CHAPITRE 85
Pain
Les habitants d'Ame avaient arrêté de fuir.
L'une des raisons était l'inutilité de ce geste. Dans ces rues jonchées de cadavres et de blessés qui ne tarderaient pas à passer l'arme à gauche, l'évidence s'était imposée : il ne servait à rien de vouloir échapper à un tel monstre. C'était comme vouloir se protéger d'une catastrophe naturelle, au détail près que celle-ci était armée d'une conscience malsaine visant uniquement à éradiquer la paix.
Mais ce n'était pas la seule chose qui avait stoppé les habitants. Une rumeur circulait déjà dans les rues d'Ame, répandue à travers le soudain silence qui venait de s'abattre et dont elle expliquait en partie l'origine...
Il se disait que leur dieu était revenu.
Les plus proches du Saiya-jin, cachés derrière des bâtisses à proximité, pouvaient ainsi constater directement la présence de Pain. C'était la première fois qu'ils le voyaient, mais ils étaient totalement subjugués. Il n'y avait aucun doute pour eux. C'était lui, le dieu qu'ils attendaient tous.
Derrière le corps de cet homme au visage si envoûtant se tenait toujours la petite orpheline d'Ame. S'autorisant enfin à libérer ses émotions, elle pleurait et tremblait, cachée derrière l'individu impassible.
Mais, en dépit de la souffrance indescriptible qui animait son visage d'enfant, ses yeux reflétaient étrangement une fascination qui n'aurait guère eu sa place quelques instants auparavant. Et ses lèvres tremblantes ne cessaient de répéter un même mot.
– Merci...Raditz avait ressenti le changement brutal d'atmosphère depuis l'arrivée de cet homme. Cela l'atteignait lui-même.
C'était comme si la peur qu'il avait infligée à ce monde tentait de changer de camp.
Était-ce lié à ces yeux qui le fixaient ? Pourquoi le captivaient-ils tant ?
Comment pouvaient-ils pénétrer jusque dans son âme ?
Depuis qu'il avait envahi le monde Shinobi, le Saiya-jin avait pu être témoin de la puissance que pouvaient renfermer certains yeux. C'était même ce qui avait failli causer sa perte, et lui avait pour la première fois fait prendre conscience du danger des ninjas.
Mais ici, c'était différent. Il savait au fond de lui que le regard si perturbant de cette pupille aux cercles concentriques ne lui avait jeté aucun sort. Il n'avait pas besoin d'être un senseur ou de tenter de libérer son Ki pour réaliser qu'il n'était sous l'emprise d'aucune illusion ; non, ce qui le perturbait là était d'une toute autre nature.
C'était comme si son âme elle-même réagissait à ce regard.
Bien malgré lui, Raditz ne pouvait qu'être subjugué par la beauté de ces yeux. Il n'avait pourtant jamais été sensible à quelque forme d'art. Mais cela dépassait clairement ce concept.
Cet œil était la perfection incarnée.
Prenant conscience de ce sentiment, il tenta de le chasser de son esprit. Cela le répugnait. Et pourtant, il ne pouvait s'empêcher de garder ses yeux fixés sur ce regard unique.
C'était comme si l’Œil prenait toute la place sur l'Univers qui l'entourait. Aussi absurde que cela pût être, force était de constater qu'il était inutile de résister à cette impression.
Et Raditz l'avait réalisé.
– Cet œil, murmura-t-il alors d'une voix à peine audible.
Qu'est-ce ?Sa question surprit la petite fille qui se blottit davantage contre les nuages rouges de la cape de l'individu, comme pour se couper totalement de l'existence du terrifiant envahisseur.
Les témoins qui assistaient discrètement à la scène depuis le dos de leur seigneur étaient tout aussi déconcertés par ces premières paroles. De toutes les réactions possibles et imaginables qui auraient pu découler d'une telle rencontre, ils ne se seraient certainement pas attendus à un intérêt oculaire.
Mais pour ceux qui pouvaient observer le visage de leur dieu, cette interrogation prenait en fait tout son sens. C'était même la seule possible.
– Le Rinnegan, répondit alors celui qui était devenu le centre d'attention de tous.
Au fond de lui, Raditz lui-même l'avait accepté. En l'absence de cette réponse, son Inconscient n'aurait eu de cesse de s'interroger. Avant d'engager toute action, il avait eu besoin d'exprimer son questionnement. C'était comme si, par ce bref échange, il s'était autorisé à sortir de l'emprise mystique de ce regard.
