niicfromlozane a écrit:Hoï zaagaan
Hein !? Comment ça Hoï ? Je ressemble pourtant pas à ce truc là!

niicfromlozane a écrit:Tes personnages sont vraiment chouettes, diversifiés, attachants, avec leurs propres démons, intérêt et divergences. Le pari n'était pas gagné d'avance, mais tu as su prendre le temps de t'attarder sur des scènes fortes, comme celle du poisson, des fourmis ou du tigre, pour bien installer leur caractère et leur personnalité. Pour moi, c'est une des grosses réussites de ton récit, d'autant que les persos sont nombreux mais qu'on n'entre pas dans la redite et qu'on les situe rapidement.
C'est quasiment ce que je travaille le plus, les personnages.
J'essaie de créer une vraie personnalité à chaque personnage pour que chacun soir réaliste, dans la mesure du possible.
Même si ça va forcément arriver, j'essaie de pas imaginer deux persos qui sont identiques niveau caractère, pas juste des méchants juste méchants ou des gentils juste gentils. J'essaie de montrer que Kavoth est un méchant avec un sens de l'honneur et de la famille, alors que Bruno c'est un gentil qui respecte personne.
niicfromlozane a écrit:Du côté des idées, c'est un peu le festival. Ton imagination est débordante, et c'est en même temps une force et une faiblesse, en ce sens qu'il y a vraiment pléthore d'informations et que ça part un peu dans tous les sens. Les idées sont là, elles sont souvent originales, mais parfois on se demande si tu as bien fait le tri dans celles que tu vas finalement conserver et soupesé les implications de ce que tu nous sers.
Bien entendu, toutes mes idées ne seront pas conservées ou n'auront pas une importance considérable, et resteront des détails. Mais quand je décris un élément en y mettant plus de 5 lignes, c'est qu'il reviendra plus tard. Que je dise que Fugo est borgne n'est pas forcément intéressant en soit, c'est un élément de description. Si j'avais voulu que ce soit important j'aurai décrit comment il a perdu son oeil, les circonstances et tout.
Par contre, la crème de Régi, le secret de Kavoth,tout l'épisode 5 de " Le dernier espoir avant la fin ", etc...sont des éléments qui reviendront.
J'essaie de régler le plus d'incohérences scénaristiques avant de les faire, et j'en ai déjà faites pas mal ( Notamment une histoire de communicateur dans le chapitre suivant ) et j'essaie réellement de faire gaffe à la différence entre détails et éléments scénaristiques parce que comme tu le dis, je risque beaucoup en posant trop d'idées.
niicfromlozane a écrit:On t'a déjà fait la remarque de la difficulté de rendre au mieux la taille lilliputienne des klimiens, par exemple, et c'est vrai qu'on est parfois à la limite entre ce que tu souhaites faire passer et ce qui passe effectivement. Qu'est-ce qu'un "mètre klimien", par exemple ? Si tout l'environnement est réussi, je m'interroge franchement sur la pertinence de disposer d'un peuple aussi petit dans l'univers DB, même si je peux en voir pas mal d'intérêt. Pour une première fic, ça me semble cependant poser pas mal de souci dans la narration et la rigueur nécessaire à un tel procédé, même si je peux parfaitement comprendre l'intérêt d'avoir des persos déjà exceptionnels qui vont cependant bénéficier d'une marge de progression extrêmement importante.
Un mètre klimien, j'ai cru que ce serait facilement compréhensible, et j'ai cru qu'on comprendrai aussi bien que moi narrateur, mais c'est tout simplement le mètre mais adapté, converti à la taille klimienne. Un mètre klimien doit faire un peu plus de 7 cm à peu près.
L'intérêt de donner cette taille aux klimiens ? J'avoue que plusieurs éléments de réponse pourraient spoiler. En vérité, la notion de taille n'est là que pour montrer la différence entre les klimiens - qui ont adapté l'environnement à leur taille, c'est pour ça que dans les derniers chapitres, en Talia, on remarque peu que Kavoth mesure une vingtaine de haut au final - et Latcalis, l'hostilité des créatures qui ont une taille " standard " au niveau de l'univers. Plus tard, ce sera pour souligner la différence entre Klim ( planète faible ) et les autres planètes de l'Empire.
Il y a quelques autres points, mais à moins de donner justement les explications dans le scénario, je vois pas trop comment faire.
niicfromlozane a écrit:Cela dit, j'en viens au point fort de ta fic : Ginyu.
Au milieu de tous ces OC on retrouve celui dont on sait qu'il va devenir le bras droit de Freezer, dans un corps qui n'est pas celui qu'on connait et qui dit clairement au lecteur : "voilà, je vais vous raconter comment Ginyu va acquérir le corps qu'on lui connait." C'est un élément d'intrigue vraiment stimulant qui pousse vers l'avant et qui, dans mon cas, se suffit presque à lui-même pour poursuivre la lecture. Il faut dire que je tiens Ginyu en bonne position dans le fandom : pour moi, si on l'inclut dans une fic, c'est qu'on a une idée originale pour utiliser son pouvoir si particulier. Et ici, t'en fais le centre de l'intrigue, du coup, je me réjouis de voir comment ça va tourner.
Je suis super content de voir que mon plan a fonctionné [ Insérer rire maléfique ].
Oui, le but de Ginue au début c'est d'être un personnage secondaire, cela permettra exactement comme tu l'a dis de mettre en valeur sa montée en puissance et ses échanges de corps. J'ai rien d'autre à rajouter, tu as tout dit, jusqu'à même définir en quoi le personnage est intéressant.
Au moins, j'ai pas raté ça pour le moment...pas comme...
niicfromlozane a écrit:Après ces compliments j'en viens là ou le bat blesse : le style.
