CHAPITRE 104
L'étincelle de Konoha
Le regard perdu dans le vide, là où les fleurs pointaient vers Nappa, Bee ne disait plus mot. Le fil de ses pensées semblait s'évader à pleine vitesse dans son esprit.
Il pensait à Yugito, laquelle se trouvait actuellement en grave danger. Car les démons qui avaient envahi son monde en détruiraient chaque parcelle. Et si Raditz s'était déjà présenté comme un trop gros morceau pour Bee, son partenaire brisait tout espoir de résistance.
Ce n'était plus qu'une question d'heures avant que l'enfer initié par Raditz n'achève sa progression sur ce monde. Chaque être vivant de cette planète était en danger, et particulièrement les plus puissants survivants.
Les bulles de Chakra qui entouraient le corps immobile du Jinchūriki captaient l'attention de ses deux partenaires, lesquels l'observaient avec étonnement.
Mais Yugito avait une idée de ce qu'il faisait. Pour laisser ainsi se manifester le pouvoir de son Bijū, de toute évidence involontairement, Bee était en intense discussion intérieure avec Hachibi.
***
Ses pensées devenues plus profondes semblaient trouver leur pic au sein du sceau marqué en lui, alimenté par le pouvoir de l'une des plus anciennes créatures de ce monde.
Assis sur le museau du taureau-poulpe aussi grand qu'une colline, Bee affichait une étrange tête d'enterrement que ses lunettes de Soleil peinaient à dissimuler.
– Désolé, Hachibi... murmura-t-il à l'adresse de son Bijū.
– Tu t'excuses, maintenant ?
– C'est possible, ouais...
– ...
– Après tout, je vais nous sacrifier tous les deux...Suite à ces paroles, Hachibi abaissa sombrement la tête et soupira.
– Le seul que tu vas sacrifier, c'est toi. La mort n'a pas d'emprise sur moi. Cela persistera, peu importe ce que l'on prévoit de faire de mon pouvoir. Et je pense en avoir une idée...La bouche de Bee s'ouvrit légèrement de surprise.
– Et si j'avais raison, reprit alors le titan,
ton sacrifice ne servirait à rien...
– Qu'est-ce que tu veux dire ?
– Autrefois, nous, Bijū, étions réunis en une seule entité...Bee fronça les sourcils.
– Une entité incontrôlable et indestructible. reprit Hachibi qui semblait particulièrement soucieux.
Son Jinchūriki l'observait en silence. Jamais il n'avait vu le colossal démon trembler ainsi d'émotion. Le doute faisait lentement fléchir sa résolution, et pourtant, un raisonnement opposé fleurissait en parallèle dans son esprit.
Après un instant profond de réflexion, Bee sembla soudainement gagner en lucidité.
– Et cette entité, demanda-t-il d'une voix lente,
elle pourrait venir à bout de la menace Saiya-jin ?Une goutte de sueur perla sur le museau d'Hachibi.
– Je pense que ce n'est pas la bonne question, Bee...
– ... ?
– ... car le problème des Saiya-jin ne se poserait plus... parce qu'il ne resterait plus de monde à conquérir... ou à défendre...***
– Bee ?L'interpellé se retourna et fixa Yugito. Et soudain, à son étonnement, il lui sourit. La jeune femme fronça les sourcils face à une expression si inhabituelle sur le visage de Bee.
– Je viens de me rappeler que j'avais oublié un truc... marmonna-t-il alors.
– Oublié un truc ? répéta Yugito qui s'avança en fixant son amant droit dans les yeux.
Tu crois vraiment que c'est le moment ?Elle s'inquiétait pour Bee, dont les réactions semblaient irrationnelles.
– Oui, répondit alors l'épéiste de Kumo.
Pardonne-moi.
– Hein ?Mais elle ne put davantage réagir qu'un violent choc lui fit aussitôt perdre connaissance. Choqué, Neji effectua un pas en arrière en se mettant en garde face à Bee, lequel maintenait toujours son coude en l'air suite au coup qu'il venait d'abattre sur Yugito.
– Qu'est-ce que... ?! balbutia le Hyūga.
– Détends-toi, grommela Bee.
Je n'ai pas pété les plombs.Le regard tendu de Neji se posa sur la jeune femme inconsciente à ses pieds.
– Elle ne m'aurait pas laissé faire... expliqua Bee.
J'étais obligé de la prendre par surprise...
– Laissé faire quoi ? interrogea le jeune garçon, suspicieux.
Bee fixa un instant Neji de son expression neutre. Mais ce dernier, dont les Byakugan étaient activés, avait appris à lire sur le visage de cet homme, à force de le fréquenter.
Et ce qu'il voyait à présent ressemblait à une étonnante tristesse. Mais cela ne se limitait pas à cette observation.
Le Jinchūriki de Kumo semblait animé d'une étonnante résolution.
– Que comptes-tu faire ? insista Neji d'un ton plus direct.
Son interlocuteur resta silencieux encore un instant, puis il tourna brusquement les talons.
