Bonne vidéo, je ne connaissais pas cette chaine, merci à toi je vais y remédier.
Les scénarios et théories sont très intéressants. Spontanément, le soir de la dissolution, j'imaginais surtout que Manu Magouillons projetais de mettre en lumière les hypocrisies et défauts du RN pour permettre à l'un de ses affiliés de rafler la mise en 2027, peut-être dans l'attente d'un retour en 2032. J'ai envisagé rapidement mais pas sérieusement qu'il s'imagine pouvoir nous rejouer le coup du rempart au fascisme et l'emporter. Si c'est le cas, le mec est un sacré joueur de poker, sacrément courageux quant il s'agit de miser le destin de ses concitoyens... L'histoire nous dira s'il était stratège ou téméraire.
Quelques remarques :
1) Dans un régime parlementaire, le chef de gouvernement n'est pas nécessairement élu par le Parlement. En Angleterre (ou en France sous les IIIème et IVème République), il est nommé par le Chef de l'Etat... mais il est en tous les cas
responsable devant la chambre basse (Assemblée Nationale en France, Chambre des Communes au UK, Bundestag en Allemagne...).
Le concept de
responsabilité du gouvernement est ce qui distingue fondamentalement les régimes parlementaires et présidentiels. En pratique, ça signifie que celui devant lequel le gouvernement est responsable (chambre basse dans le premier cas, chef de l'Etat dans le second) peut le destituer.
Exemple : Front Populaire gagne les élections législatives. Logiquement, Macron doit alors nommer la personnalité que la nouvelle majorité présente comme étant la mieux à même de la représenter.
Imaginons qu'il s'en foute et reconduise Attal ou mieux, qu'il tente de filouter en désignant Glucksmann dans l'optique de diviser la gauche. Soit Glucksmann réussit à réunir suffisamment de partisans sur son nom(hypothétique alliance du "camps républicain" allant du PS aux reliquats de LR), soit Front Populaire reste uni et dépose une motion de censure à l'encontre du gouvernement Glucksmann. Si la motion de censure est voté par la majorité des sénateurs, le gouvernement devra déposer sa démission. Le Président devra alors nommer un nouveau Premier Ministre.
Soyons clair, l'option numéro 1 (Attal) est inenvisageable dans un régime parlementaire (voir le cas du Président MacMahon au début de la IIIème, sommet de "se soumettre ou se démettre" parce qu'il tentait de défier la Chambre en nommant un chef de gouvernement minoritaire). Quant à l'option 2, il faudrait de sacrés balls à Macron pour la tenter. En cas d'échec, il passerait pour un gros forceur, perdant en prestige au passage.
En cela, la France respecte la condition nécessaire pour définir un régime parlementaire, celle de la responsabilité du Gouvernement devant l'Assemblée Nationale. Mais c'est un régime parlementaire hétérodoxe, appelé en effet régime semi-présidentiel ou présidentialiste.Tout dépend en réalité du résultat des élections législatives.
Lorsque le Président dispose d'une majorité à l'Assemblée, il réunit entre ses mains la quasi intégralité des pouvoirs exécutif, à travers un Premier Ministre qui lui est dévoué et grâce à ses pouvoirs propres, mais également législatif, via le pouvoir d'initiative de slois (pouvoir de proposer des lois) du Premier Ministre et le vote de ses députés (qui ont aussi ce pouvoir). Ceux-ci peuvent occasionnellement se rebiffer, comme ça a été le cas lorsque Manuel Valls étaient Premier Ministre, sans aller jusqu'à censurer le gouvernement. Ca reste des rapports de forces. Lorsque tous les feux sont au vert, le poids du Président sur les institutions de la Vème est plus important que ne l'est celui des USA sur les siennes.
