les intuitions, les possibilités, et les avertissements entre eux au cours de sa longue existence. Les cartes étaient d'une aide non négligeable. Elles étaient une ancre dans le réel qui empêchaient son esprit de s'égarer.

Elle retira des trois paupières, recouvrant une vue normale, et se leva lentement, élevant son aberrante carcasse aussi large que haute à presque quatre mètres de haut. Deux automates postés dans la porte vinrent recouvrir son corps nu d'une robe pourpre rembourrée. Ses ongles surdimensionnés la dispensaient de devoir porter des chaussures.


La salle des cartes était circulaire, d'une trentaine de mètres de rayon, avec en son centre la table et le paquet de cartes enchantées. Huit grandes fenêtres donnaient sur un extérieur resplendissant d'ors et de bleus. On pouvait se perdre dans ce spectacle sans cesse mouvant d'arbres flottants, de routes serpentines traversant ciel et terre sous des perspectives inimaginables. Des ruines jaillissaient de grandes tours et les tours se muaient en ruines. Qu'une des spires toujours plus fines et audacieuses s'effondre ? Qu'à cela ne tienne ! On en construisait une autre, plus grande encore.
Une autre de ces ridicules barges de plaisances était visible par la fenêtre, flottant dans les airs. Le concepteur de celle-ci l'avait agrémenté d'une douzaine de cascades qui s'écoulaient paresseusement par-dessus le rebord et dispersaient une fine pluie en contrebas. Depuis qu'on fabriquait les espaces repliés à la chaîne, ce genre de fantaisie s'était fait de plus en plus courant. La horde de parvenus, de petits rois et de nouveaux riches à l'intérieur devait se presser aux fenêtres pour observer la demeure de Bellica. Mais, quelle que soit sa taille, aucune fenêtre ne permettrait de d'englober du regard tout le palais, pour la simple et bonne raison que la barge flottait actuellement à l'intérieur.
Les proportions de la Citadelle défiaient le bon sens, celles du palais de Bellica reniaient purement son existence. Des colonnes larges comme des cités fendaient les cieux pour atteindre un plafond indistinguable. Entre elles, des ponts vastes comme des pays abritaient d'innombrables âmes toutes dévouées à leur maîtresse Sur chacun, une nuée de spires, et des titans arpentaient le sol de cette aberration qui les réduisait même eux au minuscule. Une volée de vaisseaux trans-bulle de surveillance chacun long de dix kilomètres fendit les cieux, comme une nuée d'abeilles, autours des titans. Leurs carlingues argentés prenaient des angles impossibles à toute vitesse, chacune contrôlée par un maître-sorcier.
Partout, des nuées de consorts et d'automates grouillaient et faisaient tourner le palais grand comme un continent. Des millions de vies naissaient et s'éteignaient en silence dans les colonnes, les plates-formes, les escaliers aux proportions absurdes, sans jamais saisir l'ampleur de ce à quoi elles participaient. Un royaume comme nul n'aurait osé en rêver. Une infinité de splendeurs, toutes dévouées à une seule et même âme. Bellica aurait pu errer pour l'éternité sans jamais cesser d'être surprise par ces lieux. Un bistrot agréable par-ci, une salle de jeux clandestine par-là... Un hammam prévu pour toutes les morphologies de l'ancien monde ? Son palais en comptait même un capable d'abriter un titan ! Des combattants de génie ? Il se disait qu'un art martial différent y était inventé chaque année. Rien n'était impossible dans le palais, et s'il se murmurait le contraire, une nuée de consorts apparaissait dans l'heure, ils cliquetaient entre eux dans leur idiome secret pendant quelques jours, et ces petites cervelles aussi serviles qu'ingénieuses parvenaient immanquablement à corriger l'erreur. Qu'il s'agisse des consorts, de leurs sorciers, de leurs automates, de voyageurs ou des innombrables mortels à s'y être installés, le palais pouvait puiser dans un réservoir de talents virtuellement illimité.

Bellica se détourna de la fenêtre avec un soupir. Il manquait quelque chose, comme toujours en temps de paix. C'était bien là le seul mauvais côté de cette situation qui s'éternisait depuis des millions d'années. La construction du palais avait été palpitante, et elle avait bien apprécié le repos subséquent. Puis, elle avait commencé à chercher pus grand, à convaincre les titans de lui faire un peu plus de place dans leurs bulles, puis de lui en faire une à elle toute seule. Puis deux.
Ces créatures n'étaient pas faciles à convaincre. Peu importe sa puissance et son statut, Bellica restait toujours une mortelle à leurs yeux. Un serviteur tout juste bon à gigoter pour leur amusement, et certainement pas quelqu'un avec qui négocier une de ces si précieuses bulles. Leur avis avait un peu changé quand elle était parvenue à en capturer un. Plusieurs l'avaient vu comme une menace.

La guerre. Aussi ignoble que ce mot lui avait paru dans ses plus jeunes années, il revêtait maintenant un sens bien plus attrayant à ses yeux. Qu'il était bon de se savoir menacée. De sentir son précieux palais en danger, de voir ses sujets se presser, si préoccupés par leurs petites vies et ce qu'ils laisseraient derrière eux. Et quelle occupation aussi, quel sérieux dans chaque geste du quotidien ! Tout prenait une nouvelle dimension lorsqu'on savait la mort prochaine. Oui, elle ne s'était vraiment épanouie qu'en menant le chaos et la violence du monde d'en bas depuis son balcon doré.
Cela datait de bien trop longtemps... Elle avait cherché de nouveaux ennemis, avait gagné, perdu... Mais la situation s'était stabilisée et elle n'était pas une belliciste enragée. C'était juste une distraction presque vitale après les périodes de paix tranquille presque parfois longues de plusieurs millénaires. Et cela faisait bientôt deux mille ans quelle n'avait pas vu de conflit majeur. Dans l'infinité de l'ancien monde, il y en avait toujours quelques uns pour s'affronter, mais les adversaires à sa hauteur n'étaient pas légion, et l'ombre d'une rumeur sur son implication dans un conflit mineur suffirait à l'arrêter sur le champ.

Elle passa une porte, et arriva dans le hall décoré de ses appartements personnels. Quelqu'un d'autre aurait probablement senti sa vie privée bafouée par les dizaines de petits insectoïdes qui bourdonnaient dans la pièce, mais Bellica les considérait presque comme une extension de sa personne. Ils parvenaient à saisir instinctivement ses désirs et ses humeurs, et lui obéissaient sans poser de question. Elle avança tranquillement jusqu'à son immense canapé rouge sombre recouvert de coussins, et les consorts modifièrent leurs trajectoires pour éviter ses grandes jambes.

Elle n'eut pas à attendre longtemps avant que son invité ne se manifeste. Façon de parler : elle ne l'avait jamais invité. Mais lui interdire l'accès à quelque recoin de l'ancien monde que ce soit causerait la fureur de son maître, et absolument personne ne souhaitait se mettre à dos le maître en question. Ainsi Metatron était partout l'invité d'honneur.

Les ombres de la pièce toute entière se déformèrent pour prendre la forme d'un millier de bouches d'un millier de formes différentes. Impossible de fixer son regard sur quoi que ce soit, mais une lumière sans provenance imprimait des de battements d'ailes stroboscopiques sur les rétines, jusqu'à en cacher toute autre réalité. Et la voix rentrait dans la tête, prenait la bouche et les narines, s'introduisait par chaque sens et chaque sens répétait cinq fois chaque mot. Tous les consorts de la pièce avaient succombé à cette transe et buvaient la voix divine, l'écume aux lèvres. C'était impressionnant mais sans danger, Bellica le savait. C'était d'ailleurs là tout le principe de Metatron : qu'IL puisse S'exprimer sans tuer instantanément son interlocuteur. Cela restait une expérience éprouvante pour n'importe qui.

Bellica n'était pas n'importe qui. Ses yeux perçaient à travers le trouble que provoquait l'apparition de l'archéen, ses cheveux appréhendaient assez son être pour lui épargner le trouble qu'un archéen de ce niveau induisait la plupart du temps chez ses voisins. Et puis il y avait cette certitude latente entre eux. L'une des raisons de la place toute particulière qui lui était due dans ce monde. Ce corps difforme n'était pas le fruit du hasard, mais d'une éternité de développement technologique et génétique dirigé comme seul Primus avait pu le concevoir. C'était un outil unique au monde, et ses formidables capacités sensorielles n'en étaient que la partie visible de l'iceberg.
En rabattant les bonnes paupières, elle pourrait suivre chaque mouvement de l'archéen. En contractant quatre muscle et en relâchant trois, elle créerait un piège arcanique dont la créature ne pourrait s'échapper qu'à grand peine. En activant son cœur secondaire, elle pourrait faire circuler à toute vitesse un suc concentré en fer et en argent dans un circuit qu'elle savait parfaitement susciter dans sa poitrine. Cela entraînerait le non-corps éthéré dans un tourbillon irrésistible, jusqu'à ce qu'elle se décide de faire passer le suc dans un circuit secondaire qui imitait exactement le précédent, mais dans un sens inversé, pulvérisant l'essence existentielle de la créature. Même l'un des plus grands archéens était impuissant contre une telle attaque, et Bellica pouvait l'exécuter en un claquement doigt.

Metatron maintenait une distance prudente avec elle, plus mû par un instinct d'auto-conservation que par quelque volonté de préserver sa propre vie. Cette chose n'avait aucune pudeur : Bellica pouvait lire à travers son être élimé jusqu'à la moelle par une tâche aussi destructrice qu'épuisante. Il le savait et il s'en fichait. Il ou IL ? La distinction n'était déjà pas évidente lorsqu'elle l'avait rencontré la première fois, et elle avait maintenant presque disparu. Lucie était la plus humaine du lot, en fin de compte... Son invité restait silencieux, elle savait déjà ce qu'IL voulait. Il venait la visiter tous les jours pour entendre ses prédictions, depuis qu'elles avaient commencé à monter le ces schémas alarmants. Le même tirage sept jours de suite ; cela n'était jamais arrivé. Plus que cela, cependant, Bellica ressentait le remous à travers tous les plans parallèles. Cela ne pouvait signifier qu'une seule chose.

    - La singularité est en marche. Tous les signes concordent.

Elle sentit un frisson parcourir Metatron, une des dernières reliques de son individualité. Les bureaucrates détestent le changement : dans un monde en mouvement, ils sont une entrave. L'archéen ne laissa pas son trouble le ralentir dans sa tâche, et reprit.

    - Mᴀɪs ʟᴇs Kᴀɪ̈ᴏsʜɪɴs...

    - Quelqu'un a fini par les vaincre. Ça devait bien arriver, à un moment ou un autre.

    - ...Vᴏᴜs ᴘᴇɴsᴇᴢ ǫᴜᴇ ʟᴇs ᴍᴀɢᴇs...

    - Évidemment que les mages vont revenir ! Primus a bien rodé sa machinerie.

Oh. Il aurait été furieux qu'on l'interrompe, si seulement son fantôme d'existence pouvait encore supporter un sentiment aussi intense. L'aura palpita encore un peu avant que Metatron ne se reprenne.

    - Nᴏᴜs ᴀᴜʀɪᴏɴs ᴅᴜ̂ ɢᴀʀᴅᴇʀ ʟᴇ ɴᴇ́ᴄʀᴏᴍᴀɴᴄɪᴇɴ.

Bellica soupira. Sur cela au moins, elle était d'accord.

    - On ne détruit pas un danger en s'en éloignant. Mais il est un peu tard pour les regrets, à présent.

    - Aʟᴏʀs ɪʟ ꜰᴀᴜᴛ ʟ'ᴀɴɴᴏɴᴄᴇʀ ᴀᴜ ᴄᴏɴsᴇɪʟ ᴅᴇs ᴄᴇɴᴛ ᴍɪʟʟᴇ ʀᴏɪs. Jᴇ ᴠᴏᴜs ᴇᴍᴍᴇ̀ɴᴇ.

Même pour Bellica, il était bien plus pratique d'avoir un archéen pour guide que de tenter de s'orienter d'elle-même dans l'espace à dimensions infinies qui s'étendait à l'extérieur des bulles, ainsi se laissa-t-elle guider jusqu'à sa loge du conseil.

Elle passa au pas de course à travers le complexe grouillant de consorts savants, les quelques représentants de leur espèce auxquels elle avait laissé la responsabilité d'administrer la politique extérieure du palais. Le conseil des cent mille rois demandais la présence constante et attentive d'esprits dotés d'une puissance intellectuelle et physique hors-norme. Intellectuelle, pour pouvoir accueillir la somme absurde de connaissances sur la politique sans cesse mouvante de l'infinité de bulles qui formaient l'ancien monde et ses cent mille royaumes, et physique pour survivre à la voix des titans. Qu'une seule de ces créatures décide d'articuler un mot, et les infrasons pulvérisaient pierre, os et carapaces avec une égale facilité. Malgré les merveilles d'ingénierie acoustique employées lors de la construction des loges, les accidents étaient encore courants.

