Chapitre 12 : Dead Zone
« Laissez l’Empereur et moi réglez ça seuls. Allez-vous en ! »
La déclaration soudaine de Ithaxus fit relever les yeux du nihilien. Les créatures qui les observaient depuis tout à l’heure ne paraissaient pas surprise en revanche. Prenant le chemin le plus éloigné de Kalta, elles filèrent toutes vers les portes ouvertes de la salle de commande, allant se répandre dans le vaisseau. Toutes, sauf l’immense gargouille qui gardait la carte stellaire. Et Ithaxus lui-même évidemment.
Kalta laissa faire, trop heureux d’avoir un moment de répit ; la douleur commençait à peine à se calmer. L’Empereur gardait l’oeil sur son adversaire, mais il se concentrait sur lui-même. Se transformer était hors de question : cela prendrait trop de temps et Ithaxus en profiterait pour lui porter un coup fatal. Mais il y avait autre chose qu’il pouvait faire, plus discrètement. Prenant une inspiration, Kalta tenta de trouver le calme dans la tempête d’effort qui agitait encore son corps. Il fouilla pour trouver chaque muscle et les détendre un par un, il baissa sa force et orienta chaque fibre de son être, non pour être puissant, mais dans un seul objectif : être le plus rapide.
Puis, il retrouva l’énergie qu’il lui restait. Comme une sphère brillante autour de lui, Kalta l’attrapa et la forgea lentement, la concentrant le long de son bras, puis de son avant-bras, pour former une lame.
« Prêt, votre Majesté ? »
Le nihilien étrécit les yeux et disparut dans un grésillement.
Il réapparut devant Ithaxus et put voir les pupilles de son ennemi s’écarquiller. Celui-ci tenta bien de reculer, mais Kalta avait été trop rapide. La lame traversa le torse du monstre, formant une croix parfaite avec la ligne de suture déjà présente. Une fois de plus, il n’entendit pas de cri de douleur, ou même de réaction particulière. Son adversaire avait réagit assez vite pour ne pas être coupé en deux, mais son torse était ouvert sur toute sa largeur, un liquide noir et épais s’écoulant de l’énorme plaie.
« Ahahahah ! Joli coup ! »
Le nihilien était encore dans son mouvement, sa vitesse lui donnait l’impression de voir les choses au ralenti. Ithaxus tendit le bras qu’il lui restait vers lui. Déjà, l’Empereur reculait hors de portée. Soudain, la créature accéléra. Kalta n’eut que le temps de se décaler, mais ce n’était pas assez rapide.
Les serres se plantèrent dans son épaule, avant de le planter violemment contre un mur de métal. Un rire échappa de nouveau à Ithaxus. Kalta planta son autre poing dans le torse sanglant, mais le choc fit à peine bouger son ennemi. Il était rapide, mais plus assez puissant pour lui faire mal. Le démon se fendit d’un sourire terrifiant et lâcha son épaule, pour frapper une fois de plus, broyant le bras de Kalta contre le métal.
Le nihilien poussa un cri de douleur et de surprise mêlées. Il concentra son énergie dans son bras pour tenter une riposte, mais aperçu soudain quelque chose. Les serres du démon s’étaient étirée, une lueur blanche brillant déjà entre elles, de plus en plus intense. Kalta pouvait sentir toute la force qu’il mettait dans la prochaine déflagration. Bien assez pour le tuer.
Comme prévu.
En prévision du tir, il pencha la tête pour éviter. Au moment où Ithaxus allait tout lâcher, sa queue s’enroula autour de son bras et ils disparurent tous les deux dans un grésillement.
Ils réapparurent devant l’énorme gargouille. Le bras de Ithaxus dans sa direction, il n’eut que le temps de crier.
« NON ! »
Le tir traversa le torse de la créature, comme si ce n’était rien, et continua à travers la carte stellaire, jusqu’à la coque du vaisseau impérial. Le métal résista l’espace d’un seconde avant de se plier comme du papier.
Le froid de l’espace envahit l’ancienne salle des commandes.
Rien ne pouvait résister à la Dead Zone. Garlic Jr. le savait et il le vérifiait chaque fois qu’il invoquait cette puissance technique. Ici, elle devenait redoutable.
La gigantesque station spatiale était conçue pour résister à beaucoup de chose mais certainement pas à un mini trou noir se formant en son coeur. Les couloirs n’avaient pas résistés plus de quelques secondes et des pans entiers flottaient maintenant dans l’espace pour aller se perdre dans la dimension parallèle.
La spirale infernale avait pris de plus en plus d’ampleur, grandissant à mesure qu’elle avalait des éléments. Plaques de métal, appareils complexes, morceaux entiers de couloirs… Cadavres, bien évidemment. Le noir et le froid de l’espace était maintenant tout autour d’eux, créant la panique chez les impériaux survivants.
Ils flottaient dans le vide, pourtant Garlic sentait encore une poigne ferme sur sa jambe. La jeune guerrière était toujours là, un masque noir recouvrant dorénavant son visage, lui permettant peut-être de respirer. Le démon poussa un hurlement de rage, parfaitement silencieux dans le froid de l’espace, avant de déployer de nouveau son aura.
Il sentait le froid s’infiltrer sous sa peau, paralysant ses muscles et menaçant de le briser entièrement. Seule son énergie lui permettait de repousser la violence du vide, mais cela n’allait pas durer. Son corps gagna soudainement plusieurs mètres, ses muscles se déployant comme des ballons. Il ne parvint pas à frapper l’impériale, mais le choc la fit reculer. C’est tout ce dont il avait besoin.
Elle faisait son possible pour ne pas être emportée dans la spirale. Lui n’avait pas cette peur.
Avec un grand rire, tout aussi silencieux, Garlic se laissa emporter et, pour la première fois de sa vie, il accueillit les innombrables souffrances de la Dead Zone avec plaisir.
Elle avait d’abord cru à une technique de son adversaire quand elle avait vu leur environnement se disloquer sous ses yeux. Après tout, avec la puissance que cette Resheph avait prouvé avoir, elle aurait sans doute été capable d’attaques pareilles. D’autant que, lorsque cela commença, elle vit distinctement les lèvres de papier de la créature s’ouvrirent pour lâcher un grand rire. Un son que la saïyenne ne pouvait pas entendre, car les sons disparaissaient déjà à ce moment-là.
