Le roi Enma Daioh surveillait du coin de l'oeil la petite fée, qui était revenue une fois de plus. Il commençait à se méfier d'elle : elle avait déjà entravé à plusieurs reprises le bon fonctionnement du service d'accueil dans l'Autre Monde, à la seule fin de retrouver la vie. Le roi Enma s'était même retrouvé pieds et poings liés, lorsqu'elle avait décidé qu'elle retournerait à n'importe quel prix dans le monde des mortels. Mais elle l'avait relâché peu après, calmée, en prétendant que quelqu'un se chargeait de la faire ressusciter sur la planète Terre. De toute façon, il n'avait pas le pouvoir de rendre la vie aux gens ; ce n'était pas son travail.
Pour l'heure, elle était devant un miroir, et accrochait toutes sortes de choses sur son auréole. Un démon était venu plus tôt lui demander pour quelle raison elle faisait cela, et elle lui avait répondu que c'était bien plus joli ainsi. De petites tresses de laine colorée ornaient maintenant l'auréole, ainsi qu'un grelot qu'elle avait récupéré on se savait où. Elle bougea la tête de droite à gauche et sourit, amusée par le tintement du gadget, tout en se regardant dans le miroir. Elle déplaça quelques colifichets, en faisant attention que cela correspondre exactement à ce qu'elle souhaitait, puis sourit, satisfaite du résultat. Enma haussa les épaules, et soupira en levant les yeux au ciel, mais se garda de tout commentaire : il valait mieux la laisser faire ce qu'elle voulait, sans quoi elle risquait une nouvelle fois de l'empêcher de travailler.
Finalement, Lyn sortit à pas mesurés de la pièce. Depuis qu'elle était arrivée là, elle se contentait d'errer dans l'Autre Monde. Enma avait bien regardé dans son grand registre quelle devait être sa destination, mais elle n'était répertoriée ni dans les listes de l'enfer, ni dans celles du paradis. Ennuyé par ce problème administratif majeur -- et totalement inédit --, il n'avait pu lui indiquer quelle route à prendre. Mais cela lui importait peu ; elle savait que Trunks aller trouver un moyen de la ramener à la vie sans tarder.
***
Les trois Saiyens s'entraînaient maintenant depuis près d'une heure. Ils étaient tous les trois au niveau Super Saiyen 2, mais manifestement, la salle supportait très bien la somme des énergies qu'ils émettaient. Tout avait bien fonctionné jusqu'à présent.
Végéta parait les coups que les deux autres tentaient de lui porter. Mais aucun ne cherchait réellement à prendre le dessus. Ils s'étaient jusque là contentés d'un échauffement -- un peu rude. Végéta esquiva une rapide série de coups de poings lancés par Gokuu, tandis que Goten tentait de lui faucher les jambes. Il les rétracta à temps, mais un pied de Gokuu le cueillit sous le menton, et il fut projeté vers une paroi. Il se rétablit à temps pour y poser les mains, et, d'un mouvement souple, se posa au sol. Les deux autres l'imitèrent.
"Je ne t'ai pas fait mal, au moins, Végéta ?" demanda Gokuu. L'autre se contenta de se mettre en position d'attaque.
"Bien sûr que non," fit-il. "Il m'en faut vraiment plus. Et si on passait à quelque chose de plus sérieux, d'ailleurs ?"
"Comme tu veux," répondit Gokuu, en se positionnant à son tour.
"Gravité 700g," déclara Végéta. Dans les secondes qui suivirent, l'ordinateur adapta la gravité au niveau souhaité. Ils durent une nouvelle fois augmenter leur puissance pour ne pas être écrasés par leur propre poids. L'aura de Gokuu flamboyait. Il était sur le point d'atteindre le niveau 3 pour mieux résister. Il contracta les muscles de ses jambes, pour mieux soutenir l'effort. Mais dans l'état actuel des choses, c'était bien là sa limite.
"Je -- je ne sais pas si je pourrai me battre dans ces conditions," fit-il, en serrant les dents. "Je vais devoir me transformer encore."
"A ta guise," répliqua Végéta, qui ressentait lui aussi certaines difficultés à marcher. Mais il avait encore des réserves. Goten, quant à lui, ne semblait pas trop souffrir de la situation. Il avait simplement augmenté sa force, sans avoir besoin de se transformer une fois de plus. L'avantage d'atteindre des niveaux de puissance plus importants, pensa Végéta, était qu'on était plus puissant aux niveaux inférieurs. Il avait pu remarquer ce phénomène à de nombreuses reprises.
Tout à coup, Gokuu ressentit comme une décharge d'électricité traverser son corps. Il n'avait pas éprouvé une telle sensation depuis longtemps : l'envie de progresser, de s'améliorer. Il se sentait parfaitement bien dans son état actuel, et il était persuadé qu'il pouvait encore aller beaucoup plus loin. Sans plus réfléchir, le Saiyen contracta tous les muscles de son corps, et son aura redoubla d'intensité. Un violent courant d'air s'éleva autour de lui. Sa violence était augmentée par l'étroitesse de l'espace disponible.
"Mais -- mais qu'est-ce qui lui arrive ?" demanda Végéta, les yeux écarquillés par la surprise. Goten était tout aussi étonné. Son père agissait de façon curieuse, par moments. Mais là, c'était autre chose qu'une subite lubie. Il sentait très nettement la détermination de son père, visible dans ses yeux aux prunelles dilatées.
La puissance de Gokuu décupla tout d'un coup. Le crépitement intense des éclairs qui entouraient ses membres ne parvint pas à masquer le grondement qui s'éleva du sol : le système de régulation de la salle se mettait en régime nominal de fonctionnement, pour absorber toute la puissance qui était émise à l'intérieur. Les murs commencèrent à refroidir exactement comme prévu, pour évacuer l'énergie excédentaire. Dans sa salle de commandes, d'où elle observait la scène, Bulma jubilait : tout fonctionnait exactement comme elle l'avait prévu. Elle eut un regain d'orgueil. Elle était particulièrement fière de son nouveau système : il utilisait les quantités phénoménales d'énergie extraites de l'intérieur de la salle pour faire fonctionner tous les équipements. Au lieu de perdre de l'énergie, elle en produisait. Dommage qu'elle ne pourrait jamais faire comprendre une telle chose à ceux qui utilisaient les équipements en question, pensa t-elle.
Gokuu serra les mâchoires. Il sentait confusément qu'il lui arrivait quelque chose, mais il n'aurait pu dire quoi. Son corps agissait de façon indépendante, il n'avait fait qu'amorcer le processus. Sa puissance augmentait sans cesse, tandis que son apparence physique se modifiait pour accueillir le trop-plein d'énergie. Des douleurs apparurent au niveau des muscles de ses bras, qui semblaient prêts à exploser, mais il ne pouvait plus rien faire pour empêcher ça. Il se délectait de la sensation de puissance qui envahissait ;a moindre des fibres de son corps, tandis que sa conscience se mettait à fonctionner plus rapidement, à un autre niveau. Ses cheveux, semblables à des flammes, devinrent progressivement plus clairs, se tendirent vers l'arrière de sa tête, tandis que son ki atteignait des sommets insoupçonnés.
Puis un grand calme envahit subitement son esprit. Gokuu n'était plus vraiment lui-même, il avait radicalement changé. Il souleva une main et la porta à hauteur de ses yeux : les angles étaient plus vifs, les muscles infiniment plus robustes, et une fine aura blanche entourait tout son corps. Il savait également que son énergie n'était plus détectable pour les autres. Il effectua un petit bond, et fut étonné de la facilité avec laquelle son corps se soulevait. Même avec une gravité extraordinairement élevée, il ne ressentait pas plus de gêne que d'ordinaire. Sa mobilité et sa vitesse étaient incomparables.
La lumière se fit soudain : il se souvenait d'avoir déjà atteint ce niveau de puissance, lorsqu'il s'était entraîné lors de son second séjour dans l'autre monde. En tout cas, c'était très semblable. Malheureusement, il n'était jamais parvenu à rééditer cet exploit sur Terre -- du moins jusqu'à maintenant. C'était comme si toute l'énergie de l'univers se trouvait concentrée dans son corps, et qu'elle s'y retrouvait piégée. Il n'avait pas alors compris comment il avait fait pour atteindre ce niveau, et il ne comprenait pas plus maintenant : le mécanisme s'était enclenché de lui-même, sans qu'il ait à donner d'ordre conscient.
Il regarda tour à tour son fils et Végéta ; tous les deux le fixaient, bouche bée. Ils en avaient le souffle littéralement coupé.
"Kakarotto," fit Végéta, d'une voix peu assurée. "Tu -- tu as réussi. Tu as atteint le dernier niveau de transformation."
Gokuu fit de nouveau quelques mouvements d'assouplissement. Il n'y croyait pas lui-même.
"C'est donc ça le niveau ultime ?" demanda t-il, sur un air naïf. "Dans ce cas, ce n'est pas vraiment une nouveauté pour moi. Je suis capable de faire ça depuis longtemps, mais le seul problème, c'est que je ne sais pas comment. C'est sans doute sous l'effort demandé pour résister à la gravité que j'ai pu me transformer."
Goten prit une expression contrariée.
"Papa," fit-il, "tu peux atteindre ce niveau, et tu ne nous as pas aidés dans le combat contre Shi ? C'est vraiment injuste de ta part." Son père lui jeta un regard étonné, comme s'il venait de dire quelque chose d'absurde.
"Mais je te dis que je ne peux pas contrôler cette transformation à volonté. Peut-être que ça viendra, avec le temps."
"Peu importe," fit Végéta, qui commençait à encaisser le coup. Kakarotto avait le don de l'énerver. Comment faisait-il pour discuter normalement sous cette apparence ? Il aurait dû être totalement concentré sur ce qu'il était en train de faire. En tout cas, c'était le cas pour tous ceux qui avaient jusque là atteint de stade. Au lieu de quoi, il allait jusqu'à affirmer qu'il s'était transformé de façon presque naturelle, qu'il n'en était en somme pas responsable.
"Ca tombe bien, j'avais envie de me dégourdir," continua Végéta, en serrant les poings. Sur quoi, il fit rapidement augmenter son propre niveau de puissance, en espérant que la salle résisterait à la présence de deux Saiyens au niveau ultime.
Goten, pour sa part, préféra se mettre dans un coin pour observer ce qui allait suivre. Il savait que Végéta rêvait de cette confrontation au sommet depuis un beau bout de temps, autant ne pas lui gâcher son plaisir.
***
"Et de sept," fit Trunks, en brandissant le dernier Dragonball, qui était allé se perdre dans un marécage. Il avait de la boue jusqu'aux genoux, et ses vêtements étaient en lambeaux, mais ses yeux s'étaient enfin rallumés d'une lueur d'espoir. Il commençait à entrevoir la fin de son calvaire.
La boule alla rejoindre les six autres dans son sac, et le jeune homme décolla rapidement, en direction du palais de Dunde. Il avait retrouvé les Dragonballs en un temps record, en grande partie grâce à la détermination dont il avait fait preuve. De plus, il avait pu profiter du fait que personne n'avait trouvé aucune des boules avant lui, ce qui lui avait évité de longues négociations pour se les accaparer toutes. De toutes les façons, pensa t-il, il savait que les éventuels propriétaires des Dragonballs n'auraient vu aucun inconvénient à les lui prêter pour un petit moment.
Volant à vitesse maximale sans avoir à se transformer, il s'approcha rapidement du palais flottant.
***
Gohan, Videl et Hana se dirigeaient également vers le palais de Dunde. Ils survolaient des régions boisées, évitant soigneusement les villes, où on avait plus de chances de les apercevoir. Gohan, en tête, prenait garde à ne pas distancer les autres, en volant à leur rythme.
"Goten va entendre parler de moi," fit Hana. Ses yeux étaient emplis de colère. La veille, ils avaient tous décidé d'aller rendre visite à Trunks au Palais du Paradis, mais son ami avait disparu avant même qu'elle ne se lève. Etant donné que son père aussi était introuvable, ils en avaient conclu qu'ils étaient partis en vadrouille ensemble. Chichi avait profondément soupiré en constatant l'absence de son mari et de son fils, puis lui avait posé une main sur l'épaule, en lui assurant qu'elle finirait par s'habituer, comme les autres.
Videl et Gohan éclatèrent de rire devant l'expression d'Hana. Elle apprenait lentement à connaître la famille.