Avec ceci en tête, Bellica ouvrit la porte à doubles battants au bout de la salle, et s'avança sur le balcon qui faisait le tour de la loge, lui donnant une allure de soucoupe volante.

Voilà une vue qui donnait une idée de ce qu'était réellement l'ancien monde. La bulle qui abritait le conseil laissait voir cent mille loges chacune conçue par un royaume différent qui avait cherché à peaufiner au mieux la première vitrine que le monde extérieur aurait sur eux. On avait là des abris organiques dont les ailes toujours en mouvement provoquaient un vacarme assourdissant, et qui devaient consommer quotidiennement des dizaines de tonnes de nourriture condensée pour maintenir leur effort, preuve supplémentaire de la puissance technologique de leurs détenteurs. Des fenêtres dimensionnelles s'ouvraient directement sur une bulle lointaine dont le dirigeant estimait que ce confort de circulation en valait les dépenses énergétiques inimaginables qui l'accompagnaient. Et, éclipsant de leur taille ces constructions monolithiques, trônaient les huit mille sept cent trente et un rois titans, qui forçaient tout le monde à utiliser des loges volantes pour ne pas être écrasé par inadvertance. Certains utilisaient directement des vaisseaux trans-bulles. Celui du royaume d'Axi était particulièrement immense, ce mois ci. Les axiens ne cessaient d'utiliser de nouveaux modèles toujours plus grands et perfectionnés pour marquer leur avance technologique sur le reste de l'ancien monde. Sans les événements imminents, Bellica aurait vu cette nation de technocrates comme des adversaires de valeur, mais avec la singularité, il n'était plus question de telles frivolités. L'heure était grave, et elle avait cent mille demi-dieux mégalomanes à en convaincre. Ses ministres s'écartèrent avec des cliquettements serviles quand elle prit sa place à la rambarde, autant en vue que ce qui pouvait se faire dans le conseil.

Des archéens asservis filaient à toute allure entre les loges pour délivrer les informations, indifférents qu'ils étaient aux contraintes de l'espace. Chacun portait avec lui des négociations qui décideraient du sort de millions de vies. Mais la nouvelle de Bellica devait être plus rapide et universelle que ça. Elle n'avait pas le temps de négocier avec chacun d'entre eux.
Metatron s'étendit. Comme une onde qui jaillissait de replis inconnus, sa présence se dispersa en quelques secondes dans des loges éloignées de milliers de kilomètres les unes des autres. Tout à coup, les traits multicolores cessèrent de filer entre les rois, et chaque oreille se fit attentive à ce que SA voix souhaitaient leur transmettre. C'était bien pour cela qu'ils discutaient en une paix toute relative au lieux de s'entre-déchirer.

Bellica prit une grande inspiration, et sa voix, relayée par Metatron, résonna dans chaque salle et dans chaque tête.

    - L'ʜᴇᴜʀᴇ ᴇsᴛ ᴠᴇɴᴜᴇ ! L'ʜᴇᴜʀᴇ ᴇsᴛ ᴠᴇɴᴜᴇ ᴘᴏᴜʀ ʟᴇ ᴅᴇʀɴɪᴇʀ ᴄᴏᴍʙᴀᴛ ! J'ᴀɪ sᴄʀᴜᴛᴇ́ ʟᴇ ꜰᴜᴛᴜʀ, ᴇᴛ ᴊ'ʏ ᴀɪ ᴠᴜ ʟᴀ ʟᴜᴛᴛᴇ ᴇᴛ ʟᴀ ᴍᴏʀᴛ. Qᴜᴇ ʟᴇ ᴄᴏɴsᴇɪʟ sᴇ ʀᴇ́ᴜɴɪssᴇ, ǫᴜᴇ ʟᴇs ᴄᴇɴᴛ ᴍɪʟʟᴇ ʜᴏɴᴏʀᴇɴᴛ ʟᴇᴜʀ sᴇʀᴍᴇɴᴛ ᴇᴛ ᴀʀᴍᴇɴᴛ ʟᴇᴜʀs ʟᴇ́ɢɪᴏɴs. Cᴀʀ ᴄ'ᴇsᴛ ᴇɴ SON ɴᴏᴍ ǫᴜᴇ ᴍᴏɪ, Bᴇʟʟɪᴄᴀ, ʀᴇɪɴᴇ ᴘᴀʀᴍɪ ʟᴇs ᴄᴇɴᴛ ᴍɪʟʟᴇ, ᴊᴇ ᴄᴏɴᴠᴏǫᴜᴇ ʟᴇ ᴄᴏɴsᴇɪʟ ᴘᴏᴜʀ ʟᴀ ꜰɪɴ ᴅᴇs ᴛᴇᴍᴘs ! Lᴀ Sɪɴɢᴜʟᴀʀɪᴛᴇ́ ᴇsᴛ sᴜʀ ɴᴏᴜs.

Et le conseil explosa. Les voix des titans firent vibrer la terre et trembler les cieux, les vaisseaux trans-bulles apparurent et disparurent par milliers dans un grouillement indescriptible qui n'avait que l'apparence du chaos. La nouvelle se répandait, et donnait un sens aux annonces des milliers de prophètes à travers l'ancien monde. Pas un instant la parole de Bellica ne fut contestée. Fut-il un renégat, tous à travers l'ancien monde avaient le même respect mêlé de crainte pour le seizième mage.
Dernière édition par Lamantin_Furtif le Dim Nov 05, 2017 23:35, édité 1 fois.
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Re: DBAF-Lamantin

Messagepar omurah le Dim Déc 04, 2016 12:25

Haha, ça fait un moment qu'on se maintient à un excellent niveau de qualité, et tu n'avais plus tellement repoussé la barre encore plus haut que les limites imaginables depuis le chapitre 7, mais avec ce chapitre-ci et l'intro de Bellica (entre autres) je pense qu'on peut dire qu'on y est. Bon, en fait ça m'arrange pas tellement parce que c'est tellement riche que j'ai fatalement fini par m'y perdre, et du coup là je crois qu'une relecture intégrale de toute la fic s'impose :) (c'est surtout côté Empire que je commence à être largué, mais le reste ça va ^^)

Sinon, Unio est un personnage vraiment cool à suivre tout au long des chapitres. Au milieu de tous ces personnages over the top - et au demeurant très cools - c'est toujours intéressant d'avoir une sorte de perso qui soit dans une certaine mesure tout aussi largué que le lecteur, et auquel ce dernier s'identifie naturellement très très vite !

Ah et j'aime vraiment beaucoup ce souci de la mise en page que tu as, à l'occasion, quand certains personnages assez particuliers s'expriment. Gros +1

(I'll be back, avec trois bons chariots pleins de questions enthousiastes, quand j'aurai tout relu 8D)
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Re: DBAF-Lamantin

Messagepar Lamantin_Furtif le Ven Déc 30, 2016 17:47

Yop, je passe pour laisser encore un chapitre.


Chapitre 15 - Royauté



    - Alors c'est vous, le roi Nordis ?
Pas de réponse verbale de la part de l'individu, mais même son approbation silencieuse n'était pas nécessaire. Ladra avait récolté suffisamment de documents et de témoignages pour s'en assurer elle-même. Elle pouvait de plus constater par elle-même que son énergie vitale était sans commune mesure avec celle des natifs du monde d'au-dessus, le mettant sur un plan d'égalité avec les gardes de la Citadelle. S'il y avait encore eu le moindre doute, il aurait suffit de jeter un coup d’œil à Banquiz pour remarquer la ressemblance évidente avec son probable descendant.
Malgré l'armure dont il était vêtu, le roi n'avait pas tenté de résister quand le bataillon mené par Ladra l'avait rattrapé sur Freezer 120. Lui et ses gardes du corps avaient accueilli les démons pacifiquement, leur proposant un traité de reddition en bonne et due forme. Il mettait en avant sa connaissance supérieure du terrain, ses talents de dirigeant et l'évidente supériorité militaire des démons pour revendiquer une place de vassal en charge du monde d'au-dessus. La capture s'était donc faite sans effusion de sang, et Ladra faisait relire les termes du traité, mais sans parvenir à y trouver de tentative de les piéger. Nordis avait probablement compris qu'il était dans son intérêt de jouer cartes sur table, et de s'efforcer de servir ses intérêts en même temps que ceux de la couronne du Makaï.
Cela passait évidemment pas la destruction des terriens, qu'on avait rapidement mis en évidence comme principal obstacle à leur prise de pouvoir sur le monde d'au-dessus. C'était également là que les Kaïoshins concentraient leurs efforts pour vaincre, après la défaite cuisante qui leur avait été infligée sur Megido. À ce sujet, Nordis avait été très coopératif, et, qu'il s'agisse d'une volonté de vengeance personnelle ou d'une ruse des kaïoshins, Ladra s'en satisfaisait. Il facilitait la confrontation, et tous les individus chargés des préparatifs étaient soigneusement scannés par Uranie en personne pour s'assure qu'aucune trahison ne se produirait. Ce serait également à Ladra de planifier l'assaut jusque dans ses moindre détails. Il était parvenu à leur échapper quelques temps, mais Nordis était bel et bien piégé.

Assis sur son siège sans dossier et flanqué de ses quatre gardes silencieux, celui-ci l'observait les bras croisés, et répondait laconiquement aux questions qu'elle lui posait de temps à autre. Il ne cachait pas qu'il aurait préféré se trouver ailleurs que dans le QG de campagne de Ladra, dans la continuité de l'impression d'honnêteté qu'il semblait vouloir refléter. Deux détails, cependant, l’empêchaient d'y croire. Premièrement, les considérables pouvoirs psychiques du démon du froid le rendaient imperméable à la télépathie. Sans pouvoir lire dans son esprit, ils n'avaient qu'un peu de papier et une parole comme gage de sa bonne foi. Baphasi n'aimerait pas cela. Quant au second, elle n'attendit pas plus pour s'en enquérir.

    - Au sujet de ce Taris. Il nous a causé beaucoup de soucis, j'aimerais connaître sa localisation exacte.

    - Je vous l'ai déjà dit : je n'en ai aucune idée moi-même. Il a reçu une indépendance totale pour sa mission de traque, afin de le protéger de vos espions. Mais je ne doute pas qu'il se rendra avec son unité dès que je lui en ferai parvenir l'ordre.
Menteur.

Elle n'avait pas besoin de magie pour le savoir.
Mais c'était de bonne guerre : Ladra aussi lui mentirait quand elle prétendrait accepter son traité.



*******


    - Alors c'est ce que tu faisais pendant tout ce temps ?
Khaine prit le temps de se resservir du thé, Avec un seul bras, cela nécessitait une certaine délicatesse. Depuis leur position surélevée dans ce labyrinthe de canyons battu par le soleil, leur tablée avait tout le loisir d'observer la bande des oubliés vaquer à ses occupations. À savoir s'entraîner, traquer les prométhéens, méditer, et s'entraîner encore. Ils étaient toujours une dizaine à tourner autour de leur chef. En partie pour qu'il les reprenne s'il voyait un défaut dans leur garde ou leur aura, mais aussi parce qu'il était un véritable aimant à prométhéens, et que la méthode d'extermination la plus efficace était de rester à proximité et d'ouvrir l’œil.
Ainsi, un kikoha occasionnel venait interrompre les enchaînements de passes supersoniques et les méditations silencieuses des élèves de Khaine.
Celui-ci prit le temps de savourer sa gorgée avant de répondre. Il aurait bien partagé avec ses invités, mais Lucie ne pouvait physiquement pas absorber de liquide et Abel était ici sous une forme astrale, pour ne pas alarmer ses geôliers de la Citadelle. Forme astrale ou pas, le nécromancien était de mauvaise humeur.

    - L'entraînement se passe bien, j'espère. Ça a l'air de te prendre beaucoup de temps. Tu aurais quand même pu m'envoyer une carte postale, tu ne crois pas ?
La plaisanterie acide ne suscita aucune réaction chez le onzième mage, que se contenta d'un regard torve et d'une autre gorgée de thé. Ce fut assez pour qu'Abel perde sa contenance.

    - Tu te fous de moi, Khaine ? Qu'est-ce que tu faisais pendant que cette bande de tarés me massacrait !!?

    - Je devais rester caché. C'était nécessaire.

