Dans les Star Wars, c'est vrai qu'en général j'accorde assez peu d'importance à la logique des événements, tant que des artifices permettent de combler les trous. Par exemple, je m'en tape que Rose et Finn ne puissent techniquement pas s'enfuir face à une horde de TB-TT améliorés, on peut très bien trouver 150 manières de s'en sortir, et ça me va. Par contre, tout le début du 9 est scandaleux parce qu'il se torche avec le 8 et ce qui a été mis en place. Ce n'est pas comme le passage du 7 au 8, où au final le tout s'agençait assez bien (on ne savait pas trop ce qu'indiquait la carte laissée par Luc, donc ça peut très bien être un moyen de le retrouver, que Rey soit la "fille de personne", c'était plutôt sympathique et n'allait pas à l'encontre du 7, surtout que le message de la fin du 8 indique bien que techniquement "la force" est présente en chacun de nous, qu'importe notre sang, etc... Ca remet aussi en cause la doctrine Jedi qui était obnubilée par cette histoire de sang, or comme c'est leur doctrine qui a causé leur perte (en partie tout du moins), ça s'imbrique bien avec tout le reste.
Du coup... la révélation "Rey, petite fille de Palpatine" et "Luc nous a dit d'aller là grâce à sa carte", j'étais un peu en mode "putain JJ. Abrams fait une crise de nerfs et il fait même pas semblant de vouloir s'agencer au 8. Et ça, c'est moche. Surtout qu'en plus le texte d'intro est un vrai scandale écrit par des gamins de 8 ans.
Voilà, ça, c'est ce qui m'a pas plu. Et ça a failli totalement me gâcher le film. Mais finalement, la philosophie mise en place dans le reste du film suit bien les deux autres de la postlogie et reste fidèle à la trilogie originale, donc je passe l'éponge. L'idée suit bien ce qu'on voit dans les 7 et 8.
Petit aparté, j'ai toujours vu dans chaque trilogie Star Wars à la fois un thème géopolitique et un thème psychologique qui sont abordés. Cela sert surtout l'histoire, mais ils sont là et ils m'intéressent pas mal.
Dans les 4, 5 et 6, c'est plutôt simpliste : la géopolitique c'est un méchant empire face aux gentils rebelles (guerre froide, Hitler, Staline, 2nde guerre mondiale, tout ça), et psychologie pareil : "il y a toujours du bien même dans les personnes qui servent le mal, et la rédemption est toujours possible". C'est simple, on va pas se mentir, mais ça passe bien.
Dans les 1, 2, et 3, on tente quelque chose de plus complexe : on cherche à montrer une république qui sombre dans la tyrannie et les sages, aveugles, qui n'arrivent pas à enrayer le mal qui s'empare de leurs mondes. Les sages parlent de trucs trop compliqués (les midichloriens), édictent des règles qui paraissent absurdes ("on ne se marie pas", "les émotions c'est de la merde") etc... On peut voir ça comme une représentation des problématiques plus ou moins actuelles (les "experts" enfermés dans leur Tour qui sont incompris malgré leur savoir, mais parce qu'ils sont aussi ignorants des choses les plus "simples" que tout le monde voit, et les républiques gangrénées par le souhait de sécurité quitte à s'enfoncer dans des systèmes totalitaires. Niveau psychologique, à mon avis l'idée était de montrer justement ce que pouvaient donner l'incompréhension, la frustration, et la peur de perdre ce qu'on chérit par une jeunesse qui cherche à régler tous les problèmes (Anakin, évidemment). Bon... malheureusement, l'exécution est foiré. Parce qu'on n'a pas montré les bons passages, on n'est pas restés assez longtemps sur les différents tournants, et au contraire on a passé trop de temps à montrer des trucs dont on se fout (les gungan. Sans parler de JarJar, ce n'est pas le sujet ici). Trop de passages inutiles, pas assez de passages clairement percutants, sauf dans le 3. Du coup, quand tu vois Anakin passer du côté obscur dans le 3 tu es "???? Attends, il fait ça pour CA ?!" et ça gâche tout. Je ne suis au final absolument pas convaincu par ce qui m'a été montré, et c'est donc meh. Le 3 aurait par contre très bien pu passer si les deux autres avaient été à la hauteur.