"Regardez," fit soudain Videl, en tendant un doigt devant elle. Gohan redressa la tête, tandis qu'Hana tentait d'apercevoir ce qu'elle voulait leur montrer.
Il lui sembla apercevoir, au loin, comme un fil qui reliait la Terre et les cieux ; elle était intriguée, mais ses yeux n'étaient pas habitués à voir nettement à une telle distance. Lorsqu'ils furent suffisamment proches de la tour de Karin, Gohan incurva rapidement leur trajectoire vers le haut. Le mystère s'épaississait de plus en plus pour Hana.
***
Végéta encaissa un magistral coup de poing dans la joue, ce qui lui aurait brisé la mâchoire dans des circonstances différentes. Kakarotto n'y allait pas de main morte, cette fois-ci. Il prenait vraiment beaucoup de plaisir à tester ses nouvelles capacités de combat. Végéta se souvenait de ce qu'il avait lui-même ressenti la première fois qu'il avait atteint le même niveau de puissance : un sentiment d'invincibilité totale ; une puissance indomptable, qui était à sa disposition, avec laquelle il pouvait faire disparaître des planètes entières d'une simple pensée. Si la sensation était effectivement grisante, elle n'en était que plus dangereuse : il fallait également prendre garde à ne pas perdre pied dans la folie, ce que Trunks avait été bien près de faire lors de son dernier combat contre Shi. Mais il ne descendait pas de la famille royale pour rien. Les Princes Saiyens avaient toujours eu tendance à laisser parler leur force en premier.
Avant que son adversaire n'ait eu le temps de retirer son bras, Végéta saisit son poing. Gokuu se sentit attiré en avant, et ses yeux faillirent lui sortir de la tête lorsqu'un coup de genou le plia en deux. Il avait le souffle coupé, mais il eut la présence d'esprit d'enfoncer son propre coude dans le ventre de Végéta. Les deux Saiyens effectuèrent simultanément un saut en arrière, avant de se retrouver de nouveau face à face. Leurs visages étaient identiquement meurtris et éraflés. Aucun des deux ne semblait pouvoir l'emporter sur l'autre. Un sourire cruel dévoila les canines de Végéta.
"Pas mal du tout, pour quelqu'un qui n'a pas l'habitude de se battre à ce niveau," fit-il.
"Merci," répliqua Gokuu, en prenant la même expression. Il essuya un filet de sang qui coulait d'une lèvre ouverte. "Je dois dire que tu te défends bien, de ton côté."
"Tu ne vas plus sourire très longtemps," continua l'autre. Mais soudain, une autre voix se mit à résonner dans la salle.
"Vous n'en avez pas encore assez de vous taper dessus ?" C'était Bulma, qui avait assisté à leur combat depuis sa petite salle de commande. Les trois combattants levèrent la tête, incapables de dire d'où provenait la voix.
"Allez, sortez de là tout de suite," continua Bulma. "Il me faut faire quelques réglages supplémentaires ; je vais couper la gravité dans quelques secondes."
"Et zut," fit Gokuu, en se redressant. "Quelle guigne." Les autres acquiescèrent silencieusement, de peur que Bulma les entende. Ils laissèrent progressivement retomber leur puissance, tandis que la gravité redescendait lentement à son niveau normal. Puis la porte de la salle s'ouvrit, et Bulma entra au même instant où les trois Saiyens retrouvaient leur apparence normale.
"Regardez-moi ça," s'exclama Bulma, en les détaillant du regard l'un après l'autre. "Allez vous laver, vous êtes dégoûtants." Gokuu et Végéta, surtout, ruisselaient de sueur.
"Bulma," commença Gokuu, sur un ton plaintif. "Tu pourrais nous laisser achever un combat, un jour ?"
"Pas pour l'instant, désolée. Le système de contrôle n'est pas encore parfaitement au point, j'ai dû oublier de régler certains paramètres. Vous pourrez revenir lorsque tout fonctionnera. Et maintenant, dehors."
Ils sortirent à tour de rôle, en maugréant et en traînant les pieds.
***
Le ciel s'assombrit prématurément, et Shenron apparût, dans une lumière aveuglante. Puis le long cou du Dragon sacré se tordit, pour lui permettre de regarder les minuscules créatures qui l'avaient appelé. Il reconnaissait bien Dunde, son créateur, ainsi que les deux autres, qu'il avait déjà vus à maintes reprises. Du ciel, arrivaient d'autres humains.
Piccolo tourna légèrement la tête de côté, tandis que Gohan, Videl et Hana prenaient pied sur les dalles de pierre. Hana notamment semblait très impressionnée par la taille et l'apparence du Dragon : c'était donc la première fois qu'elle le voyait, se dit Piccolo.
"Salut," fit Gohan, en adressant un signe de la main aux deux Nameks. Dunde mit un doigt devant sa bouche, et désigna ensuite Trunks, qui fixait Shenron des yeux. Gohan comprit qu'il n'avait pas encore formulé son voeu.
"Dragon Sacré," commença Trunks. "Je voudrais que tu rendes la vie à Lyn, qui a été tuée par Shi il y a quelques temps."
Le Dragon majestueux réfléchit quelques secondes, avant que sa voix ne fasse trembler tout le palais.
"Impossible," déclara t-il. "Ca s'est passé bien trop loin d'ici, je ne peux rien faire pour elle."
"Je te l'avais dit," fit Dunde, en posant une main sur l'épaule de Trunks. Le jeune homme semblait perdu. "Même Shenron ne peut pas accomplir ton souhait."
"Pas dit," répondit Trunks. Il leva de nouveau la tête vers le Dragon. Dunde haussa un sourcil. Il se demandait bien de quelle façon il comptait s'y prendre pour que son voeu soit tout de même exaucé.
"Shenron," continua Trunks, "si tu ne peux pas la ressusciter, est-ce que tu peux au moins lui donner mon potentiel de vie ?" De nouveau, la grande créature se plongea dans ses pensées.
"Je peux le faire, en effet." Tout à coup, une auréole apparût au-dessus de la tête de Trunks. Etant donné qu'ils se trouvaient à mi-chemin entre la Terre et le Ciel, Trunks est encore physiquement présent. Dunde se retint d'applaudir à l'idée du garçon : son subterfuge était bien trouvé. Il comprenait maintenant son plan.
***
Il y eut un petit tintement lorsque le grelot tomba aux pieds de Lyn ; celle-ci, surprise, le ramassa. Elle constata que toutes les autres décorations étaient tombées. Elle comprit alors : elle était de nouveau vivante, et son auréole avait disparu. Comment Trunks avait pu réussir ce tour de magie, elle l'ignorait. Mais le résultat était là. Elle se mit à crier de joie, ce qui fit lever la tête de tous les diablotins travaillant dans le bâtiment.
Enma leva des yeux ébahis sur elle. Lyn lui adressa un sourire des plus délicats.
"Je t'avais bien dit que je ne resterai pas longtemps ici," fit-elle. "A plus tard." Elle se concentra quelques instants, et disparût.
"Le plus tard possible," ajouta Enma, avant de soupirer profondément. Puis il se replongea dans sa tâche.
***
"J'attends votre dernier voeu," fit Shenron, d'une voix grave aux intonations puissantes. Dunde sourit, et leva la tête dans sa direction.
"Je voudrais que vous rendiez la vie à Trunks, maintenant," fit-il. Ce que le Dragon s'empressa de faire.
"Et voila," fit-il. "Maintenant, vous n'avez plus besoin de moi." Il disparût dans un dernier éclair, et les Dragonballs s'envolèrent dans sept directions différentes. Le ciel retrouva son bleu habituel.
Trunks passa une main au-dessus de sa tête. L'auréole avait disparu. Son passage dans le monde des morts aurait été bref.
"Merci, Dunde," fit-il en se retournant dans sa direction. Mais le Namek fixait du regard quelque chose qui se trouvait derrière lui.
"Je crois qu'on t'attend," fit-il. Trunks sentit deux mains fraîches se poser sur ses yeux, et il sursauta.
***
Gokuu s'arrêta subitement. Les autres en firent de même.
"Regardez," fit-il, en désignant une des larges baies vitrées du salon. "Il fait noir dehors."
Subitement, la lumière revint, et l'éclairage, qui s'était automatiquement mis en route, fut coupé.
"Trunks a dû réunir les Dragonballs," déclara Goten, excité. "Papa, il faut le rejoindre, j'ai hâte de voir s'il va mieux, et si son souhait a pu être accompli. Si ce n'est pas le cas, je m'inquiète pour lui"
"Entendu," répondit son père, en hochant la tête. Il regarda Bulma et Végéta, puis leur fit signe d'avancer. "Vous venez ? Ca ira plus vite comme ça."
Ils s'agrippèrent à lui, et ils disparurent tous les quatre.
***
Trunks ne pouvait plus respirer, mais c'était le dernier de ces soucis. Lyn était blottie contre lui, et ses bras lui enserraient le cou, de telle façon qu'il en avait le souffle coupé. Tout ce qui le préoccupait désormais, c'était de l'écraser contre lui. Il ne voulait plus jamais la quitter. Il se rendait maintenant à quel point il avait été malheureux durant son absence, et la seule chose qu'il souhaitait, c'était de ne plus jamais vivre une chose pareille.
"Elle est donc revenue." Trunks ouvrit les yeux. Tout le monde les regardait. Non seulement Gohan, Videl et Hana, mais aussi ses parents, ainsi que Gokuu et Goten, qui débarquaient de Dunde seul savait où. Ce dernier leur souriait, mais Piccolo leur tournait fermement le dos, les bras croisés sur le torse.
"Ton fils a trouvé une ruse géniale pour faire revenir Lyn," annonça Dunde à Végéta, qui considérait le couple d'un oeil critique. Le Saiyen haussa un sourcil. "Croiras-tu qu'il est allé jusqu'à lui donner sa propre vie ? Heureusement qu'il nous restait encore un souhait, et nous avons pu le ressusciter à son tour. Sans quoi, il aurait dû prendre sa place dans l'Autre Monde."
"Tu as fait ça ?" demanda Lyn, en redressant la tête. Trunks, qui était en train de virer au bleu, put enfin respirer. Il inclina doucement la tête. Lyn lui tira les cheveux, sans méchanceté.
"Imbécile," fit-elle. "Tu serais donc mort pour moi ?" Le jeune homme lui sourit. Il se moquait complètement de ses remontrances. Il était bien trop heureux pour dire quoi que ce soit. Il se contenta d'incliner la tête vers la sienne ; leurs fronts se touchèrent. Le contact de sa peau lançait des démangeaisons dans tout le reste de son corps, et Trunks ne put retenir un frisson.
Lyn finit de se dégager de leur étreinte, mais resta aux côtés de Trunks.
"Alors," fit Goten, en s'approchant de son ami. "Ca va mieux maintenant ?" Trunks tourna la tête vers lui, tandis que Goten lui donnait une légère tape sur l'épaule. Il lui rendit son sourire chaleureux.
"Excuse-moi," fit-il. "Je sais que je n'étais pas très sociable ces derniers jours ; mais ça va beaucoup mieux, effectivement. Dunde," ajouta t-il en tournant la tête vers le jeune Namek. "Je dois aussi te remercier pour ce que tu as fait. C'est vraiment sympa de ta part de modifier un peu l'ordre cosmique rien que pour moi." Il lui lança un clin d'oeil, et Dunde lui donna la réplique en lui faisant un signe de la victoire.
"Alors tu vas pouvoir revenir à la maison ?" demanda sa mère, en posant les mains sur ses hanches, d'un air décidé. Trunks haussa un sourcil, puis regarda Lyn. Son petit nez se retroussa légèrement, tandis qu'un sourire étirait ses lèvres.
"Non," fit-elle, en saisissant le T-shirt de Trunks d'une main, qu'elle serra en un petit poing compact. "Il reste avec moi. Après tout, il a bien gagné ce droit, non ?" Trunks écarquilla légèrement les yeux.
"Mais tu peux venir toi aussi à Capsule Corporation, tu sais," fit-il. "Il y a de la place pour tout le monde."
"J'ai quelque chose de mieux," fit-elle. Elle se concentra rapidement, et localisa ce qu'elle était en train de chercher. Elle sourit de nouveau. Puis elle se tourna vers Bulma.
"Ce qui ne l'empêchera pas de revenir de temps en temps. Mais je doute qu'il en ait envie avant longtemps."
Son image, ainsi que celle de Trunks, se mit à trembler. Puis elles se désagrégèrent rapidement, avant de disparaître tout à fait.