Son masque s’était déployé autour de son visage, lui permettant de respirer, et de ne pas ressentir le froid de l’espace au moins en ce point là. Non qu’elle en avait vraiment besoin pour le froid. Son aura de super saïyenne était déployée autour d’elle depuis un moment maintenant. Elle s’en servait pour arrêter les attaques d’Resheph, et maintenant cette énergie la protégeait du vide lui-même.
Les longs couloirs qui constituaient la station spatiale commençaient à se rompre, mais ils maintenaient encore assez d’intégrité pour que Bra se repère dans l’espace. Elle vit Resheph lui tourner brusquement le dos pour filer, loin du point où tous les objets étaient maintenant attirés. Bra fonça à sa poursuite et referma sa main sur sa jambe.
La créature se retourna avec un sourire mauvais. Déjà, les bandelettes se déployaient autour d’elle, prête à se jeter sur la saïyenne. Elle lâcha prise, se préparant déjà à les repousser, mais les bandelettes ne se dirigeaient pas vers elle. Bra fixait Resheph, réfléchissant à son meilleur angle d’attaque : elle n’avait pas l’habitude de se battre dans ces conditions. Elle n’eut pas le temps de trouver.
Les bandelettes s’étaient étendus vers la droite de la créature et se rabattirent d’un coup vers Bra, mais ce n’était pas une attaque. Elles s’étaient accrochés à un énorme morceau de métal qui flottait dans l’espace. Bra eut juste le temps de se préparer à l’impact. Le débris de couloir la percuta de plein fouet, pliant sous la puissance de la super saïyenne mais l’emportant malgré tout. L’instant d’après, elle fit Resheph fondre sur elle, le visage déchirée par un sourire beaucoup trop grand.
Sous son masque, Bra poussa un hurlement. Les flammes dorées explosèrent autour d’elle, détruisant le métal et les bandelettes qui filaient autour d’elle. Resheph ne ralentit même pas. Son poing s’enfonça dans la joue de la super saïyenne, mais Bra ne bougea pas d’un millimètre. Elle replia les deux bras le long de son corps, puis frappa, l’un après l’autre. D’une main, elle repoussa les bras de la créature. De l’autre, elle attrapa sa gorge et ramena la démone près d’elle.
Resheph paraissait hilare, les billes noires de ses yeux regardant derrière Bra. Puis, ses bandelettes s’écartèrent encore sur son sourire terrifiant et elle ouvrit grand la bouche, un liquide noire s’échappant. Bra recula la tête, mais trop tard. Quelque chose toucha son masque et un sifflement aigu retentit dans son oreille. Par réflexe, elle lâcha la gorge de Resheph. C’est là qu’elle sentit les deux pieds de la créature se poser sur son torse et appuyer violemment. Elle fut repoussé en arrière, pendant que son adversaire filait dans l’autre direction.
La jeune femme n’osa pas porter la main à son masque mais à l’étrange fumée qui se diffusait autour du métal, elle comprit. De l’acide. Le bip était là pour l’avertir que sa protection était en train de faiblir. Elle ne pouvait rien faire, sinon observer Resheph, qui s’éloignait déjà. Le sifflement s’interrompit et elle pouvait toujours respirer. Elle en profita pour jeter un regard derrière elle.
L’intersection où elles combattaient depuis un moment n’était plus. Les cadavres de dizaines de créatures filaient maintenant vers une spirale rougeoyante qui prenait de plus en plus dans l’espace. Mais ce n’était pas ça qui faisait rire son adversaire : Anik avait brusquement rebrousser chemin pour se lancer au secours de ses collègues. Les commandos impériaux luttaient contre l’attraction exercée par la spirale. Et c’est là que Bra la vit. Une armure noire, apparemment inanimée, qui flottait vers le trou noir qui aspirait tout autour de lui.
Sans réfléchir, la saïyenne fit exploser son aura autour d’elle et fila dans la direction de ses amies. Elle ne pouvait la voir, mais elle sentait Resheph filer loin d’ici. Tant pis pour elle.
En se rapprochant, elle ressentit brusquement l’attrait exercé par l’immense spirale, qui ne semblait capable que de grandir et absorber ce qui passait à sa portée. Bra dut forcer pour maintenir sa trajectoire sans être tirée dans cette direction. Quelle que soit l’origine de cette chose, elle ne voulait pas savoir ce qui se passait à l’intérieur. Pour l’heure, elle n’était concentrée que sur une seule chose : Persée.
La chasseuse de prime devait être encore inconsciente, car l’armure ne faisait aucun effort pour se soustraire à la gravité, filant à toute vitesse vers le centre de la spirale, et Bra n'arrivait pas à sentir la moindre énergie émergeant d’elle.
Tirant dans ses réserves, la super saïyenne traversa l’espace qui la séparait d’elle, slalomant entre les débris pendant un moment avant de décider qu’elle n’avait pas de temps à perdre. C’est donc en traversant un pan de mur emporté qu’elle rejoint enfin l’armure et l’attrapa fermement par le bras. Elle sentit le corps inanimé se stopper brutalement dans sa course, tirant sur son bras avec une force qu’elle n’avait pas anticipé. Mais rien pour une super saïyenne comme elle.
Dans le nuage de débris qui filaient vers la spirale, Bra se stabilisa comme elle le pouvait. Elle avait les yeux grand ouverts à la recherche des autres, mais c’était surtout sa perception des énergies qu’elle mettait au travail. Pas facile dans une situation aussi chaotique. Esquivant un immense tuyau de métal, Bra les vit enfin.
Anik et Varidal étaient au même endroit, chacun tenant une jambe de ce qui ressemblait fortement à Tao Paï Paï. Anik parvenait pour le moment à déployer assez de force pour résister à la spirale. Mais cela voulait aussi dire qu’il manquait quelqu’un. Aidan était plus loin. Beaucoup plus loin.
Bra la vit, à moins de dix mètres du centre de la spirale. Elle volait de débris en débris, usant de toute sa force pour s’éloigner, mais sans faire de progrès significatifs. La saïyenne ne réfléchit pas plus d’une seconde. Amenant ses doigts sur son front, elle se concentra sur l'énergie de la commando d'élite et disparut.