Franchement, c'est pas toujours fameux. Y a effectivement du très bon et je vais pas assassiner encore une fois ta gestion des temps, d'autant que ça s'améliore donc t'es encore en progression et ça, c'est bien. Mais clairement, entre répétitions, tournures un peu lourdes et les fameux verbes, je pense que t'as l'essentiel de ce que tu peux taffer pour t'améliorer et améliorer le confort de lecture, de manière à ce que la forme rejoigne le fond.
...la forme.
Oui, je relis souvent mes premiers chapitres et j'avoue que j'ai du mal aussi. Je veux pas me jeter des fleurs, des toutes petites fleurs, mais ça se voit que j'ai un minimum progressé et sur ça j'en suis content.
Après la concordance des temps j'avoue que c'est vraiment mon point faible. A chaque fois je lis le texte à vois haute et j'ai toujours l'impression que c'est fluide et sans problème. J'essaie de corriger mais j'avoue souvent ne même pas voir le problème.
Les répétitions c'est exactement ce que j'essaie d'éviter...et que je fait tout le temps. Les tournures oui, ça c'est lourd, surtout dans mon " style " d'écriture.
niicfromlozane a écrit:Donc voilà pour les grandes lignes. Je lis, j'y ai du plaisir et je commenterai plus avant.
Et bien merci beaucoup !
Je suis très heureux de ce commentaire !
Tu commenteras plus avant ? Plus souvent ? Ou plus avant longtemps * ?
J'avoue pas avoir compris !
Merci encore !
Bon, je suppose qu'elle a déjà été faite mais je tente quand même:
"FUUUUUUU-ZION ! (de messages), HYAHAAAAAA!"
Pour mémoire, les doubles-posts sont interdits !
LalilaloA NEW CHAPTER
Chapitre spécial: Le Journal de Girga
La cigarette n'avait pas eu le temps de devenir mégot, que déjà le puissant pied, et la botte pleine de terre boueuse, l'écrasait, alors qu'elle était encore chaude. L'instant d'après, imprimée dans le sol, elle fit partie intégrante de la trace du dessous de la chaussure, et s'éteignit, râlant, soufflant d'agonie dans un pschitt sonore qui alla se réverbérer dans la rue d'à coté.
Maudite plainte, qui trahit alors le discret homme. Il s'empressa de se dissimuler sur le coin d'un bâtiment, dos au mur, ferma les yeux, les mains posées plates pour se stabiliser, et retint sa respiration. Immobile, il n'émettait aucun son. Même ses dents écrasées sur elles-même, retinrent longuement, trente horribles secondes, l'air de pénétrer pour assurer l'approvisionnement en gaz. Le nez aussi, d'ailleurs, évitait de l'accueillir.
Silence. Silence maintenu. Une demi-minute d'apnée sur terre.
Silence brisé. Silence interrompu. Deux grands hommes armés discutèrent.
Un duo de grands gaillards se baladait, loin de leur lieu de garde.
Leurs crânes casqués de fer, leurs yeux cachés par une visière, de larges et pimpantes épaulières, un plastron d'une quelconque matière, leurs bras expressifs et placés d'une bien étonnante manière, leurs gants fabriqués dans une étoffe grossière, la ceinture attachée par derrière, le DAN sur l'épaule descendait en bandoulière, un pantalon grossi par de laides genouillères, de grosses bottes qui traînaient dans la poussière, une carrure en apparence guerrière; Il sont bien beaux ces jeunes soldats, à qui ont promet une bien belle carrière !
Et de corps, ils le sont, mais d'esprits, pas très sains.
Portés par de mauvaises valeurs, endoctrinés par une idéologie barbare, ils errent dans la nuit noire, criant presque leur envie de pouvoir. Ils disent, non, ils médisent, et surtout, répètent, ce que leurs pères croyaient, ce que leurs oncles prônaient, et ce sur quoi leurs frères juraient et jureront.
Ils échangent, l'un expliquant, l'autre paraphrasant, et ainsi jusqu'à ce qu'ils réussissent à trouver une autre formulation, pour réitérer l'opération, et passer l'ennui de leur ronde nocturne.
Le premier, plus grand, s'immobilisa alors. Il leva son visage, et crut entendre. Il demanda d'une main tendue devant l'autre, plus gras, l'arrêt de la marche. Puis il l'abaissa: sûrement une idée.
Un petit son étouffé qui était passé par là, un fruit de son imagination, ou de son ennui ?
Les idiots passèrent et continuèrent jusqu'au prochain croisement, s'immobilisèrent, et se remirent à parler.
L'homme dissimulé respira, mais toujours silencieusement. Qui sait si les gamins avaient l'idée de rebrousser chemin ? Il tâta le terrain en passant sa tête sur le côté, et ne vit rien d'autre que la rue vide. Vide jusqu'à ce qu'il s'y hâta, la traversant rapidement, en un éclair.
À l'extrémité, l'arbre, sa destination, son but.
Enfin arrivé, il sauta d'un bond prodigieux dans un buisson sur le côté.
Il y avait quelqu'un à l'intérieur.
Alors, il observa et patienta. Mais rien ne passa, sinon le temps.
Un soldat ? Ils avaient déjà déserté les lieux. Un survivant ? Non, le couple avait sûrement déjà été tué. Un voleur qui pillait les restes de l'endroit ? Pas alors que des gardes tournaient près d'ici.
Quoiqu'il en soit, il n'avait pas l'air de vouloir sortir. Peut-être une embuscade, au risque de faire du bruit ? Improbable.
Bruno se releva et passa le pas de l'arbre. Les questions attendraient, l'intrus non.
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Ça y est, c'est arrivé... Mes parents ont fini par me rejeter. Je n'aurais pas dû leur parler de ce que je faisais là-bas. C'est pour moi un grand honneur de faire parti de ce groupe, pourtant, mais Maman ne comprend pas pourquoi je m'obstine à vouloir aller sur le terrain. Papa pense que je devrais continuer mes études, mais je ne suis pas d'accord: ma vocation est de soigner, pas de prendre sa relève dans la communication. Surtout pour diffuser autant de conneries...