Il analysa alors plus globalement l'homme. Bien que portant une cape aux nuages écarlates, il était encore différent des autres qu'il avait pu rencontrer. Étant lui-même un subordonné, le Saiya-jin savait reconnaître un chef lorsqu'il en voyait un.
Et cet homme, qui se tenait seul devant lui et l'observait d'un regard calme, était clairement le pilier de cette organisation.
– Qui es-tu ? fut la deuxième question de Raditz.
Les spectateurs suivaient ce sobre échange sans prononcer mot, mais leurs regards qui passaient de l'un à l'autre se synchronisaient pleinement.
– Pain... fut la deuxième réponse du chef de l'Akatsuki.
Tous continuèrent de le fixer. Car tous, y compris le Saiya-jin, avaient compris qu'il n'avait pas fini.
– ... Dieu, acheva-t-il alors d'une voix qui résonna au milieu des ruelles ravagées d'Ame.
Aussitôt, le regard de Raditz s'ouvrit grand tandis que plusieurs souvenirs refaisaient brutalement surface. À travers ce seul mot, il avait lié en lui des événements isolés qu'il avait jugé insignifiants.
Il se souvenait de l'avertissement de la femme à la prestance angélique. Il se rappelait la surprenante folie de ceux qu'il avait massacrés, de ces sourires dessinés sur les visages alors même que l'espoir les avait quittés.
Passée la stupeur, le Saiya-jin laissa échapper un fin rictus. Et cela dura, sans s'amplifier ni s'atténuer, jusqu'à faire frissonner chacun des témoins de cette scène irréelle.
Pourtant, Pain restait immobile, impassible et imperturbable, continuant de fixer le guerrier sans ciller.
Les habitants d'Ame, bien que terrorisés à la vue du monstre qui avait bien failli détruire leur cité, gardaient néanmoins ce filet d'espoir retrouvé qui leur avait fait défaut auparavant. Leur dieu était revenu, et il allait les défendre, de la même manière qu'il avait mis fin au terrible règne d'Hanzō.
Mais tous ces sentiments s'estompèrent brutalement quand résonna une nouvelle fois la voix de Pain.
– Va-t'en.L'ordre fut si convaincant que le Saiya-jin se surprit à hésiter, l'espace d'une fraction de seconde. Fronçant les sourcils avec fureur – y compris contre lui-même –, il remarqua alors avec étonnement que cette injonction lui était pas adressée.
Les Rinnegan de Pain fixaient à présent la petite fille qui, toujours agrippée à sa cape, s'était avancée pour observer son visage, poussée par une curiosité irrésistible. Le ton était si dur que la gamine sembla frappée par la foudre et recula aussitôt de quelques pas, avant de partir en courant jusqu'à disparaître des regards, terrifiée.
Raditz fronça les sourcils tandis que les Rinnegan se repointaient dans sa direction. Il n'avait vu que froideur dans ce regard et ce ton.
Pour l'envahisseur de ce monde qu'il était, auteur de multiples génocides gratuits, voir une fillette effrayée n'était pas vraiment choquant – de surcroît lorsque lui-même avait assassiné ses parents sous ses yeux. Mais le comportement de Pain le perturbait au plus haut point.
Il paraissait ne montrer aucune empathie vis à vis de ce peuple qui, pourtant, le vénérait. N'était-il pas venu les sauver ?
Cela renforça le sentiment de malaise déjà présent chez le guerrier qui jeta un œil menaçant aux multitudes de visages dissimulés autour de la scène.
– Je suppose que tu n'es pas venu me recruter dans ton organisation ? murmura-t-il alors d'une voix inquiétante.
– Cela dépend de toi, répondit aussitôt Pain avec sérieux.
Raditz laissa échapper une expression de surprise. Était-il vraiment en train de lui proposer de rejoindre son organisation ? Il resta un bref instant sans mot, avant froncer les sourcils, énervé.
– Ne te moque pas de moi ! gronda-t-il.
Pain ne réagit pas et continua de l'étudier en silence. Cela dérangeait particulièrement le guerrier qui n'était pas habitué à ce type d'échange. Que ce soit par le combat ou la terreur, il avait toujours eu une maîtrise convenable de ceux qui lui faisaient face.
Mais cet homme était insondable.
– Que vas-tu faire ? lâcha-t-il alors, comme pour s'extraire de cette impression désagréable et se redonner de l'autorité.
Tu me rappelles ton associé. Lui aussi était confiant...
– Itachi... murmura Pain.
A-t-il survécu ?