Réapparaissant près d’Aidan, elle lui tendit aussitôt la main. Passé le premier instant de surprise, la commando impériale referma violemment ses doigts autour de son poignet. Soudain la puissance de la spirale les frappa de plein fouet. Elle vit ses cheveux se diriger droit vers elle, son corps entier tirant dans la même direction. Elle pouvait même sentir sa peau s’étirer insensiblement vers la spirale, ne désirant que disparaître à l’intérieur.
Bra elle-même se sentit partir pendant une seconde avant de faire exploser son énergie autour d’elle dans un réflexe désespéré. Les débris divers formèrent une étrange vague, esquivant la saïyenne comme si elle avait une bulle protectrice autour d’elle, mais cela ne suffisait pas. Pas longtemps en tout cas.
Tenant toujours Persée et Aidan, elle les sentit glisser vers la spirale, tendant ses bras alors que ses jambes aussi commençaient à être aspirées. Dans la panique, elle ferma les yeux.
Au loin, la puissance de Kalta continuait de se battre. Pas une bonne idée. Anik était tout proche mais la spirale l’avait rattrapé aussi. Il fallait mettre tout le monde à l’abri. Enfin, elle le sentit. Le Rédemption, encore loin d’ici. La salle des commandes et le sergent qui devait assister à tout ça avec des yeux hallucinés.
Bra disparut dans un grésillement.
Supposition confirmée.
Le dénommé Ithaxus flottait dans le vide, face à lui, sans paraître dérangé le moins du monde par l’absence d’air. Oh, il était en colère ; les traits déformés par la rage et les sutures apparemment sur le point de sauter. Mais ce n’était pas du tout la même chose que de lutter pour respirer.
Un rictus moqueur aux lèvres, Kalta se dressa de toute sa hauteur, bras écarté comme une invitation à l’attaquer. L’autre pouvait peut-être survivre dans l’espace, mais pour Kalta c’était bien au-delà de ça. Le froid et le silence du vide spatiale n’était pas un problème pour lui, même pas une gêne. Il se sentait presque chez lui et il savait que ce ne serait pas le cas de son ennemi.
« Fier de vous, votre Majesté ? »
La voix était bien celle de la créature, mais elle le prit totalement par surprise. Face à lui, Ithaxus n’avait pas bougé les lèvres. Il s’était à peine redressé, reprenant progressivement son calme.
La voix résonnait dans sa tête.
« Vous n’abandonnez pas facilement on dirait…
- J’espère que votre carte n’était pas trop importante pour vous, nargua le nihilien. »
La réponse fut sous la forme d’un rire, qui résonna de façon agressive dans l’esprit de Kalta. Il pouvait voir Ithaxus rire face à lui, mais le son ne venait évidemment pas de là. Insupportable.
« Je m’en sortirai. J’espère que vous pourrez faire de même sans votre équipage. »
Le regard de Kalta s’étrécit aussitôt. Il surveillait attentivement Ithaxus depuis tout à l’heure, lui et les débris de sa carte stellaire, mais soudain il se rappela de la présence de la station spatiale, loin d’ici.
Il n’en restait plus que la moitié. Là où le Tartare se tenait il y a encore une minute, une gigantesque spirale était apparue. Elle tournoyait lentement, mais paraissait attirer à elle tout ce qui était dans les environs. Station comprise.
Instinctivement, Kalta se mit à la recherche des énergies de son commando, mais le rire hilare de son adversaire continuait de résonner dans sa tête.
« La ferme !
- Bonne chance ! »
Kalta sentit son adversaire s’éloigner, davantage qu’il ne le vit. Il flottait dans l’espace avec moins de grâce que lui, mais fila rapidement vers le vaisseau qu’ils venaient d’éventrer dans leur combat. Le nihilien était trop concentré pour l’attaquer avant, mais maintenant Ithaxus lui tournait le dos. Déjà, il pouvait imaginer le rayon surgir de son index et rattraper le démon. Tout ce qu’il avait à faire, c’était y mettre un peu plus de force que d’habitude et…
C’est à ce moment qu’il sentit l’énergie d’Anik.
Avec un grognement de frustration qui ne se fit pas entendre dans le vide de l’espace, Kalta disparut dans un grésillement.
« Moteurs au maximum.
- Éloignez-vous de la station, décrochez tout ! »
Le centre de commande du Rédemption était déjà en alerte rouge quand Bra y était réapparue, mais la situation s’était transformée en panique totale. Dans toutes les baies vitrées, on pouvait apercevoir l’énorme spirale et la station se délitant sous la force de l’aspiration. Le vaisseau grinçait sous l’effort combiné des moteurs qui faisaient leur possible pour l’éloigner de la menace évidente.
La saïyenne savait qu’elle ne pouvait pas aider, ne connaissant rien à la façon de piloter un tel vaisseau, mais elle avait envie de leur hurler de se taire, car elle n’arrivait pas à se concentrer.
Depuis qu’elle avait déposé Aidan et Persée, la jeune femme faisait tout son possible pour retrouver l’énergie d’Anik et se concentrer dessus, seul moyen de se téléporter auprès de quelqu’un. Ou en tout cas, le seul moyen enseigné par Kalta.
Enfin, elle la sentit, tellement faible et tellement loin. Elle commença à concentrer dessus, et la force se volatilisa.
« Non ! »
Un grésillement retentit juste à coté d’elle.
Kalta apparut dans les airs, une main refermé sur le bras métallique du lézard. Anik était encore accroché à Tao Paï Paï et, un peu plus loin, Varidal se tenait toujours à la jambe du cyborg. La chaîne de soldat resta suspendue dans les airs quelques instants, juste assez pour que Bra les voit et cligne des yeux. Puis ils retombèrent tous au sol dans un fracas violent. Le commandant de bord hurla en apercevant Kalta. Le chaos n’était que plus total.
« Seigneur Kalta ! »
Puis, comme si leur présence avait donné la motivation nécessaire aux moteurs, le Rédemption s’élança brusquement dans l’espace, s’éloignant à toute vitesse des débris de la station et de l’énorme spirale infernale.
« Stop ! »
L’ordre vint de Kalta et l’équipage s’empressa de stopper tous les moteurs. Le vaisseau s’immobilisa, sans que le même grincement ne retentisse. Ils devaient être hors de portée de cette chose.
L’Empereur avait les yeux fermés, mais elle voyait ses traits se tendre, contrariés.
