Amis du soir bonsoir
Fleeeeeemme de faire une intro ce soir, my bad, tout mon temps de cerveau disponible est parti dans la relecture du coup j'ai comme qui dirait le cerveau liquide là :3
Chapitre 11 : L'empereur est mort
L’Orangeraie avait totalement changé de visage. Passant de monstre à démon. Son envergure avait soudain décuplé en termes d’astres, d’aura apocalyptique, de teintes infernales… auxquelles s’ajoutaient désormais tout un tas de bruits cosmiques indescriptiblement effroyables. Conquêtes-éclair ; viols et bains de sang ; combat à un contre un ; à un contre dix ; à dix contre un… ; en quelques poignées de minutes… Winter avait tout vu, tout entendu… et tentait encore de se tirer loin de tout ce bordel. Bordel apparu de nulle part…
… Comme un bouton sur le visage, qu'on ne se connaissait pas cinq minutes plus tôt.
Winter avait récupéré son vaisseau volé… par surprise évidemment.
Une attaque aérienne, survenue tandis qu'il sortait encore de l'atmosphère terrestre, attaque qu'il maudissait ô combien… sans savoir qu'elle lui avait en réalité sauvé la vie, en cela qu'au bout de la trajectoire qu'il suivait avant l'incident, l'attendait une poche de gravité qui les aurait aplatis, lui et son vaisseau, comme une canette de soda sur laquelle s'assoit un éléphant… en état de grossesse… de triplés.
Mais les voies du destin s'étaient à nouveau montrées impénétrables.
Une fois son vaisseau récupéré, Winter fit à nouveau route vers la sortie de L’Orangerie……
… Quand un énième incident le poussa à se “garer sur le côté”. Ou plutôt à s’écraser dans le ravin. Ou plutôt dans la fosse aux lions. Des lions — ou plutôt des singes ailés — l’ayant abattu en faisant des bonds fantastiques de plusieurs centaines de mètres.
Ils avaient sauté jusqu’à toucher le ciel, écorchant chaque fois un peu plus les ailes de l’oiseau de fer, et ce jusqu’à ce que la portance en berne oblige Winter à recourir au siège éjectable. Il abandonna ainsi ce vaisseau qui lui était au moins aussi précieux que sa propre vie. Et lorsqu’il avait atterri lourdement sur leurs plates bandes… les lions de la fosse l’attendaient déjà.
Leurs crinières aussi noires que leurs yeux barbares témoignaient moins de leur sauvagerie que les vêtements archaïques dont ils étaient drapés. Hommes et femmes rivalisaient de nudité mal dissimulée là où Winter du haut de sa complète tenue d’Adam ne dégageait que classe et grandeur ; n’eut été la “jambe de bois” qu’il s’efforçait encore d’oublier.
Un homme et une femme se détachèrent du lot en souriant, leurs queues de singes mal éduqués se déroulant lentement de leurs tailles. Winter avisa immédiatement la femme… elle semblait plus forte que l’autre malgré sa taille fine. Un kiaï chargé à bloc pour l’homme, et un coup de genou dans les dents pour la femme. Pour éviter un corps-à-corps à 2 contre 1.
Tout se passa exactement comme Winter venait de le prévoir. L’homme fut gelé sur place par le mur invisible qu’il retenait encore à mains nues, veines saillantes ; tandis que la femme qui s’était jetée sur lui traversait déjà plusieurs couches de nuages, laissant derrière elle un long filet de sang vertical. L’autre s’évanouissait au même instant, quand ses deux bras cédèrent en pointant soudain vers le bas, de 80°.
Winter n’eut même pas le temps de penser à une manière d’atomiser tous ces emmerdeurs d’un coup… que deux nouveaux sayens se détachaient de la masse établie en foutoir autour de lui. C’est à cet instant que le nihilien réalisa qu’il y avait à peu près un demi-millier de sayens dans la zone. Même pour lui ça commençait à faire beaucoup.
Il ne s’agissait pas de sayens d’un seul et même univers, c’était évident.
L’écart-type des puissances était trop grand.
