Ichinose {l Wrote}:Mais peu importe qui auraient été les deux élus pour un second tour, vous ne trouvez pas que c'est... faible démocratiquement de favoriser les deux candidats simplement, car ils ont plus de votes que les autres?
Si je ne me trompe pas, Macro et Le Pen, c'est ensemble... à peine 45% du vote. Donc, le 7 mai, le 55% va devoir voter (ou pas) pour deux individus dont ils ne voulaient pas.
Je déplore que ça soit ces deux-là, mais la faute en revient surtout au système pas très démocratique.
[...]
Toutefois, comme je demandais, je ne sais pas si c'est un débat que vous avez. En tout cas, il me semble essentiellement.
C'est difficile de gagner un jeu quand il est truqué contre toi.
Alors non, ce n'est pas vraiment un débat d'actualité en France, surtout avec les deux prétendants au poste de Président. Au mieux, ils introduiront plus de proportionnelle lors des élections législatives mais réformer l'élection présidentielle dont le système leur est favorable me parait exclu.
Pour nourrir ta réflexion à ce sujet, je reposte une vidéo très intéressante que Zhatan avait proposée:
https://www.youtube.com/watch?v=ZoGH7d51bvc&t=2sAprès, il faudrait peut-être demander aux spécialistes des Insoumis ce qui était proposé à ce sujet, dans le cadre du changement de Constitution, mais avec la défaite de M. MELENCHON, ce projet va sans doute être oublié pour les 5 années à venir.
niicfromlozane {l Wrote}:Doux rêve. Les législatives qui assurent la cohabitation c'est pas aux présidentielles hein. C'est aux législatives (où mon vote ne sera pas pro-Macron, ni pour un de ces ténors de la gauche ou de la droite qui l'ont soutenu). Alors autant avoir un mec qui va faire des compromis qu'une personne qui va chercher à gouverner comme bon lui semble.
C'est très exactement ce dont je parle. Jamais elle n'aura de majorité parlementaire, jamais elle ne pourra nommer un premier ministre qu'elle aurait choisi. En France, le président a un pouvoir énorme du moment qu'il a une majorité. Sans ça, il a au mieux un pouvoir bloquant et diplomatique.
Sauf erreur de ma part, le président n'a aucun pouvoir législatif,il ne peut pas imposer un 49.3 et le chef du gouvernement, c'est un premier ministre que le parlement peut destituer, et qu'il peut donc nommer en pratique.
Du moins c'est ce que j'ai compris de vos institutions.
Et je pense donc que la Marine aura bien plus de peine à présider sans compromis que Macron, qui obtiendra sans le moindre doute sa majorité parlementaire.
Si tu veux bloquer les institutions et obtenir un statut quo avant de retenter ta chance dans 5 ans, c'est Le Pen qu'il faut voter. Pas Macron.
Hier soir, je me suis couché en pensant à ça. Et je trouve cela rudement bien vu.
Cependant, c'est une position qu'il faut nuancer et pour un sujet aussi grave que l'élection présidentielle, je pense qu'on ne peut pas se dispenser de faire une étude quasiment exhaustive des pouvoirs du Président et donc, de ce que Marine LE PEN pourrait faire si elle accédait à la fonction suprême, même en cas de cohabitation.
Du coup; pavé is coming:
1. – Les pouvoirs propres du PrésidentIl s’agit de pouvoirs que le Président de la République exerce sans contreseing.
L’ article 5 de la Constitution, proclame que «
le Président de la République veille au respect de la Constitution ». C'est le pouvoir le plus imprévisible du Président puisqu'il lui confère un pouvoir d’interprétation des zones d'ombre de la Constitution (le pouvoir de refuser de signer des ordonnances vient notamment de là et de l'interprétation que le Président a pu faire de ses pouvoirs lors de la 1ère cohabitation). Dès lors, personne ne peut dire ce que Marine LE PEN pourrait en faire - certainement pas instaurer une dictature -, mais il reste possible qu'elle s'arroge des pouvoirs auxquels ni vous ni moi n'avons pensé.
L'article 56 de la Constitution permet ensuite au Président de nommer trois des neuf membres du Conseil Constitutionnel. Le Conseil constitutionnel a pour fonction de vérifier la conformité à la constitution des lois votées par le Parlement et peut en supprimer les éléments inconstitutionnels ou expliquer comment interpréter ces lois. Les six autres membres du Conseil sont nommés par les Présidents du Sénat et de l'Assemblée nationale. Dès lors, en cas de cohabitation, le Président ne peut pas s'assurer un Conseil constitutionnel aux ordres.
