Chapitre 8
Jamais dans sa vie, ou presque, il n’avait été aussi frustré. Non, pire, jamais il n’avait été défié par si faible, par si insignifiant. Là où les démons comme Cold et ses rejetons menaient un combat honorable – dans le sens où ils savaient se battre au-delà du commun des mortels – Brutaël rejetait la force ridicule de ce saiyen. Pourquoi le pacificateur de mondes, l’ange démon avait-il cru en une bête si sauvage ? Il avait pourtant lu ses intentions, mais il pensait qu’au plus profond de lui il pourrait y avoir une étincelle de confiance. Brutaël avait des doutes quant à sa santé mentale, tant il se crut trahi, tant son cœur en fut meurtri. Et il ne pouvait plus bouger pour mener à bien sa vengeance…
...ou en tout cas accélérerait-il sa mort en essayant.
Le fait d’avoir été entourloupé de la sorte n’était pas le plus grave, finalement. Quand la divinité sentit que son pouvoir avait été utilisé par sa fille, il s’inquiéta plus que d’habitude, mais quand son souffle, son aura, son identité s’éteint en même temps que celle de son frère, Brutaël lâcha son marteau gigantesque qui s’écrasa sur le sol et le brisa, créant une ouverture énorme entre cet étage où siégeait le géant et le puits d’énergie qui camouflait le palais. Son agacement et sa haine déferlèrent sur une assistance qui enclencha l’état d’urgence pour que tout le monde se réfugie. Il hurlait, un cri si grave que les murs mêmes se craquelaient. Il fronça les yeux et repéra l’énergie du saiyen, il savait exactement où il se situait, où il allait aller le chercher.
Soudainement, Nagaza apparut dans un scintillement de lumière, bravant avec courage le courroux de son père. Malgré tout, elle levait un bras devant ses yeux pour ne pas qu’une quelconque poussière ne souille ses yeux magnifiques. Elle osa alors, elle demanda à son père quelque chose qu’il n’aurait pas pu refuser en temps normal :
-Laissez moi purifier notre planète de sa présence, père !
Il la paralysa d’un regard. Littéralement, elle ne put alors faire aucun mouvement, ne put agiter un sourcil. Ce fut comme si elle avait été éjectée de la vie, tout en réussissant à la maintenir à sa portée. La voix de Brutaël parvint jusqu’aux oreilles de Copper dans l’arrière-salle, rampant, jusqu’à celle de Thalès à des centaines de kilomètres de là, et même…
…à celles d’Obey, dans son vaisseau, là-haut.
Ce furent ces mots qui résonnèrent dans leurs esprits :
-Je vais venir vous chercher.
* * *
-Tu n’as aucune idée de comment atteindre les Floors, hein la gelée !? s’impatientait Thalès.
Cacao manipulait des commandes dans le bureau de Najaï qu’il avait lui même rongé plus tôt. Il finit par ne rien répondre d’autre que… :
-Da.
-Da ?
-Da.
-Je crois que c’est ce qu’il voulait dire par « Je vais m’étouffer ici », précisa Amondo.
Après quelques minutes d’insupportables attentes enfin le saiyen put voir comme un écran. Par chance, les communications avec le vaisseau de l’Empire étaient possible, mais étrangement Cacao ne semblait pas intéressé par le contact, mais par…
...un logiciel de traitement de texte.
Il écrivit quelques mots sur la page ainsi ouverte :
« Notre planète était constituée d’érudits. Nous en savions un rayon sur les différentes races de l’univers, et les saiyens en faisaient parti. Je vais maintenant exploiter une particularité de votre race. »
Thalès recula, intrigué :
-Ne me dis pas que tu crois en ces légendes idiotes de Super Saiyen ?
« Non, mais nous avons imaginé ce que cela était par rapport à des informations sur un étrange être au Sud du territoire de l’Empereur Cold. Bref, j’ai menti. Il est impossible d’accéder aux vaisseaux d’ici. »
Thalès s’approcha vivement de Cacao et attrapa une partie de l’armure de son bras. De même, Amondo et Roket se mirent en position de combat :
-Tu t’es joué de moi ?