« Je ne les sens plus. Saïyenne ? »
Comprenant enfin ce qu’il faisait, elle tenta aussi de projeter sa perception bien au-delà de leur position, mais rien ne lui parvenait, pas même la force qu’ils avaient prétendus avoir avant de révéler leurs puissances. Ils se cachaient. Une toux interrompit ses réflexions. Elle arracha son masque à demi fondu, toussant plus fort pour finir de se débarrasser des derniers relents de l’étrange fumée et de l’acide qui le rongeait toujours.
« Je ne les perçois non plus. Ils sont déjà parti dans l’hyperespace ?
- Peut-être. Mais je crois qu’ils peuvent cacher leur énergie.
- Ils maîtrisent bien leur énergie en tout cas. Celle qui… Celle que j’ai affronté savait cacher sa vraie force jusqu’à ce qu’elle en ait besoin. »
Elle toussa une fois de plus. Kalta la regardait, inquiet mais elle lui signe que tout allait bien. Autour d’eux, Bra pouvait sentir les regards insistants de toute la troupe et de l’équipage. Seul le commando devait comprendre exactement de quoi ils parlaient. Plus encore, quand elle observa les soldats, la saïyenne perçu quelque chose dans leur regard qu’elle n’avait pas l’habitude de voir : de la peur. Ce n’est que là qu’elle vit les traits fermés du nihilien. C’était la première fois qu’elle le voyait ainsi depuis longtemps.
« L’artefact ? demanda-t-il d’une voix froide, sans que son regard ne se concentre sur qui que ce soit. »
A l’hésitation notable qui plana sur le commando, Bra connaissait déjà la réponse, mais elle se demandait qui aurait le courage de le dire.
« Perdu, Seigneur Kalta, répondit enfin Aidan. Emportée dans cette spirale.
- Mais on l’a lui ! »
Anik s’était exclamé, se dressant sur ses pattes en levant le corps de Tao avec lui. Le cyborg, amputé d’un bras, émit une brève protestation, mais n’osa visiblement pas aller plus loin.
Les rubis qui constituaient le regard de Kalta brillèrent d’une lueur inquiétante. Il semblait ne prendre conscience de la présence de son ancien soldat que maintenant. Ses traits se détendirent d’un coup, mais son ton ne rassurait pas du tout Bra.
« Excellent, Anik. Amenons-le en salle d’entraînement. Même chose pour l’armure. Nous avons des questions à leur poser. »
L’ancien palais impérial était en pleine effervescence.
Le Responsable des opérations Loppeg avait travaillé longtemps au sein de l’Empire Cold, peut-être plus longtemps que tous les autres soldats présents, et il n’avait pas connu plus de cinq périodes où un tel chaos était possible. Cela dit, depuis la découverte de la planète Terre, devenue Freezer 82, il s’était habitué à attendre une situation d’urgence tous les 4 à 5 ans.
Celle-ci, en revanche, était particulière.
« Nouvelle communication, Monsieur !
- J’ai un signal !
- Attendez, je crois que je comprends quelques mots… »
Des éclats de voix fusaient d’un bout à l’autre du centre de communication. Point névralgique de l’Empire, l’ancien palais servait à recevoir et envoyer des communications d’un bout à l’autre du gigantesque territoire contrôlé par l’Empire Cold. Les conquêtes successives du Roi, de ses deux fils et de son petit-fils avaient étendues les frontières si loin que le genre d’appareillage nécessaire pour maintenir les communications ouvertes pouvaient occuper plusieurs pièces.
D’ordinaire, cela suffisait amplement pour faire passer les messages d’un bout à l’autre de l’Empire. Freezer 82 étant, malgré tous les derniers évènements, la capitale officieuse, il était utile que le centre soit localisé en son sein.
Depuis maintenant plusieurs heures, les messages de détresse se multipliaient dans tout l’Empire, et il était impossible de localiser exactement la provenance de chacun d’entre eux. Tout était brouillé. Les mots devenaient incompréhensibles, la localisation d’origine parfois absurde et la fréquence complètement aléatoire.
Tout ce qu’ils avaient réussis à savoir, c’est que quelque chose était arrivé sur Cold 285, une partie de la flotte était perdue à une armée ennemie, mais ses objectifs ou prochaines cibles étaient encore floues.
Par-dessus tout, on l’avait averti de l’arrivée de Dame Siberia très prochainement, ce qui signifiait qu’ils allaient se ridiculiser devant la veuve du Seigneur Freezer. Intolérable.
« Vaisseau en approche, en bordure du système. »
En parlant du loup.
« Suivez son avancée, prévenez-moi quand il sera prêt à atterrir. »
Le grand insecte parcourut la salle d’une traite, s’arrêtant devant une des consoles retransmettant un message incompréhensible. Il repoussa un peu l’officier y travaillant.
« Essayez ça… Ca devrait nous éclairer un peu et… »
Loppeg n’avait plus la puissance nécessaire pour être un bon soldat, mais il avait travaillé si longtemps au sein de l’Empire qu’utiliser ces appareils était une seconde nature pour lui.
« Administrateur Loppeg ? Pouvez-vous m’expliquer ? »
La voix glacée de l’Impératrice retentit soudainement dans la salle, faisant taire la plupart des techniciens. Abandonnant le sien, Loppeg se redressa d’un coup, ses membres cliquetant quand il se retourna vers elle, inclinant déjà la tête.
La nihilienne était à peine plus grande que son défunt mari, le Seigneur Freezer, quand il n’avait pas encore affronté le super saïyen sur Namek. Elle lui ressemblait aussi, mais n’avait pas de corne : les excroissances osseuses qui entouraient la plaque violacée au sommet de son crâne descendaient vers le bas. Elle paraissait toujours porter une couronne.
« Dame Siberia, nous recevons des communications de tout l’Empire, il est possible que… Vous êtes déjà là ? »
La révélation l’avait frappé au milieu de sa phrase, à sa propre surprise mais aussi celle de la nihilienne, qui fronça les sourcils en levant les yeux vers lui.
« Évidemment que je suis là, nous avons atterri il y a dix minutes. »
Mais alors, le vaisseau en approche.
« Monsieur ! Nous avons une arrivée dans l’atmosphère de Freezer 82, vaisseau impérial mais le code est brouillé ! »
Loppeg n’avait pas besoin du code pour savoir d’où venait l’intrus. C’était un vaisseau impérial. Il venait de Passaros.