    - Pardon ?
Les flammes noires dansaient sur sa silhouette fantomatique, et les plans marquaient une distorsion sinistre tout autours de lui. Khaine le regarda droit dans les yeux, sans lâcher sa tasse. Lorsqu'il parla, son ton était d'un calme imperturbable

    - Abel... Tu es peut-être la créature la plus insensible et la plus hypocrite à ma connaissance. Qu'est-il arrivé à la personne dont tu occupes le corps ? Est-ce que tu t'en soucies, seulement ? Et relâcher tes vampires sur le monde juste pour avoir une garde-robe partout où tu irais...
    J'aurais dû t'arrêter à ce moment là, et beaucoup d'autres d'ailleurs. Mais je ne l'ai pas fait parce que tes expériences étaient nécessaires. Prend ça comme une punition. Ça te pendait au nez.
Estomaqué, le nécromancien émanait toujours ses flammes noires. Lucie s'écarta imperceptiblement lorsqu'il fut évident qu'il allait passer à l'attaque, mais Khaine reprit la parole.

    - Si tu t'imagines avoir la moindre chance contre moi maintenant, sache que tu te trompes.
Et, l'espace d'un instant, il dévoila son aura. Les plans qui glissaient sur lui comme s'il n'avaient jamais été là furent soudainement agités d'une tempête furieuse, et l'air se chargea d'électricité statique. C'était un ki comme personne n'en avais jamais manifesté depuis que deux héros avaient fusionné, sur une planète lointaine. Mais pour les mages présents, Khaine n'avait jamais connu d'égal.
Abel baissa sa garde. La confrontation était inutile.

    - Bien. Pour répondre à ta première question, oui, l'entraînement se passe bien. Il me reste cent treize combattants, et ils seront tous fin prêts pour quand l'ancien monde tentera de nous envahir. Ceux qui sont trop faibles pour ce combat s'occuperont de neutraliser les Kaïoshins.
Ce fut Lucie qui prit la parole.

    - Cent treize ? Contre tout l'ancien monde ?

    - Ils suffiront. Ce statut quo se maintient parce que les dirigeants de l'ancien monde sont persuadés qu'avec leur avantage de population, ils généreront des combattants plus vite que nous, et que le temps joue en leur faveur. Cela causera leur perte.

    - Parce que toi, tu vaux plus que cent mille royaume ?

    - Exactement.
Ce n'était pas de la vantardise. Et les deux mages étaient bien forcés d'admettre que si une seule personne était susceptible de se montrer à la hauteur d'une telle prétention, c'était bien leur collègue. Cela suffit cependant à sortir Abel de son mutisme.

    - L'ancien monde est banni de toute façon. Tes soldats ne servent à rien.

    - Ils ont des dragon balls.
Abel haussa des épaules, méprisant.

    - Et alors ?

    - Eh bien si vous aviez cherché à comprendre comment elles fonctionnent au lieu de les détruire systématiquement, vous sauriez que les dragon balls sont exactement aussi puissantes que celui qui les a invoquées.
Le silence se fit entre les trois mages alors qu'ils parvenaient à la même conclusion. Abel se remit en premier.

    -Tu veux dire que...

    - Oui.


*******


La citadelle était en effervescence. Partout, les familiers et les démons arpentaient les corridors à toute vitesse. Les bataillons de guerriers venus des quatre coins du Makaï affluaient, menés par leurs seigneurs régents. Ils seraient tous présents : Baphasi y avait mis un point d'honneur. Pas une cité ne manquerait d'un héros pour la bataille à venir. Les chars volants Ioniens croisaient leurs premiers escadrons de dragons domestiques, qu'Abel avait réussi à produire. Pour la première fois depuis l'ère de Gilgamesh, le peuple du Makaï se battrait uni.

Par-delà les murailles, les légions Noxiennes marchaient au pas, à à peine quelques kilomètres des guerriers tribaux et des zones de test des pyromanciens de l'université royale récemment fondée. Uranie estimait leurs forces actuelles quatre millions de combattants, et un million de plus était stationné autours de Zaïen. Leurs bêtes de guerre étaient spécialement entraînées à chasser les dragons ; il faudrait les tenir à l'écart des spécimens domestiques.

L'attaque devait partir dans la semaine ; il était dangereux de laisser de pareilles forces inactives pendant trop longtemps. Mais Ladra avait parfaitement organisé leur armée à la surface, et les petites actions de sabotage ennemies n'avaient été que des inconvénients mineurs, quand elles n'avaient pas tout simplement viré au fiasco suite à une embuscade. La base avancée serait prête et sécurisée dans les temps, et alors, la grande bataille pour le monde d'au-dessus pourrait prendre place. Cela devait être et cela serait. Baphasi, en tant que reine du Makaï, ferait tout le nécessaire pour y parvenir.

La reine du Makaï navigua rapidement entre les bâtiments qu'elle arpentait depuis son enfance. Quelques têtes se retournèrent vers elle, mais la vitesse empêchait de la reconnaître. Depuis son retour avait abandonné les vêtements d'apparat criards pour un uniforme sobre, élégant et surtout pratique. Sa garde rapprochée avait subi le même sort : elle était de toute façon bien trop puissante pour être inquiétée par qui que ce soit ici.
La porte des appartements princiers était juste devant elle. Aucun des deux gardes habillés de blanc ne firent rien remarquer. Tout au plus se raidirent-ils un peu lorsque Baphasi écarta les portes pour la confrontation.



*******


Val'aël laissa rebondir les dernières paroles de son discours sur les murs de la cathédrale. Les quelques neuf cent hectares recouverts par l'édifice étaient bondés par la foule qui s'y amassait, et chaque groupe luttait pour conserver une respectueuse distance de sécurité avec ses voisins. Beaucoup d'inconfort pour ces êtres qui n'y étaient pas habitués. Les cent mille rois étaient tous présents, avec leurs cours et quelques individus assez exceptionnels pour avoir mérité une place dans l'illustre sanctuaire. Ce qui ne pouvaient physiquement pas passer par la porte à doubles battants haute de six mètres et large de quatre avaient bien dû trouver une alternative. Des centaines de drones tous différents se tenaient en lieu et place de leurs maîtres titans. Celui au premier rang, dont l'exosquelette de corail laissait percevoir un flot tourbillonnant d'eau salée au niveau des articulation, appartenait certainement à Océan, mais il s'en trouvait des centaines d'autres de bronze, d'écorce, de papier, de pain, d'étoffe ou de chitine, à travers tout l'édifice. N'importe lequel d''entre eux avait le potentiel de réduire une armée à néant. En fait, lancer le contenu de la cathédrale à l'assaut de l'arène réglerait probablement le problème en une poignée d'heure. Mais laisser le goût du premier sang à ces arrogants monarques ? Non, Val'aël n'était pas prête à leur accorder tant.
Cet honneur-là devait revenir à SES plus fidèles serviteurs et à eux seuls.

La foule attendait le final. Et ils pourraient bien attendre un peu plus, se dit la gardienne des élus. Elle s'était préparée toute sa vie pour ce moment et comptait bien le savourer jusqu'à la dernière goutte. Quelle vision que voilà ! Ces innombrables rois humblement serrés les uns contre les autres, forcés de reconnaître la grandeur de leur maître légitime au sein de ce monument dressé à SA gloire. L'élue laissa son regard se perdre sur la gigantesque fresque qui en décorait le plafond illuminé de chandelles flottantes. L'entrelacs de colonnes semblait s'écarter de lui-même pour ne jamais cacher aux yeux les détails de cette fresque. On en trouvait des copies dans les livres et les musées de tout l'ancien monde, mais celle-ci était l'originale. Elle racontait l'histoire d'un commencement. Et comme touts les commencements, il commençait par une fin. C'était la fin d'un monde et d'un arbre, l'histoire d'un lion, d'un magicien et d'un dragon.


*******


    - Comment ?
Elle avait retenu sa voix, mais c'était un cri que Panka avait voulu laisser échapper. Baphasi la dévisagea quelques instants encore, se laissant un temps pour penser à ses paroles avant de les prononcer. Sa fille n'était pas surprise. Elle s'y attendait, sans l'accepter. La bataille était déjà gagnée, mais il restait à vaincre son courage et son esprit de sacrifice. Qu'elle les réserve ! Elle en aurait grand besoin.

    - Tu restes ici avec Adjack. Je ne peux pas laisser le Makaï sans surveillance, et tu n'es pas assez expérimentée pour cette bataille.
Ceci au moins était vrai. Panka n'avait jamais vu de bataille de sa vie, et Ellac, s'il avait bien envoyé de nombreux membres de sa tribu menés par l'un de ses fils, était aux abonnés absents pour l'invasion. Il devait garder rancune de la réprimande de Panka, et le fait de s'être fait ressusciter sans avis préalable n'arrangeait probablement rien. Tant pis. Ce vieux débris n'aurait pas sa part de gloire, et elle aurait tout le temps de le punir pour son impertinence une fois le monde d'au-dessus conquis.
Elle ne récolta qu'un regard blessé de la part de sa fille. Elles savaient toutes les deux que le soutien de Panka lors d'une bataille rangée de cette ampleur était tout bonnement trop décisif pour s'en passer. Au-delà de ses redoutables talents de combattante et de sa capacité à exécuter n'importe quel ennemi instantanément, elle pourrait ramener à la vie les pertes, et on était en droit de supposer qu'elle était aussi immortelle que son père. Il y avait autre chose. Quelque chose de trop dur pour que sa mère puisse se permettre de le lui avouer.

Elle aurait besoin d'aide. C'était terriblement évident, mais elle refusait qu'on la lui apporte. Le visage de Panka se teinta doucement d'acceptation, puis vira instantanément à la colère noire.

    - Non !
Voilà qui était inattendu. Baphasi voulut ouvrir la bouche, mais elle fut immédiatement interrompue.

    - Non ! Si tu crois que je vais te laisser risquer ta vie là-haut sans rien faire, tu te trompes ! Je me suis rongé les sangs pendant quatre ans, et tu veux m'abandonner encore ? Tout ça pour quoi ? Pour ta foutue vengeance ?
Elle était au bord des larmes.

    - Tu ne vois pas ce que nous avons déjà ? Tu ne penses qu'à conquérir, mais tu n'as rien fait pour ton royaume ! Combien de gens vas-tu tuer pour satisfaire ton ego ? Tu... tu...

    - ...

    - Tu ne vois pas ce que j'ai fait tout ça pour toi ?
Une poignée d'heures de sommeil par nuit tout au plus, et toujours présente, toujours souriante. Toujours là pour veiller sur le Makaï, du plus prestigieux seigneur régent au plus misérable des plébéien. Toujours là pour reconstruire, pour relever, pour réconforter les plus faibles, et encourager les plus forts. Quatre ans sans jamais se reposer, sans s'autoriser un seul écart, une seule faiblesse, une seule injustice, et elle avait transformé un royaume au bord de la guerre civile en une merveille.
Baphasi pouvait voir les cernes sous le maquillage, et les cheveux gris sous la teinture. Les mains, si jeunes, qui avaient reconstruit leur royaume, tremblaient sous l'émotion.

Elle la saisit par l'épaule, plantant son regard sur dans celui, tremblant, de sa fille.

    - Mais je me fiche de cette vengeance, Panka. Je l'ai abandonnée depuis que je t'ai eue.
Voilà qui la surprenait enfin. Complètement désoriente, l'héritière lui rendit un regard plein de questions.

    - Tu ne sais pas ce qui est en train de nous fondre dessus. C'est... Nous serons comme des insectes pris dans un ouragan.
Sa poigne se fit plus forte, douloureuse, et Panka vit une lueur de folie panique dans ses yeux.

    - J'ai vu le Makaï brûler. Il faut fuir.
Elle resta béate devant la révélation. Puis, au fur et à mesure qu'elle prenait conscience de son ampleur, ses traits laissèrent percer une fureur sans mesure avec son explosion précédente.

    - C'est ça ton plan ? Nous exiler ?
Coupée dans son élan, Baphasi hocha brièvement la tête, comme si elle échouait à réaliser la raison de la colère de sa fille.

    - Tu vas abandonner le royaume ? Tout ce que nos ancêtres nous ont laissé ?

    - Tu ne comprends pas, nous...

    - Oh si, je comprend très bien. Tu as peur. Tu es peur, et tu veux tout abandonner pour te cacher. Tu as pensé à la Citadelle ? Tu vas laisser notre Héritage derrière toi ? Et les jardins volants d'Ionia ? Et la montagne sacrée ? Tu vas la laisser ? Le champ des lames, la nécropole des cent mille ? Un million d'année d'histoire ! Et les troupeaux de béhémots ? Ils ne survivent pas en surface !

    - Je vais leur sauver la vie !

    - En sacrifiant nos raisons de vivre ? Tu...
Elle ne finit pas sa phrase. Tout le palais royal tremblait. L’atmosphère se chargea d’électricité, et des arcs électriques se mirent à danser sur tout le corps de la reine. La salle toute entière parut brûler d'un feu surnaturel. Soudainement, elle eut l'impression d'étouffer. Était-ce parce que la température ambiante avait subitement monté jusqu'à la limite du supportable ? La question ne l'effleura pas longtemps, cependant. Panka était capable de ressentir les énergies, et celles qu'elle percevait, pulsant depuis le corps de sa mère, la laissait aussi terrifiée qu'un lièvre devant un semi-remorque.