Et lorsque le dernier des nihiliens s’arrogea quelques secondes pour scanner le continent… ce fut pour réaliser, au comble de la surprise, que des groupes comme celui-ci, il y en avait masse d’autres un peu partout. La conclusion était évidente : la “maison” était trop infestée par les “termites”, il n’y avait plus aucun meuble à sauver, il fallait débarrasser le plancher avant de se faire soi-même bouffer ; et désormais la seule manière de se débarrasser de cette engeance était d’y passer des plombes ou plus simplement de faire sauter la Maison-Terre.
Winter recentra son attention sur les deux nouveaux challengers, se demandant pourquoi ces gens s’avançaient toujours deux par deux et non “par un” ou “par trois”… ou plus. En tout cas ces deux-là semblaient encore plus chiants que les précédents. Et les tatouages tribaux différaient encore une fois. Ces sayens étaient-ils en pleine compétition pour leurs clans respectifs ? Winter focalisa son attention sur l’homme cette fois. Ses traits semblaient verser du côté simiesque plus que du côté humain. Ses dents étaient des crocs. Ses yeux : dépourvus de pupilles. Et ses muscles recouverts de poils étaient au moins aussi impressionnants que ceux de Piccolo ou de Tenshinhan.
L’adolescent qui marchait à ses côtés semblait posséder une capacité secrète singulière, seule explication possible au sourire qu’il arborait, alors que — tout le monde le voyait bien — il était à priori et de loin le maillon faible du combat qui se profilait.
Finalement, l’empereur nihilien joua la sûreté et se focalisa sur l’adolescent. La prudence bientôt légendaire de Winter refit surface, exacerbée par la défaite cuisante qu’il s’était mangée suite au Sokidan de Yamcha, cinq ans plus tôt.
L’empereur concentra son énergie de façon totalement exagérée ; la région entière trembla et le tiers des sayens présents chuta au sol. Dans un élan tout aussi exagéré, Winter concentra — au bout de son bras aux muscles tendus à l’extrême — une décharge magnétique répulsive équivalente en puissance à la Death Ball qu’il avait lancée sur la Terre quelques années plus tôt. Le pauvre adolescent fut atomisé dans la seconde, en même temps que tous les sayens qui avaient eu le malheur de se trouver derrière lui.
L’empereur généra un bouclier extrêmement solide, anticipant la charge de la brute spartiate, qui n’en méritait clairement pas autant. Mais chat échaudé craint l’eau froide. Winter eut d’ailleurs irrationnellement peur au dernier instant, juste avant que le poing du sayen ne s’abatte sur la paroi de sa sphère vert pomme. Il recula avec ce-même bouclier, sur plusieurs dizaines de mètres.
Le sayen qui n’avait frappé que le vide — sans rien comprendre à l’inconcevable vitesse de son adversaire — poussa un hurlement de frustration démesuré et se rua à nouveau de toutes ses forces en direction de son insaisissable proie.
Et lorsque son poing fut encore une fois à un cheveu de s’abattre sur le bouclier, le sayen mourut, lui aussi sans rien comprendre, sinon qu’une ombre venue du ciel s’était élargie sous ses pieds… juste avant que le noir éternel ne s’abatte sur son esprit.
En réalité, il avait été enfoncé sous terre par le vaisseau télékinétiquement aiguisé de Winter, qui retenait jusqu’ici l’appareil en suspension dans l’air, par l'esprit, et venait de s’en servir pour abattre la brute sans avoir à gaspiller son KI.
Gaspiller, même la plus petite gouttelette de Ki…… l'empereur en était devenu totalement, viscéralement… incapable, depuis sa bêtise d’avoir dilapidé toute son énergie dans une seule et unique attaque, pensant tuer Gohan sur le coup.
Même le bouclier qui l’entourait présentement n’était pas composé de KI brut mais d’énergie magnétique et psychique. Winter porta la main au vaisseau ; qu’il avait fait s’écraser presque en douceur, pour éviter de l’abîmer plus qu’il ne l’était déjà. Il se plaça ensuite entre l’embarcation et le reste des sayens, avant de faire repartir l’appareil vers les hauteurs… pour lui éviter une balle perdue.
