par Antarka le Ven Déc 13, 2013 23:54
Je plussoie totalement Batroux sur tout ce qu'il a dit.
Je vais aussi parler d'une autre forme de handicap qui me met mal à l'aise : la vieillesse. J'ai souvent bosser avec des personnes très très agées, et ma foi, ça me conforte dans l'idée que parfois, vieillir c'est vraiment moche. Déja le cliché de la sagesse qui vient avec l'age est TRES discutable, tant les résidents de maison de retraite sont parfois des monstres les uns envers les autres, au taux de maturité largement inférieur à la pire des classes de CP.
Aujourd'hui encore, un de mes résidents de mon lieux de stage s'est retrouvé "bloqué" (il arrivait pu à marcher) a l'entrée de la cantine de la maison de retraite, debout certes, stable certes, mais n'arrivait plus à mettre un pied devant l'autre, totalement crispé sur son déambulateur, l'air de fournir un effort surhumain pour essayer de se faire obéir de son propre corps... les autres résidents se sont très méchamment moqué de lui, lui mettant sa perte d'autonomie en pleine face (comme si le résident en question se sentait déja pas assez mal à cause de ça).
Ensuite... la plupart des gens, quand on leur parle de dépendance due à l'age, ils ont une notion très abstraite de ce que ça peut représenter. Ils imaginent une baisse de mobilité, des raideurs entrainant un besoin d'assistance pour certains gestes de la vie courante (ne plus pouvoir se baisser, donc ne plus pouvoir faire sa toilette en bas), ils imaginent aussi Alzeihmer comme un état "ou la personne se rappelle de rien donc ne souffre pas" alors que la réalité peut aller bien au dela de ça.
Perso mercredi, j'ai du enfiler des gants et masser un anus de résidente pendant quelques minutes, parce que pour parler familièrement elle avait "la crotte au cul" mais les musles tellement atrophiés qu'elle ne pouvait plus pousser par elle-même pour évacuer ce gros caca, dame qui avait absolument toute sa tête (je précise). Ca m'a quand même legèrement perturbé (pas pour le coté scato de la chose, mais bien parce que j'étais mal pour elle)
Voir un homme (ou une femme hein) qui a été sportif de ses 10 à 70 ans, se retrouver démuni face à une simple marche d'escalier, car il sait que si il s'y prend mal il risque de chuter, se peter le col du fémur et ne plus jamais marcher, ca me perturbe.
Voir une femme pleurer parce que ça fait 20 minutes qu'elle essaie (en vain) de se rappeler les noms de ses propres enfants (si elle pleure c'est avant tout parce que l'esprit humain est tordu et qu'elle culpabilise à mort de pu se souvenir de leurs noms, et qu'elle l'interprete comme le fait qu'elle est une mauvaise femme et une mère indigne) ça me perturbe aussi.
Voire des personnes totalement dépendantes physiquement, très très agées, incapable de faire quoi que ce soit par elles-même, me sortir une liste de tout ce pourquoi elles prefereraient mourrir malgré leur propre peur de la mort(elles ont déja eu une belle vie, elles souffrent au quotidien physiquement et moralement, n'ont plus d'espoir de connaitre de vrai moment de bonheur dans le futur, ne comprennent absolument pas pourquoi continuer à vivre), sans que je puisse leur opposer UN SEUL autre argument que "ces connards égoistes de vivants seront tristes si vous mourrez" (argument que je garde pour moi), ça me perturbe.
Bref, comme dit Batroux, le handicap c'est un concept vraiment très vaste, qui peut prendre de nombreux aspects.
C'est un θ, il croyait qu'il était τ, mais en fait il est θ.