par Supaman le Jeu Mai 01, 2025 10:31
Je comprends ta remarque, et elle me semble justifiée sur plusieurs points. D’abord, à mes yeux, nous ne sommes pas gouvernés par un véritable gouvernement centriste. Je ne fais pas simplement référence à un positionnement idéologique abstrait. Je veux dire par là qu’il s’agit, selon moi, d’un gouvernement de compromis électoral, de rassemblement stratégique, qui va de la droite classique (à la limite du RN) jusqu’au centre gauche. Ce n’est pas un centre au sens fort, construit autour d’une cohérence doctrinale ou d’un engagement pour la raison, la nuance et la méthode.
C’est plutôt un pouvoir qui oscille, qui compose selon les circonstances, qui emprunte à droite des réflexes d’autorité et à gauche une rhétorique sociale, sans jamais s’adosser à une boussole claire.
Le centrisme, dans le sens que je défends, suppose plus qu’un entre-deux : il exige une volonté active de modération, d’écoute des données, de refus des extrêmes. Pas seulement en termes d’alliances, mais dans la structure même de la pensée politique.
Le centrisme, dans son idéal, suppose une exigence de rationalité, de mesure, de compromis et d’écoute, là où l’on peut constater aujourd’hui des postures autoritaires, des décisions opportunistes, et des logiques identitaires à peine voilées. De mon point de vue, le centrisme peut être vu comme une disposition intellectuelle proche d’un état d’esprit scientifique et ouvert, où la curiosité, la rigueur et l’humilité priment sur l’ego et les certitudes.
Par ailleurs, je dois dire que le fait qu’un homme politique de premier plan, en 2025, soit un religieux pratiquant m’interroge (vraiment) profondément. Ce n’est pas une critique de la foi en tant que telle, ni une forme de laïcisme agressif. Mais cela me semble problématique à ce niveau de responsabilité, parce que cela indique, selon moi, une difficulté (ou un refus) à confronter lucidement les incohérences flagrantes entre les récits religieux traditionnels et les connaissances établies par la science contemporaine.
Nous vivons à une époque où la cosmologie, la biologie, la physique quantique ou les sciences cognitives ont radicalement transformé notre compréhension du monde. Continuer, malgré cela, à adhérer à des textes qui décrivent la création du monde en sept jours, l’existence d’une âme séparée du corps ou des miracles surnaturels, c’est faire preuve d’une dissonance cognitive qui, à mon sens, interroge la capacité à appliquer les exigences de la raison de manière cohérente.
Un responsable politique doit être capable d’arbitrer entre des convictions personnelles et des faits objectivables. Or, de mon point de vue, lorsqu’un dirigeant adhère à des dogmes religieux, il y a toujours un risque (même inconscient) qu’il laisse ces dogmes orienter ses décisions, ou qu’il refuse de reconnaître certaines vérités scientifiques parce qu’elles heurtent ses croyances. Et en 2025, cela me semble non seulement anachronique, mais préoccupant pour l’avenir d’une gouvernance politique éclairée.
Concernant Hanouna, je ne savais pas qu’il avait tenu de tels propos envers l’extrême gauche, qu’il traiterait donc non seulement comme des adversaires politiques, mais comme des ennemis de la nation. S’il a vraiment tenu ces propos, cela confirme sa vision profondément autoritaire et manichéenne de la société. Mais malgré de tels propos, je pense qu’il ne faut pas sous-estimer sa capacité à séduire une certaine frange de l’extrême gauche : celle qui a basculé dans le complotisme, dans le rejet des institutions et dans une forme de populisme antisystème. C’est là que le phénomène Hanouna devient particulièrement dangereux.
Il incarne plutôt bien ce qu’on peut appeler un confusionnisme politique : une stratégie qui consiste à brouiller les repères idéologiques pour capter des colères et des affects dispersés, parfois même contradictoires. Il agrège le ressentiment, sans jamais proposer de projet cohérent. Son discours peut contenir à la fois des slogans d’ordre, des critiques de la finance mondiale, des appels à l’autorité et une défense du "bon sens" populaire. C’est une logique de captation émotionnelle plus que de conviction politique.
Et dans ce climat confus, toute parole rationnelle devient suspecte, toute complexité est perçue comme une trahison, et la tentation autoritaire s’installe peu à peu comme seule réponse "claire" au chaos perçu. C’est pourquoi je continue de penser qu’il faut défendre l’idée (peut-être utopique) d’un centrisme véritable, fondé sur la raison, l’honnêteté intellectuelle, et le respect des libertés. C’est fragile, mais nécessaire.
EDIT
Il semblerait qu’Hanouna ait démenti la Une de VA et qu’il ne soit pas candidat.