Winter ne s’intéressa même pas aux deux nouveaux challengers ; il contemplait sa main, les yeux grands ouverts et les pupilles tremblantes. Il ne pouvait vraiment plus utiliser le KI. Un blocage mental l’en dissuadait à chaque fois qu’il essayait. La raclée qu’il s’était prise cinq ans plus tôt l’avait trop marqué. C’était d’autant plus inquiétant que l’énergie psychique qu’il utilisait jusqu’ici pour attaquer et se défendre n’était qu’une roue de secours supplétive, dont les réserves pouvaient certes se recharger un peu plus vite que l’énergie brute… mais qui étaient aussi beaucoup moins grandes que son réservoir de KI ; elles allaient d’ailleurs bientôt s’épuiser !
Un bruit singulier poussa l’empereur à reporter son attention sur la “bande des cavernes”. Un bruit anachronique. Celui d’une botte de cuir ; étonnant puisque la plupart des sayens étaient pieds nus. Les deux derniers challengers semblaient prendre racine depuis longtemps — en attente d’un signe de vie de Winter à l’esprit papillonnant — quand ils furent bousculés par l’arrivant à la botte de cuir ; le couple ainsi violenté ne sembla étonnamment pas disposé à rendre l’ascenseur, préférant retourner se noyer dans la foule. Lorsque Winter avait redressé le regard, une première chose l’avait frappé : pendant qu’il divaguait, les sayens avaient apparemment déjà dressé le camp.
Certains jetaient leur dévolu sur des gigots de viande en plateau, d’autres sur des fruits en corbeille ; certains encore étaient étalés sous quelque espèce de tentes en peau de bête… fumant Winter ne savait quoi ou prenant le thé autour du feu ; la plupart le regardaient depuis leurs fauteuils rustiques, semblant attendre leur tour… ou simplement profiter de l’ombre des bâches tendues au dessus de leurs têtes.
L’empereur ne comprenait absolument pas comment ces gens avaient eu le temps ou l’envie de s’installer dans la zone aussi rapidement. Soit il avait divagué vraiment très longtemps, soit la réalité était effectivement en phase terminale.
Ou alors il avait vraiment divagué très longtemps. Ses pupilles — dorées, depuis son passage chez Gero — se posèrent enfin sur le sayen qui se dirigeait vers lui ; et soudain… Winter se mit à sourire. Ça avait pris le temps… mais il se disait bien avoir déjà vu ce visage quelque part.
Oui, c’était lui.
Végéta.
Non pas le Végéta qu’il avait affronté il y avait cinq ans de cela. Plutôt le Végéta qu’il avait giflé lors d’une cérémonie, il y avait bien deux mille ans. Végéta premier du nom. Apparemment les Végéta ne changeaient pas beaucoup d’une génération à une autre. Celui-ci ayant juste les traits plus matures et la barbe plus fournie, que le Végéta de la Terre.
— Tu te souviens de moi, apparemment. De mon côté, je ne peux malheureusement pas en dire autant, siffla Winter, cherchant déjà dans sa tête d’autres piques inspirées à balancer à l’égo du sayen.
— Tu m’as honni devant ma femme, devant mon peuple, devant ma fille, devant mon père, devant mes hommes, devant mes ancêtres… et devant Ice qui me l’a bien rendu depuis lors, en me pensant une cible facile et sans personnalité.
— Oulalah…… ah bon… ? Je ne m’en souviens pas…… possible…, sourit Winter, qui s’en souvenait très bien.
Le roi Végéta premier — devenu empereur de son univers d'origine, l'univers n°1, depuis lors — fit quelques pas de plus jusqu’à se retrouver en face de l’autre empereur galactique, nihilien de son état ; ils faisaient pile la même taille et se regardaient droit dans les yeux.
Ou plutôt droit dans l’œil puisqu’ils étaient tellement proches, physiquement, que chacun des deux ne voyait guère plus de l’autre qu’une espèce de cyclope. Trois longues minutes électriques filèrent, sans l’ombre d’un mot.
Trois minutes au cours desquelles les sifflements de la foule en toile de fond s’intensifiaient.
— Pas de problème.