    - Silence ! Tu vas te taire et faire exactement ce que je te dis !
Les murs tremblaient sous sa voix. Des insectes devant un ouragan.

    - Tu resteras au Makaï pendant toute la durée de l'attaque, et tu n'en sortiras que lorsque tout cela sera fini ! Ensuite, tu débuteras l'exode. Tu emporteras tout ce qui peut être emporté, et tu laisseras le reste derrière toi.


*******


La fresque commençait par un monde dévoré par le Dragon. Sa gueule rasait les murs, ses yeux occupaient le ciel et la terre suivait le mouvement de ses écailles. Qu'il ordonne, et les feuilles se changeaient en colombes, les colombes en or, l'or en plomb et le plomb en mercure. Qu'il dorme, et le temps marquait la pause en son honneur, qu'il désire, et le monde pliait pour lui. Mais il restait une chose qui ne pliât pas. Un arbre que sa volonté ne savait courber. Un pilier qui faisait du monde un monde, et pas un Dragon. Quelle fureur alors dans les yeux de la bête ! Quelle cupidité ! Quel désir irrépressible d'acquérir ce qu'il n'avait pas, de briser ce « non » qu'il haïssait tant. Le voilà qui s'avançait, insatiable, et qui dévorait à pleine gueule pour atteindre l'objet de ses rêves. Et les dents tranchaient les montagnes, et les désirs vidaient les océans, et la gueule engloutissait le ciel... Comme une nuée de mouches, ils étaient innombrables à se réfugier sous les frondaisons de l'arbre, et comme une nuée de mouches, ils seraient tous impuissants à arrêter le mal quand il les rejoindrait.
Et dans cette heure de détresse, la sagesse leur vint enfin. Ils gémirent à l'unisson et appelèrent leur roi à l'aide. Leur vrai roi, qui ne régnait pas par orgueil ni par désir, mais par constat. Le roi qui, seul, pouvait stopper ce devant quoi tous tremblaient. La frise le dépeignait comme un lion, mais une forme en valait une autre lorsqu'on s'efforçait de peindre un archéen, fut-il le plus grand de tous.
Et déjà l'arbre frémissait, car le Dragon était proche. Le Lion s'avança, conscient que le combat à venir serait terrible et que le temps manquait. Il dit qu'il vaincrait, mais que l'ennemi s'était fait si redoutable que nul, à l'exception de lui-même et de son lionceau, ne vivrait pour contempler sa victoire. Mais voici qu'il leur fit une offre, car son cœur avait été touché par le destin terrible auquel ces malheureux étaient condamnés. Il leur offrit une place en son sein. Car, si nulle incarnation ne saurait voir le lendemain d'un combat si terrifiant, au moins pourrait-il sauver leur âme et leur offrir une autre vie dans un monde plus hospitalier. Et tous s'agenouillèrent devant de si sages paroles, et lui offrirent leur âme en toute sérénité.

Mais une voix, fourbe, s'éleva alors dans la foule. « Je ne vous crois pas ! », dit-elle. « Il ment, il est bouffi d'orgueil ! Il veut sacrifier vos âmes pour vaincre le Dragon, mais n'y parviendra pas ! J'ai pour ma part un plan qui saura nous sauver tous, et rendra une telle catastrophe impossible à l'avenir ! » C'était un magicien du nom de Primus qui avait parlé. Même l'imminence de la venue du Dragon n'avait pas vaincu sa mesquinerie. Tout petit et faible qu'il soit à côté du lion, il était avide de pouvoir et voulait régner comme le roi qu'il n'était pas.
Et beaucoup l'écoutèrent. L'esprit égaré par l'imminence de la mort prochaine, ils se tournèrent vers un escroc mielleux plutôt que vers un sauveur compatissant. Mais le Lion n'en prit pas ombrage, et ne ressentit que de la pitié pour ceux qui avaient refusé le salut.

Et quand vint le Dragon, tout fut comme le lion l'avait prédit. Ils firent face à l'enemi, unis, mais seul le lion et son fils survécurent. Le combat fit rage un instant ou une éternité, mais le terrible duel cessa quand, avec un craquement sinistre, le magicien fendit l'arbre en deux, et cacha une moitié dans l'Arène qu'il avait passé l'affrontement tout entier à construire. Sans doute se figurait-il que c'était là son dernier espoir de vaincre le Dragon, mais cela fut pour le cupide un intense soulagement. Car, au plus fort du combat, il était devenu évident que le lion le vaincrait, et que sa juste fureur vengerait bientôt toutes les âmes qui rugissaient en son sein.
L'Arène fut pour le Dragon comme une échappatoire, et il s'y enfuit à toute vitesse, droit dans le piège que lui tendait le rusé Primus. Là, le magicien et ses fidèles affrontèrent le Dragon, et Primus paya pour son arrogance : même blessé à mort, la bête parvint à l'abattre avant qu'il ne la brise en sept fragments. Chaque fragment fut lié à l'un des sept survivants de cette catastrophe afin que rien de semblable ne se produise plus, et ainsi s'acheva la fin.




Val'aël préférait les fins aux débuts. Distribuer des fins, cela avait occupé une bonne partie de sa vie d'avant. Elle avait terminé des dizaines de guerres, en élaguant les rangs ennemis, en abattant tous les champions qui osaient se présenter devant elle. Elle avait mit fin à des fortunes, aussi, à chaque fois qu'elle réclamait son dû pour ses services de tueuse. L'argent, la violence... elle n'avait pas connu ni cherché grand-chose d'autre... Elle tuait, recevait son compte d'excitation et d'argent, et passait à un autre affrontement. Quand elle avait de la chance, quelqu'un y était assez désespéré pour débourser de quoi ruiner son futur empire, dans l'espoir d'être celui qui régnerait dessus. Et c'était bien ce qui arrivait la plupart du temps. La légende de la vierge écarlate ne s'était pas faite toute seule.

Elle sourit au souvenir de ce surnom clinquant. La vierge écarlate... Elle n'était ni l'une ni l'autre lorsqu'on avait commencé à l'appeler ainsi, mais elle s'était attachée à ce patronyme. C'est sous ce nom qu'elle avait bourlingué de bulle en bulle pendant des décennies, traînant avec elle un archéen emprisonné que les premiers vaisseaux trans-bulle avaient rendu inutiles. Rapidement, c'était une véritable armée qui s'était rassemblée à sa suite. La « horde écarlate » était en passe de lui tailler une place au sein du conseil des cent mille rois, quand elle avait rencontré l'élu.
Quel duel cela avait été ! Elle ne respectait rien à l'époque, et SA parole n'était alors qu'une autre figure d'autorité dont elle se serait bien passée. Il n'avait pas fallu longtemps pour que la vierge écarlate ne rampe au sol, terrassée. Mais au lieu de l'exécuter pour l'un ou l'autre des innombrables crimes qu'elle avait sur la conscience, il lui tendit la main et lui offrit une place à SA droite. Une place parmi les élus. Qui aurait-elle été pour refuser ?

Elle avait obéi sous la menace, mais la transformation lui avait ouvert les yeux sur sa vraie place dans l'existence, et celle qui lui avait été offerte. S'IL était indubitablement invincible, peu d'être pouvaient supporter SA présence, et il lui fallait des émissaires pour s'exprimer ou pour porter SA justice là où un peu de délicatesse était nécessaire. C'était là qu'intervenaient les élus, les plus grands guerriers mortels de l'ancien monde, réformés à SON service. Oui, ils seraient eux qui frapperaient l'arène les premiers, et l'écraseraient d'un seul coup. Les cent mille rois pourraient bien se partager le reste si ça leur chantait.
Partout en hauteur, suspendus dans leurs chaires miniatures, les quelques sept mille cinq cent élus hibernaient, attendant leur heure. Ils avaient toutes les tailles et toutes les formes, mais c'était presque la seule chose pour les différencier. Sous la peau, leurs veines étaient gorgées du même plasma doré, et leurs âmes avaient été reforgées par la même Vérité.
Il suffisait de les voir se mouvoir pour que cela saute aux yeux. Quiconque maîtrisait son corps finissait par acquérir une fluidité dans le mouvement. Le corps savait comment réagir et ordonnait le déplacement suivant avant même que celui en cour ne soit achevé. Durant sa vie de mercenaire, Val'aël avait rencontré un maître qui, plongé dans le coma par un maléfice, continuait de tenir les portes de son dojo et combattait quiconque tentait de passer outre. On croyait alors voir une trombe d'eau en mouvement, un exemple d'harmonie du corps même en l'absence d'esprit.

Lorsqu'elle se retourna dos à la foule pour enfin se diriger vers l'autel, le pas de Val'aël était sec. C'était une série de mouvements raides indépendants les uns des autres, comme un pantin manipulé avec une extrême précision par une main extérieure qui ne savait jamais quel serait son comportement dans la seconde qui suivrait. Val'aël n'avait pas de réflexes, aucun élu n'en avait besoin. Les réflexes permettent de limiter au maximum les temps de trajet de l'information, de minimiser le temps de réaction. Mais les élus n'avaient pas de temps de réaction. L'instant où ils percevaient une information était celui où le mouvement de réponse se déclenchait. Leurs décisions les plus longuement étudiées étaient immédiates, car SON pouvoir pouvait altérer le temps lui-même.

Le pas saccadé, artificiel, résonna silencieusement sur la pierre dure de la cathédrale, recouvert qu'il était par le vacarme de cette foule muette qui l'encerclait. Partout où elle posait son regard, Val'aël croisait des yeux hostiles, craintifs et orgueilleux. Ils avaient peur d'elle, des élus, et surtout de ce qu'ils représentaient. Ils étaient furieux de leur propre impuissance. Mais la peur et l'impuissance étaient des composantes essentielles de la foi, et elle ne s'en alarma pas. Par sa proximité avec le lion transcendé, elle les ressentait plus intensément que n'importe lequel d'entre eux. Tel était le lot de SES champions.

L'élue s'arrêta finalement devant l'autel. Si la cathédrale toute entière était parsemée de ses frères et sœurs en hibernation, un examen attentif permettait de constater que leur regard à tous convergeait vers l'un d'entre eux, au centre du monument. Celui-ci avait les yeux tournés vers le ciel, car de tous les mortels, il était le plus proche de SA lumière. Son visage était recouvert d'un masque d'or, car sa beauté était telle que quiconque l’apercevait devenait fou d'amour pour lui. Son corps d'éphèbe était couvert d'une simple robe robe blanche, car la vanité lui était étrangère. Dans sa main gauche, il brandissait Crépuscule, l'épée léguée par son père avec laquelle il avait percé le cœur d'un million de mécréants. Dans sa main droite, il étreignait Aube, l'épée offerte par sa mère qu'il n'avait jamais souillée par le sang d'aucun ennemi. Il se dressait ainsi, pieds nus, depuis qu'il avait transmis à Val'aël la garde des élus, et jamais elle n'avait osé remanier son choix en transmettant son titre à un autre.
Ce fut avec le cœur en liesse qu'elle prononça devant toute la foule, le nom d'Ach'aël, élu parmi les élus.

Et alors le silence ce fit vraiment.

Le corps du héros, qui était resté immobile pendant une éternité, s'anima soudainement, avec la même économie précise que Val'aël. Il balaya la cathédrale du regard, tranquille et sûr, car il ne lui avait pas fallu instant pour recouvrir de son comas millénaire. Autours de lui, chaque élu faisait de même, et s'agenouilla en silence devant Ach'aël, imité par toute la foule.

Lorsque le dernier roi eut posé le genou au sol, Val'aël les imita, et il ne fut plus que le plus grand héros de l'ancien monde pour se tenir encore droit.

Lui seul pouvait prétendre le faire en invoquant SA bénédiction. Sous le masque doré, les lèvres s'animèrent, et l'ancien monde retint son souffle.

C'était un nom fait d'une infinité de syllabes, qui résonnaient dans tous les plans. Il lui fallut une éternité pour le prononcer, mais cette éternité ne dura pas un instant. Le temps se rétracta, l'espace se plia, et chaque âme se tourna vers celle qui les gouvernait toutes.

Dans l'immensité de l'ancien monde, à travers les cent mille royaumes et au-delà, les cités immenses débordantes de vie se figèrent le temps d'un battement de cœur. Les armées innombrables qui s'entre-tuaient pour l'une ou l'autre broutille réalisèrent leur place, et leurs milliards de guerriers baissèrent les armes qu'ils brandissaient les uns contre les autres pour les mettre au service de la seule guerre juste. Les fortunés pleurèrent d'avoir été vraiment pauvres toute leur vies, et les érudits se maudirent d'avoir si longtemps ignoré cette vérité. Une infinité d'âme reconnaissantes tournèrent leur regard vers le ciel, car le doute et la peur n'était plus. SON nom avait balayé toutes les incertitudes, et ils savaient qu'ils ne seraient jamais seuls.