Une attaque.
La déclaration soudaine de Ithaxus fit relever les yeux du nihilien. Les créatures qui les observaient depuis tout à l’heure ne paraissaient pas surprise en revanche. Prenant le chemin le plus éloigné de Kalta, elles filèrent toutes vers les portes ouvertes de la salle de commande, allant se répandre dans le vaisseau. Toutes, sauf l’immense gargouille qui gardait la carte stellaire. Et Ithaxus lui-même évidemment.
Kalta laissa faire, trop heureux d’avoir un moment de répit ; la douleur commençait à peine à se calmer. L’Empereur gardait l’oeil sur son adversaire, mais il se concentrait sur lui-même. Se transformer était hors de question : cela prendrait trop de temps et Ithaxus en profiterait pour lui porter un coup fatal. Mais il y avait autre chose qu’il pouvait faire, plus discrètement. Prenant une inspiration, Kalta tenta de trouver le calme dans la tempête d’effort qui agitait encore son corps. Il fouilla pour trouver chaque muscle et les détendre un par un, il baissa sa force et orienta chaque fibre de son être, non pour être puissant, mais dans un seul objectif : être le plus rapide.
Puis, il retrouva l’énergie qu’il lui restait. Comme une sphère brillante autour de lui, Kalta l’attrapa et la forgea lentement, la concentrant le long de son bras, puis de son avant-bras, pour former une lame.
« Prêt, votre Majesté ? »
Le nihilien étrécit les yeux et disparut dans un grésillement.
Il réapparut devant Ithaxus et put voir les pupilles de son ennemi s’écarquiller. Celui-ci tenta bien de reculer, mais Kalta avait été trop rapide. La lame traversa le torse du monstre, formant une croix parfaite avec la ligne de suture déjà présente. Une fois de plus, il n’entendit pas de cri de douleur, ou même de réaction particulière. Son adversaire avait réagit assez vite pour ne pas être coupé en deux, mais son torse était ouvert sur toute sa largeur, un liquide noir et épais s’écoulant de l’énorme plaie.
« Ahahahah ! Joli coup ! »
Le nihilien était encore dans son mouvement, sa vitesse lui donnait l’impression de voir les choses au ralenti. Ithaxus tendit le bras qu’il lui restait vers lui. Déjà, l’Empereur reculait hors de portée. Soudain, la créature accéléra. Kalta n’eut que le temps de se décaler, mais ce n’était pas assez rapide.
Les serres se plantèrent dans son épaule, avant de le planter violemment contre un mur de métal. Un rire échappa de nouveau à Ithaxus. Kalta planta son autre poing dans le torse sanglant, mais le choc fit à peine bouger son ennemi. Il était rapide, mais plus assez puissant pour lui faire mal. Le démon se fendit d’un sourire terrifiant et lâcha son épaule, pour frapper une fois de plus, broyant le bras de Kalta contre le métal.
Le nihilien poussa un cri de douleur et de surprise mêlées. Il concentra son énergie dans son bras pour tenter une riposte, mais aperçu soudain quelque chose. Les serres du démon s’étaient étirée, une lueur blanche brillant déjà entre elles, de plus en plus intense. Kalta pouvait sentir toute la force qu’il mettait dans la prochaine déflagration. Bien assez pour le tuer.
Comme prévu.
En prévision du tir, il pencha la tête pour éviter. Au moment où Ithaxus allait tout lâcher, sa queue s’enroula autour de son bras et ils disparurent tous les deux dans un grésillement.
Ils réapparurent devant l’énorme gargouille. Le bras de Ithaxus dans sa direction, il n’eut que le temps de crier.
« NON ! »
Le tir traversa le torse de la créature, comme si ce n’était rien, et continua à travers la carte stellaire, jusqu’à la coque du vaisseau impérial. Le métal résista l’espace d’un seconde avant de se plier comme du papier.
Le froid de l’espace envahit l’ancienne salle des commandes.
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Rien ne pouvait résister à la Dead Zone. Garlic Jr. le savait et il le vérifiait chaque fois qu’il invoquait cette puissance technique. Ici, elle devenait redoutable.
La gigantesque station spatiale était conçue pour résister à beaucoup de chose mais certainement pas à un mini trou noir se formant en son coeur. Les couloirs n’avaient pas résistés plus de quelques secondes et des pans entiers flottaient maintenant dans l’espace pour aller se perdre dans la dimension parallèle.
La spirale infernale avait pris de plus en plus d’ampleur, grandissant à mesure qu’elle avalait des éléments. Plaques de métal, appareils complexes, morceaux entiers de couloirs… Cadavres, bien évidemment. Le noir et le froid de l’espace était maintenant tout autour d’eux, créant la panique chez les impériaux survivants.
Ils flottaient dans le vide, pourtant Garlic sentait encore une poigne ferme sur sa jambe. La jeune guerrière était toujours là, un masque noir recouvrant dorénavant son visage, lui permettant peut-être de respirer. Le démon poussa un hurlement de rage, parfaitement silencieux dans le froid de l’espace, avant de déployer de nouveau son aura.
Il sentait le froid s’infiltrer sous sa peau, paralysant ses muscles et menaçant de le briser entièrement. Seule son énergie lui permettait de repousser la violence du vide, mais cela n’allait pas durer. Son corps gagna soudainement plusieurs mètres, ses muscles se déployant comme des ballons. Il ne parvint pas à frapper l’impériale, mais le choc la fit reculer. C’est tout ce dont il avait besoin.
Elle faisait son possible pour ne pas être emportée dans la spirale. Lui n’avait pas cette peur.
Avec un grand rire, tout aussi silencieux, Garlic se laissa emporter et, pour la première fois de sa vie, il accueillit les innombrables souffrances de la Dead Zone avec plaisir.
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Elle avait d’abord cru à une technique de son adversaire quand elle avait vu leur environnement se disloquer sous ses yeux. Après tout, avec la puissance que cette Resheph avait prouvé avoir, elle aurait sans doute été capable d’attaques pareilles. D’autant que, lorsque cela commença, elle vit distinctement les lèvres de papier de la créature s’ouvrirent pour lâcher un grand rire. Un son que la saïyenne ne pouvait pas entendre, car les sons disparaissaient déjà à ce moment-là.
