Zhatan a écrit:Je n'ai pas en tête leur réflexion, donc je vais "trahir" leur pensée, et elle a été si largement galvaudée l'an dernier que ce n'est pas la peine. A la limite je peux construire un argumentaire cohérent sans discrimination, ça donnera un exemple. Je précise qu'il n'engage que moi (et encore pas vraiment vu que ce n'est pas ma pensée) :
Le mariage est historiquement fait pour instituer et protéger la famille en tant qu'elle est une institution qui protège de la mauvaise fortune (Etat, coup du sort... etc), en tout cas il a pris ce statut-ci, la tendance est à la destruction des solidarités de toutes natures au profit de l'individualisme. C'est très bien pour ceux qui en ont les moyens (classes moyennes pour faire court), mais pour des ouvriers, autrefois protégés par le syndicalisme et les solidarités intraprofessionnelles, c'est catastrophique en terme de socialisation et intégration (de toute nature) à la société. De la même façon, la famille recomposée (symptôme de l'individualisme : voir de Singly, sociologue de la famille par exemple) et les nouvelles formes familiales sont essentiellement payées par les classes les plus démunies de la société (pour donner un exemple : on divorce plus dans les classes les plus aisées parce qu'on en a davantage les moyens, un divorce coûte cher) : toutes ces destructions de la famille traditionnelle ce sont des protections qui sautent parce que ce n'est plus une institution contraignante. Ce qui est très bien pour les classes qui ont les moyens de cette émancipation mais pas pour celles que justement la famille fédérait (avec d'autres types de solidarité) : le mariage homosexuel c'est faire éclater un peu plus la famille "obligation" (lieu de la solidarité obligatoire (ce qui ne veut pas dire qu'elle n'est pas consentie et pas consentie avec joie même)) au profit de la famille "choix" et recomposable à merci. C'est donc instaurer un peu plus de précarité dans les classes qui n'ont pas les moyens de l'émancipation et de la précarité.
Je me contrefous de savoir qui couche avec qui dans ce modèle-ci, qui serait quelque chose relevant du catholicisme social, et pourtant dans ce cas je suis contre le mariage homo. Bon alors certes, j'ai pas tout détaillé. Encore une précision cependant : l'idée que la loi et la liberté ne s'appliquent pas uniformément mais de façon différenciée selon ta position sociale est commune à Sandra Laugier, Foucault, Butler et bien d'autres. Je ne dis pas ça pour que tout d'un coup tout le monde soit d'accord avec mon argumentaire, mais pour dire que ça ne sort pas de nul part cet argument. Cependant, je ne développe pas parce que j'écris déjà suffisamment pour ne pas en rajouter des kilos.
Non, mais c'est exactement ce que je disais. La réflexion semble cohérente, mais elle ne l'est pas. Je passe sur la partie des "protections qui sautent" qui sous-entend quand même que le divorce, c'est le début de la fin de notre civilisation...

J'ai bien compris que c'était pas ce que tu pensais, c'est juste que c'est un argument de religieux complètement con qui utilise une rhétorique qui a fait ses preuve dans le passé où des cons violents gouvernaient. "Si on autorise ci ou ça, c'est le début de la fin !".
Donc, je disais que je passe sur le début de la réflexion qui, déjà, est erroné. Je me demandais comment on allait en venir au mariage homo. Tout d'un coup, sans crier gare, "le mariage homo, c'est faire éclater un peu plus la famille..."

On y arrive comme ça ! Pouf !
Là, tu vois, je suis déçu que tu puisses trouver ça cohérent et pas hypocrite.
Sérieusement, tu peux refaire la même, et remplacer "homo" par "noir": tu comprendras que c'est incohérent.
Zhatan a écrit: Encore une fois, tu mélanges tout et tu compliques inutilement ce tout.
Ça c'est parce que tout est compliqué.
Mais non, c'est pas si compliqué. Les homosexuels, dans leur grande majorité, veulent être égaux en droit de la famille. C'est tout. Les arguments des contres, grosso modo, y en a trois qui sont plus ou moins nuancés, deguisés, etc... :
- c'est le début de la fin de notre civilisation (individualisme, les verrous sautent, tout ça...)
- l'adoption des enfants (des enfants élevés par des gays seront forcément anormaux)
- l'homosexualité est une déviance (religion, education, tout ça...)
J'en oubli peut-être un, je suis pas sûr