Oui, c'est ce que je leur ai dit. Et c'est pour ça qu'ils m'ont chassé... Je vous le donne en mille: ils pensent que j'ai des idées révolutionnaires, et que je risque d'être un terroriste. La question n'est pas de savoir si j'en suis un, mais de savoir pourquoi je n'en serais pas un ? Ce gouvernement de merde qui ne recherche que la violence pour la domination, qui tue parce que tu l'as dépassé dans la file d'attente, parce que ton gamin est myope... Pourquoi j'aimerais rester là et vivre avec ces enfoirés de corrompus par la dictature ?
Je ne peux pas tenter de m'y opposer. Un simple médecin comme moi face à une armée de soldats armés jusqu'aux dents ? Oui, je pourrais panser une plaie ou deux, puis mourir. Il est impossible pour moi de vivre dans un autre système, les frontières sont fermées. Ah, il y a bien un accès... mais je pense que je préfère vivre à Talia que dans Latcalis.
Et je ne peux pas rejoindre la rébellion. Oui, j'y ai pensé !
Je sais qu'il y a plusieurs groupes au sein de cette rébellion, et justement, ça m'inquiète: si eux-même ne savent pas se coordonner, quelle chance ont-ils contre les armées de la dictature ? Aucune, exactement. Et quand bien même je voudrais y aller, comment les trouver ? Comment ne pas éveiller les soupçons ? Comment ne pas mettre en danger ma famille ?
Je ne sais plus quoi faire, alors je poursuis ma formation de médecin. C'est toujours moins long que pour devenir soldat, j'ai plus facilement du boulot, je serai toujours demandé, même si misérablement payé... mais je resterai un pion de ce gouvernement.
Ai-je une autre alternative ? Absolument pas, et c'est ce qui me désole.
----- Ditutag 10 Tocembrom 804
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L'obscurité avait envahi la pièce bien avant que la nuit ne tombe. Les fenêtres étaient barricadées, chaque accès, mis à part la porte principale, avait été bloqué par des meubles, qui tenaient encore. L'arbre était un relais de communication d'avant l'arrivée au pouvoir du grand général.
Désaffecté comme une bonne partie des habitations de la zone Nord de Talia de cette époque, il tenait difficilement debout. Ce genre de taudis était souvent utilisé par les hors-la-loi, rebelles et squatteurs, pour avoir un toit, mais les gardes passaient souvent par là pour s'adonner à quelques activités un peu moins légales - s'il y avait encore une vraie légalité tout du moins - comme les règlements de compte, les meurtres gratuits, des larcins, des tortures, et même quelques fois des viols ou autres actions du même type.
En l’occurrence, cet arbre-là servait à l'époque à transmettre des messages radios, et d'après l'état des barricades, quelqu'un était venu récemment ici.
Bruno s'avança sur le pas de la porte. Il était paré à toute éventualité: les murs sur le côté étaient solides, et il pourrait s'y cacher si on tirait ou attaquait de front. Il resta alors quelques secondes, debout et immobile, pour déjà d'une, évaluer la menace de l'intrus, et de deux, le tester en cherchant à savoir ses réactions.
Quoiqu'il en soit, Bruno fut surpris. Il ne s'attendait pas à entendre une respiration non camouflée juste à sa gauche, dans le coin, à à peine un mètre sur le coté. L'éclairage de la Lune ne passant qu'à peine l'entrée, personne ne pouvait voir, et même les klimiens semi-nyctalopes, ou distinguer des formes dans une pénombre si intense.
En vérité, bien plus qu'une respiration, c'était la chaleur de son ki que Bruno avait sentie. Une chaleur qui s'éteignait d'ailleurs à grands pas, et le chef rebelle comprit alors instantanément le problème quand son nez huma une odeur de sang, un sang qui déjà se solidifiait, preuve irréfutable du fait que l'homme à gauche tentait de survivre plus qu'autre chose.
Les odeurs et les sens clarifièrent la situation: Bruno était arrivé après un combat sanglant, en présence d'un vainqueur et d'un vaincu. Le vivant mourrait, et le mort souriait vers la vie.
Aussi étrange que cela puisse paraître, le cadavre poignardé du soldat décédé montrait toutes ses dents en regardant l'homme allongé, près du mur, et haletant.
Bruno s'activa alors.
Il agrippa le corps du blessé, et le posa à l'extérieur, pour profiter de la lumière salvatrice de l'astre lumineux de la nuit. Physiquement: de bonnes épaules, un corps svelte et maigrichon, de longs bras, des jambes musclées, un visage aux traits fins, au nez aquilin, aux yeux semi-fermés bleu foncé, aux antennes courbées vers l'intérieur, aux mandibules longues mais fines...Il portait un manteau brun d'hiver, un ample bas de cuir, des bottes lourdes, des gants de laine blanches, maintenant rouges...
... car il tenait avec ses mains son cœur, perforé.
Une épine s'était logée près du poumon, et perforait l'aorte.
Les couleurs énoncées précédemment ne sont plus d'actualité, tant l'hémoglobine recouvrait son corps.
Bruno allongea l'homme au sol et lui adressa la parole. Il voyait ses yeux entrouverts et sa respiration contrôlée, ainsi que son immobilité totale, et son manque de questionnements. Il savait comment faire pour gagner du temps sur sa blessure fatale:
- Je ne suis pas arrivé à temps. Vous allez mourir.
L'expression faciale du condamné ne changea pas. La franchise, le tact de Bruno, l'annonce simple mais rude n'étonna personne.
En revanche, ce qui surprit, ce furent les paroles mélangées au sang et à la salive rougeâtre du blessé:
- Sauvez-le... Les documents... sont dans le tiroir... sous le dessous du lit.