Son masque s’était déployé autour de son visage, lui permettant de respirer, et de ne pas ressentir le froid de l’espace au moins en ce point là. Non qu’elle en avait vraiment besoin pour le froid. Son aura de super saïyenne était déployée autour d’elle depuis un moment maintenant. Elle s’en servait pour arrêter les attaques d’Resheph, et maintenant cette énergie la protégeait du vide lui-même.
Les longs couloirs qui constituaient la station spatiale commençaient à se rompre, mais ils maintenaient encore assez d’intégrité pour que Bra se repère dans l’espace. Elle vit Resheph lui tourner brusquement le dos pour filer, loin du point où tous les objets étaient maintenant attirés. Bra fonça à sa poursuite et referma sa main sur sa jambe.
La créature se retourna avec un sourire mauvais. Déjà, les bandelettes se déployaient autour d’elle, prête à se jeter sur la saïyenne. Elle lâcha prise, se préparant déjà à les repousser, mais les bandelettes ne se dirigeaient pas vers elle. Bra fixait Resheph, réfléchissant à son meilleur angle d’attaque : elle n’avait pas l’habitude de se battre dans ces conditions. Elle n’eut pas le temps de trouver.
Les bandelettes s’étaient étendus vers la droite de la créature et se rabattirent d’un coup vers Bra, mais ce n’était pas une attaque. Elles s’étaient accrochés à un énorme morceau de métal qui flottait dans l’espace. Bra eut juste le temps de se préparer à l’impact. Le débris de couloir la percuta de plein fouet, pliant sous la puissance de la super saïyenne mais l’emportant malgré tout. L’instant d’après, elle fit Resheph fondre sur elle, le visage déchirée par un sourire beaucoup trop grand.
Sous son masque, Bra poussa un hurlement. Les flammes dorées explosèrent autour d’elle, détruisant le métal et les bandelettes qui filaient autour d’elle. Resheph ne ralentit même pas. Son poing s’enfonça dans la joue de la super saïyenne, mais Bra ne bougea pas d’un millimètre. Elle replia les deux bras le long de son corps, puis frappa, l’un après l’autre. D’une main, elle repoussa les bras de la créature. De l’autre, elle attrapa sa gorge et ramena la démone près d’elle.
Resheph paraissait hilare, les billes noires de ses yeux regardant derrière Bra. Puis, ses bandelettes s’écartèrent encore sur son sourire terrifiant et elle ouvrit grand la bouche, un liquide noire s’échappant. Bra recula la tête, mais trop tard. Quelque chose toucha son masque et un sifflement aigu retentit dans son oreille. Par réflexe, elle lâcha la gorge de Resheph. C’est là qu’elle sentit les deux pieds de la créature se poser sur son torse et appuyer violemment. Elle fut repoussé en arrière, pendant que son adversaire filait dans l’autre direction.
La jeune femme n’osa pas porter la main à son masque mais à l’étrange fumée qui se diffusait autour du métal, elle comprit. De l’acide. Le bip était là pour l’avertir que sa protection était en train de faiblir. Elle ne pouvait rien faire, sinon observer Resheph, qui s’éloignait déjà. Le sifflement s’interrompit et elle pouvait toujours respirer. Elle en profita pour jeter un regard derrière elle.
L’intersection où elles combattaient depuis un moment n’était plus. Les cadavres de dizaines de créatures filaient maintenant vers une spirale rougeoyante qui prenait de plus en plus dans l’espace. Mais ce n’était pas ça qui faisait rire son adversaire : Anik avait brusquement rebrousser chemin pour se lancer au secours de ses collègues. Les commandos impériaux luttaient contre l’attraction exercée par la spirale. Et c’est là que Bra la vit. Une armure noire, apparemment inanimée, qui flottait vers le trou noir qui aspirait tout autour de lui.
Sans réfléchir, la saïyenne fit exploser son aura autour d’elle et fila dans la direction de ses amies. Elle ne pouvait la voir, mais elle sentait Resheph filer loin d’ici. Tant pis pour elle.
En se rapprochant, elle ressentit brusquement l’attrait exercé par l’immense spirale, qui ne semblait capable que de grandir et absorber ce qui passait à sa portée. Bra dut forcer pour maintenir sa trajectoire sans être tirée dans cette direction. Quelle que soit l’origine de cette chose, elle ne voulait pas savoir ce qui se passait à l’intérieur. Pour l’heure, elle n’était concentrée que sur une seule chose : Persée.
La chasseuse de prime devait être encore inconsciente, car l’armure ne faisait aucun effort pour se soustraire à la gravité, filant à toute vitesse vers le centre de la spirale, et Bra n'arrivait pas à sentir la moindre énergie émergeant d’elle.
Tirant dans ses réserves, la super saïyenne traversa l’espace qui la séparait d’elle, slalomant entre les débris pendant un moment avant de décider qu’elle n’avait pas de temps à perdre. C’est donc en traversant un pan de mur emporté qu’elle rejoint enfin l’armure et l’attrapa fermement par le bras. Elle sentit le corps inanimé se stopper brutalement dans sa course, tirant sur son bras avec une force qu’elle n’avait pas anticipé. Mais rien pour une super saïyenne comme elle.
Dans le nuage de débris qui filaient vers la spirale, Bra se stabilisa comme elle le pouvait. Elle avait les yeux grand ouverts à la recherche des autres, mais c’était surtout sa perception des énergies qu’elle mettait au travail. Pas facile dans une situation aussi chaotique. Esquivant un immense tuyau de métal, Bra les vit enfin.
Anik et Varidal étaient au même endroit, chacun tenant une jambe de ce qui ressemblait fortement à Tao Paï Paï. Anik parvenait pour le moment à déployer assez de force pour résister à la spirale. Mais cela voulait aussi dire qu’il manquait quelqu’un. Aidan était plus loin. Beaucoup plus loin.
Bra la vit, à moins de dix mètres du centre de la spirale. Elle volait de débris en débris, usant de toute sa force pour s’éloigner, mais sans faire de progrès significatifs. La saïyenne ne réfléchit pas plus d’une seconde. Amenant ses doigts sur son front, elle se concentra sur l'énergie de la commando d'élite et disparut.