Dans la cathédrale, le monde fut brutalement privé de toutes ses couches de mensonge, et un torrent de vérité s'abattit sur son peuple. Et les élus rirent, car ils savaient depuis longtemps ce qui se trouvait derrière le mensonge. Mais tous n'étaient pas préparés. Ceux qui n'avaient que simulé leur foi ne purent supporter la révélation, et payèrent leur déni de leurs vies. La Vérité s'imposa malgré eux et, ne pouvant s'y fondre, ils tombèrent en poussière.

C'était un mot qui emplissait l'espace et le temps, qui fondait la réalité et la reforgeait en une extension de SON être. Une preuve irréfutable du divin, que nulle gorge ne saurait prononcer, que nul langage ne saurait transcrire, mais que nous traduirons ici par :



YALDABAOTH
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Re: DBAF-Lamantin

Messagepar Antarka le Dim Jan 01, 2017 13:19

Message en passant pour dire que je suis toujours, que c'est toujours aussi énorme/épique, et qu'en fait je commente pas tant parce que j'attend la suite avec impatience, et que tes chapitres se suffisent pas à eux-même dernièrement, mais s'incorporeront dans la suite (clairement, suis dans l'attente d'ou tu vas et de comment tu vas y aller).

Juste, sur un des derniers chapitres, un peu déçu qu'on ait pas lu comment l'armée de Kaioshin s'est faite balayer... ce dernier semblait bien préparé, il avait moult disciples, avait a priori fait reveler leur potentiel, et en plus fait fusionner certains d'entre eux, sans compter sa propre progression a priori énorme (il parle de ridiculiser Dabra, j'en déduis qu'il est le numéro 2 vivant de l'univers derrière Son Goujin)... y'avait un potentiel énorme la dedans, je t'en veux tellement d'avoir foutu ça en off-screen :evil:

M'enfin c'est génial quand même hein. Même si je trouve qu'on commence à sentir ta frustration de pas maitriser le Kage Bunshin no Jutsu et de "bacler/plier" ton univers à ce point (dont tu pourrais faire 12 tomes de 1500 pages chacun).
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Re: DBAF-Lamantin

Messagepar omurah le Dim Jan 08, 2017 10:50

Mer il é fou.
Arrêtez-le!

Ton projet c'est de tous nous faire complexer de nos fics ou c'est comment ? Oo

Bon, je devrais faire un vrai com' et tout, mais j'ai toujours du mal à commenter ta fic parce que c'est pour moi l'une des 3 meilleures du fofo (en comptant les actives, les inactives, les abandonnées, les terminées, etc.) et j'ai du mal à tempérer mon enthousiasme et pas passer pour un gros suceur. Je pourrais me faire violence pour me tempérer et m'auto-censurer, mais ça rendrait pas justice à la fic.

Tout ces passages aux relents bibliques,
merde quoi,
ça arrache.

Continue mec. Continue.

ps : +1 au com' d'Antarka
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Re: DBAF-Lamantin

Messagepar niicfromlozane le Dim Jan 08, 2017 21:24

OK,

La scène entre Khaine et Abel envoie du pâté grave. J'ai adoré le passage écrit à la manière d'un mythe, ainsi que la manière d'amener la manière dont tu a amené "Yaldabaot", comme on dit chez nous. Ça pète, autant graphiquement que l'ambiance particulière de l'ancien monde. Du coup, j'ai envie de revenir en arrière relire le passage où on avait deja appris des trucs sur le Dragon.

En fait, ça paraît le on moment pour reprendre la fic entièrement et essayer d'y voir clair… Juste avant l'explosion générale qui en saurait tarder et qui devrait logiquement clore cet "acte 0".
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Re: DBAF-Lamantin

Messagepar Lamantin_Furtif le Lun Jan 09, 2017 14:44

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Huhuhu, mais arrêtez donc ! continuez

Bah, déjà merci beaucoup pour vos retours, ça fait plaisir :D
Antarka a écrit:Juste, sur un des derniers chapitres, un peu déçu qu'on ait pas lu comment l'armée de Kaioshin s'est faite balayer... ce dernier semblait bien préparé, il avait moult disciples, avait a priori fait reveler leur potentiel, et en plus fait fusionner certains d'entre eux, sans compter sa propre progression a priori énorme (il parle de ridiculiser Dabra, j'en déduis qu'il est le numéro 2 vivant de l'univers derrière Son Goujin)... y'avait un potentiel énorme la dedans, je t'en veux tellement d'avoir foutu ça en off-screen :evil:

En fait, je ne l'ai pas fait pour deux raisons :
1- Le temps. ça m'aurait pris deux chapitres minimum à traiter, et vu ma vitesse de parution c'était un peu trop.
2- L'économie. Je préfaire gardes mes chorégraphies, techniques et retournements de situation pour le bouquet final.
Pas d'inquiétude, Kibitoshin est vivant et il lui reste des disciples.
Pour ce qui est de son niveau, il ne fait pas oublier Zakriel, Kyra et Boo dans l'équation. Ils sont tous les trois plus forts que lui, et il reste quelques autres super-sayens de niveau 2, qui lui sont à peu près équivalents au combat.

Antarka a écrit:M'enfin c'est génial quand même hein. Même si je trouve qu'on commence à sentir ta frustration de pas maitriser le Kage Bunshin no Jutsu et de "bacler/plier" ton univers à ce point (dont tu pourrais faire 12 tomes de 1500 pages chacun).

J'avoue que j'aurais du prendre ce module à l'accadémie ninja...
Mais oui, j'ai plein de choses en tête : une fic cross over avec 40k, une série de OS sur l'ancien monde, une autre sur la chute des mages, une autre sur les guerres zodianes... Mais si je finis cette fic cce sera déjà pas mal
omurah a écrit:Bon, je devrais faire un vrai com' et tout, mais j'ai toujours du mal à commenter ta fic parce que c'est pour moi l'une des 3 meilleures du fofo (en comptant les actives, les inactives, les abandonnées, les terminées, etc.) et j'ai du mal à tempérer mon enthousiasme et pas passer pour un gros suceur. Je pourrais me faire violence pour me tempérer et m'auto-censurer, mais ça rendrait pas justice à la fic.

Haha, merci. Je veux bien le ,nom des concurrents, là encore.


omurah a écrit:Tout ces passages aux relents bibliques,
merde quoi,
ça arrache.

Ouaip, c'est aussi mes passages préférés, et ceux que j'écris le plus naturellement. Content qu'ils vous plaisent.

niicfromlozane a écrit:En fait, ça paraît le on moment pour reprendre la fic entièrement et essayer d'y voir clair… Juste avant l'explosion générale qui en saurait tarder et qui devrait logiquement clore cet "acte 0".

Exactement. La fic est très (trop) dense en intrigues, et elles risquent de se recroiser toutes dans les prochains chapitres. On en voit le bout, enfin !
Dernière édition par Lamantin_Furtif le Jeu Jan 19, 2017 0:18, édité 1 fois.
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Re: DBAF-Lamantin

Messagepar xela26 le Mer Jan 11, 2017 0:29

Salut Lamantin,

J'ai ouï dire (ou j'ai lu qq part, je me rappel plus :) ) que certains lecteurs ont profité du calage de ma fic pour découvrir/redécouvrir la tienne :mrgreen:

Bref, je me suis mis à ta fic, en commençant par les différents OS puis la fic. j'en suis au chapitre 4.
Premier point négatif ( le seul pour l'instant) je pense que tu devrais mettre tous les OS nécessaire à la compréhension de la fic sur la première page, en spoiler comme tu l'as fait pour l'une d'elle.
Sur les OS en eux-même, le style est, pour moi, nickel. Ta mythologie du Makai est bien ficelée, ainsi que le chapitre sur le dernier Sayan et l'arrivée de l'ancêtre de Freezer.
La fic maintenant, part sur les excellentes bases des OS. Je vais rattraper mon retard et poster des trucs plus intelligents que "c'est bien".
Gilgamesh, Enkidu... Je me prépare donc à voir apparaitre Atrahasis :) . Peut-être est-ce lui qui est l'origine de l'énigme du sort de Gilgamesh ?
Cell: l'ascension de la terreur- Cell a vaincu Son Gohan lors du Cell game!! Quel sort réserve-t-il à la Terre?? Pour le savoir....viewtopic.php?f=42&t=5990
Chapitre 138: publié
Chapitre 139- 145: 90%- relecture, correction

Cell: Damned Souls- Les aventures parallèles de héros de "l’ascension de la terreur". Pour les connaitre:
viewtopic.php?f=42&t=6774
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Re: DBAF-Lamantin

Messagepar Masenko le Mer Jan 11, 2017 11:14

Hello !

Je suis 100% d'accord avec Xela !

J'ajouterai même que ça donnera du "sérieux" à tes OS ! J'en ferai une critique constructive plus tard mais posés là comme ça, ça donne l'impression que c'est bofbof, peu travaillé et pas très utile... (du genre : j'ai un truc à écrire, je sais pas pourquoi mais bon, voilà quoi, c'est écrit...) Et c'est pour cette raison que j'ai mis beaucoup de temps à venir lire parce que la démarche d'aller chercher tes one shot et de comprendre leur ordre était contraignant ... (alors que les commentaires sont très positifs !)

... Alors qu'ils sont super important pour ton histoire apparemment et surtout très intéressant à lire ! Tu devrais mieux les mettre en valeur en éditant ton premier message ici, présentant succinctement tes OS, ou pas... Mais en tout cas, au moins le titre dans le lien quoi (ou en spoiler comme proposé par Xela, même si j'me dit qu'ils valent mieux que ça aussi tes textes :) )

Je suis en train de lire le 4e (ben oui, tu mets trois liens mais en fait il y a 4 OS :p) et il est bien clair que ce que tu fais est super travaillé et que tu sais parfaitement où tu vas ! Fais honneur à l'univers que tu as créé en les mettant en page ! :)


à bientôôôôt !
- Masenko -


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Chapitre 14 : Super Trahison

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Re: DBAF-Lamantin

Messagepar xela26 le Dim Jan 29, 2017 20:14

Plutôt que de faire un retour global à la fin, dans lequel j'aurais oublié la moitié de ce que je voulais dire, je vais faire chapitre par chapitre juste après leur lecture.

Chapitre 5 :
Pas grand chose à dire sur ce chapitre d'introduction de la secte des magiciens, c'est toujours bien écrit et les liens avec les persos classiques de DBZ se pose.

Chapitre 6 :
Alors le fameux Goujin apparait. Il n'a pas l'air trop mauvais-Pour l''instant- mais ça sent la bombe à retardement.
J'aime bien ce que tu as fait de Boubou, avec la stratégie du Kaioh shin qui a finalement marché. BOn chapitre et bon combat, toujours aussi bien écris.

Chapitre 7: ou l'ascension, l'avènement et la chute de Dérèk.
Un de tes plus gros chapitre. Tout est bien, et même si on est loin après la mort de Goku et de ses fils, tu fais très facilement le lien avec cette époque héroïque et on n'est pas perdu du tout. Les évènements qui se déroulent suite à l'irruption de la présence sayan sur Terre sont très réalistes, avec l’ascension progressive des descendants de Goku et Végéta au sommet, à l'élite de la planète Terre, l'héritage de tortue géniale legué à Krillin ainsi que les accomplissements de Ten shin Han et la quête sans fin de puissance de Piccolo.

à propos des descendants de Goku et Végéta, peut-on vraiment les qualifier de Sayan? à part les enfants directs de Goku et Végéta, les autres ont tellement de sang terrien en eux qu'ils seraient plus terriens que sayan (enfin mis à part leur capacité de transformation)
Cell: l'ascension de la terreur- Cell a vaincu Son Gohan lors du Cell game!! Quel sort réserve-t-il à la Terre?? Pour le savoir....viewtopic.php?f=42&t=5990
Chapitre 138: publié
Chapitre 139- 145: 90%- relecture, correction

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Re: DBAF-Lamantin

Messagepar Lamantin_Furtif le Lun Fév 27, 2017 11:49

Yooooop. Je suis de retour !
Désolé pour le temps d'écriture, je me suis un peu laissé déborder par la vie IRL.