L’être constitué de matière rose ne bougea même pas, de peu intimidé.
« Il est impossible à quatre personnes de manipuler un seul des floors. Je ne sais pas ce que vous cherchez à l’intérieur, mais si c’est de vous enfuir, ce ne sera pas possible. Ainsi, je vous propose de mettre à profit vos possibilités raciales pour, disons, procéder à un atterrissage forcé. »
Ah! Quelle déchirure se vit ceignant le visage de notre saiyen préféré ! Et il voyait bien quelle aptitude était concernée, ce qui effraya les deux acolytes. Cependant, la main ne fut pas relâchée :
-Sauf que mon plan, que je vais aussi du coup révéler à mes deux alliés, est d’utiliser les mécanismes de destruction du vaisseau-mère pour annihiler Brutaël et ses gardes, car je sais où il se trouve maintenant.
« Je vois. Alors, si vous me transportez jusqu’au vaisseau en question, je pourrai très facilement suivre ce plan. Sur ce, je vais vous expliquer comment je compte vous transformer. »
-Oui, je me disais bien que ce serait compliqué si j’étais pas un vieil aristo’ capable d’activer ma transformation.
« Il ne suffit pas d’être un saiyen de la haute société pour y parvenir. C’est simplement une question de maîtrise, mais aussi de mental. Vous êtes plus sauvage et talentueux que vos pairs, Thalès, ce ne sera pas un mal pour vous. La capacité innée de votre race pour manipuler et supporter les influences du ki est exceptionnelle. »
-Venez en au fait.
« Les pleines lunes dégagent de l’énergie brute se comptant en millions de millions de zénos, et la concentration intensive de ces ondes reste en suspension dans l’air pendant des semaines. Parfois, nous l’avons étudié sur vos pairs avant leur mort, la transformation s’active sans réelle raison : en fait, les ondes brutes s’étaient rassemblées dans une zone et avaient déclenchées la métamorphose. Diffusées dans l’oxygène donc, les ondes peuvent être attirées par un réel aimant de ki. De cette manière, il suffit de vous concentrer pour parvenir à capter ces ondes et réussir. »
-Je vois….il faut que je te dise quelque chose, mon cher Cacao…
L’être fait de morve rose ne prit pas la peine d’écrire quelque chose d’autre. Il se contenta d’un « Da ».
-Maintenant que tu m’accompagnes, je sais que tu me seras utile. Et heureusement, sinon tu serais déjà mort, ricana-t-il en cherchant du regard l’approbation chez Amondo.
Il l’eut un peu détaché , car les deux acolytes étaient effrayés par la transformation qu’ils ne connaissaient pas. Mais ils en avaient confiance, ils était emplis d’espoir à l’idée de survivre grâce à ce nouvel allié et ses connaissances. Oui, ils étaient comme rassurés : après tant de péripéties, ils allaient enfin vaincre Brutaël, la troupe d’Obey et montrer à l’univers à quel point l’astuce et la force de Thalès étaient des atouts. Les seigneurs de guerre se battraient pour l’éviter et il écrasera tout le monde jusqu’à Freezer. Rien ne pourra l’arrêter, rien que d’y penser faisait jubiler Thalès qui en tremblait.
Alors, ce fut comme un spectre.
« Je vais venir vous chercher ! »
Matérialisée, la haine de Brutaël s’organisa comme une aura solide qui balafra la salle du feu Sergent Najaï, et qui éclata sur le visage ambitieux de Thalès, le faisant reculer comme le plus misérable des insectes lors d’un coup de vent. Que dire d’Amondo, Roket et Cacao qui furent expulsés vers le fond, presque hébétés ?
Puis plus rien, si ce ne fut la lourdeur, le poids de l’esprit du conquérant.
Tous autant qu’ils étaient restèrent trois secondes complètement immobiles, à moitié dans les vapes. Tant de force avait fait vaciller leurs consciences et ils se virent vaincus, au sol, sans défenses. Thalès fut le plus impacté : en lui, c’était une défaite. Alors qu’il avait roulé le dieu, il était rappelé par son péché et il se voyait un échantillon de sa punition lui arriver à la tête, par un simple coup de vent, mais de céleste facture ! Tourmenté, il finit par se relever et comme tous les enfers s’animaient en lui pour garantir que le paradis succombera à l’assaut, il en appela à l’un de ses incubes, Cacao :
-Dépêche toi de me transformer, je n’attendrai pas plus longtemps pour lui régler son compte.