Végéta leva lourdement la main… et la posa doucement sur l’épaule de Winter qui ne comprit pas sur le coup. Le nihilien s’était attendu à ce que le combat soit engagé précisément à ce moment-là, mais apparemment… ce n’était pas le cas. C’est alors avec curiosité qu’il redressa le regard et tendit l’oreille, à l’écoute de la deuxième partie de la phrase qui était apparemment en suspend.
— Pas de problème si tu ne te souviens de rien.
Végéta posa sa deuxième main sur la seconde épaule de Winter.
— Laisse-moi donc refaire les présentations.
Loin, très loin de là, le Dieu Soleil ouvrit les yeux.
Au même moment, les cheveux du roi Végéta premier viraient au blond étincelant et ses yeux au vert émeraude.
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Une grosse goutte de sueur perlait sur le flan de la télévision cubique ; qui ne savait plus où donner de la tête. Tantôt le foot, tantôt “Sous le soleil”, tantôt “Playboy Tv” ; au final, il fut décidé que la petite aurait le dernier mot… et le dernier mot, c'était “La ferme de Mickey”. Elle s'en retourna colorier dans sa chambre… laissant les trois pensionnaires du divan central moins amusés que dégoûtés.
Quelques minutes d'images abrutissantes plus tard, ils parvinrent à trouver un terrain d'entente : le JT.
Ça cherchait encore la télécommande. Sans elle, pas possible de monter le son.
Et sans son, les sautes d’humeur de C-18 s'entendaient un peu trop… depuis le pauvre fauteuil qui étouffait. Pas à cause de l'humeur lunatique de la jeune femme ; plutôt parce que c'était un canapé deux places et qu'il accueillait présentement trois personnes, serrées comme des sardines, aucune n'ayant voulu céder le meilleur poste de visionnage. De gauche à droite : C-18, Krilin et Muten Roshi.
Krilin et son maître se cramponnaient épaule contre épaule. C-18 par contre était la première sur le divan et entendait bien rester pas moins allongée qu'au moment où son trône avait été courageusement contesté par les deux prétendants.
Un compromis avait finalement été trouvé : C-18 était toujours allongée, dos contre l'accoudoir et jambes étendues par-dessus celles des pauvres garçons, les pieds de la mère de marron reposant par-dessus l'accoudoir opposé ; celui de Roshi. Ce dernier aurait bien profité d'avoir les pieds nus de la sublime femme de Krilin juste sous le pif. Malheureusement, s'il y avait bien un fétichisme qu'il n'avait pas… c'était celui-là. Et puis il devait malgré lui se serrer la ceinture niveau écarts ; un ou deux de plus et il était bon pour la bouillie aux épinards de Lunch.
Par contre…… des guilis taquins, ça coûte pas très cher en dents, ça détendra l'atmosphère et surtout avec un peu de chance, ça la fera partir du fauteuil pour aller se poser ailleurs. Roshi laissa discrètement tomber une main derrière le divan et la porta à la plante des pieds de C-18… qu'il se mit à chatouiller. D'abord doucement, puis de plus en plus énergiquement, en se rendant compte qu'elle ne réagissait pas.
Faisait-elle semblant de rire quand c'est Maron qui le faisait ? Sa condition de cyborg lui ôtait-elle tout humour ? Roshi se posa la question et jeta un regard curieux au visage de la blonde. Elle avait la bouche ouverte et regardait droit devant elle, d'un air hagard.
Roshi capta le même air sur le visage de Krilin avant d'orienter le visage vers la source de leur apparent étonnement : la télévision.
Les yeux de Roshi s'agrandirent rapidement tandis que ses lunettes glissaient le long de son nez. Des sayens à queue, des sayens sans queue, des singes géants… marchaient sur la ville. Sur la région. Sur le pays. Sur le continent. Sur le monde.
Pas que des sayens d'ailleurs, c'était tout simplement la seule race sur laquelle l'esprit de Roshi pouvait mettre un nom. Mais des créatures étranges et autrement plus effrayantes… il y en avait absolument partout.
La caméra s’affolait parfois dans tous les sens, de la terre au ciel, tant il y avait de choses à filmer de partout.