Merci pour vos commentaires, Xela et Masenko ! J'ai un peu raccomodé la première page, comme vous me l'aviez conseillé. Par contre, aveec la limitation du nombre de mots par message, je ne peux pas mettre tous les OS dans le premier topic :|

j'apprécie beaucoup les retours progressifs sur les chapitres, mais n'hésite pas à critiquer si tu trouves quelque chose qui cloche.
xela26 a écrit:à propos des descendants de Goku et Végéta, peut-on vraiment les qualifier de Sayan? à part les enfants directs de Goku et Végéta, les autres ont tellement de sang terrien en eux qu'ils seraient plus terriens que sayan (enfin mis à part leur capacité de transformation)


Bah, justement. Pour moi, ce qui définit un sayen, c'est précisément cette capacité de transformation. Niveau vocabulaire, je suis parti sur cette appellation, car il ne reste de toute façon plus de sayens de sang pur.

Allez, place au texte :


Chapitre 16 - Appel aux armes



Il y a bien longtemps (mais pas tant que ça)



    - Attention, ça va un peu piquer.
Assis sur sa souche, le petit garçon serra les poings en silence pendant qu'on lui appliquait du liquide désinfectant sur le front. De gros doigts blancs finirent d'apposer délicatement un tout petit pansement là où il était blessé. L'enfant se détendit, voyant qu'il n'y avait plus rien à craindre, et quitta des yeux le verre où reposait sa dent cassée.

    - Merci monsieur.
L'immortel lui maintint doucement la bouche ouverte, tout en appliquant le bout de dent brisé à l'endroit de la cassure. Un petit flash plus tard, la dent était ressoudée. Il recula pour mieux apprécier son œuvre.

    - C'est bon. Tu vas bien. Mais il faut faire attention, tu sais. Les Zodians sont très forts, tu aurais pu te faire tuer.
Pas de réponse. Il regardais par terre, en frottant sa dent réparée d'une main. Il avait été chanceux que le sang-bleu n'ait pas forcé : un seul coup de pied d'un combattant de ce niveau était plus que suffisant pour exécuter un gamin de huit ans. Malgré tout, l'immortel devait bien admirer le courage de son protégé, qui n'avait pas hésité à attaquer une demie-douzaine de soldats pour protéger un parfait inconnu, et ce, armé seulement de ses poings.
Le monde s'était fait plus rude que jamais au cours des dernières décennies. L'ancien monde et l'arène étaient devenus le théâtre d'une lutte titanesque entre sorciers, empires et divinités, et les zodians, au service de l'impératrice Calyψo, de l'ordre des mages et de l'église de Primus, incarnaient les trois à la fois. Partout où l'impératrice régnait, ses légions faisaient respecter sa loi. Partout où elle ne régnait pas, elles venaient l'imposer par la force. Ce gosse avait de la chance d'être en vie.

    - Qu'est-ce qui t'a pris de les attaquer, au juste ?
Un bataillon de soldats contre un seul enfant incapable de maîtriser son ki. L'immortel en aurait ri si la situation n'avait pas été si dramatique. Le jeune garçon restait muré dans son silence. Un fort sens moral, qu'il ne parvenait pas à s'expliquer à lui-même l'avait irrésistiblement poussé à agir.

C'est toi qui a créé ça, Primus ? À quel point as-tu préparé son existence ? Tu ne nous aurais pas demandé de lui sauver la vie s'il ne t'était pas précieux, d'une manière ou d'une autre.

    - Et vous ? Pourquoi vous m'avez sauvé ?
De la répartie. Et bien soit.

    - Un vieil ami nous a prévenu qu'il y avait un enfant en danger, alors nous sommes venus à la rescousse.
Puis, devant la mine confuse de son interlocuteur.

    - Il peut voir l'avenir.
Cela faisait beaucoup à assimiler d'un seul coup, et son regard se perdit un moment dans les arbres. L'atterrissage d'un jeune homme blond au teint maladif l'interrompit dans sa confusion. L'arrivant leur adressa un grand sourire, ses yeux bleus délavés pleins de fierté.

    - Ça y est, je les ai tous eu !
L'immortel le regarda dans les yeux, désapprobateur. Silence gênant, avant qu'il ne se reprenne.

    - Sauf celui-ci, OK. Je reviens tout-de-suite.

    - Non, Abel. Il y en a deux. Celui que tu viens de détecter essaie de détourner ton attention pendant que l'autre se dirige vers leur vaisseau.
Abel Alazrhad resta coi, le regard perdu au loin, jusqu'à ce que l'immortel ne l'aide dans sa concentration en lui pointant une direction du doigt.

    - Ooooh. Oui. C'est bon, je l'ai. J'y vais.
Et le jeune mage quitta le sol à toute vitesse dans la direction qu'on lui avait indiqué. Le rescapé dévisageait à présent l'Immortel avec de grands yeux interrogateurs.

    - Il va les tuer ?
Zut. L'immortel n'avait pas eu à gérer ce genre de situation depuis très longtemps. Il tenta de se redonner une composition en se retournant vers l'enfant. Inutile de tourner autours du pot.

    - Parfois, c'est la seule solution. Si Calyψo découvre que nous sommes intervenus, sa colère sera terrible. Elle pourrait décider d'exterminer touts les habitants de la planète.

    - ...
Il n'y avait plus grand chose à faire, à part attendre le retour d'Abel. Ensuite, il serait temps de mettre les voiles le plus loin possible.

    - Pourquoi est-ce qu'ils font la guerre tout le temps ?
Ce môme ne devait pas avoir vécu un seul jour de paix dans toute sa vie. S'il n'y était pas directement opposé, il entendait parler de la guerre qui opposait les deux empires de Calyψo et de Caldagla sur un millier de champs de batailles depuis des siècles. Zodians contre démons du froid, empereur contre impératrice, mage contre mage... Une guerre absurde, mais qui devait durer coûte que coûte.

    - La force entraîne la force. Tu as remarqué qu'aucun des deux camps ne détruit de planètes ? Ils ne veulent pas détruire les ressources de l'autre, même si ce serait plus efficace.
    Ils ne cherchent pas à se vaincre l'un l'autre. Ils veulent rendre ce monde aussi fort que possible.

    - Mais...

    - L'ancien monde est rempli d'ennemis prêts à nous envahir au premier signe de faiblesse. Tant que la guerre continue, ils savent que nous sommes prêts à leur rendre coup sur coup. L'ancien monde fonctionne sur un niveau d'oppression complètement différent. Ils chercheront à imposer leur loi sans comprendre à quel point l'arène diffère de leurs dominions. Tout le monde regretterait les deux empires.
Abel se posa en silence, ne voulant pas perturber l'enfant dans son trouble, et assura d'un geste que le travail était fait. Ce maladroit s'était brûlé les manches avec une boule de feu. Il était temps de partir. Le colosse pâle se leva de son siège improvisé, quand une voix fluette l'interrompit.

    - Apprenez-moi à me battre.

    - Pardon ?

    - Apprenez moi à me battre comme vous. Je vais devenir fort. Encore plus fort que vous. Et que Caldagla, et que Calyψo. Comme ça, il n'y aura plus besoin de guerre. Je vais devenir tellement fort que tout l'ancien monde tremblera devant mon nom, et que plus personne n'osera nous faire de mal.
Dans la bouche d'un enfant ordinaire, ce discourt eut été ridicule, mais c'était Primus lui-même qui les avait menés à celui-ci. L'immortel se tourna vers Abel, le sourire aux lèvres.

    - Ça fait onze, c'est bien ça ?


*******

On entendait le vent souffler sur la capitale du nord. Dans les rues vides, les seuls mouvements visibles étaient ceux des chats errants et d'un oiseau de passage.

Il faudrait aussi penser à ressusciter les oiseaux, se dit Piccolo.

Quand on ordonnait aux dragon balls de régénérer la planète, elles ressuscitaient aussi les animaux, mais pas les humains, ni les sayens, ni les nameks. Pourquoi ?
Qu'est-ce qu'ils avaient de si spécial, eux, les êtres pensants ?

Les humains passaient un temps considérable de leur vie à essayer de prouver qu'ils n'étaient pas au même niveau que la nature, sans jamais mettre ce supposé fait en question. Mais c'était bien vrai, Piccolo et les autres en avaient la preuve... Il avait créé des dragon balls, mais même lui ne savait pas pourquoi Shenron lui-même opérait cette distinction. À l'époque, il n'avait fait que solliciter un être supérieur, l'arracher de son état de quasi non-existence apathique en lui insufflant le ki et une forme physique, fut-ce seulement une statuette. Un corps et un ki, et Shenron pouvait transformer l'univers, sans aucune limite.
Alors pourquoi cette distinction ? Ce n'était pas une question d'énergie : il opérait les résurrections individuelles et massives avec la même facilité.

Ce ne pouvait être qu'une chose : la manifestation d'une chose que Shenron n'avait jamais montré devant qui que ce soit : une opinion.

Shenron avait un avis sur ce qui l'entourait. Il avait donc forcément eu une vie, avant que le fils de Katats ne l'arrache au vide. Était-il simplement une réflexion de la pensée du namek qui l'avait créé ? Mais Piccolo se sentait bien trop étranger à sa propre création. Shenron dégageait une aura d'un autre monde et d'un autre temps.



Pourquoi était-ce différent cette fois-ci ? Quand les sayens, les cyborgs, les démons du froid et ceux du Makaï avaient débarqué, il ne s'était jamais posé cette question. Tout prenait un air tragique, fatal. Il était le même Piccolo, sur la même planète, mais l'univers dans lequel il évoluait lui semblait radicalement différent. Le mot « Mort » ne signifiait plus la même chose qu'à l'époque.

    - Piccolo, tu es prêt ? Tout le monde est déjà en position !
C'était Goujin. Plusieurs centaines de kilomètres les séparaient avant que le namek ne sombre dans ses pensées, et, s'il n'y avait pas été particulièrement attentif, il n'avait tout de même pas remarqué son approche. Le jeune sayen avait récemment à faire vibrer son aura pour minimiser les déplacements d'air entraînés par ses mouvements. Plus rapide, plus endurant, plus discret...
Plus fort, aussi. Même hors de sa transformation, ses traits étaient ceux d'un exaltés. Le jeune homme apathique et relâché avait disparu pour de bon. Dans son costume anguleux, avec sa coupe iroquoise impeccable, il n'évoquait plus rien qu'un horrible mot aux yeux de Piccolo.

« Arme. »

Ils n'avaient jamais eu besoin d'armes, avant. Pourquoi Kaïoshin avait-il fait ceci ? En quoi était-ce différent ?

    - Oui, c'est bon. J'ai enterré toutes mes macro-capsules.

    - Parfait.
Goujn souriait, les yeux fixés sur la lune qui éclairait en retour son visage d'une blancheur spectrale. Là-bas, par-delà le vide spatial, s'activaient des centaines d'ingénieurs impériaux qui préparaient la base avancée des démons, qui leur permettrait d'attaquer la terre.
Tous les partis s'étaient accordés à ceci, l'empire servant d'intermédiaire diplomatique.

La bataille devrait bien avoir lieu, de toute manière, et les démons menaçaient de prendre des milliards de vies extraterrestres si les terriens détruisaient l'astre avant le jour J.

C'était pour très bientôt. Les démons affluaient de plus en plus nombreux, et ils avaient pu détecter quelques puissances hors de portée des plus faibles super sayens. Ce serait un combat éprouvant pour tout le monde, du plus puissant sayen au plus humble moine.

À l'heure actuelle, leurs forces s'élevaient à vingt-sept super sayens, dont cinq atteignaient le niveau deux, et trois le troisième. À ceci s'ajoutaient trois cent vingt-deux moines de la grue, une trentaine de maîtres en arts martiaux de niveaux variés, deux cyborgs, quarante-neuf combattants promis par le Kaïoshinkaï, Boo et Piccolo lui-même.
Face à eux : tout le Makaï. Un monde dont ils ne savaient pratiquement rien, si ce n'était qu'il leur vouait une haine farouche.
Une force inarrêtable s'apprêtait à rencontrer une masse inamovible, et ils étaient situés pile sur le point d'impact.

Goujin souriait en anticipation. Goku aussi aurait souri.

Mais pourtant, le malaise ne voulait pas partir.


*******



    - C'est une sorte de rongeur terrien, madame.

    - Je me fous de ça ! Ce que je veux savoir c'est ce que ce squelette fait là avec les deux autres !

    - Nos alliés confirment que les indigènes ont pu aller sur la lune à cette époque. C'est peut-être une exploration qui a mal tourné ou quelque chose du genre.

    - …
Ladra détestait les imprévues dans ce genre. Elle était arrivée il y avait douze heures, et il restait des dizaines de cas similaires à traiter. Mais Uranie avait scanné mentalement tous les responsables impériaux impliqués dans le projet. Ces petits impairs ne pouvaient être que des désagréments mineurs et certainement pas une conspiration de masse.
Sûrement.