* * *
Ils étaient un seul à la base.
C’était de manière à dire 100 %. Mais, alors qu’il œuvrait pour de maléfiques desseins, et qu’il devait alors maximiser sa concentration sur le contrôle de l’être de destruction suprême, il décida de scinder son âme en quatre entités, inégales : 10 % devinrent alors Glimi, l’orgueil et la vanité, le plus gros défaut de l’être originel, 5 % s’organisèrent en une entité avare et paresseuse, Field, et 5 % créèrent Copper, la colère et la frustration. Pour les 80 % restants, ils restèrent l’être originel, diminué et affaibli de pouvoir, mais ses défauts étaient devenus des entités esclaves qui étaient forcées d’obéir. Oui, Glimi, Copper et Field se devaient de répondre à tous les ordres de leur alter-ego, ou bien ils souffraient. Les décennies et siècles détruisirent des empires et ils restaient des serviteurs.
Les dieux finirent par intervenir quand le sorcier lâcha l’être de destruction suprême vers le paradis. Tous furent tués, sauf un, mais l’incarnation du mal fut enfermé alors que les 80 % de vices se trouvaient aussi morts. Les trois esclaves décidèrent de devenir le maître du cocon de l’être de destruction mais ils n’y parvinrent pas : la moitié de l’âme sombre de leur autre eux se matérialisa et devint Babidi le trompeur, un bien moins terrible mais tout aussi dangereux sorcier des ténèbres. Il alla cacher le cocon et laissa pour mort ses frères. Bien qu’il coopérèrent, une rivalité naquit entre ces trois mauvais êtres : lequel parviendrait à tuer Babidi et à récupérer le scellé ? Parfois ils s’aidaient et paraissaient des frères, mais plus de fois encore ils se trahissaient pour leur propre profit.
Les millénaires portent conseils, et Glimi finit par devenir un commerçant très prisé. Son goût pour le luxe et sa naturelle aisance dans les milieux chics aidèrent à le comparer à un noble, et il s’enrichit considérablement. Par pur orgueil, il laissa ses deux frères entrer dans sa demeure luxueuse et leur offrit un confort ahurissant. Jaloux, ils le piégèrent et alors que Copper éliminait les gardes, Field tortura longuement Glimi qui finit par devenir fou. Ils la laissèrent pour mort dans son château et prirent la fuite. Glimi, dépossédé de ses besoins, erra dans l’espace, blessé et meurtri, sonné et déprimé. On raconte qu’il a finit par se suicider. Mais qui cela importe-t-il ?
Field et Copper entretiennent une relation plutôt tendue mais presque amicale : car Field déteste bouger ses fesses, il paie souvent Copper pour l’aider, et en échange, il lui fournit de quoi préparer ses plans de destruction sur Babidi. En fait, Field attends le moment parfait pour assassiner son frère et s’emparer du cocon. En vérité, Copper le sait très bien, mais il a trop besoin des contacts du fainéant pour obtenir ce qu’il désire. Il attend aussi la trahison de son frère pour le prendre à revers et gagner le jeu.
Mais aujourd’hui, il s’avéra que la guerre entre Brutaël et Obey, avec un petit singe au milieu, ne bouleversent un peu leur relation. Après tout, ce que l’un et l’autre souhaitaient, c’était de tuer le second. Mais sur une planète aussi dangereuse, les chances de mort de Copper étaient supérieures à celles de vies. Ce fut d’ailleurs, parce qu’elle était dangereuse, qu’elle en était profitable. Le saiyen, les vaisseaux d’Obey, les richesses de Gamaran et des armées de Brutaël : ce sont les corbeaux qui profitent le plus de la guerre, car ce sont les seuls qui ne font que des bénéfices. Leur seul paiement ? Un peu de temps d’attente.
