Ton message est extrêmement intéressant.
Et pertinent.
À de nombreux égards.
Je pense que j'ai dû passer une bonne heure à fixer le mur en y réfléchissant (dslé pour le "y"

).
Du coup, j'ai quelques remarques. Mais d'abord, mettons-nous bien d'accord; tu voulais bien dire que le conseil, c'est: "Ne racontez pas, montrez!"
Ou alors je n'ai décidément rien compris à ton post.
Mais revenons au conseil en question. Voici ce qui fut, en quelque sorte, mon processus de réflexion. Je le partage parce que je pense qu'il peut être source de réflexion pour d'autres, comme ton post l'a été pour moi. Comme c'est assez long, je vais le séparer en plusieurs parties.
1. Raconter une histoireCe conseil m'a d'abord profondément choqué. En effet, j'étais jusqu'ici persuadé qu'il était très important de raconter une histoire. C'était jusqu'à ce matin mon credo.
Et je reste persuadé que c'est essentiel. Même si écrire pour écrire est un excellent exercice -ne serait-ce que pour vaincre la phobie de la page blanche ou améliorer sa technique- quand on voit l'implication et l'abnégation que cela demande de pousser un récit jusqu'au bout, je pense qu'il est essentiel pour un auteur d'avoir un propos clair, du moins en matière de SF/Fantasy telle qu'on en trouve sur ce forum - mais si c'est pour parler d'autre chose, pourquoi poster ici, vu qu'une fanfic DB va se appartenir à 99+% à ce type de récit.
On ne saurait trop insister sur l'importance d'axes clairs dans la narration, particulièrement si on écrit -comme souvent ici également- de manière épisodique et qu'on a commencé à publier sans avoir terminé la rédaction. Pas plus tard qu'hier, je discutais avec un fic-eur embourbé dans les éléments qu'il avait établis précédemment et qui nuisaient selon lui à la construction de la suite de son récit. Ça peut être une source de démotivation importante que de constater que ce qu'on a fait nous empêche de terminer le récit comme on le souhaiterait.
Si le propos et la narration sont clairs, normalement, l'écriture va rester un plaisir, car on saura toujours ce qu'on est en train de raconter et qu'on avance vers la conclusion de l'histoire.
Ce que je veux dire par là, ce n'est pas que tous les détails doivent être pré-établis (bien au contraire), ni qu'on doit avoir une vision mentale de tout ce qu'on va faire. Mais qu'avant de se lancer dans la rédaction, on devrait pouvoir résumer sa propre histoire en quelques lignes simples qui décrivent un objectif et un moyen. Et c'est ces quelques lignes qu'on va ensuite étoffer et mettre en scène de manière à les rendre intéressantes.
Je pense donc qu'il est effectivement essentiel de raconter.
Quelques exemples populaires de ce que je veux dire, sous spoiler.Je précise que le "résultat" n'engage que moi et que mes exemples sont matière à discussion. Mais ça mériterait un topic à lui seul.
Le seigneur des anneaux:
Star Wars:
Harry Potter:
Bref, raconter et savoir ce qu'on raconte, c'est quand même un peu la base.
2. La question du fond et de la formeÀ ce stade de ma réflexion, j'ai compris que je confondais les termes.En effet, mon "credo" concernait le fond, alors que tu parlais de forme.
Je le précise parce que j'ai vraiment envie qu'on ne mésinterprète pas mon propos. Quand Foenidis parle de ne pas raconter, elle parle de la
manière de faire. Quand je parle de raconter, j'entends par là
ce qu'on fait.
Cependant, même là, je ne suis pas tout-à-fait d'accord. Tout en pensant que c'est un excellent conseil.Je m'explique.
En fait, ta première phrase est une phrase qui se concentre sur l'action tandis que la seconde est centrée sur la description.