Et soudain, Bruno comprit. Alors que le visage défiguré expirait, le leader rebelle poussa un cri de rage intérieur: Il ne l'avait pas reconnu, alors que tout était si évident.
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Longtemps que je n'avais pas écrit dans mon journal. Et j'ai des choses à dire.
J'ai été accepté comme médecin-secouriste auprès d'un détachement de guerriers qui gardent la frontière entre le pays et la jungle, au Sud. Je n'étais pas seul, nous étions trois jeunes à être envoyés là-bas. Les deux autres étaient sympas, même si l'un d'eux n'est pas revenu. En fait, un monstre s'est approché trop près des fronts...
[ Une dizaine de lignes étaient cachées par une épaisse marque de doigt ensanglantée, ce qui agaça le lecteur ]… mère est morte d'une maladie assez grave qu'elle supportait depuis plus de dix ans. J'ai beaucoup pleuré quand je suis revenu en Talia. Mais mes problèmes ne s'arrêtèrent pas là: mon père a disparu. Je suis allé jusque dans leur vieil arbre, au Nord, et j'ai tout tenté pour le retrouver, j'ai même contacté ses amis. Après plusieurs mois de recherches, j'ai arrêté. On m'a appelé pour une mission au même endroit, et cette fois, c'était plus une urgence qu'autre chose: un tigre blanc de Latcalis complètement difforme était devenu fou et avait détruit à lui seul un avant-poste.
J'y suis allé et j'ai passé trois semaines à sauver des soldats. Heureusement, les autorités compétentes en ont fini avec la bête. Et il y avait la grande Tinky qui est même intervenue. Oui, je l'ai même rencontrée. Charmant personnage.
[ Les passages suivants décrivaient une scène de rencontre amoureuse avec une employée de communication. Cela n'intéressa pas le lecteur, qui lut en diagonale avant de passer à la suite, une page après. Le précédent récit portait la date du „Dilotag 4 Livraom 806“. ]
Je me suis enfin marié avec Nola. Je n'arriverai jamais à décrire ici à quel point je suis heureux, mais il faut me croire. Le mariage – mariage sous la dictature, rappelons-le – s'est bien passé. Et comble du bonheur: je vais être papa.
Oui, Nola m'annonça la nouvelle juste après la cérémonie. Nous commençons à acheter tout ce dont notre enfant a besoin. Dans un mois, Nola pondra l’œuf, et quatre mois plus tard, je pourrai enfin voir naître mon fils. Ou ma fille. Mais j'avoue préférer vouloir un fils.
Nous réfléchissons au prénom. J'hésite entre plusieurs, mais nous n'arrivons jamais à une entente avec ma femme.
[ Une énumération de noms et de situations amoureuses. Le lecteur passa à un autre récit bien plus intéressant.]
Nola m'a fait part d'une chose, et j'ai été incroyablement surpris: elle a un contact avec l'armée rebelle, avec un certain Bruno.
[ Le lecteur sourit. ]Elle m'a confié vouloir les contacter. Elle a la même vision du gouvernement que moi, et elle n'a rien à perdre, si ce n'est moi et notre futur enfant. Je n'ai rien non plus, et j'admets avoir aussi voulu rejoindre leurs rangs. Ce gouvernement doit tomber, mais suis-je capable de rejoindre cette armée et de mener une double-vie ? Enfin, sommes-nous capables ?
Nous en avons beaucoup discuté. Nous allons attendre que l'enfant naisse, et nous contacterons ensuite ce Bruno. J'ai déjà entendu son nom dans les médias. D'après ce qu'on dit, c'est un effroyable homme, mais je ne crois jamais la presse de ce pays: c'est la presse de la dictature, comme si j'allais m'y fier.
On dirait que tout est lié. J'ai été appelé pour supporter les soldats à la frontière de Morio. Un escadron rebelle a fait sauter un avant-poste, et j'ai été appelé en urgence sans qu'on ne me demande mon avis. Je prends le journal avec moi, je vais peut-être rester longtemps là-bas.
-----Diclovtag 22 Petembrom 806
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Il y avait quelqu'un d'autre ici.
Bruno laissa l'homme au sol. C'était lui qu'il cherchait, mais il était mort avant de pouvoir lui donner les données recherchées. Enfin, il avait survécu assez longtemps pour délivrer un dernier message, et il fallait d'ailleurs applaudir son incroyable capacité de survie qui le fit temporiser des dizaines de minutes avec une épine dans le coeur avant sa mort.
Le fumeur rendrait hommage à cette personne qu'il n'avait pas pu sauver. Et cet hommage débuta en remplissant sa dernière volonté, et en allant „ le“ sauver, „le“ étant très certainement l'autre personne dans l'arbre, lequel émettait un ki, un faible ki, mais assez élevé pour que les sens de Bruno le détectent.
Juste avant de pénétrer une seconde fois dans la demeure, le rebelle en chef dissimula soigneusement le corps derrière les buissons. Puis, une fois le mort à l'abri des regards, Bruno s'en retourna à ses affaires. La pénombre ne lui laissant toujours pas entreprendre d'imaginer le chemin vers le second ki, c'était sans compter la maîtrise exceptionnelle de l'énergie vitale de Bruno. Il leva son index supérieur droit, et une lumière scintillante naquit, éclairant les alentours d'un doux byzantin.
Dorénavant bien visible, le cadavre du soldat assassin souriait toujours autant. Même si le scalpel qu'il avait dans le torse – et un second derrière la nuque, mais Bruno ne le vit pas – avait fait taire le klimien, ce dernier pensait qu'il s'était sacrifié pour assassiner un rebelle, et qu'il avait accompli ce pour quoi il était né: servir le pays et aider à la domination.
Il y a décidément des idiots partout. Bruno fracassa sa mâchoire à coup de pompe, laquelle éclata et laissa quelques dents se planter dans le décor.
Le mort paraissait pleurer maintenant. Parfaite expression.