Quoiqu’il en fut, on se rappelait tous de l’ami Copper en train de traîner, chaise attachée à lui, des épines dans un bras et le second dans le néant depuis quelques heures, vers la cape de Nagaza. Compliquée comme situation nan ? D’autant plus que les gardes ne semblaient pas trop sensibles à la corruption. En fait, pour une fois Copper était vraiment seul. Il avait pu il y a quelques heures appeler son frère, mais il devait survivre par ses propres moyens le temps qu’il arrive. On observait donc une sorte de grenouille grise ramper dans une position inconfortable, se cognant l’arrière de son large crâne sur le dossier à chaque mouvement, son membre qui s’ouvrait de différentes manières suivant comment il faisait bouger ses doigts, et cette trace de sang qui mettait un peu de poésie dans son sillage.
Enfin, il l’eut. Oui, aussi simplement que cela : il l’attrapa avec ses dents et lâcha une larme de joie. C’était quoi déjà le deal ? Survivre en attrapant ce truc et mourir en échouant ? Par-fait. Maintenant, ce qu’il manquait, c’était attendre sa geôlière. Mais il se devait de profiter du temps restant pour communiquer avec son alter ego. Il lança le lien télépathique et se roula en boule dans un coin, la cape fermement agrippée entre ses griffes :
-Field ? Je t’aime. Viens me chercher Maman.
Il n’y eut pas de réponse jusqu’à des grésillements. C’est Field qui relança l’appel :
-Copper, tu es insupportable.
-Arrête tes compliments. Où es-tu ?
-Pas loin, mais pas proche. D’autres questions ?
-Donne moi une estimation. Je veux savoir quand tu vas arriver et combien de temps je dois encore gagner. Y’a une folle fanatique qui m’a attaché à une chaise et qui m’a défoncé le bras avec des aiguilles. Le saiyen a tué son frère et sa sœur, je crois que tout va bientôt exploser et j’aimerai être éloigné du temple où je suis au moment où tout va péter.
-J’arriverai dans une heure au maximum. Par contre, j’arriverai dans un vaisseau privé de ses sécurités donc mon atterrissage risque d’être reconnaissable. Dis moi où je dois me crasher.
-Une heure c’est compliqué...mais je vais faire de mon mieux. Je ressens une puissante magie autour du temple où je suis, donc y’a peut-être un bouclier. Là où je suis, il y a pas loin une grande statue de serpent dans le désert.
-T’as pas plus imprécis ducon !?
-Tu crois que c’est simple d’être prisonnier, imbécile !?
-Ah, tu m’énerves ! Si j’avais pas besoin de toi…
-C’est moi qui te tuerais, hé hé, ne l’oublie pas.
-Qu’il croit toujours ! J’arrive…
La discussion s’interrompit alors. Copper tenta de se mettre sur ses jambes mais il échoua encore à cause de la chaise. Les gardes autour n’auraient entendus que des murmures étranges, le prenant pour un fou, donc il n’y eut pas lieu de s’inquiéter. Mais comment faire pour attendre une heure, torturé par la fille de Brutaël en rogne ?
La voilà qui arrivait, justement…
* * *
Une belle catastrophe.
C’était cela qui résumait la splendeur de Brutaël, qui descendait alors les marches de son temple, son marteau à la main. Chacun de ses pas résonnait dans tout le temple, il emplissait l’atmosphère d’une lourdeur étrange, et pareillement, les marches elles-mêmes se fissuraient, plus habituées au poids de ce demi-géant, de ce demi-dieu, de ce plein pouvoir qu’elles tentaient de supporter. Mais ses yeux étaient fermés, ses narines bouchées, son bras gauche figé dans le temps…
...et comme une coulée de lave, son sang s’échappait de sa bouche.
Certains serviteurs s’évanouirent à sa vue. Ils ne pouvaient entreprendre la mort prochaine de leur maître. D’autres le suivaient, préférant mourir que de vivre sans lui. Mais Brutaël, qui avançait dans l’allée, se stoppa et leva la tête. Il cherchait l’esprit de ce singe et celui de l’homme dans le vaisseau, et il s’en débarrasserait avant de choisir son successeur...Enfin, deux des potentiels étaient morts, et Nagaza était alors la dernière de ses filles sur cette planète. C’était la raison, d’ailleurs, pour laquelle il ne l’envoya pas combattre : elle serait son héritière et deviendrait une déesse qui saura outrepasser les erreurs de son père.