S'il semble évident que la première phrase est très moche, ce n'est pas uniquement parce qu'elle raconte; c'est surtout, comme tu le dis, parce qu'elle est laide en soi et qu'elle accumule maladroitement divers problèmes que je n'ai pas tellement envie de développer.
Si on avait eu, à la place:
« Il tira sa couverture de son sac et s'y pelotonna, près du feu, afin de détendre ses muscles endoloris. »
Ça aurait déjà mieux passé.
Comparons maintenant avec ce que tu proposais:
> Pelotonné près du feu dans la couverture tirée de son sac, il détendit ses muscles endoloris.
On constate que la première phrase raconte, ou, pour utiliser mon jargon, "explique". Elle commence par un sujet et un verbe conjugué, ce qui implique l'action. Elle
met donc l'accent sur l'action.
En revanche, la seconde commence par un participe passé ayant valeur d'adjectif. Elle
met donc l'accent sur la description.
Or, hors contexte
(spéciale dédicace, Yves), la seconde est effectivement meilleure. parce qu'une phrase hors contexte est inévitablement meilleure si elle est décrite.
Maintenant, imaginons ces deux mêmes phrases dans un contexte d'action.
a.
La poursuite l'avait épuisé, tout son corps lui faisait mal. Il ne pouvait pas rester comme ça, sans rien faire. Alors, pelotonné près du feu dans la couverture tirée de son sac, il détendit ses muscles endoloris.
b.
La poursuite l'avait épuisé, tout son corps lui faisait mal. Il ne pouvait pas rester comme ça, sans rien faire. Alors, il tira sa couverture de son sac et s'y pelotonna, près du feu, afin de détendre ses muscles endoloris.
On constate qu'
il n'est finalement pas si évident de choisir la meilleure phrase.
Tout ça pour dire qu'entre raconter/expliquer et montrer/décrire, il n'y a pas vraiment de règle. C'est avant tout une question de choix.Je suis -avis personnel spotted- vraiment convaincu que la forme à adopter dépendra de ce qu'on a envie d'écrire et qu'on veut faire passer, une phrase n'existant pas en soi, mais dans un contexte.
3. Un excellent conseilSeulement voilà. Le conseil est excellent.
Pourquoi?
• Déjà, en premier lieu, je dois dire que jusqu'à ce que je te lise, je n'avais absolument pas conscience de tout ce que j'ai écrit sous le point 2 (et qui est peut-être finalement erroné, soit dit en passant) et que du coup,
ton conseil a déjà permis à au moins une personne d'ajouter un outil à sa boiboîte d'écrivain.
• Ensuite, et c'est plus général, tout simplement parce que
la forme explicative est la forme "naturelle". C'est celle qu'une majorité de jeunes auteurs vont choisir instinctivement, car c'est celle qu'il pratiquent tous les jours à l'école, et qu'ils ont tendance à "maîtriser".
Du coup, si, comme je l'ai écrit plus haut, on veut être à même de
choisir quelle est la meilleure technique à employer dans une situation donnée,
il faut maîtriser les deux. Et donc beaucoup pratiquer la forme descriptive.
• Enfin,
parce que dans la fanfic en particulier, on a tendance à beaucoup expliquer. On voit pléthore de paragraphes nous expliquant en détail l'histoire d'un personnage, tuant tout le mystère qui l'entoure, parce que les auteurs veulent s'assurer qu'on bien saisi la miriades de détails que son imaginaire à développé. Surtout dans le premier paragraphe de son récit.
Alors que c'est, très souvent, très chiant à lire et que ça tue une bonne part de l'intérêt du récit. Nombre de fics gagneraient à simplement placer les personnages dans une situation qui pourrait paraître incongrue ou OoC et à "justifier" cela par des descriptions éparses, des dialogues ou de petites phrases savamment dispersées dans l'histoire.
Voilà pour mes remarques.
Je terminerai en te remerciant encore une fois pour ton intervention.
Tu as dit que tu en ferais d'autres dans le même style, je les attends avec impatience.

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