Se dirigeant plus profondément dans la demeure, Bruno chercha dans les différentes pièces un lit ou équivalent, et alors qu'il avait déjà terminé d'inspecter quatre pièces, au rez-de-chaussée, pièces qui servaient de cuisine, de salon, de bureau et de garde-manger, il commença à marcher jusqu'aux escaliers pour accéder au premier et seul étage de la bâtisse.
Le ki s'intensifiait à certains endroits, et chose étrange, celui-ci paraissait adulte tant la quantité était standard. Pourtant, d'après les déductions de Bruno "le" était un gosse.
Ces données ne ralentirent en rien les recherches: les marches gravies, il se rendit compte que la lumière de son doigt commençait à faiblir. Alors il ralluma sa bougie digitale, et continua de marcher.
La lueur se dissipa. Un coup de feu fit vibrer l'arbre.
Avançant d'un seul coup et manquant de briser un mur avec sa vitesse, Bruno esquiva un projectile imaginaire et se colla dans les couloirs. Des réflexes surklimiens qui dominaient ceux des autres, il pouvait esquiver ce genre d'attaques. C'est Kavoth qui donna à Bruno l'intérêt pour les armes à feu et comment les utiliser ou s'en protéger.
Quelqu'un avait une arme. Mais ce n'était pas sur lui qu'il tirait, et un second coup de feu retentit, dans une pièce non loin d'ici. Trois portes à gauche.
Bruno ferma les yeux: il y a deux kis !
L'un était vraiment très faible, et fluctuait beaucoup. L'autre, c'était le premier, et il s'agitait.
Ces tirs étaient-ils là pour prévenir Bruno de se retirer ? Non, il avait été discret, seule la lumière aurait pu le trahir. Et les portes fermées jouaient en sa faveur.
Une autre théorie plus inquiétante était qu'on venait de se faire achever, ou tirer dessus. Mais à deux reprises, c'était certainement une exécution.
Un troisième tir, ce serait indubitablement la mort pour celui qui n'avait pas le flingue, s'il ne l'est pas déjà. Qui sait, son ki encore actif traduirait l'agonie.
Qui étaient-ce d'ailleurs ?
Le gamin, pour sûr, et qui d'autre ? Bruno savait qu'on avait intercepté des infos et que c'était pour ça qu'il y avait eu un mort, mais on avait réellement envoyé deux hommes armés en plus de la patrouille ? Ils ne rigolaient pas. Et Bruno non plus.
Justement, lui qui était passé maître dans les déflagrations précises de ki, il ne l'était pas en détection, tel Bacchio, et grave erreur de ne pas s'être plus entraîné, car ses sens ne l'avaient pas prévenu de la présence de ce deuxième garde. Si ce garde n'était pas mis à terre, il tuerait l'enfant. Si ce garde tuait l'enfant, le garde serait tué. Si le garde était tué, il allait encore falloir dissimuler un cadavre.
Et ce matin, Bruno avait lavé ses gants, alors c'était chiant.
Plusieurs options s'offraient à lui: soit, faire diversion, pour que l'ennemi sorte de la salle, qu'il puisse le stopper, en risquant de faire tuer le second ki en effrayant le premier, soit rentrer directement dans la salle, et tout péter. On risquait alors... de faire tuer le gosse.
Donc Bruno n'eut pas d'autre choix pour s'assurer de la survie de sa cible...
Les réflexions, c'était trop tard. Et puis il se faisait vieux, ça devenait chaud.
Le fumeur chargea une émanation d'énergie dans son caractéristique violet. Il chercha alors sur quoi tirer: le sol serait désavantageux s'il devait se déplacer rapidement, le plafond serait dangereux si le toit s'effondrait et bloquerait le passage...mais les murs, en fait c'est cool, c'est pas résistant et ça permet de créer des ouvertures.
Le faisceau lumineux avala la distance entre la paume de Bruno et un tableau accroché près de la fameuse troisième porte à gauche. Il percuta celui-ci, qui se vit délester d'une superbe peinture du sixième siècle, mais aussi le bois derrière.
Pas d'explosion, juste une brûlure au bon endroit et efficace, le son qui va avec.
La réaction ne se fit pas attendre, et la porte – on entendit le bruit du déverouillage – s'ouvrit avec fracas, la main gauche d'un homme armé dans sa main droite sur la poignée, un DAN encore fumant à hauteur de sa tête, qui passa sa tête dans le couloir pour voir ce qui se passait...
... et ce qui se passait, bah c'était Bruno.
L'espace se posa une question: où était le rebelle klimien ? En effet, le mouvement si rapide et si fluide ne laissa alors pas à l'espace même le temps de comprendre le-dit mouvement, que Bruno avait déjà traversé le couloir, salué l'ennemi, et placé un coup-marteau vertical dans le coude droit.
Le soldat mort chuta inexorablement, s'étala de tout son long, et laissa en suspension dans l'air une longue coulée de sang. Le fusil s'écrasa aussi, et tira une dernière épine, plainte plus percutante que la cigarette, dans le mur en face, avant de rejoindre le silence.
Deux constations, qui en amenèrent plusieurs autres: Bruno n'avait pas tué l'homme avec cette attaque, et durant ces quelques secondes, il y eut deux coups de feu.
Commençons par la première.
Évidemment, un coup de cette puissance, dans cette situation, de ce type, et à cet endroit, ce n'était pas mortel, loin de là. Très douloureux, c'est sûr, mais pas mortel. Handicapant, oui, mais... on a compris. Croyant à une esquive, Bruno s'était étonné de la trajectoire de son mouvement, qu'il soit si divergeant du crâne ciblé au départ. Et cette ligne de sang, d'où vient-elle ?
En seconde partie, parlons de ces coups de feux. L'un, chronologiquement, le second, était le cri d'agonie du DAN. L'autre, il était venu avant, on s'en doutait, mais d'où ?