Le magnifique dieu vivant leva son marteau. Le mouvement d’air fit ouvrir en deux le grand escalier, impraticable dès lors. Un rugissement de sa part dû à l’effort et à ses pieds, les caches d’armes explosèrent accompagnées par les dalles du sol et les mètres proches. L’arme lourde fut projetée en avant, dans le ciel, et une véritable fusée d’or transperça le ciel à une vitesse vertigineuse. En regardant en arrière, on remarquait qu’entre le projectile et Brutaël, la fumée du mouvement était aussi jaunâtre, à la manière du matériau dont était constituée l’arme. Le lancer demanda au corps du titan de s’écraser lourdement sur le sol, pour aller creuser un cratère qui en fit vaciller le temple et blessa des gamaréens. Cadeau de la difficulté : le maître de la planète cracha encore de son sang.
Mais qui était là pour le voir ? Personne, oui. En vérité, vérifiez par vous même, mais un son vif permet à l’attention d’être détournée vivement de quelque chose que l’on fixe, et ici, toute personne s’étant attardée sur l’état du demi-dieu – malgré un attachement prononcé – s’est vue monter les yeux vers le ciel, vers les débris de deux floors d’Obey, pulvérisés par le marteau, qui lui-même alla dériver pour l’éternité dans l’espace. Une véritable pluie de débris organiques et matériels qui abîma le vaisseau mère, et qui abîmera dans peu de temps le sol et Mortera. Brutaël avait réussi son coup, celui de retarder Obey. Il savait bien qu’il ne devait pas tenter de viser le vaisseau principal, plus en retrait, au risque de rater, et de plutôt essayer de concentrer l’attention de la flotte sur les réparations. La chance était de son coté pourrait-on dire, car deux floors se montraient à proximité. Un marteau deux coups.
Redressé, le titan essuya sa bouche avec sa dernière main valide – pour un court temps, Brutaël avait réveillé son autre bras mais son attaque justifiait la nouvelle mort de celui-ci – et s’apprêta à sortir de l’illusion du temple. Juste avant de partir dans sa dernière bataille, il murmura à tout le monde :
-Merci pour vos services. Rien n’est éternellement en vie, mais par mon pouvoir, votre essence sera suspendue pour un temps infini dans ma lumière. Puisse vos descendants honorer ma mémoire et la votre.
Son corps énorme disparut alors, ne laissant que l’image des dunes sur les pupilles de ceux qui révéraient l’ange démon. Mourra-t-il ? Pour sûr. Mais mourra-t-il pour rien ? Surréaliste !
* * *
Dans la pénombre d’une salle, volontairement privée de lumière, elle tendait devant elle ce miroir usé qu’elle camouflait dans cette chambre. Ses capacités innées de nyctalopie se montraient utiles, car elle prenait le temps de se maquiller en homme dans cette obscurité réconfortante. Oui, peut-être le seul endroit où elle pouvait être elle-même...privée de son sexe dans l’armée de Freezer. Difficile d’être respectée dans ce complexe où l’homme se battait et le reste allait tout au mieux s’occuper des machines. Quand elle eut finit de rendre ses traits plus masculins, elle avala cette pilule qui abîmait les cordes vocales de sorte à rendre sa voix plus grave. Par chance, le second du grand Freezer, Zarbon, s’exhibait plus androgyne, et était dans la galaxie certainement dans les dix meilleurs combattants. Elle se servait de cela, de cet homme, son supérieur, pour ne plus avoir à supporter les railleries. Enfin, voilà bien des années qu’elle ne les supportait plus. Après tout, elle était bien plus forte que tous ces idiots, et l’avait prouvé. Aujourd’hui, il ne restait plus qu’un pas avant qu’elle n’anéantisse ce soi-disant demi-dieu, et n’éradique sa planète. Oh, on la connaissait pour sa tactique et elle sera bientôt promue pour avoir géré la difficulté présente, et la soudaine et étrange absence de réponse du sergent Najaï. Voilà qu’on toquait à la porte de sa chambre. Un soldat sous son ordre, elle se releva et répondit, enfilant son armure d’or :
-J’arrive dans une minute. J’espère que c’est important.