L'article 61 de la Constitution permet aussi au Président de déférer les lois au Conseil Constitutionnel. S'il le fait pour chaque loi en cas de cohabitation, il fera perdre du temps pour la mise en place des réformes et cela entrera donc dans le cadre de son pouvoir de blocage auquel Niic faisait allusion.
Le Président de la République est également garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire
aux termes de l'article 64 de la Constitution. A ce sujet, vu le comportement de Marine LE PEN au cours de sa campagne, on peut soupçonner des relations explosives entre la magistrature et elle si elle devait arriver au pouvoir.
Viennent ensuite
les pouvoirs exceptionnels tirés de l’ article 16 de la Constitution. Ils sont les plus dangereux pour la démocratie.
Pour que le Président de la République puisse recourir aux pouvoirs exceptionnels de l’article 16, deux conditions de fond doivent être réunies :
– une «
menace grave et immédiate » doit peser sur les institutions de la République, l’indépendance de la Nation, l’intégrité de son territoire ou l’exécution de ses engagements internationaux. Sont en particulier visés les guerres et tous les mouvements insurrectionnels (or, on peut en soupçonner si Mme LE PEN arrive au pouvoir).
– le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels doit être interrompu.
Le problème étant qu’il appartient au Président seul d’apprécier si les deux conditions sont remplies. Il doit simplement consulter le Premier ministre, les Présidents des deux assemblées et du Conseil constitutionnel avant de prendre sa décision.
En cas d’application de l’article 16, la répartition des pouvoirs telle qu’elle est prévue par la Constitution n’est plus applicable et le Président de la République exerce les pleins pouvoirs. Les décisions prises par le Président de la République sont soumises
pour avis au Conseil constitutionnel (lequel ne dispose donc pas d'un pouvoir de censure) .
Pendant la durée de mise en œuvre des pouvoirs exceptionnels, le Parlement se réunit de plein droit et l’Assemblée nationale ne peut être dissoute par le Président.
Si le Président outrepassait ses droits, le Parlement pourrait se réunir en Haute Cour et le destituer pour manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat.
Des garde-fous existent donc en cas de recours à l'article 16 mais au final, seront-ils suffisants ?
Je pense que c'est sur ce point que votre appréciation de Mme LE PEN doit jouer et vous faire décider si oui ou non, vous pouvez envisager la stratégie proposée par Niic dans l'hypothèse où ni elle, ni E. MACRON ne vous conviendraient. Si vous pensez que c'est une fasciste en puissance, alors la Constitution pourrait sous certaines conditions lui donner le droit d'instaurer une dictature. Si vous pensez qu'elle n'est pas une fasciste, alors vous considérerez que les garde-fous de l'article 16 sont suffisants pour éviter qu'elle ait recours à ce pouvoir de manière disproportionnée.
Il est également important de rappeler que
l'article 12 permet de dissoudre l'assemble nationale. Si Mme LE PEN n'était pas satisfaite de la composition de l'assemblée, elle pourrait donc demander aux français d'en choisir une autre. Si le plan de Niic est mené à bien, il n'y a pas de risque particulier qu'elle obtienne une majorité, quel que soit le nombre de fois où elle dissoudrait l'AN (ce pouvoir est limité à une fois/an). En revanche, en ayant recours à ce pouvoir régulièrement, elle obligerait les différents partis à se restructurer souvent, leur imposerait une campagne permanente et entraverait ainsi les actions législatives. Là encore, on est en plein dans le pouvoir de blocage des institutions.
Enfin,
le Président nomme le 1er ministre (article 8). Théoriquement, rien ne l'oblige à nommer un 1er ministre issu de la majorité dégagée à l'AN mais nommer un 1er ministre FN avec une majorité de gauche ou LR équivaudrait à s'interdire toute action législative pendant 5 ans.
2. – Les pouvoirs partagés avec le gouvernementConformément à l'
article 8, alinéa 2 de la Constitution, le Président de la République nomme les ministres sur proposition du Premier ministre.
Le Président de la République (
article 13 de la Constitution) nomme aux emplois civils et militaires de l’État. Cette compétence partagée avec le Premier ministre (
article 21) se traduit par le fait que les hauts fonctionnaires ainsi que les dirigeants des établissements et entreprises publics sont nommés en Conseil des ministres. On peut penser que si Mme LE PEN est élue, elle pourra nommer ses pions pendant la période précédant les élections législatives et au cours de laquelle elle n'aura pas manqué de nommer un gouvernement à son image.
Le Président de la République signe également les ordonnances selon
l'article 38 de la Constitution (textes qui, bien que relevant du domaine de la loi, ont été pris par le Gouvernement préalablement habilité par le Parlement pour agir ainsi pendant un délai limité). Il est arrivé, au cours d’une période de cohabitation, que le Président de la République refuse de signer les ordonnances ; contraignant ainsi le gouvernement à agir par la voie législative traditionnelle. On est encore une fois dans le pouvoir de blocage que Niic appelle de ses vœux.
