par Kame-boy le Mar Déc 21, 2010 22:08
Chapitre XII :
D’un œil vitreux, Potatoes suivait les mouvements alambiqués des esprits errants. Se ressaisissant, le guerrier d’élite déchira le nuage tourbillonnant de coups d’épée, y emprisonnant au passage les âmes en lambeaux. Elles s’enroulaient parfois autour de la lame, y restaient accrochées, pendantes, résistant tant bien que mal à l’absorption inéluctable. À mesure que la vie cotonneuse se réduisait comme peau de chagrin, le fer de Potatoes gagnait en brillance, lâchait des flashs lumineux. Ces derniers, chargés de vitalité, trouaient le ciel, déchiraient le paysage de cette scène. Noyées dans cette énergie blanche, on pouvait distinguer des plantes colorées. La vérité éclata alors au grand jour, fit valser la boue, réduit le marécage à l’état de souvenir. L’herbe verte retrouvait sa place et, sur son tapis accueillant, laissait se reposer, de-ci de-là, cinq capsules spatiales.
De l’autre côté, le temps avait filé bien plus vite… Une journée était déjà passée et avait permis à l’escouade rebelle, aux tenues toutes neuves et clinquantes, de poser un pied sur le sol de Bombac. Celui-ci était traître, car recouvert d’une substance agréablement duveteuse, cachant pourtant quelques terribles épines. Prudente, l’équipe slalomait entre les pièges et habitations pendouillantes, cocons fibreux densément peuplés. À cette ambiance déstabilisante s’ajoutait une odeur qui ne l’était pas moins, comme pourvue d’une tête chercheuse tellement elle ciblait avec soin les narines de nos pauvres visiteurs.
- S’il y a des enfants dans le coin, je suis la reine Vegeta ! lança Bajiri, essayant de distraire son équipe, comme l’aurait fait son ami Toumo.
- Qu’est ce qui t’arrives tout à coup ?! demanda sèchement Ukero. Au lieu de dire des bêtises, ouvre grand tes yeux et tes oreilles, ça nous aidera !
- Je n’en ai pas l’air, mais c’est ce que je fais ! répliqua le saiyen au mollet fragile.
Ce dernier, pour joindre les gestes à la parole, s’arrêta net et pointa son doigt vers le ciel. La petite troupe stoppa sa progression et essaya de distinguer ce que Bajiri leur montrait.
- Tu as dû rêver, il n’y a rien d’intéressant là-haut… dit Tamato, pourtant encore l’esprit fixé sur ce qui pouvait bien se passer au-dessus de leurs têtes.
- C’est justement parce que l’on y distingue aucune trace de vie que ça m’interpelle, répondit l’intéressé. Mais j’aurais bien du mal à vous expliquer exactement pourquoi, l’idée fait encore son chemin.
Après quelques longues secondes de silence, Coco réajusta avec soin ses petites lunettes sans branche, puis révéla :
- Je crois avoir trouvé où elle mène, ta fameuse idée !
- N’hésite pas, nous t’écoutons ! assura fermement le chaman Ginseng.
- Très bien ! Vous avez sans doute remarqué que plus les cocons sont près du sol, plus ils sont gros. Ils se développent donc, tout comme un corps peut le faire. Il serait alors logique d’affirmer que, si l’on monte, nous irons vers la source…
- Je commence à te suivre… dit Ukero, souriant à pleines dents.
Les visages de l’ensemble de l’escouade se décontractèrent. Ils approchaient de leur but !
Ceux de l’élite officielle étaient fermés, graves. Ils avaient enfin retrouvés leurs vaisseaux mais ceux-ci étaient restés trop longtemps sans entretien et n’étaient plus utilisables. Mais ce n’était pas le pire…. La punition qu’allait leur infliger le roi Végéta promettait d’être lourde : incapacité à retrouver l’imposteur, capsules hors d’état et, surtout, huit longues journées sans donner de nouvelles… Enfin, d’après leur notion du temps troublée. Si seulement ils savaient…
- Seigneur Vegeta va nous passer un de ces savon… se lamentait déjà Kyabetsu.
Ses compagnons, comme un seul homme, baissèrent la tête de concert et indiquèrent ainsi qu’ils avaient les même craintes. S’il y avait eu des mouches, on les aurait entendu voler… Pourtant, goguenard, Toumorokoshi faisait exception. Il fouilla dans son plastron, faisant crisser volontairement et bruyamment celui-ci, sous les regards réprobateurs de son équipe. Il finit par montrer l’objet de sa malice, petit flacon coincé entre ses doigts. Bombant le torse, il expliqua :
- À l’intérieur se trouvent un petit souvenir, qui fera bien plaisir à notre roi ! Je vous parie sur les cheveux de Kyabetsu que notre souverain oubliera sa colère.