Elle était prête. Elle était maintenant le Commandant Obey.
-Que se passe-t-il ? Faites la courte ! s’insurgea-t-elle en ouvrant la porte et en sortant.
Un étrange humanoïde à deux têtes, dont une masquée, parla, plutôt affolé :
-Un objet volant non identifié a traversé le floor numéro 4 et abattu le numéro 6 qui passait derrière au même moment.
-Un objet volant !? Qui venait de la planète !?
-Précisément d’une zone en plein milieu du désert dans la zone que nous survolons actuellement. Mais ce n’est pas tout ! Brutaël lui-même vient d’apparaître. D’après les calculs balistiques, nous pensons que c’est lui qui a abattu nos vaisseaux. Que devons-nous faire ?
-Le sergent Najaï ne répond toujours pas ?
-J’y venais : les restes de ses vêtements ont été retrouvés dans son bureau, et aucune trace de lui ni de la créature qui devait lui servir d’arme expérimentale. Ce sont des soldats qui nous ont alertés. Des êtres lumineux morts ont aussi été retrouvés. D’après des témoignages, il y aurait eu un enfant et au moins deux hommes dont un avec une queue qui se seraient enfuis.
-Je vois...murmura-t-elle agaçé(e).
-Que fait-on, monsieur ?
-Dites aux floors restants de se rapprocher de de ce vaisseau mais de rester à distance suffisante l’un de l’autre en cas de projectile. N’envoyez plus aucunes ressources au sol, mais répondez aux officiers postés à Mortera. Dites leur de cesser les attaques et de se replier dans le bunker principal. Nous allons bombarder Brutaël jusqu’à sa chute dès que je le signalerai, préparez vous à la mise à feu. C’est compris ?
Pour Oui, il salua son supérieur. Il détala bien vite. Obey se tourna alors vers le poste de commandement et s’installa dans le cockpit où elle demanda à braquer les caméras sur Brutaël.
Ce qu’elle vit la figea dans le marbre : il n’y avait pas un mais deux géants qui se toisaient dans les dunes. L’un de lumière et de ténèbres, et l’autre de fureur et de...poils. Ils semblaient adversaires. Le gorille serait-il le saiyen ? De mémoire, ceux de cette race pouvaient sous certaines conditions se changer en monstres. Ils n’étaient pas si effrayants à priori ces « monstres » mais le combat qui allait se dérouler l’expliquera mieux que des théories. Car oui, Obey allait attendre. Elle n’allait pas cracher sur l’occasion de laisser ses deux principaux adversaires s’entretuer, même s’il elle aurait voulu s’en occuper elle même.
Son doigt prêt à demander un tir chirurgical, elle regardait le film avec une envie non dissimulée.
* * *
-Je crois qu’on a problème de taille, il va falloir se dépêcher, grogna Thalès, récemment transformé en Oozaru grâce à la machine de Cacao.
En faisant un détour vers les arrières salles, le scientifique put enfin mettre la main sur assez de composants intéressants et amener les ondes brutes jusqu’au corps de son nouveau maître, celui-ci réagissant vite. Simple entreprise quand on savait que Brutaël IV possédait trois lunes. Le monstre explosa sa tenue de combat, déjà abîmée plus tôt, et l’élasticité ne fonctionna pas correctement à cause des longues fêlures qui annulèrent ses effets. Enfin, ce n’était pas là l’important au final. Le projet était d’atteindre les vaisseaux et éradiquer Brutaël ainsi que son armée. Le plan d’origine se montrait un peu paradoxal, en se voulant de les enrôler, mais au final, arrêter une guerre à lui seul montrera à Freezer sa détermination, le fera grossir en popularité, et ils seront des milliers à vouloir le rejoindre. Il dominera les peuples opprimés, et tuera son pire ennemi tandis qu’ils feront diversion. Simple, efficace, mais difficile.