Et les informations se rejoignirent, tout comme deux regards: celui de Bruno, et celui de l'enfant.
Celui de Bruno, et celui de l'enfant qui venait de tirer une épine dans la tête de son agresseur.
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Je sais pas par où commencer.
C'est la merde. Ouais d'entrée je dis ça: C'est la merde.
J'ai été séparé des autres à cause d'un missile. Je crois que c'était un missile, parce que sinon je vois pas ce qui peut faire d'aussi grosses explosions. On était arrivés sur le lieu des conflits, et on se battait contre gens de Morio qui avaient passé la frontière. Mais ils étaient armés.
Enfin bref, combats, morts, et le missile.
Je sais pas où je suis là. Je crois que je suis tombé dans une tranchée. Je vois quasiment rien et mon matériel est plus haut. Je vais suivre l'endroit et tenter de remonter à la surface.
[ La suite montrait le chemin parcouru et les différentes craintes du jeune klimien. Le lecteur cherchait quelque chose de plus intéressant. Deux dates: 25 et 26 Petembrom 806]
Je suis remonté. Je sais pas où je suis là. Je suis fatigué, j'ai soif: ces deux jours de marche m'ont épuisé. Je suis soit à Morio, soit à Talia et dans les deux cas je suis dans le pétrin. Je suis secouriste de Talia, on va me détester à Morio, je suis un simple égaré et je reste à Morio, si on me retrouve à Talia, je serai tué.
Mais je dois y retourner pour ma femme et mon fils.
[ Il trouva des indications et réussit à trouver la frontière. Il rentra dans un bar de Morio, et regarda la télévision publique. ]Je suis abasourdi par ce que je viens d'entendre.
Les soldats de Morio ont vaincu l'intégralité de la résistance Talienne. Personne n'a été épargné ou presque, et les seuls survivants sont prisonniers. Un des neuf de Talia est arrivé en renfort et a repoussé l'offensive après coup.
Par simple déduction, j'en apprends que je suis considéré comme mort.
Je suis officiellement mort... MORT !
Si je reviens au pays... je serai tué pour trahison pour avoir coopéré avec Morio... alors que j'ai juste involontairement traversé la frontière.
Ma femme doit...
[ Une tâche d'encre et des marques d'encre. Deux pages plus loin, la suite du texte. Les premières lignes étaient très mal écrites par rapport au reste. Beaucoup de ratures et de lettres malformées. Le lecteur dut s'y reprendre à plusieurs fois pour les déchiffrer. ]
Je sais même pas combien de temps je suis resté en cellule. Sûrement une demi-année. J'ai arrêté de compter en fait, au bout d'un moment.
Je suis tout maigre, tout laid... J'ai du mal à penser, à écrire, et même à manger quand je peux.
Ces enfoirés de Morio m'ont enfermé dans un cachot en pensant que j'étais un infiltré de Talia. J'ai été repéré dans le bar, et j'ai été oublié ici...
Six mois, mon enfant est né. C'est sûr. Ma femme a dû pleurer toutes les larmes de son corps...
Comment vais-je faire ?
Ils ont gardé mes effets personnels, et donc ce journal. En revanche, ils ne m'ont pas autorisé à revenir au pays. Trop dangereux, qu'ils ont dit. En plus, bien qu'ils savent que je ne sois qu'un médecin, ils pensent que je dois rester ici et me recréer une vie.
C'est mort, je peux pas faire ça.
[ Pas de date à la fin de cette page. ]
Une semaine que je cherche quelque chose à faire.
Je mendie dans la rue, je compte sur la charité des gens.
Je suis d'ailleurs assez étonné de voir autant de liberté ici, les gens sont souriants et ils peuvent discuter librement dans la rue, s'amuser, rencontrer des gens.
[ Une vingtaine de lignes qui décrivaient les différences entre Morio et Talia. Le lecteur les connaissait déjà, il lut en diagonale. ]
J'ai rencontré un homme, qui m'a donné une pièce. Il m'a demandé si j'avais quelque chose à perdre.
Je lui ai répondu que j'avais une famille, avant, mais que sans eux, ma vie n'avait plus de sens.
Alors il m'a demandé de le suivre.
Nous sommes arrivés jusqu'à un sous-sol. Juste avant de rentrer, il m'a posé une simple question: Êtes-vous prêt à risquer votre vie pour un monde meilleur ?
Ne comprenant pas, j'ai acquiescé.
Il m'a fait rentrer dans une sorte de zone secrète. Des dizaines de grands gaillards se préparaient à partir pour une expédition. Ils étaient tous armés.
J'ai voulu partir, ayant alors très peur. Mais l'homme m'a agrippé par les vêtements et m'a traîné jusque devant les autres. Je me souviens très bien de ses mots:
- Tu veux retourner à Talia ?
Mon visage horrifié a répondu.
- Prends ce fusil, on y va. Tu fais maintenant parti de la rébellion.
La rébellion ? Moi, dans la rébellion ?
Je ne sais pas me battre, ni viser correctement. À quoi vais-je servir ?
Après plusieurs heures de préparation, durant lesquelles il m'a donné à manger, nous sommes partis vers la frontière vers Latcalis. J'ai eu très peur, mais heureusement, ici aussi la frontière est surélevée.
Un gigantesque réseau de rails...
[ Le lecteur tourna les pages. Il lut en diagonale et s'arrêta une centaine de lignes après. Il attrapa les pages incriminées, les arracha, et les brûla d'un faible kikoha. Soupirant, il se remit à la lecture. ]… dans un berceau.
J'aimerais tellement les rejoindre... mais je suis bloqué, ici, dans le QG.
J'ai rencontré un homme plutôt extravagant, qui sortait de dépression. Un certain Giorno, qui m'a expliqué pas mal de trucs.