- Qu’est ce que mes cheveux viennent faire là-dedans, marmonna l’ex-responsable du spatiodrome, quelque peu vexé.
Toumo déversa doucement le contenant, avec un sens de la cérémonie, dans sa main gantée.
- Tiens, ça me rappelle vaguement quelque chose… pensa tout haut Courga, qui visiblement n’était pas ravi par les souvenirs qui s’imposaient à lui.
Le saiyen au sourire presque permanant pinça une minuscule boule noire entre son index et son pouce, et l’approcha des yeux de chacun de ses camarades.
- Quand Courga et Kya nous ont raconté leurs mésaventures, je me suis tout de suite mis dans le crâne que je devais trouver un moyen de ramener ces drôles de petites bêtes chez nous. Mais pas juste pour décorer… Elles nous serviront de sparring-partner, lors de nos entraînement. Ca nous évitera d’avoir à se blesser les uns les autres. Ingénieux, n’est-ce pas ?
- Très ! répondit Kyabetsu, rassuré par cette perspective.
- Je ne sais pas si ça suffira, mais c’est toujours mieux que rien, exprima un Courga se relâchant enfin, après presque 10 jours de tension.
Une main se posa sur son épaule. Son leader, calmement, lui signifiait qu’il était temps de rentrer.
Il n’était pas question de partir ! Les rebelles auraient pourtant bien voulu, empêtrés qu’ils étaient dans une multitude de fils, bien plus fins qu’une toile d’araignée. Ils volaient tant bien que mal, gênés dans le moindre de leur mouvement, en quête d’un habitat enfantin. De son k atana auréolé d’un ki écarlate, Coco tranchait la matière gênante, y freillant ainsi un chemin pour son équipe.
- Cela se densifie, je crois que l’on approche du but, observa t-il.
- Dans ce cas, ne bougez plus ! ordonna Ginseng.
Celui-ci, avec sang-froid, lança une salve de tan’ken chimeiteki, aiguilles d’énergie aussi puissantes que fluettes. Étonnement, aucune attaque ne semblait avoir de cible. Au contraire, elle finissaient par se perdre dans le ciel pâle ou se volatilisaient au chœur de la toile, sans n’avoir rien touché… Pourtant, personne n’osait objecter, Ginseng avait l’air si confiant ! Et puis, au moins, il ne causait pas de dégât ; l’objet de leur recherche ne risquait pas d’être tué.
- Croyez moi, ils vont sortir de leur trou ! affirma le chaman à la veste verte.
- Qui ça ?! se demandèrent ses coéquipiers.
En guise de réponse, un souffle se fit entendre au loin, fut immédiatement là… puis les emporta ! Ils ne pouvaient plus bouger, compressés dans un espace clos et sombre.
- Pas de panique ! grogna Ukero, en souffrance mais confiant.
À peine une seconde plus tard, les cinq guerriers rebelles étaient libres ! Non pas par un stratagème complexe, ni une ouverture défaillance de leur prison, mais tout simplement – si l’on peut s’exprimer ainsi - grâce à leur transformation éclair en oozaru. Le singe au pelage blanc attrapa, au vol, le pauvre saiyen sans queue, Tamato. Puis il le posa délicatement sur son épaulette.
- Il ne nous avait pas mentit, se dit Bajiri, reconnaissable à sa tunique noire et son « v » sur le front. Il peut vraiment combiner la plante permettant une illusion de lune avec une autre, dopante, qui accélère la métamorphose. Stupéfiant !
- Sans cela, il n’aurait pu tuer Salsifi et ainsi provoquer la fuite de Bajiri. Il aurait été trop lent et se serait fait repérer par un scaouter avant même d’avoir le corps recouvert de poil, concluait intérieurement le chaman, seul saiyen a connaître l’identité du coupable.