– Je vais te dire ce qui lui est arrivé... susurra Raditz qui se décida enfin à bouger, marchant de gauche à droite sans s'approcher, tel un prédateur hésitant face à une proie inconnue.
Un sourire carnassier se dessina sur le visage dur du guerrier.
– Je l'ai buté avec Konoha !Pain ferma lentement les yeux. Les lèvres de Raditz s'étirèrent davantage en le voyant rendre ce qui s'apparentait à un hommage silencieux à son compagnon.
Reprenant confiance, il leva sa main en l'air, paume ouverte.
– Que dirais-tu de connaître le même sort... avec ton village ?Pain rouvrit alors les yeux mais son expression ne changea pas.
– Je te le déconseille.Raditz lui lança un regard mauvais.
– Tu m'en empêcherais... ?
– Si tu ne souhaites pas rejoindre l'Akatsuki...Raditz fronça les sourcils, remarquant qu'en dépit de sa voix toujours aussi calme, une note de menace semblait soudain se glisser dans son ton.
– ... tu pourrais devenir un danger potentiel pour notre organisation, acheva alors le chef de celle-ci.
Raditz restait immobile, main en l'air. Les habitants savaient précisément ce que cela signifiait, mais leur fascination dépassait à présent leur envie de vivre.
Parce qu'ils avaient la foi.
– En tant que tel, reprit Pain,
tu serais un ennemi.Le Saiya-jin resta un moment silencieux. Ces paroles n'avaient rien de bien surprenant. Mais à présent qu'elles étaient prononcées, il en comprenait mieux le sens caché.
Pain était hostile. Et il était dangereux.
Si Raditz détruisait la ville, peut-être ne chercherait-il pas à l'arrêter. Peut-être le regarderait-il faire avec cette impassibilité dont il avait fait preuve depuis son apparition ; peut-être montrerait-il la même indifférence que vis à vis de cette orpheline terrifiée...
Mais une chose était sûre : si le Saiya-jin détruisait cette ville, il gaspillerait une énergie précieuse qui lui serait potentiellement utile. Pire : il créerait une ouverture à celui qui lui faisait face. Et cela lui serait potentiellement fatal...
Car il n'y avait pas matière à douter. Sans même avoir échangé le moindre coup, et avant même le moindre mot, il le savait. Il l'avait compris dès le premier regard.
Pain serait son plus redoutable adversaire.
À bonne distance de là, plus loin même que les eaux agitées du lac, un autre spectateur observait la scène en silence, bras croisés, son champ de vision permis par les buildings abattus sur le chemin ; mais c'était surtout lié à sa très bonne vue.
Car le Sharingan qui brillait sous son masque pétillait d'attention.
– Quelles sont les nouvelles ? demanda à ses côtés une voix qui paraissait provenir de la terre elle-même.
– Zetsu...Contrastant avec le sol aride, l'être bicolore le plus mystérieux du monde des ninjas fit son apparition.
– Pain a décidé d'intervenir... répondit alors l'homme masqué.
– Je vois... murmura Zetsu noir.
– Serait-il nostalgique ? hasarda sa pâle moitié.
L'homme masqué resta un moment silencieux. Il semblait soucieux.
– Sans détecteur, quelles étaient les chances que le Saiya-jin tombe par hasard sur ce lieu ?
– Très faibles... répondit Zetsu noir.
Ame était connu pour son isolement, aussi bien géographique que politique...Les paupières entourant le Sharingan se plissèrent tandis qu'une multitude de feuilles de papier se mettaient à les entourer, portées par un vent qui leur était propre, jusqu'à se concentrer et former un corps de femme.
– Où sont les autres ? demanda-t-elle alors, visiblement inquiète.
– Chez moi, répondit l'homme masqué sans quitter des yeux la scène de rencontre lointaine.
– Quoi ? réagit-elle.
Mais pourquoi ?
– N'as-tu pas remarqué... ? répliqua son interlocuteur.
Elle s'interrompit et le fixa d'un regard intrigué.
– Il a déjà sorti Tendō, déclara l'homme masqué.
– Et alors ?
– Alors, toute aide ne ferait que le gêner, car...Il marqua une brève pause et concentra davantage son regard sur la scène qu'il observait.
– ... Pain a décidé de se battre sérieusement dès le début.L'Ange Messager d'Ame fronça les sourcils.
– Mais... Que peut-on faire pour l'aider ?
– Protège Nagato, murmura alors Zetsu noir.
Tant que son corps est à l'abri, il ne risquera rien...
– Et observe... ajouta Zetsu blanc avec un sourire.