Réapparaissant près d’Aidan, elle lui tendit aussitôt la main. Passé le premier instant de surprise, la commando impériale referma violemment ses doigts autour de son poignet. Soudain la puissance de la spirale les frappa de plein fouet. Elle vit ses cheveux se diriger droit vers elle, son corps entier tirant dans la même direction. Elle pouvait même sentir sa peau s’étirer insensiblement vers la spirale, ne désirant que disparaître à l’intérieur.
Bra elle-même se sentit partir pendant une seconde avant de faire exploser son énergie autour d’elle dans un réflexe désespéré. Les débris divers formèrent une étrange vague, esquivant la saïyenne comme si elle avait une bulle protectrice autour d’elle, mais cela ne suffisait pas. Pas longtemps en tout cas.
Tenant toujours Persée et Aidan, elle les sentit glisser vers la spirale, tendant ses bras alors que ses jambes aussi commençaient à être aspirées. Dans la panique, elle ferma les yeux.
Au loin, la puissance de Kalta continuait de se battre. Pas une bonne idée. Anik était tout proche mais la spirale l’avait rattrapé aussi. Il fallait mettre tout le monde à l’abri. Enfin, elle le sentit. Le Rédemption, encore loin d’ici. La salle des commandes et le sergent qui devait assister à tout ça avec des yeux hallucinés.
Bra disparut dans un grésillement.
* *
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Supposition confirmée.
Le dénommé Ithaxus flottait dans le vide, face à lui, sans paraître dérangé le moins du monde par l’absence d’air. Oh, il était en colère ; les traits déformés par la rage et les sutures apparemment sur le point de sauter. Mais ce n’était pas du tout la même chose que de lutter pour respirer.
Un rictus moqueur aux lèvres, Kalta se dressa de toute sa hauteur, bras écarté comme une invitation à l’attaquer. L’autre pouvait peut-être survivre dans l’espace, mais pour Kalta c’était bien au-delà de ça. Le froid et le silence du vide spatiale n’était pas un problème pour lui, même pas une gêne. Il se sentait presque chez lui et il savait que ce ne serait pas le cas de son ennemi.
« Fier de vous, votre Majesté ? »
La voix était bien celle de la créature, mais elle le prit totalement par surprise. Face à lui, Ithaxus n’avait pas bougé les lèvres. Il s’était à peine redressé, reprenant progressivement son calme.
La voix résonnait dans sa tête.
« Vous n’abandonnez pas facilement on dirait…
- J’espère que votre carte n’était pas trop importante pour vous, nargua le nihilien. »
La réponse fut sous la forme d’un rire, qui résonna de façon agressive dans l’esprit de Kalta. Il pouvait voir Ithaxus rire face à lui, mais le son ne venait évidemment pas de là. Insupportable.
« Je m’en sortirai. J’espère que vous pourrez faire de même sans votre équipage. »
Le regard de Kalta s’étrécit aussitôt. Il surveillait attentivement Ithaxus depuis tout à l’heure, lui et les débris de sa carte stellaire, mais soudain il se rappela de la présence de la station spatiale, loin d’ici.
Il n’en restait plus que la moitié. Là où le Tartare se tenait il y a encore une minute, une gigantesque spirale était apparue. Elle tournoyait lentement, mais paraissait attirer à elle tout ce qui était dans les environs. Station comprise.
Instinctivement, Kalta se mit à la recherche des énergies de son commando, mais le rire hilare de son adversaire continuait de résonner dans sa tête.
« La ferme !
- Bonne chance ! »
Kalta sentit son adversaire s’éloigner, davantage qu’il ne le vit. Il flottait dans l’espace avec moins de grâce que lui, mais fila rapidement vers le vaisseau qu’ils venaient d’éventrer dans leur combat. Le nihilien était trop concentré pour l’attaquer avant, mais maintenant Ithaxus lui tournait le dos. Déjà, il pouvait imaginer le rayon surgir de son index et rattraper le démon. Tout ce qu’il avait à faire, c’était y mettre un peu plus de force que d’habitude et…
C’est à ce moment qu’il sentit l’énergie d’Anik.
Avec un grognement de frustration qui ne se fit pas entendre dans le vide de l’espace, Kalta disparut dans un grésillement.
* *
*
*
« Moteurs au maximum.
- Éloignez-vous de la station, décrochez tout ! »
Le centre de commande du Rédemption était déjà en alerte rouge quand Bra y était réapparue, mais la situation s’était transformée en panique totale. Dans toutes les baies vitrées, on pouvait apercevoir l’énorme spirale et la station se délitant sous la force de l’aspiration. Le vaisseau grinçait sous l’effort combiné des moteurs qui faisaient leur possible pour l’éloigner de la menace évidente.
La saïyenne savait qu’elle ne pouvait pas aider, ne connaissant rien à la façon de piloter un tel vaisseau, mais elle avait envie de leur hurler de se taire, car elle n’arrivait pas à se concentrer.
Depuis qu’elle avait déposé Aidan et Persée, la jeune femme faisait tout son possible pour retrouver l’énergie d’Anik et se concentrer dessus, seul moyen de se téléporter auprès de quelqu’un. Ou en tout cas, le seul moyen enseigné par Kalta.
Enfin, elle la sentit, tellement faible et tellement loin. Elle commença à concentrer dessus, et la force se volatilisa.
« Non ! »
Un grésillement retentit juste à coté d’elle.
Kalta apparut dans les airs, une main refermé sur le bras métallique du lézard. Anik était encore accroché à Tao Paï Paï et, un peu plus loin, Varidal se tenait toujours à la jambe du cyborg. La chaîne de soldat resta suspendue dans les airs quelques instants, juste assez pour que Bra les voit et cligne des yeux. Puis ils retombèrent tous au sol dans un fracas violent. Le commandant de bord hurla en apercevant Kalta. Le chaos n’était que plus total.
« Seigneur Kalta ! »
Puis, comme si leur présence avait donné la motivation nécessaire aux moteurs, le Rédemption s’élança brusquement dans l’espace, s’éloignant à toute vitesse des débris de la station et de l’énorme spirale infernale.
« Stop ! »
L’ordre vint de Kalta et l’équipage s’empressa de stopper tous les moteurs. Le vaisseau s’immobilisa, sans que le même grincement ne retentisse. Ils devaient être hors de portée de cette chose.
L’Empereur avait les yeux fermés, mais elle voyait ses traits se tendre, contrariés.