Le fils de la victime était loin de s’en douter. Il était assis sur l’armure de son frère, d’une facette de Thalès qu’il avait appris à apprécier, au travers de leurs buts communs. Voilà tout. Alors qu’il croisait brièvement le regard rouge d’Ukero, il pensait même :
- Dommage que Papa soit dans l’autre camps… J’aimerais tant qu’il soit à nos côtés, qu’il voit ses deux fils combattre ensemble. Il serait si fier de nous…
Il fut brutalement éjecté de ses pensées lorsqu’un bruit, digne d’un immense instrument de percussion, se fit entendre. Leur « prison » venait de se relever ! Il s’agissait d’une ronde et hideuse créature à l’épaisse peau rose, couverte de pointes, de telle sorte qu’on aurait pu croire qu’elle portait une couronne. Un pli barrant son front d’un relief disgracieux, faisant office d’arcades sourcilières, renforçait son expression belliqueuse. De même taille que les gorilles lui faisant face, elle ne se faisait pas de soucis, bien au contraire. Elle plissa d’aise ses yeux cernés de stries, passa sa langue sur ses lèvres gercées, on eu cru qu’elle se préparait à un festin… Puis elle attaqua sans sommation ! Sur ses gardes (malgré ses bras ballants), Ginseng eu le réflexe de lancer une aiguille d’énergie. Elle pouvait transpercer n’importe quelle matière, même le cuir de cet affreux personnage ! Mais encore fallait-il qu’elle touche… Malgré son gabarit, le monstre local était vif et n’eu qu’à pencher la tête sur le côté, freinant à peine sa course. Sa massue à pointes, qui lui servait d’avant-bras, pu alors faire la connaissance de gencives, celles d’Ukero. Le primate visé en perdit quelques touffes de poils blancs, sous la violence du choc. Il écarta vivement les bras pour se stabiliser en l’air, avec maîtrise, mais resta inexplicablement dans cette position… De longues secondes… De trop longues secondes pour que cela soit rassurant.
- Lâche ! grogna le frère de Tamato.
En effet, celui-ci était désormais entre les vilaines pattes de l’ennemi, compressé dans l’étau de mains à 3 doigts.
- Il fallait s’y attendre… Une telle assurance ne pouvait être couplée qu’à la fourberie ! pensait Coco, sans ciller.
- J’ai certes titillé sa progéniture, il y a de quoi être en colère, mais faudrait voir à pas exagérer ! exprima intérieurement Ginseng, en une colère contenue.
Mais le plus rageur de tous était sans conteste Ukero ! Son regard rouge brûlait du désir de libérer son collègue et frère. Il gagnait peu à peu en luminosité haineuse, lâchait même par intermittence des flashs de révolte. Puis ce fut la libération !
- Akuma no me !
Une vague d’énergie destructrice sortit alors de ses yeux. Ceux-ci, portes de l’Enfer que l’on aurait ouverte, lâchaient un flot d’animosité pure. Le monstre rose fut littéralement fauché, perdant une jambe au passage. Stupéfait, il ne réalisait pas encore qu’il souffrait, se contentait de fixer, hagard, l’emplacement de son défunt membre. Lorsqu’il redressa enfin la tête, se fut pour constater avec effarement qu’une nouvelle attaque fondait sur lui. Un katana flamboyant perça la coque de l’animal… en plein cœur !
- Mal pensé ! pensa pourtant Coco, peu satisfait de sa décision.
En effet, le protecteur de Bombac n’avait aucune raison d’être constitué comme eux, d’avoir le système vasculaire à gauche. Le jus violet et nauséabond qui sortit de sa plaie ne l’inquiéta pas plus que cela ; il se permit même de narguer le saiyen de sang-mêlé, de caresser la joue de Tamato avec l’arme blanche. Le petit combattant fixait alors le ciel de ses yeux implorants, espérant tisser un lien avec des nuages pourtant inexistants. Soudain, il cru que sa prière avait été exaucée : la poigne du monstre se désserait progressivement. Elle le faisait sous l’effet de la surprise, le monstre rose ne tenant plus le saiyen dans sa main mais, à la place, l’un de ses précieux fils. Totalement perdu, le père se posait milles questions à la fois. Où vais-je mettre mon enfant pour qu’il soit à l’abris ? Comment a t-il pu se retrouver là d’un seul coup ? Qu’est ce que ces intrus manigancent ? Où se trouve le cocon de ce petit ? Tant et tant que sa tête en tournait. Un rayon mortelle transperça alors le crâne de la créature ronde, ne laissant pas à cette dernière l’opportunité de comprendre ce qu’il lui arrivait.
- Bien joué Ginseng ! L’illusion n’allait pas tarder à s’estomper ! remarqua un Ukero fier de son ancien élève.
- Heureusement que je suis là, ce ne sont pas ces naïfs qui auraient bougés le petit doigt, fit remarquer le chaman.