– Prends soin de Yugito.Alors, sous le regard stupéfait du Hyūga, Bee s'éloigna.
– Bee ! s'exclama Neji qui le rattrapa et se plaça devant lui.
Face au visage de marbre du Shinobi, une hypothèse se dessina soudain dans son esprit.
– Ne me dis pas que...Mais avant même de terminer sa phrase, il sut qu'il avait raison.
– ... tu comptes te rendre à l'Akatsuki... !***
Le visage juvénile du garçon tétanisé par la peur se dévoilait au monde Shinobi.
L'espoir malsain représenté par l'organisation criminelle faisait maintenant place au tout dernier rempart qui se tenait encore debout entre les deux Saiya-jin et la civilisation. Face à deux éléphants désireux d'anéantir une fourmilière se tenait la plus petite d'entre-elles.
– Konoha ? interrogea Nappa.
C'est quoi ça ?
– Un village... répondit évasivement Raditz.
***
– Tu penses que donner ton pouvoir à l'Akatsuki pourra changer les choses ? demanda Neji d'une voix inquiète.
– C'est le seul moyen, reprit Bee, qui s'était de nouveau immobilisé.
Tu as mieux ?
– ... Yugito serait contre.Bee tourna la tête en direction du corps étendu de sa bien-aimée. Il ne put s'empêcher de rester ainsi un instant, rêveur, avant de reprendre la parole...
– Tu prendras soin d'elle ?Face l'expression déterminée de son interlocuteur, Neji savait bien qu'il était inutile d'essayer davantage de l'en empêcher. Le seul moyen de stopper Bee était par la force, et il n'existait sans doute plus un seul ninja vivant pouvant se targuer d'un tel défis.
Désactivant ses Byakugan clos, le Hyūga soupira, avant d'acquiescer d'un lent signe de la tête. Lorsqu'il rouvrit les paupières, il remarqua face à lui un poing fermé, tendu par Bee, lequel présentait de nouveau un sourire sincère dessiné sur ses lèvres.
Alors, Neji tapa dans son poing. Et soudain s'imposa furtivement dans son esprit l'image colossale d'un imposant bovin.
– Cimer, conclut Bee.
Poto.Sur ce mot, le Shinobi s'éloigna d'une démarche lente, mais déterminée, sous l’œil du Hyūga. Ce dernier, fixant le dos du Jinchūriki d'un regard neutre d'apparence, ne put toutefois retenir un soupire peiné.
* Bonne chance, pensa alors Neji.
Mon ami. *Tandis qu'il s'éloignait définitivement de ses camarades, le regard de Bee se posa un instant sur son tatouage en forme de taureau.
***
– Tu ne t'opposes pas à mon choix ? s'étonna alors l'hôte face au silence de son démon.
– Bien sûr que non, répliqua Hachibi.
Je te connais mieux que personne...Il s'interrompit.
– J'ai compris ton plan.– Cool. Je vais pisser.***
Et tandis que le Jinchūriki s'activait, il ne savait pas que des yeux étrangers le fixaient. À bonne distance, au sommet d'une des collines surplombant ce terrain irrégulier, l'observait une silhouette encapuchonnée assise à même la terre.
– Comme une ambiance de fin du monde...Derrière elle se tenaient quatre individus.
– C'est Killer Bee, de Kumo... murmura l'un d'eux.
– Le Jinchūriki d'Hachibi... ? ajouta un deuxième.
C'est un gros morceau...
– On dit de lui qu'il peut manier presque autant d'épées que son démon n'a de qu...Un rictus issu de la silhouette encapuchonnée interrompit la discussion.
– Je m'en occupe, murmura alors la voix féminine en se relevant.
Accompagnant fluidement son mouvement naturel, son pied glissa volontairement, emportant gracieusement le katana enfoncé dans son fourreau qui se trouvait en dessous. L'arme qui tourbillonnait dans le vide avec légèreté n'entrava pas le silence stupéfait qui s'installait.
– Finalement, le vieux croûton avait raison, ajouta-t-elle tandis que la lame tourbillonnante arrivait à sa hauteur.
– N'en fais pas trop.
– On verra ! lâcha-t-elle avec un clin d’œil.
Bondissant dans les airs, elle se rattrapa avec aisance sur le manche de son épée et géra l'équilibre avec une telle précision qu'elle glissa sur la pente comme on surferait sur une vague. Son regard était pointé en direction de Bee, à la manière d'un prédateur à l'affût ayant sélectionné sa proie.
– Le vieux croûton ? répéta l'un des observateurs avec un sourire amusé.
Quel irrespect...
– Il ne devrait pas tarder, d'ailleurs...***
Les Scouter des deux Saiya-jin se mirent soudainement à s'activer de nouveau. Quelqu'un d'autre se trouvait sur cette scène irréelle !
Raditz ne comprenait pas. Le terrain tout entier venait d'être soumis à une intense déflagration. Il ne devrait pas y avoir âme qui vive sur des kilomètres. D'ailleurs, cela valait également pour le gamin de Konoha...