"Mais -- mais où sont-ils ?" demanda Bulma, en tournant la tête dans tous les sens pour tenter de localiser son fils.
"Ne t'inquiète pas trop," fit Gokuu. "Je suis sûr qu'elle s'occupera bien de lui."
"Affaire réglée," marmonna Piccolo, en se tournant dans leur direction. Son visage était tout aussi fermé qu'à l'habitude.
"Tu es dur," fit Gokuu, en s'approchant de lui. "Moi, je suis content que ça se termine bien. Il le mérite vraiment." Le Namek hocha imperceptiblement la tête.
"Peut-être," fit-il. "Mais je ne m'habituerais jamais tout à fait aux manières des humains, je crois."
"Goten." C'était Hana, qui arrivait droit sur lui, en prenant un air sombre. Le jeune homme écarquilla brièvement les yeux. Elle passa une main sur son visage, et considéra avec dégoût les traces noires qui restaient sur ses doigts.
"Mais où as-tu été traîner ?" fit-elle, sur un ton qui se voulait menaçant. "Je parie que tu es encore allé te battre, bien entendu." Il se passa une main derrière la nuque, gêné, et regarda son père. Un sourire éclatant lui dévoilait toutes les dents.
"Puisque tout le monde s'est retrouvé," fit Gokuu, "que diriez-vous de fêter tout ça à la maison ?"
Tandis que Gohan et Goten manifestaient bruyamment leur approbation, Végéta haussa un sourcil. Il croisa les bras, et jeta un coup d'oeil à Bulma.
"Je suppose que les modifications sur la salle de gravité peuvent attendre à demain," fit-elle en haussant les épaules. "De plus, comment refuser quand c'est si gentiment proposé ?"
"Alors c'est d'accord," acquiesça Gokuu. Il se tourna vers son plus jeune fils. "Tu veux bien aller prévenir Chichi ?" Goten inclina la tête. Dans le même geste rapide, il se baissa, saisit Hana à la taille, et avant qu'elle n'ait eu le temps de hurler, décolla dans une explosion de bruit et de lumière.
***
"Salut." Trunks haussa les épaules d'un air moqueur.
"Toujours là ?" demanda t-il, à personne en particulier. Il lui faudrait prendre l'habitude de parler à des voix, pensa t-il. Surtout quand la voix en question faisait dresser les cheveux sur sa nuque, au seul souvenir des souffrances qu'il avait endurées à cause de Shi. Mais il n'oubliait pas non plus que cette voix était celle de l'Eternel, que lui et Shi ne faisaient qu'un. "J'aurais cru que vous nous laisseriez un peu tranquilles."
"Laisse-le," fit Lyn, en s'approchant tranquillement de lui. Trunks la dévisagea de bas en haut. Sa démarche avait tout du félin qui s'apprêtait à se jeter sur sa malheureuse proie. Mais la proie en question sourit ; il rêvait de ce moment depuis tellement longtemps, qu'il se laisserait volontiers dévorer tout entier. Elle tendit un bras, et le poussa d'un doigt. Trunks ne fit rien pour lui résister, et il tomba à la renverse dans la mousse épaisse. Lyn le toisa de haut. Dans un claquement de doigts, elle matérialisa de nouveaux vêtements sur son corps : une tenue riche en couleurs, plus grande que sa combinaison de combat. Trunks haussa un sourcil, conscient du fait qu'elle était encore plus belle ainsi.
"Lyn," continua l'Eternel, "j'ai une mission à te confier. Un problème sur une planète du monde inférieur."
"Je suis occupée," fit-elle, sans quitter le regard de Trunks. "Pendant les dix prochains millions d'années." Sur quoi, elle eut un dernier petit sourire malicieux, et se laissa tomber en avant. Trunks amortit sa chute, et elle s'allongea de tout son long sur lui. Même ainsi, la pointe de ses pieds arrivait à peine au niveau des genoux de Trunks.
Ce dernier passa un doigt le long de son nez. Il l'immobilisa sur l'extrémité pointue.
"Rébellion ?" demanda t-il. "Ce n'est pas très correct, tout ça."
"Mon oeil," fit Lyn, en louchant sur la pointe de son doigt. "Ca fait une éternité que j'accomplis tous ses ordres sans discuter. J'ai droit à un peu de paix, non ?"
Trunks souleva ses deux mains, et décrivit la courbe gracieuse de ses petites oreilles de la pointe de ses doigts. Le contact évoquait en lui de nombreux souvenirs qu'il avait cru enfouis à jamais. Il ne parvenait toujours pas à se rendre tout à fait compte de la réalité : elle était revenue, et plus rien ne pourrait jamais les séparer, désormais.
"Pendant que tu étais encore dans l'Autre Monde," fit-il, "une amie m'a posé quelques questions à ton sujet."
"Une amie ?" demanda t-elle, soudain méfiante. "Tu as beaucoup d'amies, toi ?" Trunks éclata de rire.
"Pas tant que ça, rassure-toi. Je suppose que tu dois la remercier, d'ailleurs." Il sourit de plus belle devant son expression inquisitrice.
"Je dois remercier qui ? Et pour quoi ?" Trunks se mit à rire ouvertement.
"Crystal. Pour tous les dessins qu'elle a fait de toi." Lyn écarquilla les yeux.
"Hey, toi !" fit-elle, en lui tirant sauvagement une oreille. Trunks se mit à gesticuler, en riant. "Je te rappelle qu'il est interdit de parler de trucs réels. C'est une fanfic, ici !"
"Tu n'as aucun humour."
"Et peut-on savoir ce qu'elle t'a demandé ?"
"Et bien --" Il sembla réfléchir un petit moment. "Tout d'abord, comment tu as rencontré l'Eternel."
"C'est simple," répondit la fée, en lui prenant le menton entre le pouce et l'index. "Je ne l'ai pas rencontré, c'est lui qui a fait appel à moi. Tu sais bien que je fais partie du peuple des Thers." Trunks acquiesça. Il profitait de ce qu'elle parle pour la dévorer du regard. Il remarqua également que, dans cette position, il avait une superbe vue plongeante sur son décolleté. Elle ramena son regard à hauteur de ses yeux en lui pinçant une joue. "Un jour, un des anciens est venu me voir, et m'a informé du rôle que j'aurais à jouer. Et il a révélé les pouvoirs que l'Eternel avait placés en moi, et qui étaient latents jusqu'à ce moment. D'autres questions ?"
"Oui," fit Trunks. Lyn haussa un sourcil. Elle n'aimait pas du tout cette lueur qu'elle venait d'apercevoir dans son regard. "Elle voudrait aussi savoir combien on va avoir d'enfants." Les yeux de Lyn faillirent exploser.
"Ca," répondit-elle, en reprenant son attitude de prédateur, "c'est une surprise. Si tu veux bien, on va en parler tout de suite."
Histoires de Famille
Trunks se faufilait entre les rochers, se laissait glisser entre les blocs énormes, sans un bruit, tel un serpent. Il savait qu'il ne devait pas relâcher son attention une seule seconde, sans quoi il s'exposait à de grands risques. Son esprit était en alerte constante, recherchant les sources d'énergie l'entourant, pour tenter d'anticiper l'attaque qui ne manquerait pas de survenir ; autour de lui, le vent sifflait en s'engouffrant dans les fissures au milieu desquelles il progressait. Il se trouvait sur le flanc d'une montagne, dont un côté baignait dans une mer intérieure. La lumière du soleil était réfléchie sur la couverture de neige éternelle qui recouvrait le sommet, qu'il n'apercevait que par intervalles.
Le principe du jeu était simple : Lyn et lui devaient mutuellement se trouver, et le premier qui se serait dans l'impossibilité de bouger aurait perdu la partie. Tous les moyens étaient bons pour parvenir à son but. Le jeu pouvait durer des mois entiers, durant lesquels ils devaient soigneusement prendre garde à ne pas être repérés. Trunks n'avait pas vu Lyn depuis maintenant quatre jours ; il n'avait alors fait qu'apercevoir sa chevelure blonde disparaître derrière un pan de rochers, après avoir suivi sa piste durant plusieurs jours. Elle avait alors totalement disparu, et il la soupçonnait de le suivre à son tour depuis lors, sans cependant en avoir eu la preuve. Mais plusieurs années d'expérience lui avaient appris à suivre son instinct en ce genre d'occasions.
Trunks faisait attention de ne déplacer aucune pierre, à ne briser aucune brindille, à ne faire aucun bruit qui pourrait trahir sa présence. Il devait partir du principe qu'il pouvait être découvert à tout instant, ce qui exigeait une concentration permanente sur son environnement. Cependant, les rochers offraient une protection plutôt satisfaisante, et il pouvait avancer assez vite. Une des règles essentielles était de ne pas rester immobile trop longtemps, ce qui aurait eu pour conséquence immédiate de permettre à l'autre de détecter sa présence. Il avait également appris à dormir sans baisser sa garde, en émettant le moins d'énergie possible, et en changeant de quelques kilomètres sa position au moins une fois par heure.
Soudain, le jeune homme se figea : le vent venait de lui apporter un bruit. Lointain, diffus, mais il traduisait un mouvement. Au même moment, il détecta une présence vivante. Il pouvait s'agir de n'importe quoi : d'un oiseau, d'un petit rongeur, ou encore d'un serpent. Mais il ne devait prendre aucun risque. Lentement, il se hissa sur un pan de pierre incliné suivant une forte déclinaison. Arrivé au sommet du bloc de pierre, il jeta un regard autour de lui pour vérifier qu'il n'était ainsi pas trop vulnérable. Il portait des vêtements usés, déchirés, et tellement sales que son camouflage était presque parfait : il se fondait dans le décor, et seuls ses mouvements pouvaient le trahir. Il jeta un coup d'oeil par une fente sur l'arête irrégulière du bloc de pierre. Au loin, il ne voyait que de l'herbe et des rochers. Encore plus haut, c'était la forêt de résineux qui couvrait la moitié de la montagne d'une couleur sombre. Au-dessus de la forêt, le paysage devenait lunaire, et se couvrait finalement de neige au sommet. Son intention avait été de se glisser dans la forêt, où il serait quasiment indétectable, pour contourner les pentes abruptes, et enfin atteindre un point d'observation assez élevé pour tenter de détecter sa proie -- car au fil du temps, il avait appris à se comporter comme un prédateur.
Un mouvement attira son regard : une touffe d'herbe s'était mise à bouger, mais pas sous l'effet du vent. Il se concentra, et hocha la tête : la présence qu'il avait détectée se trouvait bien là bas. Mais ce n'était pas Lyn. Soudain, un éclair gris jaillit. Trunks eut le temps d'apercevoir un lièvre, qui réintégrait son terrier. Son estomac se mit à gronder, et il fit une grimace : il n'avait rien avalé depuis bientôt 24 heures, et son corps commençait à protester. Il grava dans sa mémoire l'emplacement du trou où l'animal avait disparu, puis redescendit lentement de son perchoir. A pas de loup, il se glissa entre les rochers, sans faire le moindre bruit.
Quelques minutes après, il se trouvait accroupi au sol devant le terrier. Il détectait la présence de plusieurs animaux à l'intérieur, et se mit à saliver. Il savait que pour capturer son déjeuner, il devrait momentanément baisser sa garde, mais remplir son ventre était maintenant devenu une priorité absolue. Il devait manger, sinon il allait s'affaiblir, et toutes les chances seraient alors du côté de Lyn.
Il leva une main, et d'un mouvement brusque, l'enfonça dans le sol. Le choc effraya les animaux, qui se précipitèrent vers la sortie. Rapide comme l'éclair, Trunks les cueillit un à un par les oreilles, et les assomma avant qu'ils n'aient le temps de se rendre compte de ce qui leur arrivait. Il y en avait trois : un adulte, et deux jeunes. Puis il se réfugia de nouveau à l'abri des blocs de pierre, avec un sourire triomphant. Il était préférable d'attendre la nuit pour se restaurer, et il aurait donc le temps de trouver des fruits ou d'autres animaux pour compléter son repas. Il s'assit à même le sol, adossé à un rocher, le temps de calmer les battements de son coeur, et de reprendre ses marques. Au moment où il tourna la tête pour ramasser les trois lièvres qu'il avait laissé tomber, Trunks écarquilla les yeux -- et les narines. Non, il ne rêvait pas, il reconnaissait très bien cette odeur. C'était celle de Lyn, aussi diffuse soit-elle. Son sang ne fit qu'un tour : il venait de retrouver sa trace. Elle s'était tenue là, à cet endroit précis, dans la même position. D'après le peu d'intensité de l'odeur, il jugea qu'elle était partie depuis environ deux jours. Mais une chose était certaine, il était maintenant sur sa piste. Un reflet doré le confirmait : il tendit un bras, et ramena entre son pouce et son index un fil d'or accroché à une aspérité de la pierre. Elle s'était arrêtée pour se reposer, peut-être pour dormir un peu.