Amondo, Roket et Cacao tenaient sur son épaule droite, et Thalès cherchait à se rapprocher, en marchant, le plus possible de sous le vaisseau d’Obey. Il effaçait aussi une certaine distance avec le palais camouflé pour narguer le demi-dieu.
-Vous avez entendu ? beugla Amondo en entendant un son.
-Non, rien du tout. Qu’est ce qu’il y a ? répliqua Cacao
-J’ai cru qu’il y avait des pas plus loin devant nous.
Alors qu’on en doutait, Thalès confirma :
-Ce n’était pas prévu qu’il puisse encore bouger. J’ai trop compté sur le fait qu’il dise être malade.
-C’est Brutaël !? s’affola Roket.
-J’espère que non, rajouta Thalès.
-Tu veux dire que tu ne penses pas le battre ?
-Non, mais ça aurait été plus symbolique qu’il meurt sur son trône. Là, il va juste mourir en héros et inspirer des gens qui vont crever dans moins d’une heure. Je vais le dézinguer ! Déguerpissez vite d’ici le temps que je m’en occupe.
Ils sautèrent de son épaule et s’en allèrent jusqu’à la grande statue serpentine qui sert de repère. Après quelques secondes de longue traverse, la carcasse magnifique de Brutaël apparut. Le demi-dieu, déjà mort ou presque, regarda avec haine les yeux du gorille géant. Son marteau était bien loin, son bras gauche ne répondait plus, il saignait de partout, et ses jambes faiblissaient. Il ne pourrait pas se battre comme un guerrier, il devait finir en un seul coup. Mais Thalès le nargua :
-Tu as déjà perdu. Penses-tu que tu peux réussir à me vaincre ? Je me contrôle plutôt bien sous cette forme.
-Tu mens. Tu sais que mes pouvoirs te dépassent, mais tu espères que cette condition m’empêchera de te détruire. N’oublie pas que je peux lire en ton esprit : tu as peur. Un tout petit peu, mais tu a peur. Je n’avais pas prévu que tu me trahisses, je savais les saiyens dociles, mais je me fourvoyais à cause de Freezer. Pourtant, j’avais lu que tu étais excité, mais pas fourbe. Tu as donc changé d’avis entre temps. Dis-moi, qu’est ce qui t’as donné envie de me combattre ?
Perturbé, Thalès se demandait quel était l’intérêt de nier tout ce que lui disait Brutaël. Alors, il se contenta de lui répondre, non sans tenter de prendre le dessus, et même, il fit un pas en avant :
-J’ai compris que je n’avais pas besoin de toi pour m’échapper d’ici. Ma réputation pourfendra l’univers entier quand je t’aurai abattu, toi et ce crétin d’Obey ! Tu oses me dire que tu lis à travers mon esprit, mais moi aussi j’en suis capable sans pouvoirs, de savoir ce que tu penses : tu me crois plus faible que toi, mais tu restes beaucoup trop blessé pour parler. Je les voyais tes gouttes de sang durant ton discours de devin de mes fesses, alors la ramène pas. Ou alors si ; ramène toi avant que ce ne soit moi qui vienne t’écrabouiller.
Quel toupet, se disait Brutaël. Il y croyait dur comme fer, d’après son esprit ; il s’imaginait réellement pouvoir gagner ! Et il avait un peu raison, il ne serait pas capable d’encaisser tous ses coups. Mais sa force brute lui était supérieure d’au moins le triple, alors ce serait peut-être un combat qui se décidera au premier ! Le risque était de cinquante contre cinquante. Mais Brutaël avait une solution qui permettrait de faire d’une pierre deux coups. Car même s’il tuait Thalès, lui et son armée seront décimés par Obey. S’il avait ralenti les offensives des vaisseaux, il n’avait pas endigué cette peste de missiles. Mortera était peut-être abandonnée à l’heure qu’il était, à cause du saiyen, mais rien de sûr.
Thalès s’approcha d’un coup, ne pouvant calmer ses pulsions. Mais il se retint au dernier moment en voyant les gouttes du sang sur le menton du demi-dieu s’évaporer :
-Je sais ce qu’il va faire ! pensa-t-il en se mettant sur le coté.