Il m'a expliqué que j'étais mal camouflé, que mes vêtements étaient mal ajustés et qu'on voyait mes poches à scalpels. Il est vraiment sympa, mais il a l'air détaché. Un ami à lui est mort il y a quelques années, quelque chose comme ça, et il a eu du mal à s'en remettre.
Enfin, ma première mission, c'est de réussir à voler une base ou un bâtiment de l'armée Talienne. Je connais bien ce genre de trucs, pour y être déjà allé dans le temps.
Nous sommes une équipe de quinze, et nous partons dans une heure. D'après Bruno, le grand chef rebelle, c'est un test pour moi, j'espère ne pas trop le décevoir.
[ Le lecteur sourit. Il continua de feuilleter les pages, lisant alors les aventures de cet homme. Après une heure de lecture des dizaines et dizaines de paragraphes, il en arriva enfin à l'actualité. Datée du 30 Petembrom 819, soit une quinzaine d'années après le début du journal, la suite. Le langage utilisé était plus codé, plus simplifié. Il ne traduisait que des idées, comme un journal de bord plus qu'un journal intime. ]
Des dossiers vont être transférés jusqu'à l'arbre de ma femme.
Elle sait que je les lui envoie. Elle va apprendre que c'est moi.
Mon fils ne doit pas savoir. Mon fils ne doit pas être mêlé à tout ça.
--------30 Petembrom 819.
Dossiers transférés.
Je ne connais pas la réaction de ma femme. Je l'ai mise en garde.
Demain, j'irai chez elle pour la revoir. Bruno m'a autorisé à le faire. Mon fils ne sera pas là.
--------1er Donembrom 819
Message de dernière minute. Nala est en danger. Nos messages ont été détectés par les services de l'armée.
Je courus jusqu'à l'arbre de ma femme. Je laissai un message à Bruno pour qu'il me rejoigne.
Nala le savait aussi, elle tenta de revenir à la maison, avec notre fils. Nous devions empêcher les services de renseignement de trouver nos bases de données.
Si je ne me dépêchais pas, je ne pourrais pas les verrouiller. J'avais les codes sur moi, je les cachais dans mon journal. Qui sait ce qui peut leur arriver...
[ Sur la même page, étaient écrits de façon brouillonne, en très gros, à la va-vite, les codes. L'encre utilisé a bavé et de grosses traces bleues en découlaient. Il n'y avait pas de date en bas. C'était le dernier message du cahier. ]
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La main était tendue et ne vacillait pas. Le flingue, qu'elle agrippait fermement, fumait encore, et le canon encore rouge savourait le meurtre. Levée vers le haut, dirigée vers la position de la tête, tête maintenant attribuée au passé, elle commença lentement à lâcher prise, son objectif accompli. Et en même temps que le mouvement, les doigts lâchèrent, et se séparèrent du pistolet, lequel toucha le sol sans un seul bruit.
Le bras s'effondra, et vint se cogner sur la hanche du garçon. Choc qui entraîna la chute irrémédiable de celui-ci, sur le dos.
Abasourdi, Bruno, alors spectateur étonné, n'eut pas le temps de se poser des questions. Enfin, il avait le choix entre s'en poser et s'activer, mais la première solution n'était pas adaptée à l'état actuel de l'individu. Car oui, le gosse était mal en point, et pour cause: une carcasse pauvre, mal nourrie, comme un enfant qui n'aurait pas mangé depuis un bon mois, percée alors par deux impacts d'épines.
Le leader rebelle n'hésita pas, et redressa le garçon qui avait encore les yeux ouverts. Cependant, l'esprit ne suivait pas, et il mit plusieurs secondes à, assis par Bruno, suivre son regard bienfaiteur, lequel ne servait pas à capter l'attention du blessé, mais à détourner celle-ci de l'immense douleur en feintant sa conscience.
Le décalage de cette perception couplé au regard salvateur fut annulé: le bras de Bruno, tentant de soulever le garçon, frôla la blessure.
Son bras fut agité d'un bref soubresaut, et un pic de douleur lui coupa le souffle. Inutile ! Même si supporté par ceux de Bruno, le membre pendait immobile tout du long de son épaule transpercée.
Le cri qui s'ensuivit était glacial, comme annonciateur de mort.
Un hurlement d'un aigu givré par la froideur de son corps s'échappa alors, malgré le sang chaud qui touchait le sol, littéralement au compte goutte, de son épaule et de sa hanche. Ces deux endroits qui accueillaient deux jolies épines qui de part en part les traversaient.
Bruno, hébété par le son ténébreux, défaillit un instant.
Sa tête s'égara. La demi-seconde fatale.
Elle se décrocha et se stabilisa, lévitant devant le garçon gelé, paralysée par le râle noir de givre.
Puis la vie reprit, chez l'homme, mais la peur, de la même façon, réapparut.
Le cadavre vivant se sépara alors de ses sens et s'effondra dans les bras d'un Bruno immobile, complétement stoppé.
On la voyait, l'âme, s'échapper, sortir de la bouche encore ouverte, et monter vers les cieux. Et, simple mortel, Bruno contemplait l'informe corps s'élever. Il avait perdu sa combattivité, sa hargne, sa folie, sa joie, sa fougue, ses envies...
... pour regarder silencieux le fils de son ami mourir ?
Encore une fois, Bruno avait ce fameux choix à faire: analyser la situation et laisser l'âme disparaître, ou agir, mettre de coté les interrogations, sortir de cette paralysie de glace, et sauver la vie de ce garçon.
Seuls les imbéciles ne changaient pas d'avis, et Bruno était un imbécile: il força sur son cou et abaissa sa tête, s'extirpant de la torpeur du râle d'agonie. L'élan lui permit de continuer ce que ses bras avaient débutés, et il souleva le corps vers le haut, força sur ses genoux pour se relever.
Et l'âme retourna dans son lieu d'habitation.
Elle ranima le garçon, qui cracha alors du sang, avant de continuer de crier de plus belle. Ces fois-ci, ce n'étaient plus des cris de mort, mais de souffrance.