– Ce n'est pas le moment... s'agaça la femme.
– Zetsu a raison, Konan, coupa alors l'homme masqué sans lâcher son regard de la scène lointaine.
Le concerné lui jeta un coup d’œil surpris.
– Il ne s'agit pas de capturer un Jinchūriki, expliqua alors le possesseur du Sharingan.
Il n'y aura aucune limite...Après un dernier regard concerné à l'échange lointain, Konan se décomposa de nouveau en papiers qui s'envolèrent jusqu'à se perdre au loin.
Soudain, à la surprise générale, Pain tourna le dos à Raditz et commença à marcher d'un pas lent. Le Saiya-jin fronça les sourcils face à cette attitude totalement inconsciente.
Comme par réflexe, il voulut saisir cette ouverture et entama le geste de lever une main. Aussitôt, sans même se retourner, Pain s'immobilisa.
Raditz resta figé également, une goutte de sueur coulant depuis sa tempe. Il abaissa sa main et Pain reprit sa lente marche.
* Comment... Comment peut-il me voir ? *Mais ce n'était pas le problème le plus important. La vraie question qui taraudait l'esprit de Raditz était d'une toute autre nature...
La réaction du chef de l'Akatsuki le surprenait terriblement.
Pourtant, à peine son esprit commençait-il à fonder cette interrogation que son cœur répondit, manquant un sursaut. Sa nature Saiya-jin avait réalisé avant même toute logique.
Pain l'invitait à combattre.
Ce dernier continuait à marcher lentement, s'éloignant de lui.
Le cœur de Raditz se mettait à battre avec plus d'intensité. Pour la première fois depuis cette rencontre, dans ce mélange incertain d'émotions qui s'entrechoquaient dans son esprit, il en percevait enfin une clairement : l'excitation.
Son sang Saiya-jin bouillonnait dans ses veines quand il se mit en marche à son tour, du même rythme lent que Pain qu'il suivait à distance.
Non loin, du haut d'un building, un individu aux longs cheveux aussi roux que celui qui marchait, aux piercings aussi étonnants et aux yeux aussi mystiques, observait la scène, silencieux et immobile, à tel point qu'un rapace se posa sur son épaule. Quatre autres silhouettes étaient éparpillées en différents points de l'imposante cité.
Les habitants, témoins de cette scène surréaliste, se retiraient hâtivement du chemin des deux marcheurs. Mais paradoxalement, tous restaient sur place.
Ils formaient ainsi une ligne respectueuse, qui s'agrandissait peu à peu au fur et à mesure de l'avancée lente des deux êtres. L'émotion les submergeait totalement ; des frissons parcouraient cette sobre foule – certains même fondaient en larmes et une femme perdit connaissance.
Et tout se faisait dans un mutisme irréel, comme si l'atmosphère n'osait plus déranger le seul son des pas rythmés de cette lente marche anormalement calme.
Mais en dépit de tout ce que le Saiya-jin pouvait représenter aux yeux des habitants d'Ame, pour la première fois depuis depuis son arrivée, sa présence n'engendrait guère de peur. L'aura de Pain avait totalement déchiré ce sentiment de leurs cœurs. La vue de leur dieu avait généré chez ce peuple le besoin profond de lui témoigner leur foi.
Certains souriaient même, d'autres hurlaient des éloges – sans toutefois qu'aucun son ne sortît de leur bouche. À l'inverse, Raditz était la cible de regards noirs et même de gestes obscènes.
Mais le Saiya-jin ne voyait rien de tout cela. Son attention totale était centrée sur la cape aux nuages écarlates qui avançait lentement devant lui.
– À quoi il joue ? s'étonna au loin Zetsu blanc.
– Il semble vouloir quitter le village, commenta l'homme masqué, dont la vue perçante était la plus performante.
Il ferma un instant les paupières, pensif.
– N'a-t-il pas l'avantage du terrain ? interrogea Zetsu blanc.
Pourquoi s'éloigner ?
– Qui sait... murmura Zetsu noir.
L'homme masqué avait rouvert son œil rougeoyant.
– Pain...Le concerné et l'envahisseur poursuivaient leur lente marche dans cette haie d'honneur – et de déshonneur – silencieuse. Ils arrivaient à présent au niveau des quais du lac, et progressaient au milieu des cadavres des hommes du défunt Hanzō.
Une fois arrivé au bord des terres, Pain poursuivit sa marche sur l'eau, sans même changer de rythme. Raditz se mit alors à léviter au dessus des flots qui s'étaient étonnamment calmés.