Non, il n’arriva pas à esquiver correctement. Brutaël avait rassemblée toute son énergie dans un incroyable rayon buccal, lequel fusait à une vitesse vertigineuse sur Thalès, puis en toile de fond, sur Mortera. Le gorille géant encaissa une partie du choc, trop proche, avec son bras droit avant d’être balancé à une centaine de mètres de là dans le sable, le choc assez violent pour faire chuter une dune. L’explosion de la citadelle, au loin, jeta des débris jusque devant Brutaël. Et ce dernier, les yeux injectés de sang et de ki, ne cessait pas le feu. Le rayon, toujours alimenté, s’amenait jusque dans l’espace, et rien n’arrêterait cette énergie. Dans un effort soudain, Brutaël s’agenouilla avant de diriger son visage jusqu’aux vaisseaux spatiaux.
Il visait Obey.
Le vaisseau-mère fut pulvérisé. En un seul coup, une traînée d’acier et de métaux, de gadgets et de corps brûlés puis congelés, désintégrés ou conservés dans le vide. Le rayon de la mort disparut presque au même moment, et la carcasse penchée de Brutaël s’en voyait soustraite d’une vie. Toutes ses dernières énergies avaient été consumées...mais on pourrait avec analyse comprendre qu’il lui en restait, et assez même pour diriger son faisceau vers deux ou trois autres engins, annihilant les floors. Le plus effrayant n’était pas sa puissance démesurée, mais l’état de son visage. Il n’y avait plus rien d’autre que de la chair difforme et des os détachés. Au loin derrière cette masse déifiée, un jeune garçon se tenait le bras, lequel avait été rongé par le feu jusqu’à l’os, et c’était Roket…
...qui avait trouvé ingénieux de forcer la fermeture de la bouche de Brutaël.
La mâchoire ne contint pas tout se ki et implosa, en finissant aussi avec le bras d’un héroïque – si tant fut que le terme puisse être approprié – combattant. Même Amondo et Cacao s’étaient abstenus d’intervenir, ce dernier ayant au final foncé vers le saiyen pour s’occuper de lui. Le combat était gagné pour le groupe : Brutaël s’était suicidé, Obey avait été calcinée, Mortera était en pièces. Le dernier bastion contre la fin de cette planète étaient les quelques floors restants et la seconde fille du demi-dieu, mais quels en étaient la puissance sans commandement ?
Thalès, debout, redevenu « humain », marcha jusqu’à son acolyte rougeâtre en se tenant le bras :
-J’avais pas prévu ça, mais faut croire que l’on est chanceux. Il faut que nous allions capturer la gamine de Brutaël pour la convaincre qu’on a buté son père et qu’elle le transmette aux autres planètes du vieux, puis qu’on infiltre les vaisseaux pour aussi le raconter. C’est comme ça que je deviendrai…
L’énoncé du plan avait été interrompu – et pas par les cris de douleurs de Roket – par l’arrivée fracassante d’un vaisseau typé mercenaires, à l’arrière de la zone couverte par le champ de...le champ de force qui avait disparu lui aussi. Découverte, la cité magnifique de l’armée de Brutaël n’aurait pas eue autant de succès qu’il y a quelques minutes : tous les sujets du demi-dieu étaient morts, s’étant poignardés le coeur avec une lame, suicidés par amour pour leur sauveur décédé. Là-haut, Nagaza se tenait proche du grand autel où la flamme s’épanouissait plus tôt. Elle avait tout désactivé avant de se donner la mort en perforant son cœur d’une lame de ki. Apparemment, elle n’avait pas accepté de devenir la nouvelle icône, et il fut choisis de laisser l’héritage de Gamaran se perdre.
Amondo cacha sa bouche avec sa main :
-Quel horrible spectacle.
-C’est peut-être de la poésie, souligna Roket entre deux gémissements.
-Da.
-On s’en fout de ces idiots là, un vaisseau s’est posé derrière, on doit aller le récupérer.
Alors qu’ils marchaient en contournant le palais, Lourdaud et Field criaient de joie d’avoir réussis à activer les freins de leur vaisseau-crash-test. Ils venaient récupérer Copper comme si de rien n’était.
* * *