Se guidant à l'odorat, et aux infimes informations qu'il pouvait détecter -- ici une herbe brisée, là une pierre retournée, une trace sur une paroi, ou encore une marque dans la terre humide -- il pouvait maintenant progresser plus rapidement. Il espérait seulement qu'il était le chasseur, et non la proie : combien de fois lui avait-elle ainsi laissé des indices, combien de fois avait-il suivi de fausses pistes, qui finissaient invariablement par se perdre, et au bout desquelles elle l'attendait patiemment ! Mais il avait beaucoup appris, il était devenu très agile : même si c'était encore un piège, il saurait le détecter et l'éviter. La seule chose qui importait, c'était qu'il se rapproche d'elle.
Cependant, la nuit l'obligea à trouver un refuge. De plus, du ciel, qui avait été bas et sombre toute la journée, tombait maintenant une pluie fine et glacée. Il trouva donc une grotte à flanc de montagne, et s'y installa. Par chance, un grizzly y avait élu domicile avant lui : il l'assomma d'un mouvement du poignet, et le dépeça. Les lièvres seraient pour le dessert, décida t-il. Il se félicita d'avoir trouvé un tel abri, car il devait la plupart du temps se contenter du ciel étoilé comme couverture ; et il regretta amèrement de devoir l'abandonner le lendemain. Ici, il pourrait dormir tranquille, à l'abri des animaux sauvages, et surtout de l'attention de Lyn. Il pourrait même faire du feu -- il n'avait pas mangé d'aliments cuits depuis plusieurs jours, car faire du feu aurait irrémédiablement trahi sa position. Les flammes seraient visibles à des kilomètres aux alentours la nuit, et dans la journée, il devait craindre la fumée. La seule solution consistait à boucher l'entrée de la grotte par un épais tapis de branchages, et à prier afin que les maigres courants d'air emportent suffisamment de fumée pour qu'il puisse respirer. Ainsi, il était pratiquement indétectable.
Aussi confortablement installé qu'il l'était possible, Trunks passa ainsi sa première nuit tranquille depuis près d'un mois.
***
Le lendemain, reposé et rassasié, il se remit en route. Un épais brouillard montait de la terre, et restreignait sa perception visuelle à une dizaine de mètres, mais lui assurait également un camouflage supplémentaire. La pluie de la veille avait effacé la plupart des traces du passage de Lyn, mais il parvenait à en trouver suffisamment pour être certain d'être sur le bon chemin. A mesure qu'il progressait, le jeune homme devenait de plus en plus excité à l'idée d'atteindre son but. Il ne cessait cependant de tempérer son enthousiasme : non seulement son attention baissait et il devenait plus imprudent, mais rien n'était encore gagné. Il lui faudrait procéder avec la patience la plus extrême une fois qu'il serait suffisamment proche de Lyn, à supposer qu'il y arrive jamais. Il risquait de perdre sa trace à tout instant ; de plus, il se pouvait fort bien qu'elle soit en train de mourir de rire en ce moment même, en le voyant suivre une piste tracée par ses soins, auquel cas elle pouvait lui tomber dessus n'importe quand. Et dans cette hypothèse, elle bénéficierait d'un effet de surprise suffisant pour avoir l'avantage sur lui. Trunks se souvenait de nombreuses occasions où il s'était retrouvé à terre avant même de comprendre qu'une fléchette enduite d'un soporifique s'était plantée dans son cou. Ce n'était qu'un des nombreux scénarios qui risquaient de se répéter s'il n'y prenait garde.
La piste s'enfonça soudain dans la forêt. Elle devenait du coup plus facile à suivre, mais il était de son côté plus facilement détectable. De très nombreux indices jalonnaient la progression de Lyn, au point qu'il en devint presque persuadé qu'elle était en train de le rouler. A un moment, il perdit sa trace, et ce n'est qu'au bout de vingt minutes qu'il comprit qu'elle avait quitté le sol, pour continuer sa progression dans les arbres. Ainsi, elle faisait tout pour ne pas être repérée, ce qui le rassurait. Mais il ne relâcha pas son attention pour autant.
Une fois dans les arbres, il était difficile de savoir quel chemin elle avait emprunté. Mais ses sens étaient devenus suffisamment affûtés pour qu'il ne perde pas son cheminement. Elle avait encore une large avance sur lui, ce qui lui permettait d'avancer rapidement. Durant une bonne partie de la journée, il parcourut plusieurs dizaines de kilomètres dans le feuillage ; elle avait donc suivi le même chemin qu'il avait eu l'intention d'emprunter : la route qu'il suivait évitait soigneusement les pentes les plus raides, sur lesquelles elle n'aurait eu presque aucune chance de grimper sans se faire remarquer. Elle avait ainsi continué en arc de cercle vers le haut. Vers le milieu de l'après-midi, il arriva à l'orée de la forêt : celle-ci se terminait brusquement, et elle était remplacée par un paysage à nouveau rocailleux, mais où il était très difficile de se cacher. Il ne put rien détecter sur les pentes nues ; pourtant, sa piste continuait vers le sommet, sans que le doute soit possible.
Trunks s'accroupit sur une branche basse, où il était entouré de toutes parts par la végétation. Si elle s'était effectivement avancée vers le haut, il y avait toutes les chances du monde qu'elle puisse le voir une fois qu'il sortirait de la protection que lui offraient les arbres. Il jugea qu'il n'avait plus qu'un jour de retard sur elle, mais ça lui donnait suffisamment de temps pour avoir trouvé un abri valable, d'où elle pourrait surveiller tous les environs. Il n'avait cependant que deux alternatives : soit jouer la prudence, et longer le bord de la forêt en espérant retrouver sa trace plus bas, soit compter sur un manque d'attention de sa part, et se jeter en avant. Aucune des deux solutions ne le séduisait : la seconde n'était rien d'autre qu'un immense coup de bluff, tandis que la première lui faisait perdre la piste qu'il avait suivie avec succès jusqu'à maintenant.
Mais lorsqu'on y réfléchissait, elle n'avait aucun moyen de savoir qu'il allait la suivre lorsqu'elle était passée par ici. Du moins, c'est ce qu'on pouvait supposer en faisant l'hypothèse qu'elle cherchait, elle aussi, à ne pas être repérée. Bien entendu, elle pouvait avoir pensé qu'il y avait une mince chance qu'il retrouve sa trace, mais dans tous les cas, elle n'avait pas intérêt à s'avancer à découvert. Donc la seule conclusion logique était qu'elle non plus n'était pas montée plus haut sur ce terrain où on ne pouvait se cacher nulle part. Elle avait nécessairement dû avoir besoin d'un minimum de garanties pour se déplacer. Trunks se mit sur ses pieds, et grimpa au sommet de l'arbre, pour avoir une meilleure idée du relief de la région. Une fois perché sur les plus hautes branches, il lui suffit d'un coup d'oeil pour trouver ce qu'il cherchait : à sa gauche, un torrent dévalait la pente. Il sourit, et redescendit de quelques mètres.
Il se dirigea ensuite vers le lit du cours d'eau. Il lui fallut un petit moment pour l'atteindre, car la végétation était très dense sur ses berges, et il ne voulait pas se frayer un chemin trop voyant dans les murs de lianes et de ronces qui lui barraient le passage. Il longea quelques minutes le torrent avant de trouver une percée dans le feuillage. Il se percha sur un rocher, et ne put se retenir de contempler le spectacle : c'était un véritable fleuve qui bouillonnait sous ses pieds. Des rochers immenses, submergés d'écume, faisaient figure de navires naufragés dans cet enfer liquide. La vitesse de l'eau était impressionnante, sans compter que la température ambiante ne l'invitait guère à plonger dans les remous rugissants. Les pentes étaient abruptes, les parois glissantes, et les cachettes nombreuses dans un tel environnement. L'endroit idéal pour une embuscade. Trunks esquiva un sourire : il était maintenant totalement persuadé qu'elle l'avait amené là à dessein. C'était trop beau pour être un simple hasard. Mais il n'allait pas se laisser avoir par sa ruse. Cependant, il ne pouvait s'empêcher d'admirer les trésors d'imagination qu'elle avait dû déployer pour l'attirer jusque là.
Si ce qu'il supposait était fondé, elle devait le guetter, quelque part le long du torrent. La question était de savoir où elle se trouvait exactement. En amont, ou en aval de sa position actuelle ? S'il choisissait de bouger, il lui fallait être extrêmement prudent à partir de maintenant. Il était traqué. Mais au moins, il le savait.
Trunks décida de ne pas continuer à évoluer à proximité immédiate du cours d'eau. Non seulement il était trop vulnérable, mais la forêt offrait plusieurs avantages : il pourrait se déplacer plus vite dans les arbres qu'à terre, il serait partiellement caché, et l'eau faisait trop de bruit pour que son ouïe puisse lui être utile, de toute façon. Il regagna lentement les arbres qui bordaient le torrent, et se contenta de sonder les alentours pendant les minutes suivantes, à la recherche de tout indice qui lui permettrait de l'aider à localiser Lyn. En vain. Il ne trouva rien, mais il avait au moins la certitude qu'elle ne l'espionnait pas. S'il ne s'était pas trompé, elle ne devait pas savoir qu'il était à sa poursuite, ou du moins, elle ignorait à quel stade il en était. Donc il aurait peut-être l'avantage de la surprise.
Le soleil descendait maintenant sur l'horizon. Il savait que le temps jouait contre lui : plus il attendait, et plus elle serait sur ses gardes. D'un autre côté, il pouvait profiter des quelques heures de jour restantes pour explorer la région tout à son aise ; elle était forcément quelque part dans les environs.
Il se retira donc vers l'intérieur de la forêt. Plusieurs espèces d'arbres fruitiers lui fournirent des victuailles, et il eut même la chance de tomber sur une biche qui broutait tranquillement sous un arbre. Sans un bruit, il fondit sur l'animal, qui se laissa étrangler silencieusement. Il cacha le cadavre, y laissa tous les fruits qu'il avait récoltés, et partit à l'aventure, bien décidé à trouver des traces du passage de Lyn.
Malgré tous ses efforts, il ne trouva rien de satisfaisant. L'obscurité envahissait peu à peu la forêt, et il ne put voir que quelques marques sur l'écorce des arbres. Mais les elles auraient tout aussi bien pu être laissées par des animaux. Rien n'indiquait quelle soit déjà passée par là. Pourtant, Trunks était persuadé qu'il était maintenant tout près. Il n'avait jamais eu besoin de détecter son énergie vitale pour sentir la présence de Lyn. C'était une sensation plus profonde, une sorte d'angoisse qui lui nouait l'estomac, et qui lui donnait de petits frissons. Il savait que c'était exactement la même chose pour elle : à l'heure qu'il était, elle devait savoir qu'il n'était pas loin. Heureusement pour lui, elle ne pourrait pas s'en servir pour le repérer : le sentiment était trop diffus pour être utilisé avec tant de précision. Mais désormais, elle serait sur ses gardes.
Une fois la nuit tombée, Trunks revint à l'endroit où il avait laissé son repas. Il engloutit rapidement tout ce qu'il put. Pas question de faire du feu, cette fois-ci : il aurait été immédiatement repéré. Il se contenta donc de viande crue, et froide. Mais il avait dépassé le stade où il en éprouvait du dégoût ; il en ressentait même un certain plaisir, mêlé à de l'excitation, ce qui n'était pas étranger au goût du sang dans sa bouche, à la texture particulière de la chair entre ses dents. Lorsqu'on est un Saiyen, on ne peut pas se refaire.
Il dormit très peu. Non seulement il lui fallait bouger très souvent pour rester tout le temps en alerte, mais il se mit à pleuvoir en plein milieu de la nuit. Une pluie pénétrante, froide, très inconfortable. Il repensa avec nostalgie à tous les moments de paix qu'il avait connus dans le petit sanctuaire de Lyn. Il chassa toutes ces pensées d'un coup : s'il y avait bien un piège dans lequel il ne devait pas tomber dans une telle situation, c'était celui de la mélancolie. Ne jamais se laisser abattre, c'était une des règles essentielles. Mais ce n'était pas à lui qu'on apprendrait une telle chose. Il profita donc de ce qu'il était éveillé pour trouver quelques fruits de plus, histoire de se réchauffer autant que possible -- il ne pouvait pas non plus augmenter son énergie interne pour dresser autour de lui une barrière protectrice contre le froid et l'humidité, sans quoi Lyn l'aurait repéré et ligoté dans les cinq minutes suivantes. De plus, la sensation qu'elle se trouvait à proximité, elle aussi éveillée, et à sa recherche, devenait de plus en plus forte. Même s'il l'avait voulu, il n'aurait pu trouver le sommeil.
