Non.
Il y a parfois des moments dans la vie où on se retourne, on regarde le chemin parcouru... et l'on se rend compte qu'on n'a pas bougé d'un centimètre.
Pire, on a reculé.
Non je ne table pas sur une autre quarantaine d'années... je sais que je peux mourir demain, tout à l'heure, maintenant. Je suis bien placée pour le savoir.
Et justement !
Non seulement je n'ai atteint aucun de mes buts, mais je ne m'en rapproche pas.
J'ai vécu ce qu'une femme de mon âge avait à vivre.
Un amour partagé de longues années, des enfants à qui j'ai appris à marcher, à parler, à rire aussi. Parce qu'apprendre le bonheur à ses enfants est aussi important que le reste.
Une vie professionnelle bien remplie.
Et des deuils, des échecs...
J'aurais voulu consacrer cette nouvelle tranche de ma vie à autre chose... un autre chose que je me rends compte inaccessible.
Je n'y arriverai pas, tout simplement, parce que je n'en ai pas le talent.
J'ai joué, j'ai perdu.
Oh, je ne m'en prends à personne d'autre qu'à moi-même.
Pour ce qui est de ce que vous appelez mes rabâchages... je regarde l'actualité.
Le corps d'une petite fille de huit ans retrouvé dans un champ... poignardée.
Celui d'un soldat rapatrié d'Afghanistan... tombé pendant la lutte contre des fous de dieu qui veulent mettre le monde à leur botte.
Des humoristes menacés de mort.
Alors oui, ça m'agace.
Oui je m'énerve, tempête et crache ma mauvaise humeur.
Oui j'ai mauvais caractère... et pourtant, je trouve que j'ai fait des progrès de ce côté là.
C'est déjà un progrès de savoir l'admettre je trouve.
Oui ça serait mieux si je devenais une gentille dame toute en nuances et douceurs... peut-être ne suis-je pas encore assez vieille ?
Peut-être ne le serais-je jamais ?
Peut-être que je ne suis pas faite pour ça ?
Je pensais pouvoir transcender cette violence en moi, toutes ces émotions qui bouillonnent, en terreau pour mes histoires. Je me croyais apte à transmettre colère, joies et chagrins, à mes personnages pour donner une petite tranche de divertissement et de bonheur aux gens... une certaine philosophie aussi - qui n'a rien à voir avec les conneries du genre de celles que j'ai posté plus haut. À défaut de ne rien savoir faire d'autre pour ne pas avoir l'impression d'avoir vécu pour rien.
Mais je n'y arrive pas.
Ma colère reste mesquine, vilaine et moche.
Voilà.
Où sont passées mes aiguilles à tricoter ?
Ah ? J'en ai jamais eu ?
Ah oui, c'est vrai... je n'ai jamais eu de goût pour les trucs de filles... alors les trucs de "vieilles"... erf !
Ça lit quoi une vieille de quarante balais ?
Cosmopolitain ! La série Harlequin !
Euh...
Je crois que je vais plutôt enfiler mes chaussures de randonnée...