La loi fixe les règles concernant un certain nombre de matières importantes (article 34 de la Constitution). Pour les autres matières, on décide par voie de décrets. Deux solutions ici; soit Mme LE PEN ne nomme pas un gouvernement en cohérence avec la majorité à l'AN et se contente de mini-réformes prises par décret, soit elle joue le jeu de la cohabitation mais peut là encore bloquer les choses en refusant de signer des décrets.
Concernant les référendums auxquels Mme LE PEN a consacré une bonne partie de son programme :
On distingue trois types de référendum au plan national ; seule la décision de recourir au référendum législatif n’est pas soumise à contreseing, mais elle nécessite une intervention préalable du Parlement ou du Gouvernement.
Le référendum constituant, soumis à contreseing ( article 89, alinéa 2 de la Constitution), est une procédure qui nécessite le vote, préalablement, du texte par les deux assemblées dans des termes identiques. Dès le vote du texte, le Président de la République peut soit le soumettre à référendum, soit le soumettre au Parlement réuni en Congrès qui statue à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés (si le texte est d’origine parlementaire, le recours au référendum est obligatoire).
Ici encore, peut de risque que Mme LE PEN touche à la constitution dans l'hypothèse avancée par Niic.
Le référendum législatif ( article 11 de la Constitution) est une procédure initiée par le Gouvernement ou le Parlement (dans les faits, celui-ci ne l’a jamais utilisée). Le Gouvernement ou les deux assemblées du Parlement par une proposition conjointe, saisissent le Président de la République qui décide sans contreseing s’il interroge ou non le peuple. Si la proposition émane du Gouvernement, celui-ci doit faire une déclaration suivie d’un débat devant chaque assemblée. Le champ d’application de l’article 11 est vaste et susceptible d’interprétations extensives. Il couvre l’organisation des pouvoirs publics, la ratification d’un traité ayant des incidences sur le fonctionnement des institutions (cf. traité établissant une constitution pour l’Europe en 2005) et les réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale. Après la proclamation des résultats par le Conseil constitutionnel, le Président de la République promulgue la loi référendaire. Si Marine LE PEN ne joue pas le jeu de la cohabitation, elle pourra recourir au référendum législatif fréquemment. Cela dit, on ne gouverne pas ainsi dans un pays de 70 millions d'habitants.
Le référendum prévu à l’article 88-5 de la Constitution, soumis à contreseing. Cette procédure est prévue pour les projets de loi autorisant la ratification d’un traité relatif à l’adhésion d’un État à l’Union européenne.
La Constitution instaure enfin implicitement une compétence partagée dans les domaines suivants : le Président de la République est le chef des armées (
article 15), il négocie et ratifie les traités (
article 52). Il a donc une prééminence au niveau international.
De son côté, le Gouvernement, détermine et conduit la politique de la Nation et dispose de la force armée (
article 20). Son action est plus centrée vers le national.
A ce sujet, je ne suis pas tout à fait d'accord pour dire qu'une cohabitation bloquerait complètement les institutions. Si l'idée de Niic était appliquée, je pense qu'on arriverait à une situation proche, dans l'esprit, de la troisième cohabitation CHIRAC-JOSPIN où un CHIRAC fatigué laissait le gouvernement socialiste mener son action. En 2017, je ne verrais pas une Marine LEPEN fatiguée mais en revanche particulièrement isolée (ce qui revient au même) si elle parvenait à l'emporter au 2nd tour. En effet, l'annonce de sa victoire serait à mon sens un tel choc que la majorité issue des législatives lui serait sans doute très opposée. Reste à savoir qui pourrait diriger le gouvernement. A mon sens, MACRON s'il arrive à fédérer un parti ou ... le leader de LR. A ce sujet, Nicolas SARKOZY dont le rôle au sein de LR parait toujours prééminent se prépare déjà pour contrer MACRON aux législatives et mènera cette bataille d'autant mieux si Mme LE PEN est élue (à ce sujet, le relatif bon score de LR malgré les casseroles de FILLON me fait penser que le parti survivra beaucoup mieux à l'élection présidentielle 2017 que le PS).
Donc bon, si le but est d'éviter MACRON comme Président pour l'avoir ensuite premier ministre ou SARKOZY ou un de ses pions, est-ce une si bonne opération ?
J'ajoute enfin à titre d’exemple que la loi AUBRY sur les 35 heures qui divise encore la société, 17 ans après sa promulgation, a été approuvée pendant une cohabitation. La limitation des pouvoirs du Président et de son premier ministre est donc réelle pendant une cohabitation mais elle est loin d'être totale.