En revanche,
en cas de cohabitation, c'est bien le Premier Ministre, issu d'une majorité hostile au Chef de l'Etat, qui gouverne la France et en détermine les grande orientations. Le locataire de l'Elysée conserve néanmoins toujours un pouvoir non négligeable, en tout cas supérieur à celui d'un Chef d'Etat d'un régime parlementaire classique. Le Président détient ainsi un rôle prépondérant dans son "domaine réservé" (affaires étrangères, défense, utilisation de l'arme nucléaire) de même que dans celui de la révision de la Constitution, il préside toujours le Conseil des Ministres, peut en conséquence refuser de signer les ordonnances et décrets pris en Conseil des Ministres (cas de Mitterrand contre Chirac en 1986), prendre les pleins pouvoirs en cas de crise (le fameux article 16) et surtout, c'est lui qui conserve la capacité de dissoudre la chambre basse. Dans un régime parlementaire classique, cette prérogative appartient au chef de gouvernement. Enfin, on en a parlé plus haut avec Xehanort, l'élection au suffrage universel direct confère une aura particulière personnelle au Chef de l'Etat, différente de celle, plus floue, d'une vaste assemblée largement composée d'inconnus pour la majorité des français.
2) La France a connu un régime présidentiel, durant la Deuxième République. Ca a très mal finit en raison des dissensions croissantes entre le Prince-Président Louis-Napoléon Bonaparte (futur Napoléon III) et l'Assemblée Nationale à majorité conservatrice, qui avait pourtant initialement soutenu la candidature de celui-ci, pensant naïvement être en mesure de le manipuler.
D'autres états (en Amérique Latine de mémoire) ont également mis en place des régimes présidentiels, sans plus de succès. A ce jour les USA sont le seul exemple de régime présidentiel qui n'aboutisse pas à la dictature... mais bien souvent au blocage lorsque Présidence et Congrès ne sont pas de la même couleur politique et ne parviennent pas à trouver un compromis.
On en a des exemples lors du vote du budget quand, faute d'accord, les fonctionnaires ne sont plus payer durant un laps de temps plus ou moins long (le shutdown). Bref, c'est un régime qui permet d'équilibrer les pouvoirs en les forçant à collaborer... ou à recourir à la force !
3) Non, les régimes parlementaires ne pratiquent pas tous le scrutin proportionnelle (scrutin uninominal majoritaire à un tour au Royaume-Uni, système mixte en Allemagne et Italie).
4) Enfin, les régimes parlementaires modernes ne consistent pas en un parlement tout puissant. Que ce soit en France ou dans les autres démocraties parlementaires, il existe désormais un ensemble de techniques, relevant du "parlementarisme rationalisé", dont l'objectif est d'encadrer le pouvoir du parlement et d'accroitre l'efficacité de l'action du gouvernement.
L'article 49-3 en est un bon exemple, il pourrait très bien exister même si le pouvoir du Président était plus faible. S'y ajoute le vote bloqué, le domaine réservé de la loi, le recours aux ordonnances et j'en oublis.
La Constitution de la République allemande, régime parlementaire s'il en est, en prévoit une très fameuse : "la motion de censure constructive", qui contraint toute motion de censure contre un gouvernement à proposer en retour un chef de gouvernement alternatif. La motion de censure est déposée, puis un candidat doit être rapidement élu pour qu'elle soit adoptée. En somme, on ne se contente pas de virer un Premier Ministre qui nous emmerde, on doit être capable d'en proposer un nouveau.
Exemple, si cette technique était appliquée en France : Macron ne disposait que qu'une majorité relative entre 2022 et 2024. De ce fait, les gouvernements qu'il nommait était soumis au bon vouloir de quelques dizaines de députés LR, susceptibles à tout moment de se retourner contre lui. Admettons que cela arrive, que LR vote une motion de censure conjointement avec le reste de l'opposition (LFI, PS, Verts, RN), réunis comme un seul homme. Avec ce dispositif, la motion de censure n'aurait pu être votée qu'après la désignation d'un remplaçant par les différentes composantes de l'opposition. Autrement dit, LFI/PS/Verts/LR/RN auraient dû s'entendre sur le choix d'un chef de gouvernement pour les représenter... difficile à imaginer