Dès les premiers rayons du soleil, il se remit en route, progressant lentement dans les arbres. Le sol était maintenant détrempé, et il était hors de question de laisser des traces de pas dans la boue. Il s'approcha autant que la prudence le lui permettait de la rive du torrent, et le suivit dans le sens ascendant. Il ne savait pas ce qu'il devait chercher, mais il s'attendait au pire à tout instant. Désormais, il savait que la véritable chasse venait de débuter : il n'aurait plus de repos jusqu'à ce qu'elle soit terminée.
La partie de cache-cache dura ainsi cinq jours. Cinq jours durant lesquels il ne dormit pas plus de vingt minutes d'affilée ; durant lesquels il ne mangea que des baies, des fruits, et le peu de chasse qu'il se permettait pour ne pas mettre sa sécurité en péril. Et pas un instant la sensation d'une présence l'épiant ne le quitta. Il était constamment en alerte, prêt à bondir au moindre bruit, prêt à riposter. L'épuisement le gagnait peu à peu, mais il était hors de question de laisser tomber. Il savait qu'ils devaient en finir rapidement : Lyn n'aurait pas les mêmes capacités de résistance que lui, malgré tout son courage et sa détermination.
Il parcourut ainsi les berges du torrent, toujours du même côté, de peur d'avoir à franchir le cours d'eau et ainsi s'exposer à être vu. Il ne faisait que monter et descendre, sur toute la longueur qui était entourée de végétation. Il était hors de question qu'elle puisse se trouver autre part : elle non plus ne se serait pas exposée inutilement en terrain découvert. De plus, son instinct était là pour le guider. Au soir du cinquième jour, il commença à avoir des hallucinations : il lui sembla apercevoir une fois sa chevelure blonde disparaître derrière un arbre, et il entendit clairement par trois reprises son rire merveilleux -- mais ce n'étaient que les oiseaux, et il finit par penser qu'ils avaient bien raison de se moquer de lui. Son parfum était partout, le hantait. Mais il savait que tout cela était dû au manque de sommeil.
Cependant, il ne comptait pas relâcher son attention pour autant. Et c'est ainsi qu'il fit une découverte majeure, alors que le soleil se couchait une fois de plus. Dans sa hâte de trouver un abri de fortune pour la nuit, il avait failli se jeter droit sur un fil invisible tendu dans un passage aérien. Il ne remarqua le piège qu'au dernier moment, alors qu'un rayon lumineux était réfléchi par une goutte d'eau accrochée à une toile d'araignée tendue dans le vide, sans qu'aucun fil de maintien ne soit visible. Il jubilait : ce fil indiquait qu'il avait eu raison. Lyn se trouvait ici, dans son environnement immédiat. Il indiquait également qu'elle prenait de plus en plus de risques, signe d'un épuisement presque total. Il étudia le piège avec attention : le fil était relié à une branche souple, qui se rabattrait dès que le lien serait brisé. Le bruit engendré, sans parler de celui de sa chute éventuelle, l'alerterait immédiatement. A condition, bien entendu, qu'elle se trouve assez près pour l'entendre. Cela signifiait qu'elle était toute proche.
Trunks se transforma alors en statue : il alla se percher sur une branche plus haute, et attendit patiemment que la nuit tombe pour agir. A la faveur de l'obscurité, il pourrait enfin bouger.
Engourdi par le froid, il se décida enfin à redescendre. La meilleure chose à faire était d'explorer les alentours avec la plus grande prudence. Elle ne l'avait pas encore remarqué, sinon elle aurait attaqué. A moins que son plan ne soit plus complexe, mais il n'y croyait plus beaucoup. Il savait qu'il était sur son territoire de chasse : elle avait sans doute semé des pièges un peu partout dans les environs. Cette sensation ne faisait que l'exciter. Il trouva effectivement deux pièges de plus. L'un était constitué d'un autre fil, qui actionnait cette fois la détente d'une lame soigneusement cachée -- décidément, elle exagérait un peu. L'autre était au sol : il distingua des marques sur la terre et la végétation. Elle avait réussi à creuser une fosse qu'elle avait presque parfaitement dissimulée. Au fond, devaient sans doute se dresser des pics affûtés qui n'attendaient plus que leur proie.
Soudain, Trunks tressaillit, et se figea : une branche venait de craquer, non loin de lui. Ca ne pouvait être un oiseau, ni un écureuil, ni aucun autre animal. Il en avait l'intime conviction : aucune énergie n'était décelable dans les environs. Et son estomac était plus noué que jamais. Il tourna vivement la tête dans la direction d'où provenait le bruit, et faillit hurler de joie : un pied qu'il ne connaissait que trop bien disparaissait derrière un arbre. Il se jeta en avant de toute la vitesse qui lui était permise sans se faire détecter, et il rattrapa facilement Lyn. Elle avançait lentement, de branche en branche, épiant tout sur son passage. Mais il prenait soin à ne jamais se faire repérer lorsqu'elle regardait dans sa direction. La seule façon de le trouver aurait été d'entendre les battements de son coeur, et il doutait même qu'elle en soit incapable.
Elle disparût soudain de son champ de vision, et il tendit la tête hors du feuillage pour la suivre du regard. Mais elle restait invisible. Intrigué, il s'avança de quelques centimètres sur une branche large, et fut aussitôt soulagé : elle était là, accroupie sur ses talons. Sa magnifique chevelure blonde resplendissait sous le clair de lune, et émettait des reflets chatoyants. Mais elle avait cessé de bouger. Il n'aurait pu dire si elle dormait ou si elle attendait simplement, mais elle était immobile. Absolument immobile. A bien y regarder, elle était même trop immobile. Ses yeux s'écarquillèrent soudain, et la peur s'empara de lui, plus intense que tout ce qu'il avait connu dans les dernières semaines : il ne s'agissait pas de Lyn. Uniquement d'un mannequin habilement installé, et qu'on pouvait facilement prendre pour l'original dans l'obscurité. Ce qui voulait dire que la vraie Lyn était --
Il réagit instantanément. Les étoiles empoisonnées sifflèrent à ses oreilles, et le filin d'acier lui aurait tranché la gorge s'il n'avait déjà tourné la tête de côté. D'un bras, il bloqua le coup qui aurait dû l'assommer, et il se laissa tomber dans le vide. Il se raccrocha d'une main à la branche qu'il venait de quitter, et il se rétablit dans un mouvement gracieux, en faisant un tour complet pour revenir à sa position initiale. Lyn était à présent à sa merci : déconcertée par sa rapidité de réaction, elle n'avait pu arrêter sa course. Elle était propulsée par son élan vers le prochain tronc. Il savait de dès qu'elle l'aurait atteint, elle disparaîtrait dans l'obscurité sans qu'il n'ait le temps de voir quoi que ce soit. Il augmenta donc rapidement sa puissance -- inutile de se cacher, désormais -- et s'élança à toute vitesse vers elle. Il réussit à saisit une cheville, alors qu'elle était sur le point d'atteindre une branche de la main. Il la tira violemment à lui, puis referma ses bras puissants autour d'elle, tandis que ses pieds entourèrent les jambes de la petite fée. Ils s'effondrèrent tous les deux au sol, enlacés, et elle ne pouvait plus bouger d'un centimètre.
"J'ai gagné," fit Trunks à voix basse, au creux de son oreille.
"Tu as eu de la chance," répondit-elle, d'une voix où filtrait clairement de l'amertume.
***
"Tu as faim ?"
Trunks secoua lentement la tête. Il n'avait vraiment pas envie de bouger. Le monde pouvait s'écrouler autour de lui, ça lui était complètement égal.
Ils étaient revenus depuis presque une journée au sanctuaire de la fée. Une journée entière passée à dormir, d'un sommeil profond, sans rêves, et qui les laissait presque aussi las que lorsque le jeu s'était terminé.
"Et pourtant," continua Lyn, "il nous faut nous lever." Ce qu'elle fit, en se dégageant de son étreinte. Trunks, déçu, ouvrit les yeux. Puis il l'imita. Ses jambes le portaient à peine : tous ses muscles étaient perclus de douleurs. Il savait que la situation devait être encore pire pour sa compagne ; pourtant, elle se déplaçait avec sa grâce naturelle, ses mouvements étaient toujours aussi souples et fluides. Elle s'avança de quelques pas en direction de la source, se retourna un instant, et lui fit signe d'approcher de la main. Il lui obéit, tout en jetant un regard à ses vêtements : leur véritable couleur avait disparu depuis longtemps, et ils étaient tellement déchirés qu'on aurait facilement pu le prendre pour un vagabond. Lyn fit un petit mouvement de la main droite, et leurs vêtements disparurent simultanément. Le jeune homme ne put s'empêcher d'écarquiller les yeux ; il ne s'était toujours pas habitué à la voir nue, malgré leurs années de vie commune. Plus il la regardait, et plus elle lui semblait belle. Il savait cependant qu'elle ne changeait pas : elle était immortelle, et lui aussi, depuis qu'il vivait sur cette planète sacrée.
Lentement, Lyn entra dans l'eau chaude ; elle laissa échapper un petit soupir de soulagement lorsque son corps s'allongea dans la vapeur. Trunks lui-même fut surpris par la caresse du liquide contre sa peau. L'effet était immédiat : toutes ses courbatures disparaissaient les unes après les autres, ses muscles se détendaient, le sang affluait de nouveau dans les fibres contractées, emportant avec lui toute la tension accumulée. Il se mit sur le dos et ferma les yeux, ne laissant que son visage surnager. A côté de lui, Lyn faisait exactement la même chose. L'énergie refluait maintenant dans leurs corps fatigués.
Au bout d'un moment, il se sentit assez remis pour relever la tête hors de l'eau. Lyn flottait à quelques mètres de lui, sur le dos. Il s'approcha lentement, et elle se retrouva bientôt complètement allongée sur lui. Un petit sourire lui étira les lèvres : la situation avait l'air de lui convenir parfaitement. Il ramena ses bras en avant, et les posa sur sa poitrine. Ses mains se laissèrent un moment aller le long de ses courbes harmonieuses, et il ferma de nouveau les yeux sous le déferlement des sensations qui l'assaillirent. Ses fins cheveux dorés lui caressaient le cou, et emplissaient l'atmosphère de leur parfum délicat.
Enfin, il posa une main sur le ventre de Lyn, et elle tressaillit légèrement. Il la rassura en décrivant de petits cercles rassurants du bout des doigts.
"Comment va t-il ?" demanda t-il doucement. Ses lèvres pouvaient presque toucher la pointe de ses fines oreilles.
"Elle," reprit Lyn, avec un soupçon de reproche dans la voix. "Et elle va bien, merci." Il sourit à pleines dents.
"On n'aurait pas du continuer le jeu aussi longtemps," continua Trunks, en enfouissant son visage dans ses cheveux.
"Et pourquoi ? Je t'ai déjà dit que tout irait bien. Je ne suis pas si faible que ça. Et puis de toute façon, tout s'est bien passé."
"Oui," concéda t-il. "Mais il aurait pu t'arriver n'importe quoi. Je me faisais du souci."
"Imbécile. Je suis infatigable."
"Mais pas lui," fit-il en tapotant légèrement son nombril du bout de l'index.
"Trunks," ajouta t-elle, maintenant excédée. "C'est une fille."
Il se contenta de sourire. Il s'en fichait totalement, mais le jeu les amusait depuis le début. Lorsque, deux ans auparavant, elle lui avait dit qu'elle attendait un enfant, il s'était évanoui sous le choc. Depuis, elle n'avait pas pris un seul gramme. Elle lui avait bien dit que les femmes de son espèce pouvaient mettre de une à plusieurs années avant de donner naissance à leurs enfants, et que le bébé serait tellement petit qu'elle ne grossirait pas du tout durant tout ce temps. Mais il avait toujours eu de la peine à le croire. Pourtant, lorsqu'il posait ses mains bien à plat sur la peau lisse et douce de son ventre comme il le faisait en ce moment, et qu'il vidait son esprit de toute émotion, il pouvait sentir la vie qui se développait sous ses doigts. Une vie ténue, frêle et puissante à la fois. Son fils -- car il était persuadé que ce serait un garçon -- serait quelqu'un d'exceptionnel, il en était convaincu d'avance.