Quelques centaines de mètres plus loin, dans un bâtiment en préfabriqué préparé à l'avance, le roi Nordis attendait patiemment, flanqué de ses deux gardes du corps, sous la surveillance d'une demie-douzaine des hommes de Ladra. Il était toujours impossible de lire dans ses pensées, et il semblait impossible qu'il ne sot pas en train de préparer quelque chose.
Mais s'il y avait quelque chose à lui extorquer, il était déjà bien trop tard pour le faire. Le roi était piégé comme un rat, et ni ses deux gardes du corps ni sa rutilante armure de cérémonie ne lui seraient du moindre secours si Ladra ordonnait son exécution.

    - Bon, rangez ces ossements quelque part, et réglez le reste des problèmes ! Baphasi sera là dans dix heures et tout doit être prêt !
Les démons s'empressèrent de suivre ses ordres, et fusèrent à travers le campement. C'était vraiment là une merveille d'efficacité. Des dizaines de soldats et d'ingénieurs mettaient en place les derniers préparatifs et testaient la stabilité des portails qui amèneraient sur place les différents corps d'armée. Les Noxiens, premiers sur le terrain, étaient déjà des milliers à piétiner le sol du satellite. D'extraction noble pour la plupart, on sentait chez eux le désir d'effacer le souvenir cuisant de leur défaite face aux tribus d'Ellac Czapas en se couvrant de gloire dans ce combat-ci. La réputation actuelle de Noxus ne lui promettait pas des fiefs de choix dans le monde d'au-dessus.
La situation était une aubaine pour eux : Baphasi avait fixé le nombre de soldats que chaque seigneur régent serait autorisé à emporter avec lui à cinq mille, afin de limiter les problèmes logistiques. Si Noxus n'avait plus les moyens d'entretenir une vaste armée de métier, sa noblesse guerrière restait toujours aussi redoutable, et parfaitement capable de fournir un des meilleurs contingents de cinq mille soldats qu'on puisse lever hors de la Citadelle.

Alvandra Karène était la nouvelle dirigeante des armées noxiennes. Grièvement brûlée par un pyromancien des steppes, elle ne se défaisait plus de son énorme armure noire gravée de runes. Selon les rumeurs, elle serait même incapable d'en sortir.
Son imposante silhouette casquée et hérissée de pointes dépassait d'une bonne tête le reste des diplomates assemblés autours de la table du conseil stratégique, lorsque Ladra entra dans le bâtiment. La trentaine d'individus assemblés là débattaient d'une information stratégique douteuse.

    - Mais c'est complètement con. Pourquoi ils ne se rasent pas tous la tête dans ce cas ?

    - C'est peut-être un secret ?

    - Non, réfléchissez, il y a corrélation, mais cela fonctionne peut-être dans l'autre sens.

    - Tu veux dire qu'ils perdent leurs cheveux parce qu'ils deviennent forts, et pas l'inverse ?

    - Et bien, cela me semble déjà plus probable, non ? Et ils les regagnent en perdant leur niveau, comme on a pu le voir sur le sujet A03.

    - Hum... Si les humains de sang pur ont accès à une transformation, ça rendra les choses intéressantes à coup sûr.
Le silence se fit finalement quand Ladra entra dans le pavillon. Un bref hochement de tête d'Uranie lui confirma que tout était en ordre. Elle avait fait un travail merveilleux durant tout cette opération. Si elle pouvait éviter de polluer les réunions avec ce genre de considérations inutiles, Ladra en viendrait même à l'apprécier malgré sa servilité et son manque d'étiquette.


*******

Rte'is.

Là où tout avait commencé. Sur ce rocher froids et désolé, où l'atmosphère dense rare et la gravité écrasante avaient fait de leur mieux pour détruire toute forme de vie, où le froid abominable avait durci jusqu'au cœur de la planète laissée à la merci des rayonnements d'un soleil lointain et mourant, avait vu le jour la race qui ferait trembler l'univers. Les ruines des constructions que les premiers ancêtres de Freezer avaient érigé étaient encore discernables entre deux cratères d'astéroïdes.

Quelle force devait avoir ce monde, pour avoir fait trembler cette race, pour l'avoir poussée à l'exil. Taris frissonna dans sa combinaison spatiale. Le froid ici avait quelque chose de spécial. Il se faisait sentir, même depuis l'orbite, à l'abri d'un vaisseau spatial. C'était un froid particulier, qui avait poussé l'espèce la plus coriace de l'univers à s'exiler de sa terre natale.
Dans le ciel, on pouvait voir une nuée d'astéroïdes. Rte'is en comptait une dizaine, tous recouverts des demeures de démons qui avaient fuit les conditions terribles de leur patrie. Il y en avait eu plus, à une époque, mais les guerres entre lignées de démons n'avaient laissé que ceux-là. C'était une perte insignifiante, tout compte fait. Aucun archéologue n'aurait pu survivre à proximité de la géante tellurique pour étudier ces ruines.

Taris fit quelques pas de plus sur le sol compact et gelé. En haut, les moteurs de son vaisseau personnel luttaient pour ne pas laisser l'astre le broyer avec tous ses occupants.
Le capitaine détourna les yeux du ciel. Il avait envoyé plusieurs de ses soldats à la mort, dans sa vengeance aveugle... Et tout ça pour quoi ?
Résigné, il s'avança vers le gigantesque mausolée au loin. La seule bâtisse de taille respectable jamais construite par ce peuple, en l'honneur de leur premier et unique empereur. Ses tours ne s'élevaient pas bien haut, et la structure dense et carrée avait par endroits été défoncée par des météores. Mais empiler des pierres sur plus de cent cinquante mètres de hauteur par une gravité de 100G était déjà un exploit en soi, et convaincre un peuple entier de démons du froid de le faire à sa place en était un plus grand encore.
Aujourd'hui, les démons du froid étaient réduits à une poignée d'individus toujours menacés par l'extinction. Pour maintenir un semblant de contrôle sur les milliers de monde des quatre galaxies, ils devaient compter sur leurs bureaucrates et leurs armées. Oui, il y avait aux quatre coins du monde des politiciens qui se gavaient derrière le bouclier que leur conférait la confiance de Nordis.
Mais cela n'avait pas toujours été le cas, lui hurlaient ces ruines. Les millénaires avaient peut-être passé, l'histoire avait peut-être eu le temps d'être écrite et oubliée dix fois, les continents avaient eu beau avoir emporté les vestiges de cette ère dans leur course inarrêtable, la roche gelée de Rte'is se souvenait. Les vestiges qu'il contemplait au loin rappelaient à quiconque pouvait bien les voir qu'à une époque, il en avait été autrement. Qu'il avait été un temps où des démons du froid avaient arpenté la galaxie par centaines. Un temps où ils avaient construit leur avenir de leurs propres mains, et non dirigé celui des autres. Un temps où l'équilibre des forces du monde s'était retrouvé perturbé par des choses que l'imagination de Taris n'appréhendait qu'à peine.

Derrière le palais dépassant la grand construction jusqu'à la réduire au ridicule, une immense bâtisse dorée éclipsait l’horizon et projetait son ombre au sol. Sa conception était étrangère à tout ce qui s'était vu de mémoire d'homme ou de machine, mais il s'agissait bien d'un vaisseau spatial. De cette distance, il ressemblait plus ou moins au croisement d'une baleine et d'un porc-épic dont chaque millimètre carré aurait été recouvert de feuilles d'or par un milliardaire maniaque. La moitié de l'engin était écrasé sans le sol jaunâtre et glacial, et les dévastations infligées à la roche donnaient un aperçu de ses dimensions.
Le croiseur doré, comme Taris l'appelait, était à la fois un palace, un moyen de transport incroyablement rapide, et l'engin de destruction le plus effroyable sur lequel il ait jamais posé les yeux. Celui qui l'avait fait construire pouvait tout simplement se le permettre.
Le capitaine eut le même sentiment de désespoir qu'à l'accoutumée devant ce spectacle. C'était là la preuve indiscutable de l'insignifiante place qu'il occupait dans l'univers.

Les mutants comme lui occupaient une strate à part. Ils faisaient la jonction entre l'immense masse d'une plèbe complètement impuissante, les innombrables manipulateurs de ki tout-puissants pour ces derniers, mais insignifiants à son niveau, et enfin, les démons du froid.
Et lui même, plus que tous les autres, était au seuil de la porte. Entre le monde dangereux, mortel dans lequel les plébéiens devaient s'efforçaient de survivre chaque jour, et l'autre. Que penseraient-ils, s'ils savaient, comme lui ? Que penserait ce peuple qui s'échinait depuis la nuit des temps à se défaire du règne de terreur des manipulateurs de ki, s'il percevait ne serait-ce que l'existence de cette porte ? Ils se figuraient que Nordis n'était qu'une version plus conséquente des guerriers dont ils enduraient la toute-puissance au quotidien. Mais, et Taris avait mis du temps à le comprendre, c'était une grossière erreur. Nordis était par-delà la porte. Il avait les deux pieds dans l'autre monde, et était bien la seule étincelle de lumière au milieu de ces ombres menaçantes. Jusqu'alors, ils n'en avaient perçu que des mouvements aux frontières de leur vision. Des rapports historiques sur les semi-démons, une monstrueuse énergie psychique détectée sous les océans Aleriens, des recoupements bien trop précis entre des religions lointaines, la légende du sayen millénaire... Et voilà que la porte s'ouvrait grande, qu'après les super-sayens ; les dieux et les démons s'invitaient à la fête.

Et Nordis était presque tombé, vaincu par les siens. Taris, armé du croiseur doré, devenait leur dernier rempart.

Il grimaça en faisant un pas de plus. C'était plus dur que dans ses souvenirs. Encore un pas en direction du croiseur, et il sentit craquer ses articulations.

    « Est-ce que je peux le faire ? »

Et un pas de plus. À sa droite, une série de cratères indiquait l'endroit où il avait dû battre le jeune Freezer jusqu'aux sangs, lors de la révolte zodiane. Moins docile que son grand frère, il voulait rejoindre Cold sur le champ de bataille et n'avait pas voulu entendre raison. Il ne lui avait d'ailleurs jamais vraiment pardonné...
Ce jour-là, le capitaine avait risqué sa vie pour protéger la descendance de son roi. Mais aujourd'hui, un tel combat aurait été suicidaire. Il avait perdu sa force dans la guerre zodiane, et n'y avait gagné que d'abominables cauchemars qui revenaient inlassablement le hanter dès qu'il fermait les yeux.

Ses yeux se perdirent dans le ciel. Là haut, hors de sa vue, Krios attendait dans son vaisseau. Si Baphasi décidait d'exécuter Nordis, le prince serait la toute dernière chose à laquelle Taris pourrait se raccrocher. Résolu, haletant, il inspira et fit un pas de plus sur le sol impitoyable de Rte'is.


*******



    Ainsi vous étiez bien des nôtres, Bellica.
La reine-mage agenouillée, Val'aël lui adressait une expression de confiance absolue. La cathédrale n'était plus du tout aussi bondée que dix minutes auparavant : moins d'un habitant sur dix avait résisté à la révélation, et tout le sol était recouvert de cendres blanches. Les élus relevaient les survivants, les uns après les autres. Si peu de fervents parmi les cent mille rois... C'était regrettable, mais Val'aël n'en était pas surprise. Elle même n'aurait pas passé cette épreuve, durant sa vie d'avant.
En revanche, elle ne s'était pas attendue à ce que le seizième mage fasse partie des croyant. Bellica était une brute avide de pouvoir et de plaisirs matériels... Mais la foi se cachait parfois aux endroits les plus improbables. D'autres auraient pu suspecter une ruse de la part du mage, et elle avait sûrement, comme chaque roi présent, préparé un artifice pour échapper à la mort lors de cette réunion. Mais ce n'était pas ce qui l'avait épargnée ici. Bellica avait nourri en elle une foi insoupçonnée de tous, et y compris d'elle-même. La géante leva doucement ses horribles yeux vers l'élue.

    - J'en suis la première surprise.
Elle jeta un regard circulaire sur l'assemblée. Ni les consorts, ni les sorciers, érudits et maîtres combattants qu'elle avait amenée n'avaient résisté à la vérité. Progressivement, elle prenait conscience de ce qu'elle avait véritablement éprouvé au cours de ces années. D'à quel point elle différait de l'être qui avait trahi les mages dans un lointain passé. De combien son ancien moi la dégoûtait maintenant. Elle était sereine.
Ach'aël avait cessé de relever la foule, et s'était dressé sur l'autel. Sous son masque, ses lèvres s'animèrent, laissant à chaque fois jaillir un rayon de lumière qui brûlait désormais dans sa bouche. Il émanait à présent de lui une lueur qui n'éblouissait pas, un bien être qui transportait les fervents, et qui, Val'aël le devinait, serait une brûlure atroce pour les mécréants de l'arène.