En dépit de ces étrangetés, seul le plus petit des Saiya-jin avait tourné son attention vers le nouvel individu qu'il venait tout juste de détecter.
– J'ai bien envie de jouer un peu avec ce gamin, marmonna Nappa.
Raditz n'entendit ses paroles que de loin, réalisant lentement que son partenaire se désintéressait totalement de la force de combat qui se trouvait à présent à plus lointaine distance. C'était compréhensible : pour le colosse, lorsque deux niveaux inférieurs à 500 unités se trouvaient dans son environnement, il ne s'intéressait qu'au plus proche.
Après tout, quel observateur se préoccuperait d'un cloporte éloigné avec un moucheron évoluant juste sous son nez ?
Mais Radiz gardait quant à lui son attention totalement focalisée sur le mystérieux individu qui venait de faire son apparition. Car lui savait faire la différence entre un niveau supérieur à 20 unités et un niveau supérieur à 200 unités, surtout sur ce monde...
C'était l'écart qu'il existait entre un apprenti ninja et un Shinobi d'élite.
Et si le Saiya-jin était confiant face à l'audace d'un gamin isolé, il l'était tout de suite beaucoup moins quand un combattant forcément expérimenté se dévoilait.
Plissant les yeux afin de mieux discerner cet individu, Raditz ne parvint pas à voir son visage. Ce n'était pas qu'il était trop éloigné. Seulement, le dernier arrivant était dissimulé derrière un livre.
– Oh, Nappa... tenta de l'interpeller son coéquipier.
– On pourrait peut-être s'en servir comme esclave ? interrogea le colosse en fixant Konohamaru avec amusement.
* Merde, il s'en fout complètement... ! *Le regard de Raditz restait focalisé sur l'individu le plus lointain. Il s'attarda un bref instant sur son livre, y discernant un symbole de tourbillon qui lui était étrangement familier...
– Tu devrais te détendre, Raditz, reprit alors Nappa, qui avait quand même remarqué le soudain sérieux de son frère de guerre.
Peu importe ce que ça cache, personne en ce monde n'est en mesure de me laisser... ne serait-ce qu'un seul bleu.Et son dos parfaitement propre témoignait bien de la véracité de ses propos. Après avoir encaissé de multiples assauts de l'Akatsuki, le corps de Nappa était indemne.
Néanmoins, face à l'étrange mutisme persistant de Raditz, son partenaire fronça les sourcils.
– Bien, je l'élimine.Et tandis qu'il prononçait ses mots, Raditz vit l'individu qu'il observait abaisser son livre, dévoilant son visage.
Nappa se propulsa droit sur Konohamaru. Celui-ci ne bougea pas. Ce n'était pas par courage ou inconscience – tout cela, il en avait largement fait preuve par sa seule présence. C'était juste que Nappa, même sans être à fond, traversait la distance qui les séparait durant un temps que l'esprit du ninja ne pouvait encore appréhender.
Même le Sharingan qui l'observait ne parvint pas à percevoir correctement le mouvement du colosse. Il distingua par ailleurs encore moins celui – pour le coup à fond – de la deuxième silhouette.
Aucun des observateurs n'aurait vraiment pu voir ce qu'il se passa entre l'instant de l'assaut et la suite.
Toutefois, le violent son de l'impact qui déchira l'atmosphère de son onde de choc fut parfaitement perçu par l’attention lointaine de Zetsu. Pourtant, presque tous les témoins indirects fermèrent les yeux à cet instant, incapables de supporter l'horreur que cela signifiait.
***
Jiraiya et Tsunade avaient sombrement baissé la tête d'un même geste. Isolés dans leur impuissance, ils ne pouvaient décemment regarder pareille scène.
Plongés dans un sentiment d'horreur, ils réagirent à peine au cri de stupeur prononcé par Naruto. Mais, face à l'insistance des exclamations de surprise répétées du jeune ninja, ils réalisèrent que quelque chose d'imprévu s'était produit. Et c'est à contre-cœur qu'ils rouvrirent les yeux, non-désireux de voir la suite des événements...
La scène qu'il s'offrit à eux perturba fortement leur esprit. Et pour cause : personne n'aurait pu imaginer un tel dénouement...
***
Réapparaissant au milieu des hautes herbes dans lesquelles il avait été violemment projeté, Konohamaru se relevait. Bien que sonné, soufflé et choqué, le garçon était, du reste, totalement indemne.
Un autre individu avait également été envoyé au tapis. Étendu de tous son long, plus heurté dans son âme que réellement blessé, Nappa affichait toutefois un léger bleu au niveau de sa tempe droite.
– Puis-je savoir ce que cela signifie... murmura dangereusement le colossal Saiya-jin qui s'appuya lentement sur ses mains pour se relever.
Son regard se teintait de fureur tandis qu'il fixait avec une violence menaçante la silhouette de celui qui, par surprise, avait réussi l'exploit de le mettre à terre.
– ... Raditz ?!