"Tu vas arrêter un peu, oui ?" fit-elle en riant, lorsque les mains de Trunks se firent tout à coup plus curieuses sur son anatomie. Elle se mit à gigoter et lui planta involontairement un coup de coude dans les côtes. Trunks se mit à gémir, et il coula lentement dans l'eau claire, en laissant échapper une colonne de bulles.
"Trunks, non --" commença Lyn, effrayée, en se redressant. Puis elle se mit à hurler. Sous l'eau, il l'avait saisie par les chevilles, et l'entraînait maintenant avec lui vers le fond. Elle avala une gorgée d'eau lorsque sa tête fut totalement immergée.
A la surprise de Trunks, elle se ressaisit soudain : elle se plia en deux, et se libéra les chevilles d'un mouvement agile. Puis elle se mit à nager vers lui, en faisant une grimace d'horreur. Il faillit se noyer en éclatant de rire. Rapidement, il dut remonter à la surface, en luttant contre l'étouffement.
"Je t'ai eu," fit-elle, triomphante, en émergeant près de lui. Trunks n'en finissait pas de tousser.
"Tu -- tu vas voir," rétorqua t-il, en ouvrant avec peine ses yeux pleins de gouttes d'eau et de larmes.
Elle lui tira la langue, et s'éloigna rapidement. Elle semblait glisser sur l'eau tellement ses mouvements étaient rapides. Mais Trunks était plus puissant qu'elle, et il la rattrapa en quelques brasses. Elle écarquilla les yeux lorsqu'il fondit sur elle, tel un fauve prêt à la dévorer, en soulevant une grande gerbe d'eau.. Mais il se contenta de passer ses bras autour de son cou, et de la serrer contre lui.
"Tu as gagné," fit-elle, en passant ses mains délicates dans les cheveux de son ami. L'eau ruisselait lentement sur son visage, le rendant encore plus beau à ses yeux. "Tu peux me faire ce que tu veux." Un sourire étira les lèvres de Trunks.
"Vraiment tout ?"
***
Ils somnolaient, enfouis dans la mousse entre deux racines gigantesques du grand arbre qui leur servait de toit, encore éblouis par la puissance de leurs ébats amoureux. Ils étaient tous les deux surpris à chaque fois de retrouver intacts leurs sentiments du premier jour, comme s'ils se redécouvraient entièrement à chaque fois. Les yeux mi-clos, Lyn errait entre rêve et réalité, le visage enfoui dans l'épaule de son compagnon. Ils avaient développé leurs techniques de communication silencieuse, et les pensées de l'un étaient immédiatement connues de l'autre, partagées, même les sentiments les plus personnels et les plus secrets. Elle se rendait compte que c'était en fin de compte ce qu'elle avait recherché toute sa vie, et que seul Trunks pouvait lui apporter un tel bonheur, car il la comprenait parfaitement. Jamais aucun être n'avait autant compté pour elle, et elle savait que c'était totalement réciproque pour lui. Ils n'étaient pas seulement faits l'un pour l'autre : ils s'étaient apprivoisés dès leur rencontre. Le premier regard avait scellé leur destin, elle l'avait toujours su.
Trunks bougea lentement une main pour flatter la pointe d'une de ses oreilles ; le contact de sa peau était semblable à une décharge d'électricité, et elle ne put se retenir de se trémousser. Elle sentit une vague de plaisir envahir l'esprit de son compagnon. Elle ne savait pas si d'autres êtres avaient un jour connu un bonheur aussi complet que le leur : il n'était pas seulement fondé sur le contact physique, mais aussi sur une entente parfaite de l'âme, une compréhension mutuelle qui frisait à la fusion.
Epuisée, elle s'endormit ; Trunks l'imita sans tarder.
***
Lyn se réveilla presque en sursaut ; quelque chose n'allait pas chez Trunks. Pourtant, il était à ses côtés, tout aussi réveillé qu'elle. Elle fronça les sourcils, et se tourna de côté, en s'appuyant sur un coude, pour lui faire face. Trunks en fit de même, et lui sourit. Il savait qu'elle avait perçu son angoisse.
"Qu'est-ce qui t'arrive ?" demanda t-elle, en passant une main dans ses cheveux. Il baissa les yeux vers le sol. Elle aurait facilement pu lire dans son esprit pour connaître la cause de son trouble, mais elle savait s'en empêcher lorsque Trunks avait besoin de réorganiser ses pensées. Elle avait longtemps été étonnée du temps qu'il pouvait y passer, mais après tout, il était encore très jeune par rapport à elle ; il était donc logique qu'ils ne pensent pas exactement de la même façon. Elle attendit patiemment qu'il trouve ses mots.
"Je crois que le dernier jeu ne m'a pas assez fatigué," fit-il. Lyn le regarda un petit moment, sans comprendre.
"Mais -- tu étais complètement épuisé lorsque nous sommes revenus," rétorqua t-elle. Il secoua la tête.
"J'étais fatigué parce que je n'avais pas dormi depuis longtemps. Mais mon corps n'a pas été habitué à ce genre d'effort très prolongé. Ce que je veux dire, c'est que je ne me suis pas battu depuis trop longtemps."
"Et ça te manque tant que ça ?" Elle n'avait même pas besoin de poser la question. Il suffisait de regarder ses yeux pour se rendre compte qu'il en avait vraiment besoin.
"J'adore me trouver avec toi, ici, tu le sais bien," fit-il, en levant une main. Il la posa sur sa joue, et descendit lentement en direction de son épaule. "Mais il y a certaines choses que tu ne peux pas m'apporter. Des sensations que je ne peux éprouver que lors des combats."
"Tu sais bien que ça ne fait aucune différence si tu t'entraînes ou non, tant que tu restes sur cette planète." Trunks acquiesça ; il savait que son corps ne s'habituerait pas à l'inactivité, qu'il conserverait tous les acquis de son entraînement sans faire aucun effort. Un petit cadeau de l'Eternel.
"Ce n'est pas ça," continua le jeune homme. Sa main caressait maintenant la courbe gracieuse du dos de son amie. "Pour les Saiyens, le combat fait partie intégrante de la vie. Il permet de refouler ses angoisses, de s'affirmer. A voir mon père, on sait tout de suite qu'il a pris les plus grandes décisions de sa vie lors des batailles. On en a besoin pour conserver un certain équilibre."
"Désolé de ne pas pouvoir t'aider," fit Lyn. La main de Trunks était remontée derrière sa nuque. Elle haussa un sourcil ; elle savait comment ce genre d'histoires se terminait, généralement.
"Si ça ne te fait rien," continua t-il, "j'aimerais bien retourner sur Terre un de ces jours. Pour un moment seulement, mais ça me donnerait l'occasion de revoir ma famille. Lyn inclina la tête ; elle comprenait parfaitement qu'il ait besoin de ce genre de choses.
Ses yeux s'agrandirent de surprise lorsque Trunks attira fermement sa tête en avant, pour l'embrasser sauvagement. Il était capable de la surprendre dans les moments les plus inattendus.
Lorsqu'elle put reprendre son souffle, elle lui sourit légèrement.
"Encore ?" demanda t-elle. "Je te croyais trop fatigué pour recommencer si tôt."
"Ne dis pas de bêtises," répliqua Trunks, sans se départir de son air sérieux. Il la prit dans ses bras puissants tout en l'embrassant de nouveau, et elle répondit avec fougue à son invitation.
***
Le magazine de mode tomba lentement sur l'épais tapis d'herbe, et les pages de papier glacé se mirent à tourner une à une, sous l'effet de la légère brise. Allongée dans une chaise confortable, Bulma s'était complètement endormie à l'ombre d'un parasol. L'été était revenu, et pour son premier bain de soleil de l'année, elle avait revêtu un maillot de bain tellement microscopique qu'il aurait sans doute totalement vidé de son sang le vieux maître des tortues s'il avait pu la voir.
Un petit papillon aux ailes roses se posa sur le bord de son verre de soda, et un moustique se mit à tourner autour de son visage. Apparemment ravi du spectacle, l'insecte se posa entre ses seins, et la piqua violemment. Bulma se réveilla immédiatement en poussant un petit cri, et elle entreprit de régler proprement son sort au fautif en le réduisant en poussière.
Calmée, elle s'allongea de nouveau ; mais un bruit attira son attention. Elle releva la tête, et elle ôta ses lunettes de soleil pour fixer le ciel.
Deux points venaient d'apparaître à l'horizon ; ce qui n'était qu'un sifflement aigu dépassant à peine le bruit ambiant devint rapidement un rugissement de tonnerre, alors que les projectiles aériens se transformèrent en deux silhouettes entourées d'une aura brillante qu'elle ne connaissait que trop bien. Tour à tour, Goten et Gokuu se posèrent -- ou plutôt ils percutèrent le sol, sans prendre la peine de réduire leur vitesse. Ils creusèrent chacun deux traînées profondes dans la pelouse soigneusement entretenue, pour amortir leur élan, en projetant un nuage de terre et de poussière devant eux. Bulma poussa un cri strident en voyant les deux Saiyens s'approcher dangereusement d'elle. Mais elle fut littéralement projetée en arrière avec le parasol, le verre de soda et la chaise, par le puissant souffle d'air dégagé par les deux arrivants. Elle criait toujours lorsqu'elle s'écrasa dans un massif de fleurs, avec un bruit sourd.
"Gagné !" hurla Goten, en sautant de joie, un poing tendu vers le ciel. A côté de lui, son père croisa les bras en soufflant pour reprendre sa respiration. Il sortit du mini-cratère qu'il avait creusé, et se mit à épousseter soigneusement ses bottes tachées.
Bulma se releva soudain, en furie. Elle cracha rapidement la terre qu'elle avait dans la bouche, et tel un démon furieux, se jeta droit sur Gokuu, sans prendre la peine de poser les pieds à terre. Le Saiyen la regarda arriver en haussa légèrement les sourcils. Bulma s'arrêta si près de lui qu'il dut baisser la tête pour la regarder. Elle était crispée, et hurlait des mots totalement incompréhensibles, à pleins poumons. Goten, qui exultait un instant auparavant, inclina la tête de côté pour considérer la scène qui ne manquait pas d'intérêt : dans sa hâte à se relever, Bulma avait oublié de rajuster la bretelle droite de son soutien-gorge, et il avait une vue imprenable sur une bonne partie de son anatomie.
Elle s'arrêta soudain de hurler ; on aurait presque pu voir de la vapeur sortir de ses narines et de ses oreilles tellement elle était rouge de colère. Gokuu et elle se contentaient de se regarder.
Le Saiyen finit par éclater de rire. Il adorait vraiment Bulma lorsqu'elle se mettait dans des états pareils ; ça lui rappelait son enfance. Le visage de cette dernière vira au blanc ; puis elle éclata en sanglots. Bulma tomba à genoux au sol, et deux jets de larmes jaillirent de part et d'autre de son visage. Gokuu cessa de rire. Il ne savait pas ce qu'il avait fait, mais il sentait bien qu'elle n'était pas très contente.
"Allons, Bulma," fit Goten, en s'approchant. Il la souleva par les épaules, et la remit debout. Elle continuait de pleurer, et elle se mit à se frotter les yeux. Puis elle serra les poings, et se mit à marteler furieusement la poitrine de Goten.
"Mais qu'est-ce que vous faites ici ?" demanda t-elle, d'une voix entrecoupée de sanglots. Goten, gêné par la situation -- c'était maintenant tout le haut du maillot de Bulma qui s'effondrait -- se gratta la nuque d'une main.
"On avait décidé de venir vous voir," répondit-il. "Papa voulait faire la course avec moi, et j'ai gagné," annonça t-il fièrement. Bulma faillit s'effondrer de nouveau.
"Mais regardez ce que vous avez fait !" cria t-elle, en se retournant ; la pelouse était saccagée, les arbres couchés, les fleurs arrachées. Un cyclone n'aurait pas fait mieux. "Vous ne pouviez pas aller faire la course dans le désert, non ?" hurla t-elle de nouveau, en se retournant vers Goten. Malgré sa colère, elle remarqua que le regard du jeune homme n'était pas franchement dirigé vers son visage. Elle baissa les yeux, et découvrit ce qui attirait ainsi son attention.