Le vieil ermite sursauta lorsqu’au coin de l’écran… il remarqua l’espace d’une seconde — avant que le cameraman ne change d’angle — la présence d’une sphère orange dans le ciel. Une sphère orange qui ressemblait à s’y méprendre à… une boule de cristal ?
Depuis quand les boules de cristal faisaient la taille d’un camion-citerne ?
Roshi sursauta encore. Ce coup-ci… le cameraman avait très brièvement pointé l’objectif de son appareil en direction d’un phénomène astral dont le vieux maître des tortues avait déjà entendu parler… de la bouche de son élève justement assis à côté de lui. Ce dernier avait-il remarqué d’ailleurs ? Roshi cherchait encore le nom précis du phénomène dans les recoins poussiéreux de sa mémoire…
Diss…. Dissone ?
Death…
Zone… D…. Zone D ?
Non……
Zead…… Done…
Dead…
Dead…… Zone…
Dead Zone !
Roshi frissonna longuement, tandis que ses pupilles papillonnantes se laissaient encore hypnotiser par les images à l’écran, toutes plus impressionnantes les unes que les autres, chacune l'enfonçant inconsciemment un peu plus dans son divan. Le vieil ermite fut — l'espace d'une seconde — soulagé d'avoir élu domicile aussi loin de tout. Ici, au moins, personne n'aurait de si tôt l'idée de venir les chercher.
Et c'est précisément au moment où il se faisait cette réflexion…… qu'une gigantesque main, sans ombre au sol, d’une couleur aussi indescriptible que le néant, jaillit littéralement hors de l'écran du poste de télévision, pulvérisant Kame House.
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La marre de sang dans laquelle baignaient les deux empereurs s'épanchait aux quatre vents d'une terre accidentée.
Les deux corps étendus de tout leur long, à même la grande flaque écarlate, perdaient vie à l'unisson ; leurs paupières respectives se rapprochant entre elles lentement mais sûrement. L'un des deux n'avait pas la chance de voir le rideau de sa vie se fermer sur le lever du soleil — à moins que ce ne fût le coucher. Tout ce qu'il contemplait c'était la boue rougie par un sang qui ne lui appartenait qu'à moitié.
L'autre était muet et sourd, et ses yeux se fermaient encore, lentement. Cet autre c'était Winter.
Il regardait simplement le soleil orange dominer le monde tandis que son encéphalogramme approchait le plat absolu, à l'image du flot de ses pensées… qui finirent par se réduire à la plus simple expression d'un bruit monocorde… comme un sifflement continu.
Et le sifflement devint soudain bip informatique quand la condition fut atteinte.
La condition de la concentration nécessaire à la reconstruction. Ici ce n'est pas la concentration qui permit à Winter d'échapper à la mort… mais bien la mort elle-même, paradoxalement, ou plutôt l'antichambre de la mort… qui était la seconde définition du vide de l’esprit — arrondi par excès — quand la mort elle-même était l’arrondi par défaut. Le bip accéléra et Winter, encore étendu au sol, orienta le regard vers son avant-bras d'où provenait le bruit aigu. Un voyant vert clignotait rapidement.
Le nihilien se redressa enfin, en position assise, une longue coulée de sang glissant de son dos jusqu'au sol. Il porta à nouveau le regard au niveau du voyant qui clignotait. D'une manière ou d'une autre, ça avait un rapport avec sa capacité de régénération tout juste redécouverte. Cet enfoiré de Gero lui avait apparemment menti en disant qu'il l'avait définitivement perdue.
Immédiatement, Winter se demanda si le scientifique pouvait activer ou désactiver cette capacité à loisir. Mais une pensée plus réjouissante remplaça immédiatement cette dernière dans son esprit. Il ne pouvait certes toujours pas se servir de son Ki…
… mais, maintenant qu’il y avait goûté … ses poings avaient encore trop soif de sang sayen.
— L'empereur est mort ! hurla-t-il dès que son sens auditif lui fut revenu.
Les cris d'indignation des moutons répétant “l'empereur est mort ! vive l'empereur !” dans la masse de sayens lui parurent à cet instant la plus belle des chorales, il s’en enivra. Enfoirés de singes va. Winter fut encore plus comblé quand il vit la masse bouillir et prendre les armes pour se ruer vers lui. Ils étaient bien cinq cents au bas mot, mais lui… il avait retrouvé son cheatcode.