Cela arrangeait Bruno.
Le garçon vivait, c'était le principal. Et le leader rebelle put enfin se poser les fameuses questions, tout en apportant les réponses à celles qui étaient résolvables.
Le garçon avait été retenu ici. Le garde lui avait apparemment tiré deux épines dans le corps, lesquelles le tuaient à petit feu. Bon, en contrepartie, grâce à la diversion de Bruno, le garçon avait pu se venger avec un flingue qu'il avait dû ramasser. Mais d'où ?
Bruno regarda aux alentours.
Ici, il y avait une pièce plutôt grande, une salle de travail d'après les divers bureaux et papiers. Il y avait tout un matériel de télécommunication, des chaises, une table, une radio, des documents classés dans des boîtes soigneusement rangées...
... et tout au fond, un cadavre.
Une femme, une trentaine d'années à première vue, une épine bien visible dans son crâne, avec des traces de sang sur ses habits, de doigts plus exactement.
Serait-ce... la mère de cet enfant ?
Soudainement, il entendit, venant du garçon, qui venait de stopper ses cris:
- Qui... êtes vous ?
Ce qui était étonnant, plus que le fait qu'il parlait, c'est qu'il avait arrêté de manifester sa souffrance. Il serra les dents et, préféra trembler et cracher à travers ses dents plutôt que de continuer.
- Je vais te sauver petit. Je suis désolé pour ce qui t'est arrivé.
Le garçon toussa. Bruno n'émit aucune remarque sur les gouttelettes qui lui avaient sali le visage.
- Ma mère... est morte. Je l'ai vengée... C'est tout ce qui compte.
Alors le petit avait déjà accepté tout ça ? Ou il s'apprêtait à pleurer ? La douleur lui empêchait peut-être de le faire.
- Laissez-moi... ici. Je n'ai nulle part où... aller...
Histoire de lui faire comprendre son refus sans parler, Bruno commença à chercher les informations qu'il était venu chercher... au prix de la vie de plusieurs personnes. Et surtout, d'un couple.
Leur enfant, alors dans les bras de son sauveur, attendit de mourir pour les accompagner.
Enfin, tout au fond de la pièce, près de la mère – pour éviter au blessé de la voir, Bruno avait caché au garçon sa présence grâce à une paire de mains - un matelas posé au sol, servant certainement de lit. Il posa le corps du gamin dessus, puis le poussa délicatement pour permettre d'accéder à une planche qui se détachait. Celle-ci, une fois enlevée, déboucha sur un tiroir avec les fameuses informations tant convoitées, contenues à l'intérieur...
... d'un journal.
Bruno s'en empara, avant de reprendre le blessé grave sur ses épaules. Justement, il se posait aussi des questions:
- Qu'est-ce que... vous allez faire de... moi ?
Un sourire se contenta d'apparaitre sur un certain visage.
Alors que la salle était déjà bien loin des deux klimiens, alors que la maison n'abritait plus personne de vivant, alors que la lune n'éclairait plus le visage de Bruno et de l'enfant, la réponse sonna d'elle-même, au fur et à mesure du trajet.
Et quand une cinquantaine de rebelles tous agglutinés autour d'une table virent leur chef débouler avec un gosse entre la vie et la mort, qui d'ailleurs avait déjà les yeux fermés:
- Je vais faire de toi un grand homme.
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Le lecteur reprit dans sa main le journal.
Il se leva et passa dans la salle juste à coté, d'où on entendait des coups de feu.
À l'intérieur, un jeune s'entraînait: des cibles, à plus de cinquante mètres, n'échappaient pas aux balles de Prince du garçon.
Le lecteur s'approcha, puis posa une main sur les épaules de son disciple. Bien entendu, il la posa sur l'épaule droite, l'autre ayant été fragilisée par le passé:
- Arrête tes exercices pour aujourd'hui, Naranz.
L'interpellé posa son arme, avant de se retourner vers son chef, Bruno:
- Vous voulez me parler ?
- Oui, j'ai quelques détails à te donner sur... Allons nous asseoir tu veux bien ?
Une fois posés, Bruno leva le journal et le montra à son élève.
- Je n'ai pas osé le lire depuis tout ce temps.
- Qu'est-ce que c'est ?
- Le journal de ton père, Naranz.
Le garçon baissa les yeux, puis afficha un air déterminé.
- Vous ne m'en aviez jamais parlé !
- C'était pour éviter que tu ne fasses une bêtise.
- Ce journal est à moi ! Il me revient de droit !
- Je ne peux pas te contredire.
Bruno passa donc le document au concerné.
- Ton père t'aimait énormément.
- Il m'a abandonné bien avant que je naisse.
- C'est ta mère qui te l'a dit ?
- Non, j'en ai déduit.
Le leader rebelle se releva alors et commença à partir.
- Ce livre te prouvera le contraire, Naranz. C'était un grand homme, et sache que si je t'ai sauvé, et si je te considère comme un de mes meilleurs éléments, c'est pour que tu deviennes comme lui. Il était bien plus courageux que moi, et je n'ai jamais vu quelqu'un devenir si puissant en si peu de temps.
Sans lui, je ne serais pas ce que je suis, et sans lui... ce monde serait déjà dominé par la dictature.
Il partit et acheva la conversation par une simple phrase. Celle-ci s'ancra en un instant dans la conscience de Naranz:
- Tu as de la chance d'avoir été son fils.
Passant la porte avec nonchalance, Bruno feint de ne pas avoir été atteint par ce court échange. Il retourna dans la première salle et se rassit, pour se reposer.
Il ferma les yeux, se mit confortablement dans le fauteuil abîmé du taudis dans lequel il était, puis chuchota intérieurement:
- Repose en paix, Girga.
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[ Prochain chapitre: Chapitre 20 + Bonus si vous êtes sages ]