Bulma sursauta, en poussant un nouveau cri strident. Gokuu fit la grimace ; il se moquait qu'elle se brise les cordes vocales, mais qu'elle laisse ses oreilles tranquilles. Elle rajusta vivement son maillot de bain, et se mit à rougir comme une tomate.
"Qu'est-ce qui se passe ici ?"
Ils tournèrent tous la tête vers l'origine de la voix. Végéta arrivait de l'autre côté du bâtiment. Les yeux de Gokuu et Goten faillirent exploser de surprise : l'autre Saiyen était pieds nus, torse nu... en fait, il ne portait qu'un caleçon -- mais d'un air très digne. Il s'arrêta à quelques mètres d'eux, et jeta un regard autour de lui. Rien de très grave.
"Vé -- Végéta," fit Gokuu, sans parvenir à faire remonter sa mâchoire inférieure qui s'était effondrée. L'interpellé tourna la tête vers lui, et haussa un sourcil à sa mine déconfite.
"Quoi ? C'est à moi d'être surpris, Kakarotto, pas le contraire."
"Non," fit l'autre en tendant un doigt vers lui. "C'est -- c'est ta tenue, Végéta."
"Et alors ? Je faisais la sieste au soleil, pas la peine d'en faire tout un --" Il fusilla du regard Goten qui était plié en deux de rire. Le jeune homme reprit rapidement une apparence plus sérieuse, sous le terrible regard noir qui lui était adressé.
"Végéta," fit Bulma, en se jetant sur lui, "regarde ce que ces deux imbéciles ont fait. Le jardinier en a pour deux mois à réparer ça !"
"Kakarotto," fit-il, en croisant les bras sur sa poitrine, "j'espère que tu as une bonne excuse. Tout d'abord, peut-on savoir pourquoi tu as subitement décidé de venir nous voir ?"
"Je ne sais pas trop," répondit Gokuu, en secouant la tête de droite à gauche. "J'ai eu comme une intuition, et je me suis dépêché de venir, c'est tout."
Bulma le regarda pendant un petit moment sans comprendre. Puis elle tourna la tête vers Goten, mais ce dernier baissa immédiatement les yeux en direction du sol.
"Je n'en reviens pas," fit-elle, d'une voix faible. "Vous n'êtes pas venus depuis des années, et il faut que vous débarquiez ainsi."
"Salut tout le monde."
Ils tournèrent la tête un à un au son de la voix qu'ils connaissaient tous. A quelques mètres du groupe, Trunks et Lyn venaient d'apparaître, main dans la main. Trunks levait son bras libre en signe de salut, et son amie écarquillait les yeux, étonnée par la scène qu'elle découvrait.
C'en était trop pour Bulma. Tout d'abord sa pelouse et le retour de Gokuu, et enfin celui de Trunks. Elle s'avança lentement vers lui, sans oser y croire. Combien de fois avait-elle souhaité qu'il revienne la voir ? Ne serait-ce que pour avoir le plaisir de l'étrangler, afin de lui faire payer l'insolence qu'il avait eu en les quittant de la sorte pour suivre cette fille. A mille occasions, elle avait rêvé le tenir entre ses mains, pour lui faire subir les pires tortures. Après tout, elle et Lyn n'avaient même pas été officiellement présentées. Mais maintenant qu'il se trouvait là, devant elle, tout ce qu'elle pouvait faire était de le dévisager, tandis que de nouvelles larmes coulaient lentement sur ses joues.
Trunks les vit, et s'approcha lentement d'elle. Puis il lâcha la main de Lyn, prit Bulma entre ses bras, et celle-ci enfouit sa tête contre sa poitrine. Tout en tenant fermement sa mère contre lui, il releva la tête. Gokuu agitait furieusement les mains en faisant une grimace simiesque pour lui souhaiter la bienvenue, tandis que Goten avait levé une main pour le saluer, d'un air rayonnant. Quant à son père --
"Papa," fit Trunks, d'une voix totalement neutre, "je remarque que ta tenue vestimentaire va en se dégradant au cours du temps." Végéta écarquilla brièvement les yeux, puis se rembrunit aussitôt. Il décroisa rapidement les bras, et serra les poings. Ses biceps augmentèrent légèrement de volume.
"Arrêtez de me faire ce genre de remarques !" cria t-il. "Je m'habille comme je veux, je suis chez moi !" Il ignora Gokuu et Goten qui se mettaient à pouffer de rire, pour se tourner vers Lyn, qui souriait de toutes ses dents. Il tendit un bras vers elle, d'un air méprisant, tandis que Bulma séchait ses larmes d'émotion.
"Encore vivante ?" demanda t-il. "Qu'est-ce que vous venez faire ici ?" Lyn cessa de rire, pour poser les mains sur ses hanches, et prendre une expression arrogante.
"Hum," fit-elle. "Toujours aussi méchant, celui-là. Je me demande bien comment une brute sans cervelle comme toi a pu avoir un fils aussi beau et intelligent."
Un silence de mort s'abattit sur l'assemblée. Le vent se mit à souffler, emportant quelques pétales de fleurs avec lui. Végéta gardait le silence lui aussi, mais son énergie augmentait rapidement, et de façon inquiétante. Trunks tendit un bras de côté, comme pour empêcher Lyn d'avancer.
"Arrête ça," fit-il, sans quitter son père du regard. "Vous vous raconterez des mots doux plus tard. J'aimerais ne pas avoir à vous séparer."
Lyn afficha son expression la plus espiègle, fit un clin d'oeil à Végéta -- qui faillit en avoir une attaque cardiaque -- et lui tira finalement la langue. Le Saiyen croisa les bras, et se détourna d'un air menaçant.
"Petite peste," grommela t-il entre ses dents.
"Ca a un caleçon vert à pois roses, et ça se permet d'ouvrir la bouche ?" siffla Lyn.
Végéta se retourna brusquement vers elle, les mâchoires serrés, et il contracta ses muscles inconsciemment. Le dégagement d'énergie brûla toute l'herbe dans un rayon de quelques mètres autour de lui.
Il la regarda un moment, puis se détourna de nouveau, et il partit d'un pas décidé en direction du dôme de Capsule Corporation. Le robot d'identification étendit une extrémité dans sa direction juste avant qu'il ne passe la porte ; dans un mouvement trop rapide pour être visible, il fit exploser la malheureuse machine, avant de disparaître dans le bâtiment.
"Il est vraiment fâché," fit remarquer Bulma, qui croyait à peine ce qu'elle voyait. Gokuu et Goten acquiescèrent vivement.
"Encore plus aimable que dans mon souvenir, ton père," déclara Lyn, qui semblait très satisfaite d'elle. Trunks tourna la tête vers elle, et lui sourit.
"Tu sais que tu es odieuse, toi." Pour toute réponse, elle se contenta d'un sourire.
"Trunks ?"
Bra émergea de la porte par laquelle Végéta venait de disparaître, en courant. Elle portait une jupe courte et un T-shirt à son nom, et Trunks était surpris par la ressemblance avec sa mère. Mis à part quelques détails, elles avaient la même apparence. Il avait oublié que sa soeur aurait grandi en cinq ans.
Elle lui sauta au cou, et Trunks fut presque renversé par son élan.
Bra finit par calmer son élan d'affection, et laissa son frère respirer. Ce dernier remarquait que tout le monde regardait vers le ciel.
"Qui est-ce ?" demanda t-il, en posant une main en visière devant ses yeux pour mieux voir la frêle silhouette qui avançait lentement dans leur direction. Il ne parvenait pas à reconnaître l'énergie qui se dégageait de cette présence. Il fronça les sourcils. Erreur. De ces deux présences.
"Hana," répondit Goten, en croisant les bras sur son torse.
"Et Tess," acheva Gokuu, en l'imitant à son tour. "Elle a tenu à nous suivre, à son rythme."
Une étrange sensation envahissait Trunks. Il reconnaissait bien le ki d'Hana, mais pas celui de la personne qui l'accompagnait. De plus, la seconde énergie était bien trop faible pour qu'il s'agisse d'un adulte. Ce qui voulait dire que --
"Qui -- qui est Tess ?" demanda t-il, mal à l'aise, en se tournant vers Goten. Ce dernier se mit à se frotter frénétiquement la nuque d'une main, en éclatant de rire.
"Ma fille," répondit-il, d'un air innocent, en échangeant un sourire avec son père.
***
Hana se posa au sol, les traits tirés. Elle haletait pour retrouver son souffle. Trunks sourit en apercevant la petite figure rose du bébé qu'elle tenait dans ses bras. La petite fille avait apparemment apprécié le vol, et en redemandait dans son gazouillis balbutiant.
"Vous allez trop vite," fit Hana, en s'avançant vers Goten. Trunks et Lyn s'approchèrent, et sourirent à l'enfant. "Impossible de vous suivre."
"On t'avait prévenu," répondit Goten. "Mais tu es têtue. Tu n'aurais pas pu venir en avion, non ?"
"Ah non," répliqua sèchement Hana. "Je ne suis pas si faible que tu le penses." Goten et Trunks échangèrent un regard complice.
"Comme elle est jolie !" s'exclama Lyn, qui tenait à peine en place. Elle regarda Hana, et lui fit une moue implorante. "Je peux la prendre ?"
"Avec joie," répondit-elle, en lui tendant le bébé. Lyn la souleva délicatement, en lui souriant largement. La petite fille éclata de rire.
"Oh mon Dieu," fit soudain Lyn, en écarquillant les yeux. "Mais -- mais qu'est-ce que c'est ?" Goten, Hana et Trunks éclatèrent de rire. La petite queue poilue du bébé s'était enroulée autour du poignet de la fée.
"Ne t'inquiète pas," fit Trunks. "C'est de famille. Je suppose que le nôtre en aura une aussi."
"Pardon ?" s'exclamèrent en coeur les autres. Gokuu se transposa immédiatement derrière Bulma qui venait de s'évanouir. Il la rattrapa et la posa dans l'herbe, sans savoir quoi faire. Trunks rougit jusqu'à la pointe des oreilles.
"Hem -- c'est à dire --" Il ne pouvait plus trouver ses mots. Gokuu s'était mis à tapoter les joues de Bulma pour la ranimer.
"Tu vas être papa toi aussi ?" demanda Goten, émerveillé. Trunks acquiesça, et regarda Lyn. Celle-ci prit Tess dans un bras, et posa son autre main sur son ventre, en souriant.
"Et -- c'est pour quand ?" demanda Bulma, qui venait de rouvrir les yeux.
"Aucune idée," répondit Trunks, en secouant la tête. "Même Lyn ne sait pas."
Bulma referma les yeux, et Gokuu crut un moment qu'elle s'était évanouie de nouveau. Mais elle finit par serelever de ses propres moyens.
"En tout cas," continua Lyn, "ce sera une fille."
"Ne l'écoutez pas," fit Trunks, en levant les yeux au ciel. "C'est un garçon, j'en suis sûr."
***
Tess avançait lentement, à quatre pattes sur le tapis blanc du salon, sous le regard amusé de Bulma, Lyn, Hana et Bra. Trunks et Goten avaient filé droit en direction de la salle de gravité dès qu'ils en avaient eu l'occasion, et Gokuu parcourait les couloirs du grand bâtiment de Capsule Corporation à la recherche de Végéta.
Le bébé passa à côté d'une table basse, et sa queue s'enroula instinctivement autour d'un pied de verre. Etonnée, la fillette se retourna pour voir ce qui l'empêchait d'avancer.
"Alors," fit Bulma, en entrant dans la salle. Elle ramenait plusieurs verres pleins sur un plateau. "Est-ce que Trunks se comporte bien avec toi, au moins ?" demanda t-elle, en posant le plateau sur la table à laquelle Tess était accrochée. Elle se baissa, et déroula l'appendice poilu. Libérée, la petite fille éclata de rire, et continua sa lente exploration du salon.
Bulma se redressa, et tendit un verre à Lyn ; celle-ci l'accepta, et but une gorgée avant de répondre.
"Oh oui," fit-elle, avec un sourire indéchiffrable. "Il n'a pas le temps de s'ennuyer non plus, ne vous en faites pas."
"Je suis un peu déçue qu'il ne vienne pas nous voir plus souvent," continua Bulma, en s'asseyant sur le grand divan. "Mais j'ai fini par accepter qu'il mène sa vie comme il l'entend."
"Il n'est pas malheureux du tout," fit Lyn. "Il tenait à revenir ici pour vous rendre visite, et je vois que ça valait la peine."