Ils pouvaient bien être deux mille que ce serait la même.
Avant que le premier guerrier sayen n'ait pu lui écrabouiller la tête de sa massue, le nihilien s'était maladroitement redressé, manquant de glisser sur la flaque de sang. Il plongea d'ailleurs sa patte dans le liquide poisseux…
… avant de balancer une giclée rouge au visage du premier assaillant.
Winter se jeta alors dans la mêlée, traversant cette dernière comme on prendrait un bain de foule. Semant la mort sur son passage et perdant lui-même un bout d'oreille par-ci, un doigt par-là, sans s'en soucier outre mesure. Lorsqu'il arriva à l'autre bout de la masse de sayens, il en avait tué environ 340 sur 600. Ce n'était que la première tournée, le match aller.
Winter s'apprêtait déjà à replonger dans la mêlée pour le match retour, en portant les deux mains au sol, comme pour prendre son élan avant une course de fond ; c'est précisément à cet instant qu'il se rendit compte ne plus avoir de mains. Ni de bras. Ni sa jambe ni son œil droit ; aussi tomba-t-il lourdement au sol au moment de chercher à prendre son élan. Cette scène lui rappela instantanément de très douloureux souvenirs — en lien avec un certain balafré. La folie s’empara du regard de Winter, instantanément gorgé de sang et figé dans le vide absolu ; ses pupilles déjà très petites au naturel se rétrécirent encore et tremblèrent violemment, chaotiquement, effrénément…
… jusqu’à ce que, pour cette fois, et seulement pour cette fois…… il prit le parti d’en rire.
— Huhuhu, c'est enquiquinant tout de même, gloussa-t-il finalement, avec le sourire, bien qu’avachi au sol.
Aussi impatient de replonger dans le bain de sayen qu'il eut put être, ce ne serait pas très amusant sans les membres qui lui manquaient, trop indispensables à ses chorégraphies martiales. Il mit donc son excitation entre parenthèses et entreprit d’écouter à nouveau le son du silence, pour se reconstituer entièrement. Il avait le temps, les sayens encore vivants n'étaient pas des flèches et la distance qui les séparaient actuellement lui donnait largement le temps de redevenir comme neuf avant qu'ils ne le rejoignent.
L'esprit de Winter fit silence, une bonne dizaine de secondes… avant d'exploser dans un cocktail de pensées parasites. Les yeux écarquillés du démon du froid se portèrent immédiatement sur son avant-bras tandis que le martellement des pas de sayens en approche lui levait le cœur en rythme. Le voyant n’était plus vert. Il était rouge. Si c'était une blague… alors ça ne le faisait pas rire du tout.
Les yeux de Winter se révulsèrent presque sous le coup de la haine envers celui qui derrière son ordinateur s'amusait ainsi avec sa vie. Il hurla son nom dans l'atmosphère, il hurla le nom de Gero à s'en écorcher les poumons. Le voyant passait du vert au rouge et du rouge au vert, sans logique aucune. Winter aux yeux exorbités n'y comprenait plus rien.
Pourquoi maintenant ?
Le furieux martellement des pas de sayens en approche lui affolait le cœur en rythme.
Pourquoi précisément maintenant ?
Ça n'avait pas plus de sens que sa trop longue divagation de tantôt… ; à croire que son corps était une télévision et que la télécommande était tombée entre les pattes d'un troll d'appartement.
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Gordon était tellement léger que C-F aurait pu “oublier” qu’il l’avait sur le dos. Par contre le poids de ses bêtises était accablant. Malgré les efforts du robot, Gordon ne se laissait impressionner ni par la hauteur vertigineuse à laquelle ils volaient ni par la vitesse de C-F qu’il chevauchait comme un poney. L’adolescent continuait de couvrir les yeux du robot de ses propres mains pour le déstabiliser.
Parfois, il menaçait même de sauter par dessus bord.
— Si tu n’arrêtes pas tes enfantillages, je te tue.