Coco avait encore du mal à réaliser que ce petit être était en fait Tamato. Il avait même cru, un court instant, que leur collègue n’avait jamais été sur l’épaule d’Ukero, que ce dernier avait trompé tout le monde depuis le début, mettant le petit bombacien sous les traits du saiyen. Le cerveau à l’envers, il ne se rendait pas compte que le guerrier sans queue, incapable de voler, était sur le point de s’écraser mortellement sur le sol couvert de mousse et de pieux. Alors que Ginseng soufflait une poudre verte dans l’air, afin de lui faire reprendre conscience des réalités, Ukero était déjà lancé à la rescousse de son frère. Mais l’amour qu’il éprouvait pour Tamato n’avait été que trop rarement ressenti, n’était pas encré en lui. Il ne pouvait donc pas lui donner d’ailes, lui permettre de réaliser l’impossible. Plus que dix mètre… C’était terminé ! Terminé pour Ukero en tout cas… Bajiri, qui s’était fait oublié au niveau du sol, pris le relai. Il était loin de la victime mais à distance raisonnable pour tenter sa spécialité : le bouclier plat ! Il créa alors l’une de ses protections habituelles, qu’il déplia d’un ample mouvement des bras, afin d’en faire un plateau au dessus de sa tête. Celui-ci, d’une longueur supérieure à 50 mètres, se présenta alors sous Tamato. Mais était-il suffisamment étendu pour réceptionner le malheureux ? Cela allait se jouer à un cheveux… Le temps fut comme ralenti pour tout nos protagonistes et, cette fois-ci, les plantes n’y étaient pour rien. Ukero avait les yeux injectés de sang… Coco grimaçait d’inquiétude malgré ses bras croisés… Ginseng avait les paupières clauses… Et Bajiri sourait !
- Pfff ! lâcha t’il en un grand soupir.
Soulagé, il admirait sa réussite, le corps de Tamato rasant la bordure de sa création, quelques épis dépassant à peine de celle-ci. Le sauveur rétracta alors le plateau, afin de guider son collègue jusque dans ses bras poilus. Puis, ainsi, il monta rejoindre ses collègues reconnaissants. Il reçu quelques viriles claques de remerciement dans le dos, des sourires discrets furent échangés, avant que chacun prenne conscience que leur mission n’était pas tout à fait terminée.
- Une planète peuplée d’âmes orphelines, cela me donne l’impression de visiter un cimetière en devenir… exprima Coco, pensif et attristé.
- Tu devrais avoir la conscience tranquille, rétorqua Ginseng. Tu n’as pas tué le père et nous allons sauver l’un de ses enfants, en lui permettant de survivre au sein d’une puissante organisation.
- Au service de Freeza, il sera dans un environnement idéal pour accroître sa puissance et connaître l’excitation des combats et de l’aventure, compléta Ukero. D’ailleurs, quand on parle du loup…
En effet, devant eux se trouvait une version miniature de la créature rose, aux excroissances arrondies en guise de futures pointes. Du haut de son petit mètre 20, il dévisageait ceux qu’il considérait, à juste titre, comme des touristes assassins. Lèvre retroussée, haineuse, il fulminait.
- Voilà le petit bonhomme qui m’a servi de modèle ! annonça le saiyen aux cheveux blancs. Il n’a pu s’empêcher de sortir de son cocon pour soutenir mentalement son cher papa. Il a pourtant fait l’inverse car, en agissant ainsi, il m’a permis de tuer son père. Quelle ironie…
- Comment as-tu procédé ? Tu as utilisé du Ginkgo ? demanda Ginseng en connaisseur.
- Exact ! Mais ça n’aurait pas été suffisant, il fallait aussi exalter ses sentiments enfouis, exciter ses émotions, alors j’ai ajouté un peu d’éphédra. Et, comme touche finale, j’ai complété avec cette foutue fibre de cocon afin, qu’associée à ma préparation, elle lui rappelle son enfance.
- Mais à quoi servait le modèle alors ? demanda Bajiri.
- Il m’a permis d’évaluer la taille d’un enfant de cette espèce par rapport à un adulte, sa morphologie, etc. et de doser avec justesse mes produits. Sinon, je n’aurais peut-être pas plongé cet ogre assez loin dans ses souvenirs.
- En tout cas, bravo, tu es un véritable magicien ! dit Bajiri avec enthousiasme. Il ne t’a fallu qu’un clignement d’œil pour préparer tout cela.
- Très exactement 6 secondes… Le temps que cette brute a passé à narguer Coco avec une dague qui n’était pas la sienne.
Tout en parlant, et sans que personne ne s’en aperçoive, les mains d’Ukero bougeaient à toute vitesse. Quasiment invisibles, elle créaient une nouvelle mixture. Une poudre bleutée fut ainsi rapidement créée et soufflée sous le nez du petit bombacien. La créature s’endormit alors instantanément.
Dans l’espace, à bord d’une capsule ronde, un autre être était plongé dans ses songes. Potatoes serrait contre lui son épée, comme un compagne ou confidente complice. Par intermittence, il lui parlait, lâchait de brefs mots.
- Ne vous inquiétez pas, je vous vengerai ! finit-il par répéter inlassablement.