Toujours est-il que tous les arguments soi-disant cohérents se retrouvent dans ces trois grands principes des "contres".
Et bien, tu vois, pour reprendre la comparaison avec le droit de vote pour les femmes, c'était pareil. Y avait pas mal de mobd qui pensait que c'était le "début de la fin". Pareil pour les femmes qui travaillent. Pareil pour l'abolition de l'esclavage, et le droit de vote des noirs, tu avais tout un tas de personne contre qui avaient une reflexion soi-disant cohérente.
Donc bon, aujourd'hui, ça paraîtrait improbable de prendre en compte une réflexion "cohérente" qui serait pour retirer le droit de vote des femmes (ou le retour de l'esclavage).
Hé bien, pour les homosexuels, c'est exactement la même chose. Le fait de seulement en discuter montre, je pense, que tes amis ne considèrent pas cela comme quelque chose de naturel (2 hommes ou 2 femmes qui s'aiment et veulent donc forcément former un couple et donc une famille).
Zhatan a écrit:Quand je parle de l'Homme (avec un grand H), je parle de l'être humain. Et un être humain, c'est un être humain, peu importe qu'il réponde aux critères de divers philosophe qui ont réfléchi à la question de ce qui définit l'homme (mais ça, je pense qu'on est d'accord).
Oui c'est ce que je suis en train de te dire : l'idée d'humain n'est pas la même que notre concept réel d'humain. Tout le monde sait ce qu'est un être humain, pourtant des gens veulent la peine de mort, pourtant des gens veuillent qu'on aille en Crimée, en Ukraine, en Syrie...
Bien sûr qu'on peut être pour l'égalité homme-femme et reconduire un certain nombre de pratique mettant à l'écart les femmes, mais c'est cela l'hypocrisie.
Mais non. ^^ Simplement le concept d'égalité dans ce cas ne prend pas suffisamment en compte certains aspects, ou simplement qu'il considère que ces aspects ne relèvent pas de l'égalité.
Pour le racisme, j'ai pas compris ton problème probablement.
On est en 2014, et contrairement à ce qu'on peut entendre parfois, notre société a pas mal grandi dans la réflexion de biens des concepts. C'est quoi pour toi un concept de liberté qui n'appartient pas à son époque.
Grandit je ne crois pas, mais eu une histoire singulière qui l'a conduite sur ce chemin là, certainement. Encore une fois Aristote ne pigerait rien à ce qu'on est en train de dire. Le "progrès" n'est pas une idée qui me parle beaucoup, si tu veux.
Parce que des mecs qui pensent comme Aristote en 2014, y en a encore !
Euh non vraiment pas.
Après, ton discours semble quand même sous-entendre que notre concept de la liberté (dans les grandes démocraties) est plus évolué que les autres, je me trompe ?(là je prend le risque que tu me dises "mais pas du tout", j'ai remarqué que t'aimais être à contre courant

).
Berk, certainement pas. Nous avons notre concept de liberté, mais ce concept accepte Guantanamo (enfin moi je trouve ça pas super cool, hein). Tu vois ce que je veux dire par idée et concept réel avec cet exemple ? Après bien sûr que le concept de liberté est plus "fondateur" chez nous.
Ouais bah Guantanamo, c'est accepté à contre coeur. C'est comme avoir une armée et former des militaires à tuer. Dans un monde idéal, y aurait plus d'armée, plus de Guantanamo, plus d'extrémistes qui veulent imposer leur façon de vivre à la majorité par des actes de violence.
Les gens qui sont pour la peine de mort sont bêtes car ils n'ont pas vraiment réfléchi à la question. Sauf s'ils sont prêt à sacrifier quelques innocents ce qui placent ces personnes dans le groupe des bons gros salops, quand même. Guantanamo, y a forcément eu au moins un innocent qui s'est fait torturer par erreur (inacceptable sur le principe). Mais, quelque part, ce sont les extrémistes qui ont mis tout le monde dans cette position schizophrène (c'est une petite victoire pour eux, d'ailleurs).
Même un coupable qui se fait torturer, ça me pose problème.
Donc pour te répondre, non, le concept de liberté est globalement le même, du moins l'idéal. Après, comme on dit, y a la réalité du terrain. Mais on peut tout de même espérer qu'un jour, on atteindra l'idéal (je sais, je suis optimiste et naïf, que veux tu ?).