— Trouve-moi une occupation alors. Y’a rien à foutre à part écouter le vent qui gronde, je peux même pas ouvrir les yeux à cause de la vitesse à laquelle tu vas. Et ta couche de liquide semi-matériel bleu là… elle sert à rien, j’ai toujours froid bordel.
— Si… tu peux ouvrir les yeux, laisse-juste le temps au glucogironstaminoxogène de pénétrer ta cornée. De toute façon il n’y a rien à voir… à part des nuages.
— …
— Arrête d’appuyer sur cet interrupteur.
— Tiens donc, quand je mets au vert ça lance Dolce Vita et quand je mets au rouge ça lance la musique de marche funèbre.
— Arrête tu vas tuer quelqu’un avec ce bouton.
Gordon n’écoutait que d’une oreille, levant et baissant l’interrupteur rétractable vert/rouge comme un enfant s’excitant sur l’interrupteur d’une ampoule en espérant aller plus vite que la réalité et la lumière réunies.
— Dernier avertissement. Reste tranquille Gordon. Autrement ta fin pourrait être encore plus expéditive que prévu. Calme-toi et reste tranquille. C’est bientôt fini… et avec un peu de chance, tu ne sentiras rien.
— “Reste tranquille, c’est bientôt fini”… ça fait des siècles que tu me répète ça, change de disque et va te faire cuire une Màj.
C-F pirouetta sur lui-même de 360°, obligeant Gordon à dégringoler de son dos pour ensuite tomber en chute libre vers le plancher des vaches dans un cri dément. Le jeune adulte — au pantalon complètement mouillé pour le coup — se rapprocha du sol à une vitesse qui ne lui laissa même pas le temps d’une dernière pensée intelligente… ses yeux clos restèrent scellés ; durant trois bonnes minutes.
Trois bonnes minutes ? La chute aurait dû se terminer au bout d’une poignée de secondes… ; l’adolescent ouvrit timidement un œil… et se rendit compte être de nouveau sur le dos de C-F qui fusait toujours silencieusement vers la “Destination Finale” de Gordon.
— Tu as eu ta dose, Gordon ? Maintenant reste tranquille.
— …
— Et remets l’interrupteur dans la position dans laquelle tu l’as trouvé initialement.
Le concerné ne pipa mot, encore en état de choc et cramponné au robot comme un gros chat sur une branche trop haute. Il se contenta d’obéir à C-F et entreprit de ramener l’interrupteur à sa position initiale. Gordon posa le doigt sur le bouton en question… et resta figé.
Il ne se souvenait plus.
C’était vert au début ?
Ou rouge ?
Gordon fit passer l’interrupteur au vert.
Puis changea d’avis et le fit passer au rouge.
Il changea à nouveau d’avis… et à nouveau encore… et tergiversait toujours quand un événement soudain l’arracha temporairement à son dilemme. L’oreillette interne de C-F s’était mise en grésiller… signe que Gero tentait d’établir une communication.
La gorge de Gordon se resserra violemment lorsqu’il entendit la voix de son père adoptif jaillir d’un émetteur et résonner partout autour.
— C-F, ici Hiéronimus, où es-tu ? Ecoute-moi, code rouge, retourne immédiatement au bercail. Où se trouve Gordon ? Va le chercher au plus vite et ramène-le au QG dans les montagnes du Nord. Je répète code rouge, c’est arrivé beaucoup trop vite, le monde est à feu et à sang !! Trouve-le, prend-le, et revenez-ici en quatrième vitesse !!
— Gordon est avec moi, docteur.
— Parfait. Bien joué. Revenez, je vous attends au premier étage. Dis à Gordon de ne pas s’inquiéter pour ses copains de classe Fred et Jamie, je les ai fait venir et je leur ai donné une chambre. Ils seront en sécurité ici, avec leurs parents.
— Négatif docteur Gero.
— Comment ça négatif ? Quoi négatif ?!
— Je me dirige actuellement vers le Sud, je ne vais pas virer de bord.
— Mais je le vois bien que tu te diriges vers le Sud. Et qu’est-ce qui t’empêche de prendre la direction du Nord, crétinus ? Tu as oublié comment on vire à droite ?
— Mon itinéraire a déjà été compilé. Et vous ne disposez plus du statut d’administrateur.