« Je ne les sens plus. Saïyenne ? »
Comprenant enfin ce qu’il faisait, elle tenta aussi de projeter sa perception bien au-delà de leur position, mais rien ne lui parvenait, pas même la force qu’ils avaient prétendus avoir avant de révéler leurs puissances. Ils se cachaient. Une toux interrompit ses réflexions. Elle arracha son masque à demi fondu, toussant plus fort pour finir de se débarrasser des derniers relents de l’étrange fumée et de l’acide qui le rongeait toujours.
« Je ne les perçois non plus. Ils sont déjà parti dans l’hyperespace ?
- Peut-être. Mais je crois qu’ils peuvent cacher leur énergie.
- Ils maîtrisent bien leur énergie en tout cas. Celle qui… Celle que j’ai affronté savait cacher sa vraie force jusqu’à ce qu’elle en ait besoin. »
Elle toussa une fois de plus. Kalta la regardait, inquiet mais elle lui signe que tout allait bien. Autour d’eux, Bra pouvait sentir les regards insistants de toute la troupe et de l’équipage. Seul le commando devait comprendre exactement de quoi ils parlaient. Plus encore, quand elle observa les soldats, la saïyenne perçu quelque chose dans leur regard qu’elle n’avait pas l’habitude de voir : de la peur. Ce n’est que là qu’elle vit les traits fermés du nihilien. C’était la première fois qu’elle le voyait ainsi depuis longtemps.
« L’artefact ? demanda-t-il d’une voix froide, sans que son regard ne se concentre sur qui que ce soit. »
A l’hésitation notable qui plana sur le commando, Bra connaissait déjà la réponse, mais elle se demandait qui aurait le courage de le dire.
« Perdu, Seigneur Kalta, répondit enfin Aidan. Emportée dans cette spirale.
- Mais on l’a lui ! »
Anik s’était exclamé, se dressant sur ses pattes en levant le corps de Tao avec lui. Le cyborg, amputé d’un bras, émit une brève protestation, mais n’osa visiblement pas aller plus loin.
Les rubis qui constituaient le regard de Kalta brillèrent d’une lueur inquiétante. Il semblait ne prendre conscience de la présence de son ancien soldat que maintenant. Ses traits se détendirent d’un coup, mais son ton ne rassurait pas du tout Bra.
« Excellent, Anik. Amenons-le en salle d’entraînement. Même chose pour l’armure. Nous avons des questions à leur poser. »
* *
*
*
L’ancien palais impérial était en pleine effervescence.
Le Responsable des opérations Loppeg avait travaillé longtemps au sein de l’Empire Cold, peut-être plus longtemps que tous les autres soldats présents, et il n’avait pas connu plus de cinq périodes où un tel chaos était possible. Cela dit, depuis la découverte de la planète Terre, devenue Freezer 82, il s’était habitué à attendre une situation d’urgence tous les 4 à 5 ans.
Celle-ci, en revanche, était particulière.
« Nouvelle communication, Monsieur !
- J’ai un signal !
- Attendez, je crois que je comprends quelques mots… »
Des éclats de voix fusaient d’un bout à l’autre du centre de communication. Point névralgique de l’Empire, l’ancien palais servait à recevoir et envoyer des communications d’un bout à l’autre du gigantesque territoire contrôlé par l’Empire Cold. Les conquêtes successives du Roi, de ses deux fils et de son petit-fils avaient étendues les frontières si loin que le genre d’appareillage nécessaire pour maintenir les communications ouvertes pouvaient occuper plusieurs pièces.
D’ordinaire, cela suffisait amplement pour faire passer les messages d’un bout à l’autre de l’Empire. Freezer 82 étant, malgré tous les derniers évènements, la capitale officieuse, il était utile que le centre soit localisé en son sein.
Depuis maintenant plusieurs heures, les messages de détresse se multipliaient dans tout l’Empire, et il était impossible de localiser exactement la provenance de chacun d’entre eux. Tout était brouillé. Les mots devenaient incompréhensibles, la localisation d’origine parfois absurde et la fréquence complètement aléatoire.
Tout ce qu’ils avaient réussis à savoir, c’est que quelque chose était arrivé sur Cold 285, une partie de la flotte était perdue à une armée ennemie, mais ses objectifs ou prochaines cibles étaient encore floues.
Par-dessus tout, on l’avait averti de l’arrivée de Dame Siberia très prochainement, ce qui signifiait qu’ils allaient se ridiculiser devant la veuve du Seigneur Freezer. Intolérable.
« Vaisseau en approche, en bordure du système. »
En parlant du loup.
« Suivez son avancée, prévenez-moi quand il sera prêt à atterrir. »
Le grand insecte parcourut la salle d’une traite, s’arrêtant devant une des consoles retransmettant un message incompréhensible. Il repoussa un peu l’officier y travaillant.
« Essayez ça… Ca devrait nous éclairer un peu et… »
Loppeg n’avait plus la puissance nécessaire pour être un bon soldat, mais il avait travaillé si longtemps au sein de l’Empire qu’utiliser ces appareils était une seconde nature pour lui.
« Administrateur Loppeg ? Pouvez-vous m’expliquer ? »
La voix glacée de l’Impératrice retentit soudainement dans la salle, faisant taire la plupart des techniciens. Abandonnant le sien, Loppeg se redressa d’un coup, ses membres cliquetant quand il se retourna vers elle, inclinant déjà la tête.
La nihilienne était à peine plus grande que son défunt mari, le Seigneur Freezer, quand il n’avait pas encore affronté le super saïyen sur Namek. Elle lui ressemblait aussi, mais n’avait pas de corne : les excroissances osseuses qui entouraient la plaque violacée au sommet de son crâne descendaient vers le bas. Elle paraissait toujours porter une couronne.
« Dame Siberia, nous recevons des communications de tout l’Empire, il est possible que… Vous êtes déjà là ? »
La révélation l’avait frappé au milieu de sa phrase, à sa propre surprise mais aussi celle de la nihilienne, qui fronça les sourcils en levant les yeux vers lui.
« Évidemment que je suis là, nous avons atterri il y a dix minutes. »
Mais alors, le vaisseau en approche.
« Monsieur ! Nous avons une arrivée dans l’atmosphère de Freezer 82, vaisseau impérial mais le code est brouillé ! »
Loppeg n’avait pas besoin du code pour savoir d’où venait l’intrus. C’était un vaisseau impérial. Il venait de Passaros.
Une attaque.
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