Dans les 7, 8, 9, maintenant, il y a un thème "géopolitique" majeur : la lutte entre le "plus jamais ça" qui part sur de bons sentiments (la Résistance), et le "il faut revenir à ce qui se faisait avant" (le Nouvel Ordre) qui souhaite revenir à une forme de stabilité. Ca se voit plutôt bien dans le 7 où la Résistance cherche à apprendre de ses erreurs, agissent différemment que dans les 4, 5, et 6, alors que le Nouvel Ordre et Kylo Ren reproduisent exactement les mêmes erreurs. Dans le 8 (et dans le 7), au contraire, on voit le retour de bâton : "les bons sentiments et la fougue, ça ne suffit pas" (scène où ils appellent à l'aide et où personne ne vient, Rey qui tombe de haut face à Kylo Ren, Han qui se fait mettre la misère). On a donc d'un côté l'insécurité malgré l'ascendant moral, largement insuffisant malgré certaines prouesses, et l'apprentissage de Kylo Ren, qui tombe de déconvenues en déconvenues à force de juste refaire la même chose que Vador. C'est dans le 8 qu'il comprend, et donc dans le 9 où il entame son évolution. Ca représente un peu aussi aujourd'hui la lutte entre les "progressistes" et les "réactionnaires" qui s'affrontent dans les différents pays. C'est évidemment cliché, mais comme les 1, 2 et 3, et les 4, 5, et 6. Niveau psychologique, c'est évidemment la dualité entre Kylo Ren, enfermé dans ses histoires de sang (encore), et Rey, qui justement cherche un peu plus de sécurité en retrouvant sa famille. On a deux formes de perdition très différentes, entre celui qui doit assumer un lourd passé, et celle qui se cherche un passé. Les deux luttent, buttent, s'opposent parce qu'ils se ressemblent énormément (ils sont perdus), alors qu'ils ont chacun trouvé des réponses différentes. C'est pour ça que leur lien est aussi important, qu'ils s'opposent autant et qu'ils ont tellement foi l'un en l'autre. Ils apprennent tous deux de l'autre, et c'est comme ça qu'ils vont s'en sortir. Kylo trouve la rédemption pour ses actes en se détachant de son passé : il oublie Vador, mais il ne devient pas non plus Leia ou Han, il finit par trouver sa réponse. Rey finit par se trouver également, et comprend que son identité ne passe pas par le sang, mais par ce qu'elle décide d'être elle-même (d'où la scène finale, qui m'a tiré la larme à l'oeil). Et tout ce que je dis là, malgré les chamailleries de JJ Abrams et R.Johnson, bah on le retrouve en fil rouge, et ça passe très bien.
Bon, il me reste un point à aborder (alors que j'ai réussi à ne jamais citer son nom jusque là

) : Palpatine. J'étais aussi interloqué quant à son retour dans le 9 (et je pense que ça, c'est la faute de R.Johnson : il aurait dû trouver un moyen de caser un ou deux indices dans son film), mais en fait, ça a du sens. Monsieur fripé est présent dans tous les opus. C'est toujours lui qui tire les ficelles, c'est toujours lui qui s'accroche au pouvoir. Il représente dans l'univers de Star Wars le seul mal absolu : celui de la recherche sans fin du pouvoir et son usage pour ses propres intérêts. Dans les 1, 2 et 3, c'est le politicien véreux qui agit dans l'ombre et paraît sympathique (bon, c'est raté parce que même sans savoir qui c'est, il est clairement antipathique, mais eh, dans la réalité on en a aussi donc c'est pas choquant), dans les 4, 5 et 6, c'est l'empereur, celui qu'il faut éliminer, celui par qui tout le mal arrive. Et dans les 7, 8, et 9, il représente l'ombre qui plane toujours et qui attend son heure, en utilisant les bonnes (et mauvaises) intentions de chacun, et le mal dans leur coeur. Il représente ce qu'il faut vaincre pour savoir avancer. Et au final, son élimination par Rey est un symbole très fort : la nouvelle génération peut trouver sa propre voie sans pour autant renier les acquis des générations précédentes. C'est pour ça que la seule fois où elle arrive à voir les fantômes de la force, c'est à la fin, lorsqu'elle a les deux sabres qui symbolisent les deux voies choisies par Kylo et Rey, et lorsqu'elle enterre le sabre de Skywalker. Les deux ont réussi la synthèse qu'ils cherchaient, bon gré mal gré.