    - Fidèles, réjouissez-vous. Car en ce jour, notre seigneur vous a reconnu comme les siens. SES élus arracheront l'arène aux mains de Primus, et vous serez ceux qui en hériteront. Une nouvelle ère débute, et vous en êtes les héritiers.
Le cœur de Val'aël se gonfla de fierté et l'appréhension. Elle était prête. Chacun d'entre eux était prêt. Ce serait le plus dur combat de sa vie, et ils seraient nombreux à mourir, mais ils l'emporteraient. Il ne pouvait en être autrement : IL l'avait décidé.
Une voix, derrière elle, s'éleva cependant. Bellica s'était péniblement redressée sur ses deux jambes noueuses.

    - Permettez que je vous accompagne. Les mages sont de retour dans l'arène, et nul n'est mieux qualifié que moi pour les affronter.
Toute possibilité de trahison avait été écartée, aussi nul ne fut surprit quand elle reçut un hochement de tête approbateur de la part d'Ach'aël.



*******



    « Juste une minute de plus. »

C'était dangereux de rester allongé comme ça. L'attraction monstrueuse qu'exerçait Rte'is sur le capitaine le tuait à petit feu, et le temps de « repos » devait être minimisé au possible. S'il s'effondrait ici, Krios serait forcé de venir le chercher, et on ne pouvait pas se permettre de le laisser risquer sa vie sur ce maudit roc gelé. Taris était presque arrivé au but, de toute façon.
Tremblant, à moitié à cause de l'effort, à moitié à cause du froid surnaturel qui se faisait sentir partout sur la planète, il souleva son corps de l'épais tapis qui lui avait servi de lit improvisé. Il souleva un nuage de poussière qui permit de distinguer qu'il avait sûrement été rouge, à une époque. Maintenant, il était du même gris jaunâtre que la poussière de Rte'is et tout ce sur quoi elle avait pu se déposer.

Le capitaine reprit une grande inspiration, rassura son équipage par radio, et reprit l'ascension. S'il avait su ce à quoi il s'exposerait dans le futur, il aurait pris un peu plus de précautions lors de son atterrissage, il y a deux cent ans. Le nez du croiseur était planté dans le sol à un angle de vingt degrés, ce qui avait transformé le voyage vers la salle des commandes en une épuisante épreuve d'alpinisme.
Taris prit tout de même le temps de jeter un coup d’œil aux alentours. Si tout ce qui était périssable avait disparu depuis longtemps, les murs du vaisseau étaient encore intactes et laissaient distinguer de nombreux détails sculptés, que le capitaine aurait été bien en peine d'interpréter. Ils avaient quelque chose de sinistre, cependant. Sa vision périphérique animait les bas-reliefs qui semblaient comploter contre lui et une horde de monstres dorés rampaient dans sa direction peu importe vers où il tournait la tête.
Toujours du doré partout. Celui qui avait commandé la construction du vaisseau avait un sens de l'esthétique des plus discutables. Même avec toute cette poussière, on ne pouvait pas poser les yeux où que ce soit sans être assailli par cette maudite couleur. Peut-être était-ce parce que de la matière utilisée pour la construction avait été mise à nue par le temps, mais Taris avait de sérieux doutes sur à cette hypothèse : tout le bâtiment empestait l'autosuffisance. Il aurait bien coupé les lumières pour s'épargner cette vue, mais il n'avait pas la moindre idée de comment les éteindre.
La première fois, Taris s'était étonné que l'alimentation en énergie de l'engin soit encore opérationnelle, et avait regretté la réponse qu'il avait trouvé.

Une foutue étoile. Ce barjot avait d'une manière ou d'une autre réussi à distordre l'espace-temps jusqu'à miniaturiser une foutue étoile, et à la caler dans le réacteur de son vaisseau spatial. C'était de très loin la chose la plus aberrante dont Taris ait entendu parler au cours de sa longue existence, et la preuve la plus terrifiante de l'existence de l'autre monde.

Les portes s'ouvraient les unes après les autres devant lui. Du moins, cela ressemblait à des portes, et il lui avait fallu un petit moment pour saisir que ce n'en étaient pas. Normalement, on ressent un grésillement et un coup de chaud en passant un téléporteur, mais pas ici. Non seulement la transition était absolument naturelle, mais ces machines ne le redirigeaient pas identiquement à l'aller et au retour. Chaque pièce était complètement indépendante de toutes les autres, et un examen attentif avait révélé qu'elles pouvaient probablement se déplacer les unes par rapport aux autres, comme un puzzle géant en trois dimensions où chaque pièce serait compatible avec toutes les autres. Et cette maudite présence qu'il sentait derrière lui ne le lâchait pas, comme si c'était le croiseur lui-même qui jouait avec lui. Il était actuellement réduit à traverser les couloirs en économisant son souffle, tout en espérant que le chemin auquel le vaisseau le destinait serait le même qu'à sa première visite.

Heureusement, ce fut le cas.

Un énième téléporteur finit par le libérer dans une pièce qui parvenait miraculeusement à être encore plus recouverte de dorures que le reste de l'édifice. À une époque, cela avait sûrement été un salon destiné à accueillir les réceptions les plus huppées de tout le croiseur, mais également le poste de pilotage central du vaisseau. Malgré les dévastations infligées toute la pièce, qui avaient eu raison même de ce mobilier étonnamment résistant et de l'attache du lustre, qui gisait désormais au sol, le siège de contrôle central était parfaitement intact. L'ouverture à l'arrière trahissait qu'il avait été conçu pour un démon du froid un peu plus grand que Taris, mais le capitaine pouvait s'y asseoir sans trop de mal.

Il avança dans la pièce dévastée. Rien n'avait bougé depuis qu'il s'était crashé ici, il y a deux cent ans. Un frisson remonta dans sa colonne vertébrale alors que la sensation d'être observé, qui ne l'avait pas quitté depuis qu'il était entré dans ce maudit croiseur, se fit plus grande encore. À chaque pas, une présence extérieure venait un peu plus gratter le fond de sa cervelle. Il ne tremblait plus qu'à cause du froid et de la fatigue.

    « Dégage. »

Mais il ne partirait pas. Les taches de leur sang à tous les deux étaient encore incrustes par endroits, sans cette pièce même. Deux cent ans... Sollicitée par le poids du capitaine, une des articulations de son genoux fit un petit bruit.

Et les os de Taris étaient broyés les uns après les autres par une massue qui ne montrait aucun signe de ralentissement. Et encore une frappe, et encore cent, et il maudissait son insensibilité à la douleur, car le capitaine percevait chacun de ses os se briser, incapable même de s'évanouir. Il tentait de riposter, mais sans conviction, comme dans un cauchemar. Il se sentait mou, faible, impuissant. Ses coups ricochaient sur son bourreau comme ceux d'un enfant sur les murs d'une prison. « Il est plus faible que moi », pensait-il. « Il va me tuer », savait-il.

    « Dégage. »

Mais sa voix était moins assurée. Un pas de plus, et il s'effondra, sentant quelque chose lui ronger les os.

Et Taris vit avec horreur la bouche du zodian s'ouvrir sur deux rangées de crocs tranchant, alors que le monstre le soulevait d'une main. Il put sentir chaque dent percer sa peau, fendre sa chair et buter sur les bris d'os qui y erraient. Alors la gueule se referma avec un claquement humide, et Taris aurait hurlé si ses poumons n'avaient été pleins de sang.
Et soudain, un choc ascendant plus violent que les autres l'envoya en l'air. Puis un second. Puis ce fut toute une pluie de coups de bélier, et à chaque fois les massues à pointes arrachaient un peu plus de sa peau martyrisée, et à chaque fois, le rire démoniaque de cette abomination ne cessait de croître, et la myriade de clochettes et d'osselets qui parsemaient dans sa crinière noire tintait toujours plus fort. Comme une balle de jonglage entre les mains d'un clown fou, Taris oublia toute volonté de lutter.


Prostré, le mutant revivait silencieusement les détails de cette horreur passée. Il tenta de calmer sa respiration, mais au fond de son crâne, le rire résonnait toujours plus fort, étendait son dominion à chaque coup de griffe. Un bout de conscience arraché à chaque claque, il sentit comme des larmes s'accumuler à ses yeux. Taris était fort. Il pouvait se lever, s'asseoir sur ce maudit trône, et quitter cette planète ; il n'y arrivait juste pas. Sa tête bourdonnait du tintement des grelots, et il ne devinait même plus les hurlement paniqués de Polt dans sa radio.
Mais un scalpel trancha la gangue de bruit qui l'étouffait, et il pu prendre une inspiration.

Les massues avaient cessé de frapper, et le hasard lui avait laissé un œil utilisable. Devant la porte, se tenait la silhouette massive de Cold. Il était couvert du sang multicolore de ses adversaires, mais deux teintes éteignaient les autres : le fuschia des impératrices qui empoissait ses mains, et le pourpre des démons du froid, qui coulait de la triple plaie béante qui balafrait son visage. Le roi avait combattu et gagné.
Cambré, droit sur ses deux jambes, le grand noblesang, champion de l'impératrice contemplait la défaite de son peuple incarnée par Cold. Malgré le pantalon évasé, on voyait ses orteils crochus battre une cadence erratique que rythmaient les gouttes de sang qui s'écoulaient de ses massues. Les dodelinements de sa tête ajoutaient à la mélodie délirante le son des clochettes accrochées dans ses cheveux et ses cornes. La longue langue mauve de la créature passa plusieurs fois sur sa gueule garnie de crocs, et Taris comme Cold surent alors pourquoi l'impératrice avait condamné son peuple dans cette guerre suicidaire.
Il fallait abreuver ce monstre ou il s'abreuverait lui-même. Les piercings qui traversaient sa chair tremblèrent sous le rire qui secoua ce boucher dément, et il perdit tout intérêt en Taris pour s'avancer de sa démarche chaloupée vers son nouveau rival. Cold, qui le dépassait d'une bonne tête, en paraissait minuscule. Il y eut un bref dialogue silencieux entre les deux souverains ; l'un en nom, l'autre en être. Ce n'était pas un duel de force mais de royauté, et Cold n'avait aucune chance de l'emporter.
Ce ne fut qu'un infime battement de paupière, qu'un tremblement dans l'échine, mais ce fut assez. L'énorme poigne du noblesang saisit une corne, cent crocs s'enfoncèrent dans la chair du roi, et ils roulèrent ensemble au sol en une féroce masse de fourrure noire cliquetante et de chair tremblante.


    « Taris ? Monsieur, répondez s'il vous plaît ! »

La voix de Krios l'avait réanimé. Le capitaine ouvrit grand les yeux, le trouble reflua jusqu'aux confins de son esprit et, une expression féroce sur le visage, il reprit sa marche et le fantôme reprit sa place aux frontières de son subconscient.
Le mutant prit sa place dans le siège, qui le reconnut comme une sorte de chauffeur subsidiaire, et lui donna seulement accès aux fonctions de mouvement du croiseur, et encore, aux vitesses jugées inoffensives par son concepteur.

Sept cent mille tonnes d'alliage indestructible passèrent instantanément de l'immobilité totale au décuple de la vitesse du son jusqu'à l'orbite de Rte'is. Taris n'avait même pas senti l'accélération.

    « Tout va bien. Nous pouvons passer à l'étape suivante. »

La lame de ki s'éteignit doucement autours de la main de Taris, alors que ses ultimes réserves d'énergie le quittaient.
Tremblant, couvert de son propre sang, Cold mit plusieurs minutes à se remettre de ce qu'il venait de vivre, et plusieurs autres à comprendre ce à quoi il venait d'assister. Il ne restait guère de Taris qu'un bras et un œil, mais ç'avait été suffisant. Le corps mutilé de son meilleur soldat se régénérait lentement, et l'oeil rescapé ne lâchait pas Cold. S'il avait encore pu haleter, il l'aurait plus que certainement fait. Les deux hommes s'observèrent longuement, égaux pour la première fois de leurs vies. Puis, enfin, le souverain eut le courage de regarder l’œuvre de son sauveur.
Les cloches s'étaient tues, et la cascade de cheveux noirs s'était faite lac placide. Partout dans la pièce, les serpents noirs immobiles reposaient sur le terrain. Et au centre... Même amputée de sa mâchoire inférieure, la tête du noblesang conservait un éclat d'horreur. Et ses yeux, toujours ouverts, n'avaient rien perdu de leur royauté. La mare de sang mauve s'étalait doucement, au gré des contractions de ce grand corps qui n'acceptait toujours pas complètement la mort.
Taris, toujours sous le choc de ce qu'il venait d'accomplir, reçu sans même y penser le remerciement de Cold. Les yeux vides du cadavre fixaient encore Taris, et, il en était plus convaincu à chaque seconde qui passait, le fixeraient pour toute sa vie.
Dernière édition par Lamantin_Furtif le Dim Nov 05, 2017 23:36, édité 2 fois.
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