Et tous deux poursuivirent leur avancée silencieuse sous le regard hypnotisé du peuple d'Ame, à présent rassemblé sur les rives pour les observer peu à peu s'éloigner...
Cette lente progression appaisait les pensées de Raditz, concentré sur le seul objectif du combat. Pain s'était brutalement imposé dans son esprit, à tel point que ce dernier peinait à admettre n'avoir pas connu cet homme plus tôt.
C'était comme si le destin lui-même s'était rendu compte que l'intensité de cette rencontre nécessitait une réécriture historique. Et Raditz se sentait étrangement lié à Pain.
La réciproque était également vraie : un respect mutuel tacite se créait entre le Saiya-jin et le possesseur du Rinnegan, développé et renforcé durant cette rencontre et cette lente avancée.
L'emprise du temps s'était totalement dissipée. Le crépuscule avait depuis longtemps laissé placé à une nuit nuageuse de pleine Lune, à laquelle le Saiya-jin depuis longtemps séparé de sa queue ne prêtait guère d'attention. C'était pourtant dans la direction de l'astre qu'ils se dirigeaient, baignés de sa seule lumière qui perçait les entrailles des ténèbres environnants.
La ville était maintenant loin derrière eux. Les silhouettes des grands bâtiments – çà et là défigurés par le déferlement de folie de Raditz – n'apparaissaient plus qu'en tant que lointains décors d'horizon.
La pluie s'était interrompue, et les nuages parsemant les cieux se faisaient souffler par ce même vent qui balayait la cape de Pain et les cheveux de Raditz, libérant peu à peu la Lune dont la lumière scintillante s'imposait sur un monde qui ne trouverait pas le sommeil cette nuit.
Sa clarté n'atténuait par ailleurs en rien la beauté de ce ciel qui, par-delà les nuages fuyards, laissait briller sa plus belle peinture : la galaxie.
Sans même se concerter, le chef de l'Akatsuki et l'envahisseur des ninjas ralentissaient le rythme. Et tandis que la couverture atmosphérique passait, alors même que la dernière étoile, témoin céleste parmi tant d'autres de cette confrontation ineffable, pouvait enfin briller discrètement sur ce futur théâtre olympien, ils s'arrêtèrent.
Leur distance n'avait pas changé depuis le début.
Et lorsque Pain se retourna enfin, la Lune derrière lui dessinait une auréole aussi éclatante que ses Rinnegan. Raditz ne put s'empêcher de s'accorder un dernier instant de contemplation.
Mais ses pensées étaient redevenues claires, et en dépit de son sérieux, il avait retrouvé toute sa hargne guerrière.
– Alors comme ça, murmura-t-il alors d'une voix lente,
tu es un dieu pour ce monde...Sa prise de parole avait comme redonné vie à cette atmosphère à la sérénité troublante.
– Je suppose... que cela fait de moi un démon, poursuivit-il en fronçant les sourcils.
Un sourire dérangeant se dessina brutalement sur ses lèvres.
– Ma victoire sera donc totale quand ton peuple réalisera que...Il tremblait tellement d'excitation qu'il dut marquer une brève pause avant de poursuivre.
– ... son dieu est mort.Un frisson parcourut son échine à la prononciation de ces mots. Ou peut-être était-ce lié au regard flamboyant qu'il avait cru percevoir à travers la pupille de son opposant...
Afin de démystifier sa réflexion, il se décida alors à entamer ce qui, tôt ou tard, finirait inévitablement par lier ces deux êtres que le monde des ninjas ne pouvait supporter.
– QUE VAS-TU FAIRE, PAIN ?! hurla-t-il, sa main brillant dangereusement.
Et c'est, sans retenue aucune, que l'impitoyable Saiya-jin envoya une boule d'énergie droit sur le dieu d'Ame.
– Je vais te faire connaître... répondit alors ce dernier d'une voix calme et grave.
L'attaque de Raditz arrivait à la hauteur de Pain quand un mouvement sombre tout juste éclairé par le Ki du Saiya-jin fit irruption juste devant le corps droit de l'auto-proclamé dieu.
Un autre individu, étrangement similaire, se tenait devant lui, mains tendues droit vers la boule d'énergie qui ralentit brutalement sa course tout en s'éfilant jusqu'à disparaître et ne laisser derrière elle que l'oppressante obscurité de la nuit.
Ces ténèbres étaient toutefois perturbés par six paires de Rinnegan qui fixaient Raditz d'un même regard menaçant. Et autant de voix conclurent d'un même ton les paroles de Pain.
– ... la souffrance.