"Tess, non !" Hana se leva précipitamment ; l'enfant venait de rencontrer un chat roulé en boule sur un coussin, et elle riait en lui tirant les moustaches. L'animal, débonnaire, se laissait faire sans protester. Hana se baissa, et jeta un regard menaçant à sa fille. Celle-ci cessa immédiatement de martyriser le félin, et elle reprit sa progression à la recherche d'une activité moins répréhensible. Hana retourna à sa place auprès des autres.
"J'espère que tu auras moins de problèmes avec le tien," fit-elle en passant près de Lyn. "Les enfants Saiyens semblent pour avoir seul et unique but de manger ou casser tout ce qui les entoure."
"Ma fille sera une vraie peste," déclara Lyn, en souriant fièrement. "Comme moi."
"Ca promet," fit Hana, en lui rendant son sourire. "Trunks va devenir fou."
"Bien fait pour lui," fit Bulma, en avalant son verre d'un seul coup. Les autres se mirent à pouffer de rire.
***
Le hurlement aurait fait écrouler le bâtiment tout entier si les parois n'avaient été parfaitement insonorisées. Enfin libéré de toutes les contraintes, Trunks laissait son énergie couler librement le long de ses membres. La sensation était puissante et exaltante. Il dépassa le niveau deux dans une explosion de lumière aveuglante ; il avait presque oublié le sentiment de toute-puissance qui s'emparait de lui lorsque ses muscles se dilataient, lorsque ses cheveux se dressaient sur sa tête comme des flammes. Son énergie, trop longtemps contenue en lui, se pressait maintenant vers l'extérieur dans un rugissement qui faisait vibrer toute la structure de la salle.
"Tu n'as vraiment plus l'occasion de t'entraîner sur la planète de l'Eternel ?" demanda Goten, qui rattrapait rapidement le niveau de son ami. Trunks secoua la tête.
"On n'a pas le droit de se battre là-bas," répondit-il. "C'est un lieu de paix et de calme ; tu comprends qu'il me tardait de revenir ici." Son ami acquiesça.
"Cette nouvelle salle est formidable," constata Trunks, en regardant autour de lui.
"Ta mère l'a construite dès notre retour sur Terre," lui rappela Goten. "Elle a beaucoup plus de puissance que la précédente."
"Gravité 700g !" ordonna Trunks. Immédiatement, le système de contrôle fit en sorte d'ajuster l'accélération de façon à atteindre la nouvelle consigne. Goten poussa une exclamation.
"Attends !" fit-il. Trop tard. Il poussa son propre cri de guerre, et fit rapidement augmenter son énergie, pour ne pas être écrasé par la force d'attraction. La coupole de la salle, soumise à des contraintes phénoménales, adapta insensiblement sa forme pour supporter son propre poids. "Je ne suis pas habitué à une telle gravité !" cria Goten, qui luttait pour ne pas tomber à genoux. Trunks sourit.
"Pas de problèmes," fit-il. Et il laissa sa puissance prendre le relais. Son énergie se mit rapidement à augmenter, tandis que Goten l'imitait. Les corps des deux Saiyens se modifièrent lentement pour atteindre une forme plus parfaite, plus apte à accueillir leur nouvelle puissance. Leurs ki disparurent simultanément lorsqu'ils atteignirent le niveau Ultime du Super Saiyen. Mais leur énergie interne n'en était que plus importante.
"Alors," fit Trunks, en baissant lentement son regard vers son ami ; il avait l'impression de se regarder dans un miroir : Goten avait les mêmes cheveux blancs et tendus vers l'arrière de sa tête, la même expression d'extase contenue sur le visage. "C'est si difficile que ça ?"
"Tu plaisantes ?" A leur niveau de puissance, la gravité n'avait plus aucune importance. Ils ressentaient le même besoin impérieux de laisser leurs corps s'exprimer, pour goûter au délicieux frisson du danger, au plaisir capiteux de leur invincibilité. Leurs gènes Saiyens reprenaient le dessus, exigeaient d'eux qu'ils atteignent leurs limites, pour les repousser encore et toujours plus loin.
"Prêt ?" demanda Trunks, en se mettant en position d'attaque. Les yeux de Goten se fixèrent sur lui. Une série d'éclairs blancs descendit le long de ses bras, et ils disparurent simultanément.
***
Les verres tremblaient légèrement sur la table. Ils s'entrechoquaient parfois, en émettant de légers tintements.
"C'est parti," fit Bra. "Ils vont surchauffer le système d'amortissement des vibrations, s'ils continuent à ce rythme." Bulma sourit ; elle ne s'inquiétait pas autant que sa fille en ce qui concernait la solidité de la salle d'entraînement.
"De vrais gamins," commenta Hana, en secouant la tête.
"C'est normal," fit Lyn. "Il faut bien les laisser s'amuser de temps en temps."
"Leurs jouets coûtent cher," protesta Bulma. "Il m'a fallu un budget équivalent à celui de plusieurs états pour la mettre au point."
"Détail," répliqua Lyn. "Trunks ne peut pas s'entraîner sur notre petite planète. Et je suppose que la Terre ne survivrait pas non plus très longtemps à leurs jeux."
"Moi," fit Bra, "je me demande où est passé papa. Quand je suis venu vous rejoindre dehors tout à l'heure, il n'avait pas l'air très content." Bulma et Lyn sourirent.
"Oh, regardez !" s'exclama Hana, qui s'était mise à la recherche de Tess ; sa fille avait fini par rejoindre le chat sur son coussin. Elle s'était roulée en boule auprès de l'animal, qui avait même posé une patte sur son petit bras. Leurs queues ondulaient, et s'enroulaient l'une autour de l'autre dans leur sommeil.
***
"Ah, je t'ai enfin retrouvé !"
Gokuu franchit la porte de la chambre de Végéta et Bulma, au second étage du grand bâtiment. Il n'avait pas eu trop de mal à localiser l'autre Saiyen : il ne prenait même pas la précaution de cacher son énergie.
"Bravo," fit l'autre. Gokuu put constater qu'il avait revêtu un pantalon de toile et une chemise, et il inclina la tête d'un air approbateur ; pour quelqu'un qui se disait Prince, il valait mieux être habillé correctement. Végéta fouillait maintenant dans la garde-robe de Bulma. Il en retira une robe de chambre qui parut lui plaire, et il la prit avec lui en quittant la pièce. Gokuu le suivit.
"Pour cette fille," fit-il, "je ne crois pas qu'elle te déteste vraiment, tu sais."
"Kakarotto," répliqua Végéta, déjà énervé, "je te remercie de t'occuper de la qualité de mes relations avec les autres. Mais je me débrouillerai bien tout seul."
"Comme tu veux."
Un petit moment plus tard, ils débouchèrent dans le salon. Lyn sursauta d'un air faussement effrayé en apercevant Végéta, qui ne lui prêta pas la moindre attention. Puis elle lui fit les gros yeux, et posa un doigt sur sa bouche pour lui faire signe de se taire, en lui montrant du doigt le bébé endormi aux côtés du chat. Végéta considéra la scène un instant, puis se plaqua une main sur le front d'un air désespéré, en secouant lentement la tête de droite à gauche.
"Tiens," fit-il, en lançant à Bulma le vêtement qu'il lui avait ramené. Elle déplia la robe de chambre, et baissa les yeux ; elle était encore en maillot de bain.
"Pour que ce cher Kakarotto ne se vide pas totalement de son sang," expliqua t-il d'un air railleur. Gokuu sourit, en passant une main sur sa nuque. Bulma enfila le vêtement avec hâte. Elle en avait vraiment marre de tous ces obsédés parmi lesquels elle vivait.
Végéta alla s'asseoir dans un fauteuil près d'une fenêtre, et Gokuu s'assit à même le sol, près de sa petite fille à laquelle il se mit à sourire.
Lyn se leva, s'étira, et s'approcha de la grande baie vitrée sous le regard pesant de Végéta. Elle croisa les bras, et considéra un moment le paysage qui s'offrait à elle.
"Jolie planète, la Terre," fit-elle. "Un peu trop de monde à mon goût, cependant. Qu'est-ce que tu en penses, Végéta ?"
Le Saiyen croisa les mains sous son menton. Si elle voulait jouer, elle allait être servie.
"Les humains ne m'intéressent pas trop," répondit-il.
"Végéta," commença Bulma, sur un ton de reproche. "Essaie de rester poli, tout de même." Il jeta un coup d'oeil dans sa direction, et le regretta aussitôt. Lyn en avait profité pour se glisser derrière lui. Elle s'était accoudée au dos du fauteuil, et passait maintenant un doigt dans ses cheveux.
"C'est amusant," fit-elle. "Cette coupe de cheveux. C'est naturel ou tu utilises un produit pour les faire tenir comme ça ?"
Le Saiyen se força à conserver son calme. Inutile de s'énerver, elle ne méritait même pas que l'on s'intéresse à elle.
"Je me demande si ma petite fille va te ressembler," continuait la fée. "J'espère bien que non, tu es vraiment moche."
Du calme. Elle veut simplement une réaction.
Lyn vint s'asseoir sur l'accoudoir du siège, et continua de passer sa main dans ses cheveux.
"Végéta," fit Gokuu, en se retenant pour ne pas éclater de rire, "respire. Tu es tout rouge." C'était la goutte qui fit déborder le vase.
"Imbécile !" cria Végéta, en se levant brusquement. Lyn s'écarta vivement de lui. "Tu crois que c'est facile de ne pas lui taper dessus, à cette petite vipère ?"
"Tais-toi," fit l'autre Saiyen, en lui faisant signe de baisser la voix. "Tu vas réveiller la petite."
"Quelle fougue," fit soudain Lyn, en s'approchant de lui. Elle leva une main, et la passa sur l'arrière de sa tête. Elle lui gratta doucement la nuque. "Encore plus impulsif que Trunks."
Continue comme ça et je peux te garantir que --
"Végéta !" C'était Bulma, qui n'avait pas l'air contente du tout. Elle avait croisé les bras sur sa poitrine, et le regardait d'un air menaçant. "Veux-tu bien m'expliquer ce que tu es en train de faire avec elle ?" Bra et Hana étaient en train de mourir de rire.
Il leva de nouveau les yeux au ciel, en menaçant intérieurement Dunde de représailles éternelles si cette fille ne disparaissait pas à l'instant de chez lui.
***
"Vous voulez vraiment partir si tôt ?" Bulma en avait presque les larmes aux yeux. Son fils n'était revenu que pour se battre, elle n'avait pas eu le temps de le voir. Ils étaient de nouveau à l'extérieur, sous la lumière rougeoyante du soleil couchant. Elle jeta un regard à sa pelouse massacrée pour se distraire momentanément l'esprit. Après tout, elle avait exagéré l'ampleur des dégâts au départ : les robots avaient presque fini de remettre le gazon en état. Dès le lendemain, il n'y aurait plus aucune trace.
"C'était super," fit Trunks, en lançant un clin d'oeil à Goten. Ce dernier avait passé un bras autour de la taille d'Hana, qui tenait elle-même Tess endormie contre elle. Goten lui renvoya un signe en V de l'index et du majeur.
"Reviens nous voir avant qu'on soit morts," continua Bulma. "Sinon je te jure qu'une fois dans l'Autre Monde, je viens te tuer moi-même."
"Promis, maman," fit Trunks, en s'avançant pour l'embrasser. Bulma lutta pour ne pas laisser ses émotions prendre le dessus. Bra s'avança, pour saluer elle aussi son frère.
"A plus tard tout le monde," fit-il, avec un grand geste de la main. Gokuu le lui rendit avec un large sourire. Trunks se tourna vers Lyn, mais celle-ci le regardait d'un air qu'il ne connaissait que trop bien ; elle avait une idée derrière la tête.
"Un instant," fit-elle. "Une dernière chose à faire."
"Quoi donc ?" demanda t-il. Sans un mot de plus, elle disparût. Un grognement de surprise retentit, et ils se retournèrent tous pour la voir coller ses lèvres à celles de Végéta, puis l'embrasser sans retenue pendant de longues secondes. Le Saiyen faillit en tomber à la renverse.
"Sans rancune," fit-elle, avec un petit clin d'oeil. Avant qu'il ne puisse réagir, Lyn avait rejoint Trunks.
"Végéta !" hurla Bulma. "Tu vas devoir t'expliquer, je te le jure !"
Tandis que les autres explosaient de rire, Lyn et Trunks rejoignirent leur monde.
- Fin -